Édition du 10 décembre 2024

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Afrique

Le Cameroun sauve sa forêt grâce à ses tortues marines

C’est un projet osé aux allures d’un écotourisme expérimenté dans des villages du Sud du Cameroun. L’objectif est de lutter contre l’exploitation forestière tout en assurant le développement économique des communautés villageoises

L’expérience atypique vient de la commune de Campo frontalière à la Guinée équatoriale et le Gabon. La municipalité à la façade côtière est frappée dans sa partie forestière, par une intense activité illégale de coupe de bois. Chaque année, des milliers de mètres cubes de bois sortent de la forêt tropicale en billes, en équarris et en planches pour rallier Yaoundé, puis Douala, où elles seront soit vendues, soit embarquées pour l’Europe ou l’Asie. A la manœuvre de cette activité qui fait perdre chaque année à l’Etat du Cameroun, selon l’ANIF, l’Agence nationale de l’investigation financière, environ 33 milliards de fcfa, des entreprises étrangères, mais aussi des locaux. A cela s’ajoute le fait que cette activité illégale, ne bénéficie pas aux communautés villageoises. Mais depuis quelques années, la lutte contre ce phénomène porte peu à peu, mais timidement ses fruits. Grâce au concept d’écotourisme des tortues marines, les villageois reconnaissent que l’exploitation forestière illégale a baissé dans la contré.

*Ebodjè, le village des tortues*

Ebodjè est un petit village de plus de 1000 habitants, arrosé par les eaux de l’atlantique. Chaque année entre le mois de mars et celui de septembre consacrés la période de ponte des tortues, la petite bourgade enregistre un grand nombre de touristes. *« L’écotourisme des tortues marines a changé Ebodjè », *confie Oscar, un habitant du coin. *« Dans ce village, il y a plusieurs jeunes qui ont fini leur cycle secondaire à l’école grâce au système de parrainage. Un pécheur qui attrape une tortue, la remet au touriste. Celui-ci, la soigne puis la relâche dans la mer. Et en contrepartie, le touriste prend en charge la scolarité d’un enfant de la famille de ce pécheur. Ce système de parrainage d’enfant a permis subtilement de convertir plusieurs dans nous qui exploitions le bois illégalement à nos risques et péril, de sortir du ‘‘maquis’’ et trouver autre chose à faire »,* explique l’ancien exploitant.

A Ebodjè, il a fallu plusieurs années de sensibilisation pour apprendre aux villageois à protéger ce mammifère aquatique, jadis consommé comme nourriture. Le projet initié en 1998 par une fondation néerlandaise est assuré aujourd’hui par l’ong « Tube Awu ». Selon Albert Ndomi Yavoua, l’un des conservateurs de la case des tortues d’ebodjè, *«  tous les touristes qui arrivent à Ebodjè viennent pour une seule raison, admirer les tortues. Le village s’est donc saisi de la brèche, pour capitaliser cette opportunité, afin de sortir les jeunes de la forêt, tout en luttant contre la pauvreté, à travers la petite économie bâtie autour de la tortue »*

*Une communauté organisée*

La communauté d’Ebodjè est organisée autour de deux associations écotouristiques locales appelées : Ebotour et Tubu Awu. C’est en réalité elles qui gèrent les activités en accord avec les populations qu’elles consultent sur toutes les décisions relatives au fonctionnement du projet autour de la tortue. Une partie des revenus issus de l’écotourisme est versée directement aux villageois, et l’autre sert à financer des projets communautaires.

Un peu partout au village, les familles ont aménagée des chambres pour visiteurs, des petits restaurants ont vu le jour et proposent des mets locaux. Tout autour, d’autres activités telles que des excursions en forêt avec des guides, des balades dans les chutes de la lobé, sont autant d’activités, qui occupent aujourd’hui d’anciens exploitants forestiers.

‘‘L’écotourisme peut motiver les collectivités locales à maintenir et
protéger les forêts et la faune’’

Selon le Partenariat de collaboration sur les forêts (PCF), le tourisme a montré sa résilience dans le contexte actuel de ralentissement économique mondial. Globalement, l’industrie du tourisme a généré plus de 1000 milliards de dollars en 2010, d’après l’Organisation mondiale du tourisme. Et la part du tourisme dans les pays en développement était en hausse constante, passant de 31% en 1990 à 47% en 2010.

L’écotourisme, caractérisé par le concept de voyage responsable dans les espaces naturels qui favorisent la conservation de l’environnement, est l’un des segments les plus dynamiques du tourisme mondial, et croît à un rythme de plus de 20% par année - deux à trois fois plus vite que l’industrie du tourisme dans son ensemble.

D’après la FAO, les avantages de l’écotourisme pour les entreprises locales sont considérablement plus élevés que ceux du tourisme de masse.

L’écotourisme peut motiver les collectivités locales à maintenir et protéger les forêts et la faune. Lorsque la population locale tire des revenus et des emplois de l’écotourisme, elle est beaucoup moins susceptible de détruire les ressources naturelles à travers une exploitation non durable

Jean Charles Biyo’o Ella/Rainforest journalism Fund/Pulitzer Center

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