Édition du 26 mars 2024

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Amérique centrale et du sud et Caraïbes

Haïti : La terreur comme politique d’État

Le 24 avril 2019 dans le quartier de Carrefour-feuille, au sud-est de Port-au-Prince environ sept personnes sont mortes et plus d’une vingtaine d’autres sont grièvement blessées.

Cet événement fait suite à une succession d’assassinats dans les différents quartiers populaires de Port-au-Prince. Que faut-il comprendre de ces incidents criminels qui se banalisent de plus en plus ? Une chose est sûre : ils ne sont pas le fruit du hasard ou d’une criminalisation incontrôlée venant de gangs incontrôlables. Dans les faits, ces tueries constituent une stratégie politique de répression du régime néo-duvaliériste de Jovenel Moise face à la volonté du peuple haïtien de lutter pour le changement social. Cette politique se dévoile de plus en plus, se systématise, et de jour en jour, le gouvernement Moise, incapable d’offrir une alternative à la crise, se résout à généraliser la violence. Et pour cela tous les moyens sont bons : même des mercenaires étrangers seraient impliqués dans la répression du mouvement de revendications.

Depuis le soulèvement populaire des 6,7 et 8 juillet 2018, la mobilisation populaire prend un nouvel essor. Elle a atteint une nouvelle dimension. Elle ne se limite pas à des revendications réformistes. La longue expérience des luttes du peuple haïtien montre que les réformes ne peuvent apporter rien de bon face à un État corrompu, antinational et complètement soumis aux intérêts de l’impérialisme. La mobilisation vise désormais le renversement de ce système social d’apartheid.

Face à la détermination du peuple haïtien de saper les bases de l’État néocolonial, les bandits légaux du pouvoir Tèt kale répondent par la répression la plus sanglante. Ils détournent les recettes publiques non seulement pour s’enrichir mais aussi pour équiper en armes de guerre et munitions les gangs qui leur sont affiliées. Désormais le pouvoir s’affiche ouvertement avec des chefs de gangs. Cette collusion n’est, bien sûr, pas étonnante : le régime Tèt Kale lui-même n’est-il pas associé, dès son origine, à des pratiques criminelles ?

Cette répression sanguinaire, dont les habitants des quartiers populaires paient le prix fort, répond donc à une logique de pouvoir inscrit même dans la pratique politique du régime Tèt Kale. Voilà pourquoi les quartiers pauvres de la zone métropolitaine se transforment en théâtre de carnages à répétition, et même les enfants, les femmes enceintes et vieillards ne sont pas épargnés.

Soulignons que, comme durant les sombres moments de la dictature des Duvalier, le pouvoir sanguinaire de Jovenel Moise réprime avec le soutien les puissances impérialistes, dont le Canada, les États-Unis et la France. Ces tuteurs internationaux ne reconnaissent pas le droit du peuple haïtien à revendiquer une vie digne, à vouloir construire une société égalitaire.
Le massacre du 24 avril 2019 à Carrefour-feuille vient allonger la longue liste des morts et blessés des quartiers pauvres de la zone métropolitaine. Ce massacre relève d’un choix délibéré de Jovenel Moise et de ses acolytes, choix qui est de gouverner par la terreur en vue d’étouffer la mobilisation populaire réclamant la fin de la corruption et un procès en bonne et due forme à propos des fonds spoliés du Petro Caribe. Mais de façon plus systématique, ces tueries consistent à casser l’élan de la lutte pour le renversement de ce système d’apartheid.

Face à cette répression du régime Tèt kale, il est essentiel de continuer la lutte par tous les moyens nécessaires. La question aujourd’hui n’est pas de savoir comment pressurer ce régime sanguinaire en vue de le réformer, mais de savoir quelle stratégie et quels moyens, dont disposent les organisations populaires et progressistes, pour arriver à transformer les rapports de force et jeter les bases d’une nouvelle société.

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