Édition du 16 avril 2024

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Environnement

Choix budgétaires !

Le 26 mars dernier, le ministre des Finances, M. Leitão, a présenté son budget devant l’Assemblée nationale. Pour atteindre l’équilibre budgétaire en période d’austérité, le gouvernement décrète des coupures massives en arguant que « tous doivent contribuer ». Tous ? Ou est-ce que l’industrie pétrolière serait exemptée ?

Selon un article du Devoir [1], le gouvernement vient de lancer un appel d’offres pour connaître les besoins en infrastructures de transport des hydrocarbures ; en d’autres mots, un pipeline sur l’île d’Anticosti. Cet appel d’offres pourrait coûter 125 000 $. Même en oubliant mes préoccupations environnementales, ça s’appelle mettre la charrue avant les bœufs. Avant de penser au pipeline, il faut que des études sérieuses fassent la preuve que la quantité de pétrole récupérable est rentable sur le plan purement économique. Or il n’en est rien, comme le démontre l’étude du professeur Durand[2]. Selon son calcul, les coûts de forage seraient probablement de l’ordre de 30 milliards de dollars alors qu’une analyse optimiste indique que le pétrole récupérable rapporterait peut-être 10 milliards. Sur le plan strictement économique, l’exploitation du pétrole à Anticosti est indéfendable.

Le gouvernement coupe allègrement dans les enveloppes budgétaires des ministères de la Santé et de l’Éducation, mais sa volonté de développer la filière pétrolière est tellement forte qu’il tablette les résultats de la Commission des enjeux énergétiques de 2013, qui a coûté des millions, pour en commander une autre où les intervenants sont triés sur le volet afin qu’ils ne contredisent pas sa politique. Puis, pour compléter ce « budget pompette » à la Gérard D. Laflaque, [3] il émet cet appel d’offres ; c’est aussi logique que le chasseur qui vend la peau de l’ours avant de partir pour la chasse !

Il ne faut pas oublier que par le biais d’Hydro-Québec (division gaz et pétrole), nous étions propriétaires des droits d’exploration pour les hydrocarbures situés dans les schistes de Macasty que l’on retrouve sous Anticosti. Ces droits ont été vendus au cours d’une mystérieuse transaction que certains ont qualifiée de « vol du siècle ». Puis, le gouvernement du Québec rachète ce qui nous appartenait pour 115 millions de dollars. En plus de cet appel d’offres pour les besoins en pipelines, les contribuables devront-ils également financer la construction des routes, d’un port et d’autres infrastructures ?

Cette approche consistant à demander aux contribuables de « se serrer la ceinture » pour que d’autres fassent des profits à leurs dépens se retrouve aussi dans l’industrie minière, également réglementée par « La loi sur les mines ». Présentement, la facture que les contribuables devront payer pour décontaminer des sites miniers orphelins est de l’ordre de 1,2 milliard de dollars. Si les compagnies minières avaient « contribué » en tant que bons citoyens corporatifs, serions-nous obligés de couvrir cette facture ? Si l’on suit la logique de l’austérité gouvernementale, pourquoi les personnes morales ne « contribueraient-elles pas », tout comme les personnes physiques ?

Dans le budget Bachand de 2010, une petite phrase est passée inaperçue à l’époque. Pour aider l’industrie gazière, le gouvernement Charest consentait à un congé de redevance pour une période de cinq ans. Puisque l’on sait qu’un puits fracturé a un débit non rentable bien avant l’échéance de 5 ans, cela équivalait à un don pur et simple de la ressource. Comme aucun puits n’a été mis en exploitation, cette volonté servile de notre gouvernement de donner nos ressources n’a pas pu être mise à exécution. À Anticosti, serons-nous aussi chanceux ?

La politique budgétaire doit-elle favoriser les investissements en santé et en éducation ? Ou doit-on utiliser notre argent pour payer les infrastructures qui permettront à des entreprises d’engranger les profits, puis qui se hâteront de nous refiler des sites miniers et gaziers contaminés ? C’est un choix à faire !

Gérard Montpetit
Membre CCCPEM
le 3 avril 2015

1]http://goo.gl/k350sP

2] http://rochemere.blogspot.ca/2015/02/memoire-pour-

3 Émission Et Dieu créa Laflaque, SRC, Dimanche 29 mars 2015

Gérard Montpetit

Membre du comité Non au schiste La Présentation

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