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Famines, migrations, morts... Les sécheresses s’aggravent, alerte l’ONU

2,3 milliards de personnes sont touchées par la sécheresse selon un rapport de l’ONU. Solutions ? Des pratiques agricoles économes en eau et plus de végétarisme.

11 mai 2022 | tiré de reporterre.net
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Le monde s’assèche. En France, le thermomètre monte et les réserves d’eau diminuent. Dans la Corne de l’Afrique, « la pire sécheresse jamais vécue » menace de famine 20 millions de personnes. Au Chili, les coupures d’eau sont désormais courantes. En Californie, l’utilisation de l’eau en extérieur va être limitée à un jour par semaine. Même la Corée du Nord se trouve obligée de réquisitionner des fonctionnaires pour aider les paysans démunis. Cette année, « plus de 2,3 milliards de personnes seront confrontées au stress hydrique et près de 160 millions d’enfants sont exposés à des sécheresses graves et prolongées  », alerte l’Organisation des Nations unies (ONU), dans un rapport inédit publié mercredi 11 mai.

« La charge de la collecte de l’eau pèse de manière disproportionnée sur les femmes »

Ce recueil, publié à l’occasion de la COP15 contre la désertification qui se tient actuellement en Côte d’Ivoire, dresse un panorama bien aride. « Depuis 2000, le nombre et la durée des sécheresses ont augmenté de 29 %  », peut-on lire, avec des dommages considérables : elles auraient directement provoqué plus de 13 000 décès annuels depuis 1970, et détruit chaque année 12 millions d’hectares. Le phénomène touche plus particulièrement le continent africain – 134 sécheresses en dix ans – et affecte surtout les femmes : « La charge de la collecte de l’eau pèse de manière disproportionnée sur les femmes (72 %) et les filles (9 %), qui, dans certains cas, dépensent jusqu’à 40 % de leur apport calorifique pour transporter l’eau », soutient l’ONU.

La sécheresse – conséquence directe des changements climatiques, selon le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (Giec) – participe d’un cercle vicieux : moins d’eau, c’est moins de photosynthèse par les plantes et donc moins de stockage de CO2… « Les écosystèmes se transforment progressivement en sources de carbone, en particulier lors des épisodes de sécheresse extrême, souligne le rapport. La photosynthèse dans les écosystèmes européens a été réduite de 30 % pendant la sécheresse de l’été 2003, ce qui a entraîné un rejet net de carbone estimé à 0,5 gigatonne.  »

Sans (bonne) surprise, nous allons vers un monde de plus en plus sec. « Il est en train de se produire un changement des régimes pluviométriques, confirme à Reporterre Jean-Luc Chotte, chercheur à l’Institut de recherche pour le développement (IRD), président du Comité scientifique français de la désertification. La quantité de pluie qui tombe en une année sera peut-être équivalente, mais elle ne sera pas répartie de la même manière qu’aujourd’hui : schématiquement, on aura de fortes pluies et de longues sécheresses. »

« On aura de fortes pluies et de longues sécheresses »

« Si l’action ne s’intensifie pas, d’ici 2030, on estime que 700 millions de personnes risquent d’être déplacées par la sécheresse », estime l’ONU. D’ici 2050, les sécheresses pourraient toucher plus des trois quarts de la population mondiale et jusqu’à 216 millions de personnes pourraient être contraintes de migrer. À cette date, 4,8 à 5,7 milliards de personnes vivront dans des zones où l’eau est rare pendant au moins un mois par an, contre 3,6 milliards aujourd’hui.

Quant aux cultures, rien qu’en Europe, « les pertes annuelles dues à la sécheresse sont actuellement estimées à environ 9 milliards d’euros et devraient atteindre plus de 65 milliards d’euros en l’absence de mesures climatiques significatives ».

Pour Ibrahim Thiaw, secrétaire exécutif de la Convention des Nations unies sur la lutte contre la désertification, « l’humanité est à la croisée des chemins. Nous devons nous orienter vers les solutions plutôt que de poursuivre des actions destructrices, en croyant qu’un changement marginal peut guérir un échec systémique. » Il prône la restauration des terres, à travers la reforestation et l’agroécologie.

Solutions : semences paysannes, irrigation au goutte-à-goutte, végétarisme...

Selon le secrétaire onusien, il est urgent de passer d’une approche «  curative » – on répare les dommages causés une fois la sécheresse survenue – à une démarche plus préventive. Parmi les pistes sur la table, des pratiques agricoles économes en eau, notamment l’irrigation au goutte-à-goutte, qui a par exemple permis à des maraîchers d’Asie du Sud-Est « d’augmenter l’efficacité de l’utilisation de l’eau jusqu’à 43 % et le rendement de 8 à 15 % », d’après le rapport. Jean-Luc Chotte met en avant le recours accru à des semences paysannes,afin de trouver des variétés les plus adaptées aux sécheresses.

Les artisans semenciers drômois de Jardin’enVie produisent et vendent des variétés paysannes de semences, plants, légumes, fruits et fleurs. © Estelle Pereira/Reporterre

Pour le chercheur, la priorité reste de développer « des systèmes d’alerte précoces sur les sécheresses, pour mieux anticiper » : « Cela permet aux agriculteurs d’adapter leur calendrier cultural en fonction de la pluie qui est annoncée, ou pas, et de choisir les variétés les plus adéquates. » L’ONU mise beaucoup sur un système d’alerte mêlant techniques scientifiques et prévisions issues des communautés autochtones.

L’heure est donc à l’adaptation, à tous les niveaux. Il faut réduire notre gourmandise en eau… jusque dans nos assiettes. L’ONU pousse ainsi pour une baisse drastique de la consommation de viande. Il faut 15 000 litres d’eau pour produire un kilo de bœuf, 6 000 litres par kilo de porc, 4 000 par kilo de poulet. À l’inverse, comptez en moyenne 1 600 litres pour un kilo de céréales.

Lorène Lavocat

Auteur pour le site de Reporterre (France).

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