Édition du 16 avril 2024

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Asie/Proche-Orient

Obama remet à Israël la plus importante aide militaire dans l’histoire

L’administration Obama a signé un pacte pour une aide militaire de 38 milliards de dollars à Israël dans ce que le Département d’État se vante d’être le « plus important engagement d’aide militaire bilatéral dans l’histoire des États-Unis ».

Cet engagement record fournira à Israël 3,8 milliards de dollars chaque année et pendant 10 ans, à partir de 2019, ce qu’il faut comparer aux 3,1 milliards de l’accord actuel.

Au moment où le gouvernement des USA est dit ne pas avoir les moyens de fournir aux Américains pauvres et ayant un travail, des services essentiels comme l’universalité des soins médicaux – ce dont les Israéliens profitent -, il est frappant de voir qu’il y a toujours de l’argent disponible pour permettre à Israël de continuer sa destruction de la Palestine.

La candidate démocrate aux présidentielles, Hillary Clinton, qui a exprimé son opposition à un accès universel aux soins médicaux et à un enseignement supérieur gratuit, s’est réjouie de cette aide.

« Le sénateur (Tim) Kaine et moi-même applaudissons à cet accord sur un nouveau protocole d’entente concernant l’aide sécuritaire américaine à Israël » dit Clinton dans une déclaration publiée par sa campagne.

Clinton s’est servie également de cet accord comme d’une occasion pour s’en prendre à l’Iran, pour mettre en valeur son bellicisme contre ISIS et réitérer son engagement à combattre le militantisme qui grandit contre la conduite criminelle d’Israël, ce qu’Israël qualifie de « délégitimation ».

« L’accord va permettre de consolider et tracer la voie pour la relation de défense US-Israël pour le XXIe siècle alors que nous faisons face à une série de défis communs, depuis les activités déstabilisantes de l’Iran jusqu’aux menaces d’ISIS et du djihadisme radical, et à des tentatives de délégitimer Israël à l’échelle mondiale », dit-elle, réitérant sa promesse de janvier de « porter notre relation au niveau supérieur ».

« L’héritage »

Le Président Barack Obama n’a pas eu à faire cela. Ce n’est pas comme s’il lui fallait apaiser le lobby pro-Israël. Il ne concourt pas pour une réélection.

Et les Américains, en particulier les démocrates libéraux et les plus jeunes, se montrent de plus en plus opposés aux violations des droits palestiniens par Israël.

En fait, à quelques mois de la fin de sa fonction, Obama était particulièrement bien placé pour utiliser un effet de levier massif américain pour faire pression sur Israël pour qu’il cesse ses crimes contre les Palestiniens. À tout le moins, il aurait pu s’abstenir de faire monter les enchères.

Alors, pourquoi inonde-t-il Israël avec plus d’armes encore ?

« Les collaborateurs d’Obama veulent un nouvel accord avant la fin de sa présidence, voyant cela comme une part importante de son héritage. Ses détracteurs républicains l’accusent de ne pas être suffisamment attentif à la sécurité d’Israël, ce que la Maison-Blanche nie fortement », rapporte Reuters.

Et quel héritage ce sera.

Obama a condamné les Palestiniens à une décennie supplémentaire de répression étouffante, de nettoyage ethnique et de massacres périodiques, entre les mains d’un gouvernement US de plus en plus composé de racistes, fascistes et amateurs de génocides, dont la démagogie rivalise avec celle de Donald Trump.

L’idée d’acheminer encore plus d’armes au ministre de la Défense israélien, Avigdor Lieberman, qui a appelé à la décapitation des citoyens palestiniens d’Israël coupables de déloyauté envers l’État, cette idée est inquiétante.

Lieberman est actuellement en train de mener campagne pour une punition collective contre les familles et les villes des Palestiniens qui sont accusés de commettre des crimes contre les Israéliens.

Lieberman oeuvre aux côtés de gens comme Ayelet Shaked, qui fut nommée ministre de la Justice après avoir approuvé un appel génocidaire au meurtre des mères palestiniennes dans leurs lits pour les empêcher de donner naissance à des « petits serpents ».

Au cours de son administration, Obama a répondu à ce fanatisme grandissant des hauts cadres israéliens par toujours plus d’armes et de couverture diplomatique.

Avec ce dernier accord d’aide, Obama garantit à des gens comme Lieberman et Shaked d’avoir la capacité de mener à bien leurs objectifs exterminateurs, bien après que lui même aura quitté ses fonctions.

Mais, assurément, les Palestiniens comprendront l’importance de leur sacrifice comme un apaisement des critiques de la droite contre Obama. Après tout, l’héritage d’Obama est en jeu.

Des contradictions

La signature de l’accord intervient quelques jours après que le Premier ministre israélien, Benjamin Netanyahu, a accusé ceux qui s’opposent aux colonies pour les juifs exclusivement en Cisjordanie occupée – construites en violation flagrante du droit international – de soutenir le nettoyage ethnique des juifs.

Dans une initiative rare, le Département d’État US a fustigé Netanyahu, en notant que c’était Israël qui déplaçait de force les Palestiniens de la Cisjordanie occupée pour faire place aux colonies.

Mais de telles préoccupations sonnent bien creux à la lumière de ce nouvel accord, lequel est inconditionnel dans la mesure où les violations des droits humains ne sont pas prises en compte.

« Des concessions » ? 

Des médias estiment que certaines dispositions dans l’accord d’aide, qui a demandé dix mois de négociations, constituent des « concessions majeures » de la part d’Israël.

Les accords dans le passé autorisaient Israël à utiliser 26,3 % de l’aide militaire US pour acheter à sa propre industrie d’armement. Le nouveau protocole d’entente réduit progressivement ce montant, exigeant finalement qu’Israël achète les armes uniquement aux entreprises d’armement américaines. En substance, c’est un gigantesque cadeau fait à l’industrie de défense des USA.

Cette « concession » israélienne particulière ne mettra pas fin à la destruction de la Palestine, mais elle représente un revers mineur pour l’industrie de défense d’Israël, qui prévoit de ce fait qu’elle subira des centaines de millions de dollars en pertes de ressources.
« Nous, industrie de la défense, risquons de perdre de 1,2 milliard à 1,3 milliard de dollars par an, en incluant les 500 millions de dollars que le Congrès a alloués aux projets spéciaux », s’est plainte le mois dernier une source de l’industrie de la défense israélienne au journal de Tel Aviv, Haaretz, faisant allusion à la mesure.

L’accord inclut également un engagement par Israël de cesser le lobbying auprès du Congrès pour l’obtention de financements supplémentaires pour une défense anti-missile, ce qui a représenté ces dernières années jusqu’à 600 millions de dollars de plus pour Israël en soutien discrétionnaire US chaque année.

Mais il y a des lacunes.

« Il est prévu que l’engagement sera écrit dans une lettre d’accompagnement ou annexé à l’accord » et que « sa formulation sera probablement suffisamment souple pour permettre des exceptions en cas de guerre ou d’une autre crise majeure » selon Reuters.

Quoi qu’il en soit, que ce soient les fabricants d’armes américains ou israéliens qui en profitent, les Palestiniens, eux, sont perdants.

Comme l’indique Rebecca Vilkomerson, directrice exécutive d’Une Voix juive pour la Paix, « augmenter l’ensemble de l’aide militaire, c’est récompenser le comportement destructeur israélien qui enfreint depuis longtemps la politique officielle des USA et le droit international. Ce faisant, les États-Unis donnent en réalité leur accord pour l’occupation et la politique d’apartheid d’Israël envers les Palestiniens ».

Traduction : JPP pour l’Agence Média Palestine

Source : Electronic Intifada

Rania Khalek

Auteur pour le site The Electronic Intifada.

http://www.agencemediapalestine.fr/

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