Édition du 3 décembre 2024

Une tribune libre pour la gauche québécoise en marche

International

Programme du NPA pour les élections européennes

Pour une Europe écologiste

L’urgence écologique ne permet plus de tergiverser et impose que des mesures radicales soient immédiatement prises afin de préserver la planète.

L’Union européenne (UE), pionnière en matière de défense de l’environnement ? C’est idée qui court, pourtant sans fondement. En tant qu’espace économique et industriel, l’UE a une responsabilité majeure dans la dégradation des équilibres environnementaux. Par ses politiques antisociales et sa défense de la concurrence non faussée, elle ne fait qu’ajouter les inégalités sociales aux inégalités environnementales. Les tentatives de faire émerger un « capitalisme vert » ne modifieront pas les dizaines d’années de productivisme intensif. La crise écologique et la crise économique avancent de concert et se renforcent mutuellement : l’UE s’avère incapable d’y répondre autrement qu’en favorisant toujours plus les avantages de la minorité qui dirige l’économie. Avec la libéralisation de la plupart des marchés, de l’énergie ou des transports par exemple, le jeu de la concurrence accélère les mesures destructrices et empêche la reprise en main des grands choix économiques et productifs par les populations. C’est bien pourtant là que se niche le problème : face à une commission européenne qui travaille main dans la main avec les lobbys industriels, il faut opposer des choix démocratiques des peuples et des salariés, afin de définir ce qui doit être produit, comment cela doit l’être, quels sont les moyens de transports à utiliser… Bref, une inversion totale de logique : la satisfaction écologique des besoins sociaux contre la logique du profit.

Urgence climatique, justice sociale

Le paquet « climat-énergie » adopté par l’Union européenne en décembre 2008 fixe à 20% en 2020 ses objectifs de réduction de gaz à effet de serre (GES) par rapport à 1990. Or, cela est inférieur aux recommandations des climatologues, qui préconisent une réduction située entre 25 et 40%. Les dernières recherches incitent d’ailleurs à viser le haut de cette fourchette. De plus, ce paquet « climat-énergie » cherche à approfondir les mécanismes marchands de réduction des GES qui ont déjà montré leur impuissance. Si on les laisse faire, ce sont des millions de victimes à prévoir ! La révolution énergétique devient une urgence cruciale, fondée sur des objectifs de baisse drastique des consommations énergétiques, la sobriété énergétique et le développement massif des énergies propres dans le cadre de services publics européens. En taxant les profits des industriels de l’énergie, il est possible de lancer un vaste plan de rénovation de l’habitat par l’isolation et la diversification des sources énergétiques, sans nucléaire ni pétrole, et d’imposer la réalisation bioclimatique systématique pour toute construction neuve, tout en créant des milliers d’emplois.

Transports de marchandises : sortir du « tout routier »

Les transports sont au cœur de l’organisation de l’économie capitaliste, particulièrement en Europe, où la dégradation des services publics et la logique entrepreneuriale des entreprises d’Etat ont laissé la part belle aux transports par la route, au détriment du rail et des voies d’eau. Dans la période récente, et dans un contexte de hausse des transports de marchandises (et de passagers), le transport routier a augmenté de 35 %, contre 6 % pour le fret ferroviaire. La route assure 44 % du transport de marchandises et environ 80 % de la consommation d’énergie du secteur des transports. Ce choix prioritaire pour la route se justifie pour les capitalistes par le refus des stocks, le « juste à temps » qui engendre une pression croissante sur les salariés. Une autre Europe devrait au contraire se fixer comme objectifs une réduction drastique des flux de marchandises et le développement massif de modes de transport alternatifs à la route. Cela nécessite immédiatement l’arrêt de la construction de nouvelles autoroutes, l’interdiction des transports de camions sur les longues distances, mais aussi la mise en place d’un service public européen du rail, et une relocalisation importante des productions afin de réduire les allers-retours de marchandises.

Non à l’Europe de la bagnole

L’industrie automobile, et surtout ses salariés, font partie des victimes de la crise économique actuelle. La baisse des ventes de voitures sur tous les continents illustre la fin d’un cycle, qui avait fait du secteur automobile un moteur économique pour une bonne partie des pays industrialisés. Face à cette solution, ni fuite en avant ni miracle technologique ne sont envisageables. La voiture propre n’est pas pour demain et les changements climatiques nous obligent à trouver une alternative au « tout automobile », car il s’agit bien de la crise d’un modèle de société. Il faut donc à la fois défendre des revendications immédiates, comme l’interdiction de mise sur le marché des voitures les plus polluantes, la diminution de la vitesse maximale, la gratuité et le développement des transports en commun, et à la fois ouvrir des perspectives à moyen terme. La reconversion des industries automobiles doit garantir l’emploi, les contrats, les salaires et la formation des salariés. Leur savoir-faire doit être préservé et ils doivent être associés aux choix de reconversion, afin d’assurer la production de véhicules moins polluants et d’autres biens utiles socialement et écologiquement (moyens de transports en commun, rotors d’éoliennes…).

Sauver la biodiversité

Parmi les fiertés européennes en matière d’écologie, Natura 2000 est souvent cité. Il s’agit là d’un programme européen visant la création d’un réseau communautaire d’espaces protégés dans lesquels la biodiversité doit être respectée. Des experts listent les habitats naturels et les espèces pouvant bénéficier de Natura 2000. Cette politique repose sur l’idée que certaines espèces seraient à protéger (mais pas d’autres ?) sans considérer la biodiversité dans sa globalité et sans réellement mesurer l’impact que les activités humaines, et donc économiques, ont sur elle. Comme dans d’autres domaines, l’opacité, le pouvoir des experts et l’absence d’harmonisation vers le haut règnent quant à la définition des espèces et des milieux à protéger. Il faut, au contraire, défendre un alignement de la politique communautaire sur les législations nationales les plus protectrices, l’application sur tout le territoire européen de la directive de protection des espèces et des habitats ou encore un service public capable d’évaluer et de protéger la biodiversité, indépendamment des pouvoirs économiques ou d’autres lobbies (chasseurs…).

Agriculture verte ou capitalisme agricole ?

L’agriculture du xxesiècle est traversée par un projet productiviste : celui de la révolution verte. Essor du machinisme, de l’agrochimie, modernisation des exploitations, engrais… autant de techniques censées résoudre la faim dans le monde. On voit ce qu’il en est aujourd’hui ! La Politique agricole commune (PAC) a été l’un des tremplins majeurs de cette orientation, qui contribue à une baisse des prix des céréales, de la viande et du lait, afin de conquérir les marchés des pays pauvres et assurer la place des gros producteurs du Nord dans la concurrence globalisée. Mais cela se fait au détriment des autres paysans, qui subissent un véritable plan social (200 000 ont disparu en 15 ans), ou sont maintenus dans la précarité, la moitié des paysans vivant en dessous du Smic. Le bilan de la PAC, c’est bien celui-ci : l’extinction progressive des petits paysans, les famines et la malnutrition au Sud ; la disparition de terres arables sous le coup de la stérilisation des sols, des changements climatiques, et d’un déséquilibre de plus en plus profond entre urbain et rural ; une pollution aux conséquences sur toutes les espèces, y compris l’espèce humaine ; une concentration des terres et des richesses produites ; des catastrophes sanitaires et alimentaires…

Halte aux OGM !

Parmi les innovations technologiques de l’agrobusiness, les OGM sont de celles qui poussent très loin les processus de marchandisation du vivant et de dépossession des savoirs paysans. Au nom d’une amélioration hypothétique des rendements, les firmes telles que Monsanto cherchent à enchainer les agriculteurs depuis l’achat des graines jusqu’aux techniques de culture. Aujourd’hui, 36 % du soja et 13 % du maïs à l’échelle mondiale sont issus de cultures OGM. Dans l’UE, cinq espèces OGM de maïs et deux de colza sont autorisées à l’importation, mais c’est sans compter les phénomènes d’importation illégale, notamment du riz ou d’autres types de maïs. Quant à la production, quatre OGM sont autorisés (maïs MON810, de Monsanto, maïs T25 de Bayer et deux œillets de Florigène), mais une vingtaine d’autres sont en attente d’autorisation. On a pu voir comment, dans le cas du MON810, il n’était pas question pour l’Union européenne de laisser un Etat freiner la pénétration des OGM dans l’agriculture. Pourtant, des études récentes montrent que les rendements des OGM ne sont pas vraiment supérieurs aux cultures traditionnelles. Il est urgent d’interdire la production et l’importation d’OGM sur l’ensemble du continent.

Pêche : danger

Comme pour l’agriculture, les politiques européennes en matière de pêche donnent la priorité à la pêche industrielle et concentrent les concessions de criée. A terme, cela implique non seulement une disparition des petits ports et d’une pêche artisanale, mais aussi l’impossibilité de mettre en œuvre une politique de quotas et de préservation des ressources marines. La concurrence à laquelle sont confrontés les pêcheurs les conduit à une forme de productivisme qui ravage et gaspille : 10% des captures mondiales sont rejetées avant d’avoir été pêchées, soit plus de 1 million de tonnes en 2005 ! Si l’on souhaite mettre en œuvre un système qui ne menace ni les emplois ni les ressources, il faut inventer d’autres types de financement et de rémunération, afin d’empêcher les gros navires racleurs de fond de détruire la biodiversité marine, et de garantir un revenu décent aux pêcheurs. Par ailleurs, une gestion publique des ressources doit se mettre en place, incluant les pêcheurs, afin notamment de respecter les cycles de vie et de reproduction des poissons.

Pour une eau gratuite et de qualité

Les directives de l’UE sur l’eau sont essentiellement consacrées à sa qualité, dans un continent où la gestion publique demeure majoritaire, la France faisant exception en la matière. Si les objectifs de la directive cadre européenne sur l’eau (DCE) sont ambitieux, sa réalisation l’est beaucoup moins : dérogations et prévisions de ne pas tenir les objectifs sont fréquentes, en particulier à cause de la pollution des eaux par l’agriculture productiviste. En la matière, la France est particulièrement exemplaire : troisième utilisateur mondial de pesticides, elle préfère payer des pénalités ou négocier des délais avec la Commission européenne plutôt que de respecter les normes, concernant la Bretagne notamment. Au-delà de cette dimension, nous devons défendre le droit inconditionnel des Européens à une eau gratuite, avec des quotas alloués à chacun, dans le cadre de régies publiques cogérées par les salariés et les usagers. Cela implique de lutter contre les tentatives des multinationales françaises de l’eau de faire figurer celle-ci dans la liste des services à privatiser dans l’UE.

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