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La révolution arabe

Moubarak : une parodie de procès

Ce sera donc la prison à vie, et non la peine de mort. L’ancien président Hosni Moubarak, et son ministre de l’intérieur, Habib al-Adly ont été condamnés ce jeudi 2 juin à la prison à vie pour le meurtre de 846 manifestants pendant la révolution.

02 juin 2012 | Mediapart.fr

Peu après l’annonce du verdict, la télévision égyptienne a indiqué que l’état de santé de Moubarak s’était dégradé à son arrivée à la prison de Tora au Caire. L’ancien président a souffert d’un malaise à son arrivée en hélicoptère à la prison, ont indiqué la télévision et l’agence officielle Mena, sans donner de précisions. Hosni Moubarak, âgé de 84 ans, était arrivé en début de matinée au tribunal sur une civière. Il avait plaidé non-coupable. L’un des avocats de l’ancien président a indiqué qu’ils feront appel de cette condamnation, ce verdict étant selon lui « plein de failles juridiques ».

Également appelés à comparaître dans cette affaire, six officiers de police ont été acquittés. Parmi eux, figurent pourtant des responsables clés de l’ancien régime et de son système de repression : il s’agit notamment de l’ancien chef des forces centrales de sécurité, Ahmed Ramzy, qui était nécessairement au courant de l’ampleur de la répression, des meurtres et des actes de torture pratiqués contre les manifestants de la révolution.

C’en était trop pour les avocats des familles des victimes, qui ont dénoncé un procès bâclé. L’ONG de défense des droits de l’homme Human Rights Watch estime quant à elle que la cour n’a pas fait preuve de la même rigueur dans le traitement des autres dossiers que dans ceux de Moubarak et de son ministre de l’intérieur.

Quelques minutes après le procès, un dessinateur très suivi en Égypte a par ailleurs diffusé une caricature sur Twitter (@CarlosLatuff), qui reflète la pensée de bien des activistes et familles des victimes ce samedi, « Sharm » désignant la station balnéaire de Charm el Cheikh, où Moubarak résidait

Nouvelle provocation à l’encontre des Égyptiens dont la mobilisation a conduit à la révolution et au départ de l’ancien président, ce procès ne fait qu’envenimer le contexte d’une élection présidentielle dont le second tour doit se tenir les 16 et 17 juin. Affligés par la présence au second tour de l’ancien premier ministre Ahmed Chafiq, en outre proche de l’armée, les partisans de la révolution ont dû faire face toute l’année à la violente répression des militaires, qui s’est soldée par la mort de plusieurs dizaines de manifestants, et plus de 12 000 procès devant les tribunaux militaires. Ce verdict, qui absout des responsables de haut rang désormais connus de tous les Égyptiens, menace de plonger le pays dans de nouveaux affrontements et actes de violences de la part des autorités, comme cela a été le cas tout au long de l’année 2011.

Seuls bénéficiaires indirects de ce verdict : les Frères musulmans du candidat à la présidentielle Mohammed Morsi, qui l’ont qualifié de « farce » et, chose inhabituelle, ont appelé les Égyptiens à manifester. Les Frères se voient ici offrir une bonne occasion de tenter de fédérer le vote des révolutionnaires opposés à Ahmad Chafiq. Ce samedi, plusieurs centaines de personnes s’étaient déjà rassemblées sur la place Tahrir. Les 15 jours qui nous séparent du vote s’annoncent mouvementés.

Pierre Puchot

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