Depuis le début de la législature, nous vivions sous la menace constante d’une remise en cause de la loi de 2010, de sorte que la riposte était déjà prête. Et ce fut le 20 décembre qu’eut lieu l’annonce par le ministre Gallardon de sa proposition de « loi organique de protection de la vie du fœtus et des droits de la femme enceinte ». L’énoncé dévoilait clairement ses intentions. Mais le pire a été lorsqu’il a détaillé le contenu et les raisons de la proposition de loi.
La loi nous conduirait à une situation légale pire que celle de 1985, lorsqu’a eu lieu une première dépénalisation partielle de l’avortement. Les raisons se fondent sur le fait qu’« il n’est pas possible de laisser les femmes décider seules de l’interruption de grossesse ». Pour le PP, nous les femmes serions des victimes qui doivent être protégées et non des sujets de droit.
Réaction immédiate, des manifestations partout !
La réponse du mouvement féministe a été rapide et radicale : ce 20 décembre ont été convoquées de nombreuses manifestations sur tout le territoire espagnol. Beaucoup de femmes sont descendues dans la rue, en colère et indignées, mais aussi attristées, surtout celles qui luttent depuis tant d’années pour le droit des femmes à disposer de leur corps. On se retrouvait 30 ans en arrière avec les mêmes mots d’ordre et revendications. Bien que le texte ait été seulement présenté, ce fut un coup très rude pour le mouvement féministe.
Il y eut diverses formes d’action ce jour-là avec des résultats divers. Ainsi à Barcelone, on a appelé à un rassemblement qui se transforma en manifestation, avec un arrêt devant la cathédrale, sans aucun incident. Par contre à Madrid, la police a chargé les manifestants avec brutalité, plusieurs personnes furent blessées et il y eut également des arrestations.
Depuis, les actions de protestation n’ont pas cessé. Le 24 décembre, pour dénoncer l’ingérence de l’Église catholique dans nos vies, la messe de minuit a été interrompue à Manresa (en Catalogne). Le 27 décembre, il y eut des occupations dans différents hôpitaux du Pays basque pour défendre le droit à l’avortement dans les hôpitaux publics. Partout des rassemblements, des manifestations, des réunions d’information...
Dans tout l’État espagnol et également dans de nombreux pays, les citoyens expriment leur rejet de la proposition du ministre Ruiz Gallardon. Jusqu’au sein du PP se sont élevées des voix contre une réforme qui rouvre le débat à un moment d’affaiblissement du gouvernement et qui conduirait l’Espagne à la traîne de l’Europe.
Un mouvement qui ne s’arrêtera pas
Au niveau institutionnel, on a voté des motions contre la réforme dans différentes mairies. Plusieurs partis politiques ont exprimé leur rejet de la loi à la chambre des députés, et on met la pression pour que seul le PP approuve la loi. Au mois de septembre, le Parlement de Catalogne avait approuvé une motion dans laquelle il s’engage à garantir l’application de la loi de 2010, à faire respecter les droits des femmes et à rédiger une loi spécifique en cours d’élaboration. Des partis représentés au Parlement européen ont également exprimé leur rejet de cette loi.
Les mobilisations vont continuer ces prochains jours dans toutes les villes, villages et quartiers. Les groupes liés au PSOE ont organisé un « train de la liberté » vers Madrid le 1er février. Cette initiative rencontre un écho très favorable. Dans les secteurs les plus radicaux du mouvement féministe, une semaine d’actions internationales est prévue du 8 au 14 février et il est possible qu’une marche sur Madrid soit organisée plus tard.
Sur tous les fronts, les femmes luttent pour arrêter cette attaque contre leurs droits et leur liberté. No pasaran !
Sandra Companon Gutiérrezz, Barcelone, membre de la Campagne pour le droit à l’avortement libre et gratuit et sympathisante de Révolta Global-Izquierda anticapitalista.
* Paru dans Hebdo L’Anticapitaliste - 226 (23/01/2014). http://npa2009.org/
* Traduction Alain Eléonore.