Édition du 3 décembre 2024

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COP28

COP 28 : Non au colonialisme vert, Non aux fausses solutions du capitalisme vert, Non à la normalisation verte, Pour la souveraineté des peuples sur leurs territoires

Tous les rapports officiels sur le climat, y compris le rapport du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC), confirment l’aggravation de la crise climatique mondiale associée au réchauffement climatique et le fait que nous sommes terriblement proches du point de non-retour fixé, par son rapport spécial de 2018, à 1,5 degrés Celsius. Ces phénomènes seront multipliés par cinq si les émissions de gaz à effet de serre poursuivent leur tendance, selon le même rapport.

13 décembre 2023 | tiré du site du CADTM
https://www.cadtm.org/COP-28-Non-au-colonialisme-vert-Non-aux-fausses-solutions-du-capitalisme-vert

Ces transformations profondes bien réelles sont liées à la pollution accélérée de l’atmosphère qui accompagne le développement du système capitaliste mondial depuis le milieu du XIXe siècle, notamment en Europe et aux États-Unis. Elles sont qualifiées par les scientifiques comme une nouvelle ère de l’histoire géologique Anthropocène ou plus précisément Capitalocène.

Les changements climatiques liés au réchauffement climatique ne sont pas seulement des pronostics pour l’avenir, ils sont présents depuis longtemps et s’incarnent notamment dans des phénomènes extrêmes tels que les inondations, les incendies de forêt et les fortes canicules. Ces phénomènes augmentent en fréquence et en intensité dans de nombreuses régions du monde : inondations en Belgique et en Allemagne en 2022, incendies de forêt en Turquie, en Algérie et au Maroc, pour ne citer que ceux-là.

Malgré la catastrophe et l’urgence de la crise, essentiellement liée au système de production, de distribution et de consommation capitaliste imposé à la majorité par des minorités parasitaires mondiales et locales, les classes dominantes poursuivent leurs opérations de greenwashing et leurs tentatives pour tirer profit de cette crise pour réaliser plus de profits.

Les voilà qu’ils tiennent le sommet COP28 du 30 novembre au 12 décembre 2023 à Dubaï aux Émirats arabes unis, le pays qui a le deuxième taux de pollution le plus élevé au monde par rapport à sa population. Ils ont osé et accepté de céder la présidence de la COP28 à Sultan Al Jaber, président-directeur général d’Abu Dhabi Petroleum Company, l’une des plus grandes sociétés pétrolières au monde. Les Émirats arabes unis sont également l’un des États les plus répressifs au monde, notamment les libertés d’organisation des syndicats et des associations.

Le Maroc, avec les pays non pétroliers d’Afrique du Nord et du Moyen-Orient, est considéré comme un symbole d’injustice environnementale, car sa contribution aux émissions de gaz à effet de serre est très faible par rapport à des pays comme les États-Unis d’Amérique et les Emirats Arabe Unies. Malgré cela, c’est l’un des pays les plus touchés par les effets de ces changements et parmi les moins préparés à leur faire face. La baisse des précipitations, la succession des années de sécheresse et leur gravité croissante, ainsi que la succession des inondations et leurs incidences croissantes ces dernières années, sont considérées comme les expressions les plus importantes de ces transformations dans notre pays.

Le régime marocain est considéré comme le premier allié du colonialisme vert, dans la mesure où il permet aux entreprises internationales et aux classes dirigeantes de s’accaparer les terres et des territoires sous prétexte de transition énergétique, avec pour conséquence le déplacement et l’oppression des populations, comme cela s’est produit à Midelt où 5 000 hectares de terres ont été expropriés aux autochtones, et avant cela, le cas de Ouarzazate où 3 000 hectares ont été expropriés, et il y en a d’autres... représentés par les projets à venir, comme celui de Total Energy dans la région de Guelmim, où 150 hectares seront expropriés.

Malgré les investissements massifs réalisés par les gouvernants dans des projets d’énergies renouvelables, notamment solaires et éoliennes, financés directement par le budget public ou à travers le mécanisme de la dette, la part de ces énergies ne dépasse pas 20% de l’énergie totale produite pour l’année 2021.Ce pourcentage ne dépasse pas 8% de l’énergie primaire dominée par les produits pétroliers comme l’essence et le gasoil importés exclusivement par des sociétés privées dominées par celles du groupe d’Aziz Akhannouch (un milliardaire et chef du gouvernement actuel au Maroc), puis par les groupes Total et Shell. Le processus de privatisations du secteur énergétique au Maroc depuis la fin des années 1990, et son approfondissement avec le lancement des projets dits verts et la loi n°13-09 relative aux énergies renouvelables, ont abouti à un contrôle quasi total du secteur par le capital privé avec 78% de la production d’énergie électrique.

Les dirigeants marocains affirment donc leur intention de mener une transition énergétique en investissant environ 70 milliards de dirhams depuis le début du plan en 2009. Mais la réalité est que ce plan et la prétendue transition verte ne sont qu’un prétexte pour réaliser davantage de profits. Nous pourrons avancer l’exemple du contrat de la centrale solaire de Midelt dont a bénéficié la société « Green of Africa » company, propriété d’Akhannouch en partenariat avec EDF France et Masdar de l’Émirats Arabes Unies. Il y a aussi celui de la société Nareva du groupe Al Mada - anciennement ONA – qui contrôle à plus de 90 % le marché de l’énergie éolienne au Maroc.

Le régime marocain est également l’un des partenaires les plus importants de l’entité sioniste dans ce secteur, dans ce que l’on peut appeler une normalisation verte, à travers l’implication d’entreprises israéliennes dans des projets verts au Maroc, notamment ENLT et NewMed.

La position du Maroc au sommet de la COP28

À l’exception de la signature de nouveaux traités et accords commerciaux coloniaux portant sur des projets plus extractifs orientés vers l’exportation d’énergie verte vers l’Europe et des déclarations d’intention envers l’Afrique, il est difficile de clarifier la position des négociateurs marocains sur les questions les plus importantes soulevées à le sommet de Dubaï, notamment : l’arrêt de l’extraction des énergies fossiles, l’évaluation des engagements de l’Accord de Paris, le manque d’engagement des pays, les États-Unis d’Amérique en tête, et la question des réparations et du fonds d’indemnisation.

Les grandes puissances font pression pour que ce fonds, s’il est créé, soit remis à la Banque mondiale qui a joué et continue de jouer un rôle colonial aux côtés du Fonds monétaire international. Ces deux institutions portent une responsabilité majeure dans la détérioration du niveau de vie de millions de personnes dans le monde et dans la destruction de nombreux écosystèmes en encourageant par des financements des politiques extractives. Ils portent également une responsabilité historique dans la crise climatique globale en soutenant et en finançant des projets polluants. C’est ce qui a été dénoncé énergiquement par les mouvements sociaux mondiaux dans leur sommet à Marrakech contre les réunions annuelles de ces deux institutions en octobre dernier (2023).

Nous à ATTAC CADTM Maroc, alors que nous joignons notre voix à celles du mouvement mondial luttant pour la justice climatique et contre toutes les formes de colonialisme vert, considérons que toute transition écologique juste nécessite :

• La rupture avec l’illusion du rattrapage ou le calquage du modèle de développement capitaliste occidental qui n’a pas abouti socialement et qui est impossible à généraliser écologiquement.
• Faire payer la facture de la transition environnementale aux responsables du désastre : les multinationales, les États impérialistes et les « élites » locales qui pillent.
• Arrêter et annuler le paiement des dettes financières publiques illégitimes.
• Assurer la souveraineté des populations locales sur les décisions à chaque étape du processus de transition écologique : conception, mise en œuvre, exploitation, stockage, distribution, etc.
• Établir une alliance entre tous les acteurs directement concernés au sein des populations, les travailleurs, les usagers, etc.
• Donner la priorité aux alternatives décentralisées et conçues à petite échelle visant à répondre aux besoins fondamentaux de la majorité, tout en respectant le potentiel de régénération des écosystèmes.
• Développer des alliances écologiques régionales basées sur les principes de complémentarité, de solidarité et d’intérêt commun.

Rabat, le 8 décembre 2023
Secrétariat National

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