Édition du 16 avril 2024

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Politique québécoise

Entrevue avec le président de la CSN, Louis Roy (1ère partie)

Se donner une vision collective qui ne peut pas être seulement basée sur l’économie

Le nouveau président de la CSN, Louis Roy nous a accordé une longue entrevue récemment. Nous abordons, dans cette première partie les enjeux relatifs au syndicalisme et à l’économie. La semaine prochaine suivront les enjeux sociaux et politiques.

Enjeux entourant la place des syndicats dans la conjoncture actuelle

Concernant le dossier Couche-Tard

« La syndicalisation, c’est aussi la compréhension par la population du rôle des syndicats. Et là dessus, nous sommes attaqués depuis 30 ans. Probablement que nous n’avons pas suffisamment agit pour que la population comprenne véritablement quels sont les rôles des syndicats. (...) Alors, les gens ont une perception des syndicats comme troubles-fêtes alors que les syndicats sont probablement le premier, le dernier et le seul remparts organisés contre la détérioration des conditions sociales collectives. »

« C’est facile pour un boss d’empêcher ses travailleurs de se syndiquer.. On le voit avec Couche-tard : une petite menace de fermeture et ça ferme le robinet de la syndicalisation. Le robinet s’ouvre, tu en ferme un pour vrai ! Là c’est vraiment la peur de perdre son emploi. Les gens qui travaillent là n’ont pas beaucoup d’argent, pas des gros salaires. Alors ils ne veulent pas perdre leur job. C’est un peu le cercle vicieux et il faut briser ça e se montrant sur la place publique sous notre vrai jour : ceux qui contestent l’organisation capitaliste du travail. »

Sur le conflit dans les CPE

« Les CPE, c’est toujours le même problème dans ce milieu-là. Les négociations piétinent. Il y a toutes sortes de raisons. Des raisons politiques : le gouvernement ne veut pas investir davantage là dedans. L’Association des CPE tergiverse et là elle nous sort qu’elle a changé de responsable de la négociation. Alors les filles qui travaillent là sont tannées d’attendre. Elles veulent une convention collective rapidement. Le vote de grève sert à donner le signal aux associations qui gèrent les CPE comme au gouvernement. Elle veulent montrer le sérieux de la lutte. Des fois, les patrons affirment que les gens ne sont pas tant mobilisé que ça et que leurs demandes sont mal traduites, Alors parfois, pour leur montrer que notre monde sont sérieux, les gens disent qu’on va en assemblée et elles ont fait le débat et oui, elles sont prêtes à faire la grève. »

Le débat sur le syndicalisme dans l’industrie de la construction

« Il faut que le syndicalisme dans le domaine de la construction soit un syndicalisme au service des travailleurs de la construction. C’est un des problèmes. Mais là où tu as raison, c’est que le placement syndical n’est qu’un des problèmes auxquels nous sommes confrontés. La question de la collusion et de la corruption, la question de l’intégration de cercles mafieux ou illégaux à l’intérieur du domaine de la construction, dont l’obtention de permis constituent un ensemble de sujets plus préoccupants. Le placement, c’est vraiment une affaire mineure. »

Enjeux économiques

Sur le Plan Nord

« Dans le Plan Nord, ce qu’on trouve intéressant, c’est le mot Plan. Parce que du développement économique planifié au Québec, il n’y en a pas eu depuis longtemps. »

« Du développement économique planifié, ça se fait. Maintenant, il faut ajouter des couches à ça. Le développement durable, l’aspect du respect des nations autochtones. C’est important de tenir compte des ententes qui ont été prises auparavant. Et aussi une analyse. Moi je ne suis pas un scientifique sur les questions environnementales. Mais tous les scientifiques nous disent que le pergélisol est en train de fondre et nous on s’apprête à construire des milliers de kilomètres de routes là dessus... »

« Tu as abordé le volet des ventes de nos ressources et les envoyer en Chine, au Brésil, en Indes, en Russie comme ça se faisait dans les années ’40, ’50, ’60. Ça fait des années qu’on dénonce ça. Il n’y a pas de planification sur la transformation de ces matières là, ni sur la gestion des sites miniers, il n’y a pas de planification sur "Peut-on faire autres choses avec ça”. Tu parlais de la protection du territoire. C’est sûr que quand on dit 50% du territoire protégé, c’est grand en t… Mais je pense qu’il faut en sauver plus que ça. Si on pense à plus long terme, des question comme la gestion de l’eau potable sont également un enjeu majeur. »

« Mais si on parle de tourisme, d’écotourisme, nous avons une mine d’or là. C’est magnifique le nord, Il y a des canyons presqu’aussi beaux que le Grand Canyon américain. Il y a des sites incroyables mais on ne mets pas ça en valeur, on veut sortir le minerai de là. Moi je n’ai rien contre le minerai mais je sais que ça fait du dégât. Une mine à ciel ouvert, ça fait du dégât. Une mine de transformation pour les métaux précieux, ça fait du dégât à cause des produits utilisés pour séparer la roche de l’or ou des autres métaux précieux, c’est de la pollution et ça reste là. Et si ça ne reste pas là, il faut le mettre ailleurs. »

« Nous le plan (des libéraux NDLR), on ne le voit pas. Nous, on aimerait ça que pour une fois, et nous serions prêt à descendre au sud du 45e parallèle, nous avions un plan de développement économique tout court. »

« Alors qu’est-ce qu’on fait ? Il faudrait se donner une vision collective qui ne peut pas être seulement basée sur l’économie, juste sur les profits. À travers ça, il y a toute les questions des redevances, de la participation de l’État. (...) Le Plan Nord, la CSN pense que c’est une opportunité de réflexion collective des QuébécoisEs sur le développement économique, territorial, développement énergétique, développement du transport, etc. »

Sur le développement de l’industrie des énergies fossiles (gaz de schiste et pétrole)

« Ce sont les conseils centraux qui travaillent sur ces questions. Pour nous, dans le dossier du gaz de schiste, nous réclamons un moratoire. Parce qu’on veut savoir de quoi il est question. Ce qu’on nous montre actuellement, ce n’est pas très intéressant. En même temps, si c’est une ressources qui peut être exploitée de façon correct, on le fera. Mais pour l’instant, ce n’est pas le message que l’on reçoit que ce soit des scientifique ou des gens comme aux États-Unis qui vivent avec cette industrie dans leurs régions. Pour ce qui est du pétrole, nous sommes très inquiets, surtout pour ce qui est du golfe du St-Laurent. »

« (Le fleuve St-Laurent) C’est un éco-système qui est déjà très fragilisé et comme nous n’avons pas de réflexion sur notre politique énergétique, on ne connait pas nos besoins. Que veut-on faire de ce pétrole ? Il y a toutes sortes d’énergies disponibles. Dans le Grand Nord, il paraît que nous avons les meilleurs corridors de vents sur la planète. Et pas que le vent. Un scientifique nous a affirmé que nous avons aussi les taux d’ensoleillement incroyables. Et que la technologie photovoltaïque efficace sera disponible d’ici 4-5 ans. Que les enjeux entourant la conductivité ralentie par le froid, de la conductivité, de l’ensoleillement seront nettement améliorées. Si on n’avait rien, on pourrait parler de pétrole, mais nous avons des alternatives comme la bio-méthanisation par exemple. »

Entrevue réalisée par Yves Bergeron

Louis Roy

Président de la CSN

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