Édition du 26 mars 2024

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Le 4 septembre, une poignée de votes ont fait la différence entre un gouvernement péquiste majoritaire ou un gouvernement libéral minoritaire

Ce n’est que par 7 571 votes distribués dans 12 circonscriptions où les résultats ont été serrés que s’est joué le sort des élections du 4 septembre dernier. C’est en effet ce chiffre, qui ne représente que douze centièmes de 1% des 4 362 688 votes valides enregistrés dans l’ensemble du Québec, que s’est décidé l’élection d’un gouvernement péquiste majoritaire ou, par contre, un gouvernement libéral minoritaire qui aurait maintenu le PQ dans l’opposition.

Une analyse des résultats de ces élections permet en effet de constater que le Parti québécois devait récolter 5 784 votes de plus pour être victorieux dans les 9 circonscriptions stratégiques qui lui manquent pour former un gouvernement majoritaire plutôt que minoritaire, soit passer de 54 à 63 députés. Par contre, il ne manquait que 3 209 votes au Parti libéral pour former un gouvernement minoritaire, soit passer de 50 à 53 députés, et ainsi maintenir le PQ dans l’opposition avec 51 députés.

Les neuf circonscriptions stratégiques où le PQ a subi la défaite avec les marges les plus serrées sont La Prairie, Papineau, Richmond, Verdun, Jean-Lesage, St-Jérôme, Trois-Rivières, L’Assomption et Mégantic. Il a perdu 5 de ces dernières aux mains des libéraux et 4 aux mains de la Coalition avenir Québec(CAQ) dont L’Assomption et Saint-Jérôme où François Legault et Jacques Duchesneau ont été élus. Les 5 784 votes qui font la différence ne représentent qu’un treizième de 1% des 4 362 688 votes valides qui ont été enregistrés dans l’ensemble du Québec lors du scrutin.

Quant aux 3 204 votes qui manquent aux libéraux pour supplanter le PQ avec 53 sièges contre 51 et former ainsi un gouvernement minoritaires ils se trouvent dans les circonscriptions de St-François, Abitibi-Est et Laval-des-Rapides. Ces derniers ne représentent que 73 centièmes de 1% du vote dans l’ensemble du Québec.

Si l’on remonte dans l’histoire, les élections dont les résultats ont été les plus serrés en termes de votes dits stratégiques ont été celles de juin 1960. Ainsi, la Révolution tranquille a pu prendre son envol grâce à seulement 96 votes stratégiques. On se rappelle que lors de ce scrutin - qui a permis au Parti libéral de Jean Lesage de chasser l’Union nationale du pouvoir après un règne ininterrompu de 16 ans - la majorité des vainqueurs n’a été que de 4 sièges même si leur gouvernement a été majoritaire à cause de l’absence de tiers partis importants. Mais ce qu’on n’a pas souligné, c’est que la différence de votes ayant permis aux libéraux de remporter ces 4 sièges n’a été que de 96 votes stratégiques dont une majorité de seulement 4 voix aux Îles-de-la-Madeleine.

Par ailleurs, il faut noter que, le 4 septembre, le scrutin majoritaire a encore déformé de la volonté populaire exprimée par les électeurs dans l’urne en produisant des distorsions importantes entre cette dernière et la représentation parlementaire des partis, comme l’a d’ailleurs souligné le Mouvement pour une démocratie nouvelle .C’est ainsi que le Parti québécois et le Parti libéral ont été surreprésentés. Ainsi le PQ s’est vu attribuer 43% des sièges alors qu’il n’a recueilli que 31,9% des votes et que le Parti libéral a obtenu 40% des sièges pour 31.2% des voix. Par contre, la CAQ est en déficit de 12 points et Québec solidaire avec ses deux élus ne s’est vu attribuer que 1,6% des sièges alors qu’il a récolté 6% d’appui. Option nationale n’a droit à aucune représentation même s’il a recueilli 1,9% des suffrages. Au contraire, un mode de scrutin proportionnel aurait fait en sorte que la volonté populaire ne soit pas déformée ainsi et que la représentation de chaque parti à l’Assemblée nationale se rapproche beaucoup plus de son pourcentage d’appuis électoraux

Paul Cliche1, Montréal,
18 octobre 2012

Paul Cliche

Auteur du livre Pour réduire le déficit démocratique : le SCRUTIN PROPORTIONNEL et membre fondateur du Mouvement pour une démocratie nouvelle.

Il a été responsable du dossier de la réforme des institutions démocratiques à l’Union des forces progressistes (UFP).

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