Tiré du GUIDE D’OUTILS D’ÉDUCATION POPULAIRE AUTONOME FÉMINISTE
Marche mondiale des femmes 2025
file :///C :/Users/coord/Downloads/CQMMF_Guide_EPAF_NUM.pdf
La situation internationale en 2025 : un monde en grand bouleversement dans un immense cycle de la violence.
1. Concentration de la richesse et inégalités
La mondialisation économique néolibérale a permis l’accumulation de richesses d’un cercle restreint d’individus : pour chaque dollar gagné par les 90 % les plus pauvres, les milliardaires ont gagné 1,7 million de dollars2. Ils accumulent leur fortune grâce aux actifs des marchés financiers, et profitent également d’un système fiscal qui leur
est favorable.
De plus en plus d’éléments indiquent que les entreprises contribuent à l’inflation3. Nous le voyons autant dans le prix des aliments que dans celui de l’énergie. Le droit à un logement adéquat est aussi soumis à la spéculation. Dans ce système économique donnant priorité au marché, les impacts négatifs sur la vie des populations s’en font sentir, notamment par la hausse de la pauvreté des femmes, bien que ce soient encore elles qui s’occupent le plus fréquemment de nourrir, éduquer
et soigner les membres de leur famille. Les personnes migrantes veulent se soustraire à la pauvreté, à la violence et aux bouleversements climatiques, mais sont exposées à des risques dans leur migration et dans leur intégration sur leur nouvelle terre d’accueil4.
2. Concentration du pouvoir et violences
Non seulement les milliardaires à la tête de transnationales possèdent des ressources et une influence pour façonner le cours des économies, mais ils sont en mesure d’influencer les paysages politiques en prônant une réduction du rôle de l’État. Des gouverne ments de droite et d’extrême droite sont arrivés au pouvoir dans plusieurs pays (Italie, Autriche, Suède, Argentine, États-Unis) et la tendance en vogue est de libéraliser les marchés, de s’attaquer aux programmes sociaux et de privatiser les services publics, empêchant ainsi une juste redistribution de la richesse5.
Le tout à la croissance économique domine sur la démocratie. De plus en plus, les règles démocratiques sont détournées pour imposer une vision ou un projet économique. Cela favorise les entreprises, et ce, au mépris du respect des droits et libertés des collectivités et de la population. Parfois, on outrepasse même le pouvoir judiciaire6 (désinformation, manque de transparence dans les projets en développement, manipulation des médias sociaux, corruption, etc.).
Des valeurs conservatrices sont prônées par des extrémistes et idéologues religieux, renforcées par le courant des masculinistes, qui condamnent la diversité sexuelle et de genre, et préconisent le retour des rôles traditionnels des femmes et des hommes, notamment par le contrôle de la vie et du corps des femmes. Les violences envers les femmes passent non seulement par la hausse du nombre de féminicides, mais par toutes formes de déshumanisation et d’invisibilisation des femmes, jusqu’à l’extrême comme dans le cas des femmes afghanes.
3. L’exploitation de la planète et destruction du vivant
L’accaparement des richesses passe par l’exploitation de la nature, et ces richesses sont convoitées par les principaux pays impérialistes7 (États-Unis, Chine, Russie). Des tensions, des violences politiques et des guerres sévissent partout (Moyen-Orient, Afrique, Ukraine et plusieurs pays) et impliquent souvent des acteurs non étatiques et des sociétés militaires privées. Les conflits armés renforcent le modèle patriarcal, et font augmenter la violence domestique, le viol et la traite des femmes8. Les rapports colonialistes9 persistent avec l’appropriation des territoires des pays du Sud et ceux des populations autochtones.
La production d’énergie avec les combustibles fossiles et certains secteurs d’activités comme le transport et la construction ont fait augmenter le taux d’émission de gaz à effet de serre, ce qui contribue entre autres aux dérèglements climatiques actuels.10 De plus, la déforestation pour libérer des espaces agricoles modifie les habitats des animaux, mettant ceux-ci en péril. Les conséquences de ces changements climatiques alourdissent davantage la charge mentale des femmes liée à l’organisation de la famille pour les soins qu’elles prodiguent à leurs proches dans les cas de catastrophes naturelles
ou d’épidémies11, et peuvent générer une surcharge dans leur milieu de travail.
Même si les études scientifiques crient au danger pour l’avenir de la vie humaine, le mode de développement économique capitaliste12 prend toujours de l’expansion en poursuivant la marchandisation de la nature, incluant les êtres humains qui y habitent13.
4. Soulèvements et luttes des femmes
Ce portrait mondial est à la fois alarmant et redoutable, mais il nous exige d’avancer pour imposer notre volonté et exprimer notre résistance. Soyons réalistes : la lutte n’est pas terminée et sera longue et difficile. Les femmes ont déjà réalisé de grandes avancées après de longues luttes : le droit de voter et de se présenter aux élections, le droit de travailler et de faire une carrière dans plusieurs domaines autrefois interdits aux femmes, le droit de décider de sa maternité, le droit de décider de sa sexualité, le droit de prendre des congés parentaux, et biens d’autres encore. En effet, ces progrès ont été possibles grâce aux mobilisations, et c’est pour cette raison qu’il est essentiel de les maintenir. Cependant, il est important de
nuancer que ces avancées n’ont pas profité à toutes les femmes de manière égale. Nous devons continuer de lutter pour que ces droits soient étendus à TOUTES les femmes, sans exception.
Le mouvement des femmes a fait tomber des barrières immenses pour l’obtention de lois forçant l’égalité des droits pour toutes et tous – même si d’immenses pas restent à faire. Au cours des dernières années, une multitude de mouvements ont pris forme : #moiaussi pour dénoncer les violences sexuelles faites aux femmes ; celui contre les féminicides ; « Femme, vie, liberté » en Iran qui aspire à un changement pour éliminer la discrimination et la violence fondées sur le genre ; les luttes de plusieurs communautés contre l’exploitation des ressources naturelles et énergétiques qui dévaste leurs territoires ; les mobilisations des travailleuses en milieux majoritairement féminins pour la défense des réseaux publics, accessibles et de qualité de l’éducation et de la santé et services sociaux, etc.
Les protestations contre les inégalités, le racisme, les violences envers les femmes ou contre la destruction de l’environnement ne sont pas épargnées par la répression policière ou militaire, ni par l’augmentation de la surveillance et de la criminalisation de ces mouvements sociaux14.
C’est pourquoi les actions de la CQMMF en 2025, inspirées par les valeurs de la Charte mondiale des femmes pour l’humanité, sont si importantes et demeurent pertinentes encore aujourd’hui !
Travaillons à unir nos forces, à rassembler les différentes générations et à regrouper les luttes multiples afin de sortir les femmes et les familles de la pauvreté et leur donner la possibilité de vivre et travailler dans un milieu exempt de violence. Assurons-nous que nos choix de vie respectent l’environnement, notre « bien vivre » ; Sortons de nos chemins et revendications spécifiques pour faire en sorte de créer un mouvement de résistance uni pour le maintien de nos acquis si chèrement gagnés, et progresser dans nos trois grandes orientations.
Avec cette force collective qui se déploie dans toutes les régions du Québec, chacune de nos actions est une pierre pour ériger notre édifice de la résistance en 2025. Rassemblons-nous le 18 octobre prochain et démontrons la force de notre mouvement et de notre unité pour construire et défendre nos choix de société pour la durabilité de la vie.
Notre colère est notre moteur pour résister, pour dénoncer la privatisation de notre société et pour exiger le respect de nos droits collectifs. Ce slogan résume fort bien notre engagement et notre volonté d’agir :
Encore en marche pour transformer le monde !
Notes
2.OXFAM International. « Chapitre 1 : La loi du plus riche ou l’explosion des inégalités » dans La loi du plus riche :
pourquoi et comment taxer les plus riches pour lutter contre les inégalités, Royaume-Uni, OXFAM International,
janvier 2023, p.17. https://oxfamilibrary.openrepository.com/bitstream/handle/10546/621477/bp-survival-of
the-richest-160123-fr.pdf
3.HARVEY, Pierre-Antoine. Le rôle potentiel des profits dans l’inflation élevée se confirme, Institut de recherche
et d’informations socioéconomiques, 1er septembre 2022. https://iris-recherche.qc.ca/blogue/economie-et
capitalisme/le-role-potentiel-des-profits-dans-linflation-elevee-se-confirme/
4.United Nations High Commissioner for Refugees. Global Trends Forced Displacement, Édition 2020,
Denmark, United Nations High Commissioner for Refugees, 72p. https://www.unhcr.org/statistics/
unhcrstats/60b638e37/global-trends-forced-displacement-2020.html
5.DIAZ MAHEUX, Alexandre. « Pourquoi nos démocraties sont-elles à risque ? », Le Devoir, 12 novembre 2024.
https://www.ledevoir.com/opinion/idees/823485/idees-pourquoi-democraties-sont-elles-risque
6.Mouvement d’éducation populaire et d’action communautaire du Québec. Pour en finir avec les inégalités,
sortons du capitalisme, Mouvement d’éducation populaire et d’action communautaire du Québec, mai
2024. https://mepacq.qc.ca/wp-content/uploads/2024/05/Pour-en-finir-avec-les-inegalites-sortons-du
capitalisme.pdf
7. Impérialisme : caractérise toute politique de conquête qui vise à construire un empire.
8.Amnesty international. Les crimes commis contre les femmes lors des conflits armés, Londres, 8 décembre
2004, 83 p. https://www.amnesty.org/fr/wp-content/uploads/sites/8/2021/06/act770752004fr.pdf
9.Voir Annexe II-b du présent document.
10.Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat. Réchauffement planétaire de 1,5 °C : rapport
spécial du GIEC sur les conséquences d’un réchauffement planétaire de 1,5 °C par rapport aux niveaux
préindustriels et les trajectoires associées d’émissions mondiales de gaz à effet de serre, dans le contexte
du renforcement de la parade mondiale au changement climatique, du développement durable et de la lutte
contre la pauvreté, 2019, 94 p. https://www.ipcc.ch/site/assets/uploads/sites/2/2019/09/SR15_Summary_
Volume_french.pdf
11.COUTURIER, Eve-Lyne et Julia POSCA. L’impact des crises sur les femmes : Inégales dans la tourmente,
Montréal, Institut de recherche et d’informations socioéconomiques, mars 2021, 68 p. https://iris-recherche.
qc.ca/wp-content/uploads/2021/03/Femmes_et_crises_WEB1.pdf
12.Voir Annexe II-b du présent document.
13.Programme des Nations Unies pour le développement. Rapport sur le développement humain 2020 : La
prochaine frontière : Le développement humain et l’Anthropocène, New York, Programme des Nations Unies
pour le développement, 2020, 445 p. https://hdr.undp.org/system/files/documents/hdr2020fr.pdf
14.DORAN, Marie-Christine. « Criminalisation », Antropen, 19 décembre 2020, 7 p. https://revues.ulaval.ca/ojs/
index.php/anthropen/article/view/40949/218
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