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Europe

Les salariés à l’épreuve d’un an de télétravail

Depuis mars 2020, de nombreux Français ont dû travailler depuis chez eux. Ils sont de moins en moins nombreux : cette révolution, et les risques qu’elle engendre, reflètent les rapports de force qui traversent le monde du travail.

28 mars 2021 | tiré de mediapart.fr
https://www.mediapart.fr/journal/economie/280321/les-salaries-l-epreuve-d-un-de-teletravail?page_article=2

Un an de télétravail. Par intermittence ou depuis 12 mois non stop, quelques jours par semaine ou sept jours sur sept, contraint ou librement décidé. Depuis le premier confinement lié à la pandémie de Covid, du 17 mars au 11 mai 2020, de nombreux salariés français travaillent loin de leur bureau. Pas tous, tant s’en faut. « À peu près un emploi sur trois » seulement peut s’effectuer à distance, selon l’évaluation il y a un an de Muriel Pénicaud, alors ministre du travail : les ouvriers, ou les « premiers de corvée » des commerces et du médico-social, ne peuvent pas délocaliser leur activité à la maison.

Mais même parmi ceux qui peuvent le faire, ils ne sont aujourd’hui pas la majorité à se plier à l’exercice, selon les tout derniers chiffres de la Dares, l’institut statistique du ministère. En février, seulement un peu plus d’un quart des salariés ont été au moins un jour en télétravail. Et à peine 8 % de l’ensemble des salariés l’ont été tous les jours – un chiffre en baisse constante depuis le mois de novembre.

C’est cette tendance que l’exécutif cherche à casser, en enjoignant aux entreprises et à leurs salariés de se convertir de nouveau au travail depuis chez soi – lors du premier confinement, seuls 25 % des salariés avaient travaillé en étant présents dans leur entreprise. « Je le demande instamment à tous les employeurs, à toutes les entreprises, à toutes les personnes qui peuvent faire du télétravail : il faut au maximum s’y mettre, puisque notre objectif, c’est de réduire les contacts, les interactions », a ainsi exhorté Emmanuel Macron mardi 23 mars.

Juste avant lui, le premier ministre Jean Castex avait fait de même, rappelant qu’une étude de l’institut Pasteur chiffrait à 29 % les contaminations ayant lieu au travail… alors que lesderniers chiffres de l’institut sont en fait de 15 %. La possibilité d’une journée en présentiel est toujours présentée par le gouvernement comme une possibilité, mais ce dernier pousse pour que le télétravail redevienne massif. Le 22 mars, un sérieux tour de vis a d’ailleurs été imposé sur les conditions de restauration collective, faisant passer de 4 à 8 m2 l’espace nécessaire pour chaque mangeur.

Au grand dam des organisations patronales, Jean Castex a aussi annoncé que dans les 16 départements appliquant le simili-confinement décidé par l’exécutif, les entreprises doivent définir « un plan d’action pour les prochaines semaines, pour réduire au maximum le temps de présence sur site des salariés », à présenter à l’Inspection du travail en cas de contrôle.

Autant de preuves qu’on est loin d’une adhésion sans réserve au télétravail. Et il faut s’attacher à comprendre les raisons de cette réticence, au moins envers le télétravail à temps plein, plus nette de mois en mois. Car ces réserves « reflètent des résistances, et pas toujours pour de mauvaises raisons », analyse Amandine Brugière, responsable de département à l’Agence nationale pour l’amélioration des conditions de travail (Anact), un organisme public qui accompagne les entreprises souhaitant améliorer leur organisation interne.

Des hésitations qui permettent de souligner en creux à quel point l’irruption du télétravail a bouleversé les codes, les habitudes ou les travers professionnels, tout en mettant crûment en évidence les rapports de force qui traversent le monde du travail français.

« Depuis un an, nous assistons à une expérimentation grandeur nature sur le télétravail. Avant le premier confinement, cette pratique correspondait plutôt à une recherche de conciliation entre sa vie professionnelle et personnelle, rappelle Amandine Brugière. Aujourd’hui, dans beaucoup d’entreprises, on est sur autre chose, une organisation véritablement hybride du travail. »

En 2019, seuls environ 3 % des salariés pratiquaient officiellement le télétravail au moins une fois par semaine, avant l’arrivée du Covid-19, même si sans doute jusqu’à un quart des travailleurs, salariés ou non, y goûtaient régulièrement. En un an, cette pratique, jusque-là généralement réservée aux cadres et aux professions intellectuelles, s’est très largement élargie en direction des professions intermédiaires et des employés du secteur tertiaire, sans oublier des pans entiers de la fonction publique.

Rien n′oblige une entreprise à faire télétravailler ses salariés

Les choses ne se passent pas sans frictions. Du côté des employeurs, d’abord. Depuis le début du deuxième confinement, du 30 octobre au 15 décembre, les exemples sont légion d’entreprises refusant tout télétravail à leurs salariés, comme nous l’avions documenté ici. Le compte instagram @BalanceTaStartUp rassemble de nouveaux exemples, récents et éloquents, sur le non-respect des règles rappelées par le gouvernement.

« En un an, l’évolution a été plutôt positive dans les grandes entreprises, là où il y a des syndicats. La CGT a d’ailleurs signé récemment plusieurs accords concernant le télétravail, indique Sophie Binet, co-secrétaire de l’Ugict, syndicat des cadres de la CGT. Ailleurs, en revanche, cela peut être la catastrophe : je viens d’être alertée sur la situation d’une petite boîte d’ingénieurs, où ils travaillent à 50 dans un open space et où la cantine est trop petite. Toute journée de télétravail leur a été refusée.  »

« Il y a eu une vraie bascule avec le deuxième confinement en novembre : l’activité économique a pris le pas sur les éléments sanitaires, confirme Catherine Pinchaut, secrétaire nationale à la CFDT. Les entreprises ont considéré qu’elles avaient les moyens de protéger les salariés, et on est revenus à la bonne vieille culture du présentiel. Il y a de nombreux salariés qui étaient en télétravail en mars, et qui ne le sont pas depuis novembre. »

Une situation qui a incité Gabriel Attal, porte-parole du gouvernement, à menacer le 21 mars les entreprises de contrôles accrus de l’Inspection du travail. Non sans « faire de la pédagogie et accompagner », fidèle à la ligne du gouvernement depuis le mois de novembre : « Quand il y a manifestement un refus de laisser des personnes télétravailler alors qu’elles le peuvent, dans ces cas-là, oui, il peut y avoir des sanctions », a dit le porte-parole, assurant que « plusieurs dizaines de mises en demeure » avaient été faites ces dernières semaines.

Plusieurs dizaines de mises en demeure ? Ce chiffre est en vérité d’une grande faiblesse. Et ce, pour une raison simple : légalement, il n’existe aucune possibilité de fermer rapidement une entreprise qui ne met pas ses salariés en télétravail alors qu’elle le pourrait.

Les inspecteurs de travail ont le pouvoir de fermer des entreprises immédiatement, mais sur un champ très restreint : uniquement en cas de risque de chute de hauteurs, de risque électrique et d’exposition à l’amiante. Pour le reste, ils se débattent depuis 12 mois avec les injonctions contradictoires du gouvernement, tout en étant en sous-effectifs chroniques : 16 % des postes d’agents de contrôle sont vacants.

Lorsque le gouvernement annonce, comme ce jeudi 25 mars, avoir demandé aux agents de contrôle d’intensifier les contrôles, il est dans l’affichage. « Concernant le risque d’exposition au Covid ou le respect des règles demandées par le gouvernement, le cadre juridique n’a pas changé : on ne peut toujours rien imposer, résume Simon Picou, secrétaire national de la CGT du ministère du travail. Il est possible de faire un rapport à nos supérieurs pour les inciter à rédiger une mise en demeure ou bien à lancer une procédure judiciaire en référé. Mais ces deux procédures sont complexes et chronophages, et elles restent rares. »
« Les apéritifs virtuels, tout le monde en a ras-le-bol !  »

Ainsi s’explique le flou artistique qui prévaut : en vérité, chacun s’arrange comme il le peut ou le veut. Dans les entreprises, mais aussi dans la fonction publique. Le 21 mars, la ministre de la fonction publique Amélie de Montchalin a demandé aux administrations sur tout le territoire de se plier elles aussi à la règle des quatre jours télétravaillés par semaine en soulignant que seulement 54,5 % des agents de l’État avaient travaillé à domicile au moins un jour entre le 8 et le 12 mars.

« En fait, nous avons énormément de mal à avoir des statistiques précises : qui est en télétravail ? Pour effectuer quelles tâches ? On ne le sait pas vraiment, regrette Didier Bourgoin, secrétaire national à la FSU, grand syndicat de la fonction publique. Dans les grands ministères, des consignes très strictes sont passées, dans certaines grandes collectivités territoriales aussi, mais ailleurs, cela dépend beaucoup… »

Il est vrai que pour beaucoup d’agents de l’État, les conditions ne sont toujours pas réunies pour pouvoir travailler sereinement à domicile. « Il ne suffit pas de dire aux gens de rentrer travailler chez eux pour que ça ait lieu, souligne le syndicaliste. Mais après le premier confinement, il n’y a pas eu de réflexion, de maîtrise des événements. On continue à agir en réaction face à eux. »

Didier Bourgoin propose un déroulé de l’année écoulée pour nombre de ses collègues, mais qui vaut aussi pour un grand nombre de Français : « La première phase, cela a été la sidération. Tout le monde chez soi, mais sans aucune vérification sur la manière dont cela allait se passer. Les collègues ont-ils un bureau pour y travailler décemment ? On ne sait pas. Ont-ils une imprimante personnelle pour imprimer les documents nécessaires ? On ne sait pas. »

La « seconde phase », c’est celle où les travailleurs « ont été satisfaits, pendant quatre, cinq ou six mois : moins de transports, pas besoin de se déplacer pour des réunions peu utiles ». Un sentiment de confort que relève également Marianne Le Gagneur. Cette sociologue travaille à l’EHESS sur une thèse consacrée au télétravail des cadres d’une entreprise du monde bancaire, et a participé pendant le premier confinement à un travail collectif d’analyse précise de la manière dont 18 familles ont vécu cette expérience d’assignation forcée à domicile.

« Certaines personnes, qui étaient assez réfractaires au télétravail, ont remis en cause cette opinion pendant le premier confinement, en y trouvant une forme de confort », note-t-elle Quant aux managers, « ils ont constaté qu’ils pouvaient accorder une plus grande confiance aux salariés, qui remplissaient leurs missions, même à distance ». « La normalisation du télétravail peut être vécue de façon positive pour cette disparition du soupçon », estime Marianne Le Gagneur.

Mais cela fait déjà plusieurs semaines que la « troisième phase » est entamée, selon Didier Bourgoin : « De plus en plus, les difficultés apparaissent, les questions se posent, l’horizon est bouché et les collègues le vivent de plus en plus mal. Ils nous disent leur souffrance. »

Un constat qu’on retrouve dans toutes les bouches. « Les risques psychosociaux s’installent de plus en plus, ça va nous exploser à la figure, s’alarme Sophie Binet, de l’Ugict-CGT. Il faut prendre des mesures collectives : un management adapté, un vrai droit à la déconnexion. »

La situation se durcit, convient, elle aussi, Isabelle Barth, professeure en sciences de gestion à l’université de Strasbourg, autrice d’une récente tribune dans Le Monde où elle s’inquiète des conséquences délétères du confinement pour les jeunes salariés, qui s’intègrent difficilement dans les entreprises qu’ils viennent de rejoindre.

« Les entreprises me demandent beaucoup d’interventions sur la façon dont elles peuvent maintenir la cohésion de leurs équipes en temps de télétravail, mais aussi sur comment manager dans l’incertitude, explique-t-elle. Il y a un an, nous nous étions lancés dans quelque chose de très difficile, mais avec un cap et une issue que l’on pouvait anticiper. Aujourd’hui, tout s’effiloche, et cela pèse. Les nerfs sont à vif et les clés qui ont marché un temps ne fonctionnent plus : les apéritifs virtuels pour maintenir un esprit d’équipe, tout le monde en a ras-le-bol ! »

Isabelle Barth met en garde contre le « syndrome de la grotte » : « Des salariés se demandent pourquoi se déplacer au bureau, à quoi bon, alors que tout peut se faire en visioconférence. Le Covid devient un prétexte pour ne pas aller au travail, qui ne vous rend plus ce que vous en attendez. »

Autre risque parfaitement identifié aujourd’hui : l’intensification du travail et la difficulté à se déconnecter. Dès mai 2020, une enquête de l’Ugict-CGT, réalisée avec la Dares auprès de 34 000 salariés, soulignait que « près de 80 % des télétravailleurs » ne disposaient pas d’un droit à la déconnexion, et que « 40 % des encadrants » déploraient une hausse de leur charge de travail. Sur ce point, « le travail à distance renforce la responsabilité individuelle, là où le collectif est habituellement protecteur, en exerçant une surveillance bienveillante », affirme Amandine Brugière de l’Anact.

« Une capillarité s’installe entre le lieu privé et le lieu du travail. Il y a une difficulté supplémentaire à pouvoir se sortir du travail : quand je suis au bureau, je suis… chez moi », rappelle Didier Bourgoin, de la FSU.

La charge des femmes

À cette charge professionnelle accrue s’ajoute bien souvent pour les femmes celle de la gestion domestique. C’est ce que confirment nombre de témoignages recueillis il y a quelques jours par le Club de Mediapart. Sur toute l’échelle sociale, partout en France, les femmes racontent l’ampleur que prend le travail domestique en temps de travail à la maison. Elles assurent toujours le gros des travaux ménagers, des repas, ou l’école à la maison lorsque les établissements scolaires ou les classes sont fermés. Et ce même alors que le télétravail est une revendication récurrente des femmes, à la recherche de souplesse dans leur emploi du temps pour cette raison même.

« Le télétravail tel qu’il s’entendait avant le confinement était surtout une question de confort personnel, avec une organisation d’un rituel : “Je suis à domicile, comment optimiser ma journée professionnelle pour que je sois aussi utile dans mon cadre domestique.” Mais ce travail à domicile avait lieu alors que les autres membres de la famille étaient absents », observe la sociologue Marianne Le Gagneur

Mais depuis un an, le travail «  a fait irruption dans la vie familiale », ce qui occasionne « des négociations entre conjoints sur la place qu’il peut prendre : sur quelles plages horaires, mais aussi dans quels lieux le travail peut-il se faire ? » Et il s’avère que la répartition est régulièrement « jugée non équitable », très largement au détriment des femmes : « Elles ont par exemple plus tendance à travailler au beau milieu de pièces de vie, en surveillant les enfants. »

 Les directions ont la tête sous l’eau, ces sujets ne sont pas prioritaires »

Comment éviter ces écueils ? La question est complexe, et les réponses sont loin d’être évidentes.

« Lorsque nous accompagnons les PME-TPE sur ce thème, notre message principal est qu’il ne s’agit pas de transposer un bureau dans un autre bureau. C’est bien plus complexe, d’autant qu’il n’y a pas de recette duplicable d’une entreprise à une autre, insiste Amandine Brugière, à l’Anact. Il faut que le collectif prenne le temps de faire une analyse qui touche à toute l’organisation du travail, l’expérimente pour établir ce qui est acceptable et efficace : quelle activité est faisable à domicile ou dans un lieu tiers, avec quels outils et à quel moment ? »

Mais de telles réflexions prennent énormément de temps. À un moment où cette denrée manque cruellement. « Les directions ont la tête sous l’eau, ces sujets ne sont pas du tout prioritaires », constate pour la CGT Sophie Binet. Et ce, alors que les transformations à l’œuvre actuellement risquent de s’installer durablement. « Ce qui se passe aujourd’hui laissera des traces profondes, il n’y aura pas de retour à la normale », alerte la syndicaliste, qui craint carrément « une stratégie visant à ubériser le salariat de l’intérieur, en imposant de nouvelles normes dégradées ».

Nul besoin de partager cette inquiétude pour constater que le monde du travail ne sortira pas de cette interminable séquence exactement comme il l’avait démarrée. Exemple le plus éclatant : la généralisation d’accords new look sur le télétravail, prenant en compte les enseignements et les acquis de ces derniers mois. Un accord national a aussi été signé en novembre par les organisations patronales et les syndicats – hormis la CGT –, remettant le sujet au goût du jour, même s’il ne crée pas de droits nouveaux.

Les signatures sont en cours dans des centaines d’entreprises. Par exemple à la Cnav, caisse de retraite des salariés, qui emploie elle-même des salariés du privé. À la Cnav Île-de-France, ils sont 3 600, et le 17 mars 2020, 90 % d’entre eux ont été priés de travailler chez eux, du jour au lendemain. L’équipement informatique s’est fait petit à petit, mais de nombreux salariés ont travaillé sur leur ordinateur personnel jusqu’à l’automne 2020. Depuis, les salariés ne sont pas revenus au bureau plus de deux jours par semaine – pour les plus chanceux.

Une situation qui a fortement influé sur l’élaboration du nouvel accord sur le télétravail, qui devrait être signé dans les toutes prochaines semaines. « Avec notre précédent accord, datant de 2017, seuls 18 % des salariés avaient accès au télétravail, car il fallait postuler et prouver qu’on bénéficiait d’une “autonomie technique”, avec un local à disposition chez soi, et d’une “autonomie professionnelle” », détaille Grégory Thomas, le délégué syndical central CFTC de la Cnav Île-de-France.

Les managers bénéficiaient pour leur part d’une « souplesse organisationnelle », leur accordant 27 jours par an pour travailler au calme chez eux ou dans des « télécentres » décentralisés. La frilosité de la direction face à ce mode d’organisation a disparu : dès cet été, avec le nouvel accord, « ce seront désormais 85 % des salariés [qui] auront accès au télétravail, deux jours par semaine, sur des jours fixes ou sur une moyenne annuelle, et sur simple demande », indique Grégory Thomas.

Chez PSA, on attend encore la révolution annoncée

Une entreprise avait claironné qu’elle serait à l’avant-garde de cette révolution par le télétravail : PSA. Le 6 mai dernier, son directeur des ressources humaines (DRH) Xavier Chéreau a annoncé que le constructeur automobile voulait « faire du télétravail la référence pour les activités qui ne sont pas directement liées à la production ». 40 000 salariés dans le monde sont concernés, et 18 000 en France. Tous sont censés travailler 70 % de leur temps à distance. La presse embraye et relaye largement cette annonce.

Dix mois plus tard, la situation a pourtant peu à voir avec ce qui était anticipé. « On est loin des annonces en grande pompe faites par la direction, laissant entendre que le télétravail allait devenir le fonctionnement normal de l’entreprise. Il y a des chances que la montagne accouche d’une souris », estime Franck Don, responsable CFTC de l’entreprise. « Je ne vois pas venir la révolution qu’on aurait pu penser voir arriver », indique Olivier Lefebvre, son homologue Force ouvrière.

Le nouvel accord sur le télétravail qui devrait bientôt être signé laisse en effet un peu plus la possibilité de travailler à distance : de trois jours maximum par semaine, prévus par l’accord de 2014, les salariés pourraient passer à quinze jours télétravaillés par mois – l’équivalent d’un peu moins de quatre jours par semaine. Mais le volontariat sera toujours la règle, et rien ne dit que l’enthousiasme gagne tous les salariés.

« Dans cette affaire, ironise Catherine Pinchaut de la CFDT, il ne faut pas oublier que le DRH est aussi le directeur immobilier de PSA. Ce n’est pas anodin. » Et l’annonce en faveur du télétravail semble en effet avoir eu surtout à voir avec une réduction anticipée du nombre de mètres carrés de bureaux.

Rien d’étonnant pour Marianne Le Gagneur, la sociologue qui étudie le télétravail des cadres dans la finance. « Dans l’entreprise que je suis, le télétravail se développe en même temps qu’il est question de réduire la taille des locaux de l’entreprise, glisse-t-elle. Le télétravail est toujours lié à la mise en avant du “flex office” [une organisation où les salariés n’ont plus de bureau attitré, pensée pour réduire leur présence dans les locaux], les deux vont de pair. »

Pour autant, aucune direction de grande entreprise ne se risque pour le moment à annoncer qu’elle cherche à faire passer pour de bon ses salariés à 100 % en télétravail. Beaucoup ont en tête l’exemple d’IBM. Le géant de l’informatique avait opté pour cette organisation au début des années 2000 pour une grosse partie de ses troupes aux États-Unis et au Royaume-Uni. Il a fait machine arrière il y a trois ans, en raison d’une « baisse de l’engagement », et de la productivité, des salariés. « On le sait tous aujourd’hui, deux ou trois jours par semaine loin du bureau, c’est grandement suffisant pour trouver un équilibre, assure Catherine Pinchaut pour la CFDT. Plus, ça ne fonctionne pas à long terme. »

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