Édition du 16 avril 2024

Une tribune libre pour la gauche québécoise en marche

Politique québécoise

Coupures en culture, redevances minières et les voyages de Pauline

Le PQ, le parti à une seule vitesse : le reculons ! (2)

Comme dans l’expression "Se faire passer un sapin"

Le PQ poursuit dans sa course folle pour rattraper les libéraux en matière d’application des politiques néolibérales. Que ce soit dans le dossier des redevances minières, des engagements électoraux ou de la prétendue option indépendantiste, la première ministre et ses ministres font montrent d’une incroyable facilité d’adaptation en matière de mimétisme politique.

En matière d’éthique, le PQ promettait de laver plus blanc que blanc. Les cas d’André Boisclair et de Jean-François Lisée détonnent à ce propos. Ce dernier cas est toutefois révélateur : bien qu’en fait il y ait peu à reprocher à l’ancien journaliste et que les libéraux font preuve d’une hypocrisie totale dont ils sont les seuls à posséder la recette, dans ce cas, c’est la réponse aux objections qui fait foi de tout : “les libéraux avaient fait pire", que "c’était pratique courante à Ottawa” (ce qui dans le cas du gouvernement fédéral, s’est avéré faux finalement). Alors ce qui guide l‘éthique péquiste, c’est “si les autres le font, on le fait aussi" ??? En cette matière, il y a tout de même matière à réflexion : même s’il est légitime pour Jean-François Lisée d’être rémunéré pour un travail déjà accompli et que les sommes en jeu n’ont rien d’une fortune, ne devrait-on pas envisager une rémunération plafond pour les éluEs de façon à éviter une concentration d’arrivistes qui visent le pouvoir essentiellement comme un objectif de carrière ?

En culture, le ministre Makka Kotto a préparé les esprits à un réveil brutal : lors d’une tournée à Paris, il n’a pas caché ses inquiétudes quant au budget de son ministère. Il craignait de lourdes coupures qui ne sont pas perceptibles dans le budget Marceau. Lors de la présentation du budget, il se disait satisfait d’avoir été épargné. Il louangeait même le ministre pour avoir augmenté son budget de l’ordre de 2,1%.. Or dans une lettre cité par Odile Tremblay, journaliste au quotidien Le Devoir (http://www.ledevoir.com/culture/actualites-culturelles/366340/fonds-de-tiroir-menaces), la directrice du Conseil québécois du théâtre, Hélène Nadeau révèle que l’essentiel de cette augmentation ira à la salle de l’OSM et au service de la dette. Que des programmes comme celui de l’aide au développement de public seront coupés. Que les budgets des musée seront affectés (moins 1,6M$). Que contrairement à ses engagements, le PQ n’augmentera pas le budget du CALQ et de la SODEC. Que le budget du programme d’aide aux projets du ministère de la culture et des communications passe de 4,08M$ à 907 100$. Même chose pour le budget affecté aux “autres interventions particulières en culture et communication qui passe de 10,7M$ à 7,9M$. Dans ce dernier cas, ce seront probablement les organismes en émergence ou de petits projets qui ne rencontrent pas les programmes normés qui seront affectés. Dans le cas du PQ en matière d’arts et de culture, le passé est garant de l’avenir. Le PQ a toujours tenu pour acquis les artistes et le secteur des arts sans livrer la marchandise. En espérant que les créateurs se souviendront…

22-23 novembre : Pauline Marois se rend à Halifax pour assister au Conseil de la fédération, une instance qu’elle avait par le passé suggéré d’abolir. Avec son homologue de l’Alberta, Alison Redford, elle forme un comité Québec-Alberta sur l’acheminement au Québec du pétrole des sables bitumineux. Pauline Marois ne s’est pas embarrassée de ses prises de position passées en participant à la réunion du Conseil de la fédération à Halifax, une rencontre avec les premiers ministres des autres provinces qu’elle a jugé fort « utile ». Elle a promis de ne pas en manquer une à l’avenir à moins d’empêchement majeur. Pour une première ministre qui prétend défendre l’idée d’indépendance du Québec, il est difficile de comprendre en quoi cette orientation aura pour effet de mousser la popularité de l’indépendance dans la population québécoise.

Les 13 et 14 décembre dernier, Pauline Marois se rendait à New York en mission économique. Elle a insisté sur le fait que le Plan nord ré-baptisé le “Nord pour tous” ne sera pas remis en question et que seulement quelques modifications y seront apportées. Business as usual… Elle a tenu à rassurer en disant que le PQ ne fera pas de la souveraineté son cheval de bataille, gouvernement minoritaire oblige. Ça nous rappelle un certain René Lévesque qui, aussitôt élu en 1976, s’était adressé à l’oligarchie américaine pour leur garantir que le Québec ne sera pas le Cuba du nord.

Pauline Marois a insisté sur le fait que ce sera le secteur privé qui sera invité à développer le Plan nord. Elle a tenu à souligner que le projet de loi sur les mines qui sera déposé en 2013 ne contiendra pas de politique sur les redevances. Que l’industrie sera consultée sur le sujet ce qui laisse penser que toute solution qu’elle proposera sera essentiellement tournée autour des préoccupations du secteur privé. « Il y aura des exigences différentes de celles qu’avait l’ancien gouvernement, mais qui seront aussi raisonnables, parce que nous souhaitons continuer à développer le Nord. Nous n’avons pas renoncé à développer le Nord, loin de là. Mais nous le ferons avec des paramètres un peu différents ». En quoi seront-ils différents, ça on l’ignore. Elle répond probablement aux pressions que la Fédération des chambres de commerce du Québec entend mettre sur le gouvernement du PQ afin qu’aucune modification ne soit apportée à la loi sur les mines (Le Devoir, 15 décembre. Cahier Économie, p. 1). Mais c’est dans le comportement de la ministre des ressources naturelles que l’on peut deviner de quoi il retourne.

La ministre Ouellet s’enfonce de plus en plus dans le ridicule. Dans un article d’Alexandre Shields, Le Devoir (http://www.ledevoir.com/politique/quebec/366588/redevances-minieres-qui-paie-et-combien) il révélait le 17 décembre qu’il est tout aussi impossible aujourd’hui d’obtenir le portrait de la situation des redevances minières que sous le règne des libéraux. Pourtant, Martine Ouellet condamnait encore récemment les libéraux pour leur manque de transparence. Bonnet blanc, blanc bonnet… On apprend également que “dans le premier budget du ministre des Finances, Nicolas Marceau, le montant est estimé à 245 millions pour 2012-2013. Pour la dernière année, soit 2011-2012 vérifiable, il serait de 334 millions. Pour la même année, la valeur brute des ressources minérales extraites par les minières atteindrait plus de neuf milliards de dollars”. Un calcul rapide nous fait réaliser que le pourcentage anticipé par le ministre Marceau pour les redevances est de 3,7% de la valeur des extractions minières, un chiffre ridiculement bas.

Bref, la ministre refuse de dévoiler le montant des redevances payées en 2011-2012, l’identité des minières en activité actuellement ou combien ces minières verseront dans le trésor québécois pour les opérations en cours. Plus globalement, elle refuse de révéler l’ampleur des besoins en matière de renaturalisation des sites miniers abandonnés , les sommes qui devront être investies et l’approche qu’elle entend adopter lors des consultations sur le projet de loi sur les mines alors qu’elle s’empresse d’ajouter qu’elle consultera l’industrie. Le PQ a fait savoir que, malgré le fait qu’il s’était engagé à abolir le Fonds des générations, il continuera à y verser les redevances minières. Bref, malgré tous les engagements électoraux du PQ, ce seront encore les banques et les minières qui profiteront des ressources naturelles du Québec.

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