Édition du 14 mai 2024

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Europe

Europe : la fausse victoire de François Hollande

Lors d’un mini-sommet européen à Rome, vendredi 22 juin, la France, l’Allemagne, l’Italie et l’Espagne se sont accordés sur le principe d’un plan de croissance commun représentant 1% du PIB européen. Un écran de fumée selon Laurent Pinsolle, notre blogueur associé, qui souligne le caractère illusoire de l’annonce.

Laurent Pinsolle - Blogueur associé à marianne.fr

On comprend un peu mieux pourquoi la France a cédé sur les euro-obligations (et la réforme de la BCE et le juste échange). Angela Merkel a donné son accord pour un plan de croissance qui permet à François Hollande d’avoir une victoire diplomatique, illusoire dans les détails.

Un plan principalement cosmétique

En affichant ce plan à 120-130 milliards d’euros, les dirigeants européens donnent le change, à condition de ne pas trop regarder dans les détails. François Hollande peut fanfaronner : « Qui aurait pu dire, il y a encore quelques semaines, qu’elle aurait été à ce point à l’ordre du jour du conseil européen ? » Mais le nouveau président de la République n’a pas tellement infléchi l’agenda européen. Il a, par ailleurs, cédé sur les euro-obligations, le statut de la BCE ou le juste échange…

Ce plan semble bien léger par rapport aux plans de soutien aux banques ou aux créanciers des pays en difficulé. Il a déjà fallu deux plans d’une taille équivalente pour sauver les créditeurs de la Grèce : il sera difficile de faire croire qu’un tel montant permettra de relancer l’économie de l’Union européenne toute entière. Un pourcent du PIB européen, ce sera léger pour relancer des économies tombées dans la récession, surtout si cette somme n’est pas dépensée sur une année.

La description du plan donne l’impression qu’il est un assemblage de brics et de brocs. Il mêle des fonds européens non dépensés (55 Mds), une augmentation des moyens de la Banque européenne d’investissement (ce qui permet d’utiliser l’effet de levier, un euro de capital permettant d’en emprunter dix fois plus…) et des project bonds communs pour financer des infrastructures. Ce qui signifie que les dépenses s’étaleront sur une assez longue période.

Outre le fait que ce plan de relance est franchement anecdotique, les conflits continuent à miner les dirigeants européens et l’Allemagne conserve une ligne très rigoriste. Après les échanges salés des dernières semaines, le sommet de vendredi a également été l’occasion de nouvelles passes d’armes entre les quatre participants. Angela Merkel a dit à Mariano Rajoy que « responsabilité et contrôle doivent aller de pair » au sujet des différents plans européens.

Elle a soutenu « qu’il faut de la solidarité et de la compétitivité », et que « la croissance et des finances solides sont les deux faces d’une même pièce », ce qui est démenti par les études du FMI, refroidissant les demandes de solidarité des autres dirigeants. La chancelière a défendu « plus de mécanismes de contrôle » et soutient que la recapitalisation des banques par les fonds de secours « viole des traités ». Elle rejette toujours la monétisation des dettes publiques par la BCE.

Bref, même si le chef de la diplomatie allemande assure « qu’il faut accélérer l’intégration de l’Union européenne », comme Angela Merkel, il ne faut pas oublier que quand l’Allemagne parle d’intégration, elle parle de contrôle renforcé des fonds communs alors que les autres parlent de transferts venus d’Allemagne, ce qu’elle refuse complètement. Le dialogue de sourd continue. Et cela est compréhensible devant les montants envisagés …

Angela Merkel, c’est une main de fer dans un gant de velours. Si elle sait donner quelques gages aux autres dirigeants européens pour leur permettre de donner l’illusion d’avoir prise sur les évènements, dans la réalité, c’est bien elle qui reste à la barre, pour le meilleur, et surtout pour le pire.

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