Édition du 23 avril 2024

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Élections québécoises 2012

À quelques décimales du renversement de la volonté populaire - le mode scrutin majoritaire met la démocratie en péril à chaque élection

MONTRÉAL, le 5 sept. 2012 - Pour le Mouvement pour une démocratie nouvelle (MDN), l’élection d’une femme comme première ministre est un événement historique à souligner. Cependant, avec moins d’un point d’écart entre le Parti québécois et le Parti libéral du Québec, il s’en est failli de peu pour que le gouvernement soit formé du parti arrivant 2e en nombre de votes, situation qui s’est produite en 1944, 1966 et 1998. Les résultats serrés montrent à quel point le pouvoir dépend de la répartition du vote sur le territoire et non de la volonté populaire. Le MDN appelle la population à prendre conscience du péril qui menace la démocratie à chaque élection

La représentation est une fiction pour des milliers de citoyens et citoyennes qui n’ont pas voté pour le parti vainqueur. Les résultats démontrent bien la vétusté du mode de scrutin majoritaire. Ce dernier étant connu pour occasionner des distorsions dès qu’il y a plus de deux partis, les distorsions ne peuvent que s’aggraver au fur et à mesure que la population exprimera son pluralisme politique. Selon l’indice de Gallagher, les élections de 2012 souffrent d’une forte distorsion globale, avec un indice de plus de 13,5, ce qui est plus élevé qu’aux deux dernières élections et beaucoup plus élevé que dans les pays utilisant un mode de scrutin produisant des résultats proportionnels.

Encore une fois, le nombre de sièges remportés par chaque parti ne correspond pas à ce que la population a demandé en votant. Ainsi, le PQ, occupera 43% des sièges, malgré qu’il n’ait reçu que 31,9% des votes. Son statut minoritaire devrait l’obliger à faire preuve d’humilité et à négocier avec d’autres partis pour faire adopter ses lois, d’autant plus que son pouvoir provient des votes de seulement 24% de l’électorat.

Le PLQ est également surreprésenté puisqu’il détient 40% des sièges pour 31,2% des voix. La désignation de l’opposition dépend aussi de bien peu de choses, puisque seulement 3 points de pourcentage séparent l’opposition officielle de la Coalition avenir Québec, arrivée 3e en nombre de votes.

Comme toujours, les partis moins bien établis souffrent d’importantes sous-représentations. C’est le cas de la CAQ, en déficit de 12 points, et de Québec solidaire, qui ne détiendra que 1,6% des sièges, alors qu’il a récolté 6% d’appui. Quant aux 82 857 votes du Parti vert du Québec et aux 43 517 votes d’Option nationale, le système fait comme s’ils n’existaient pas parce qu’ils n’ont pas été suffisamment concentrés dans des circonscriptions.

Autre illustration du fait que le système ne traite pas les opinions politiques équitablement, il a fallu au PQ en moyenne 25 806 votes pour obtenir chaque siège alors qu’il en aura fallu 5 fois plus pour QS, soit 131 617 votes.

Cette fois encore, la représentation régionale n’est pas conforme à ce que la population a souhaité. Dans les régions de l’Abitibi-Témiscamingue, Côte-Nord, Gaspésie-Îles-de-la-Madeleine, Lanaudière, Outaouais et Saguenay-Lac-Saint-Jean, le pouvoir sera monopolisé ou presque par un parti qui souvent a obtenu moins de 45% des votes régionaux. Les populations de Chaudière-Appalaches et de l’Estrie ont même vu leur volonté renversée puisque ce n’est pas le parti qui a remporté le plus de suffrages qui occupera le plus grand nombre de sièges.

L’élection d’une première ministre ne s’accompagnera cependant pas d’une représentation égalitaire puisque les femmes ne forment que 32% des membres de l’Assemblée nationale. La situation s’est aggravée au niveau de la représentation de la diversité, puisque l’Assemblée nationale ne comptera que dix membres issus des minorités ethnoculturelles, soit deux de moins qu’en 2008, ce qui est bien loin de la réalité démographique. Ces déficits de représentation nuisent à la société québécoise, puisque les décisions que pourra prendre ce gouvernement ne pourront tenir compte efficacement des valeurs, de la situation et des opinions de la majorité de la population.

« Tant que l’Assemblée nationale ne se conforme pas à ce que la population demande, les opinions politiques ne seront pas respectées à leur juste part, ce qui n’est pas normal dans une démocratie. Un changement profond est nécessaire pour mettre fin à ces aberrations. Le MDN demande au gouvernement Marois d’agir sans tarder et il exhorte les autres partis à prendre en compte les intérêts supérieurs de la nation et à travailler de concert au bénéfice de la démocratie » souligne Jean-Sébastien Dufresne, vice-président du MDN.

« Les partis devront respecter les consensus qui se sont massivement exprimés ces dernières années, vers un mode de scrutin produisant un résultat proportionnel, comme le modèle proposé par le MDN peut le faire : un modèle proportionnel mixte compensatoire accompagné de mécanismes pour améliorer la représentation sous toutes ses facettes » de dire Mercédez Roberge, porte-parole pour le MDN. (Voir Solution démocratique sur www.democratie-nouvelle.qc.ca).

Durant la campagne électorale, on a beaucoup entendu parler du besoin de changer de mode de scrutin. Les résultats d’aujourd’hui fournissent une motivation supplémentaire, à toutes les personnes qui aspirent au respect des opinions de toutes et de tous. Le 15 septembre, Journée internationale de la démocratie, le MDN invitera la population à manifester son indignation face à l’iniquité des résultats électoraux, dans le cadre d’un rassemblement à 14 :00 au Parc Émilie-Gamelin à Montréal.

Bien qu’il soit trop tôt pour déterminer les circonstances de l’attentat perpétré au rassemblement péquiste, le Mouvement pour une démocratie nouvelle tient à mentionner que l’usage de la violence ne doit jamais remplacer celui des urnes.

Le Mouvement pour une démocratie nouvelle est une organisation citoyenne non partisane qui œuvre depuis 1999 à l’instauration d’un mode de scrutin qui respectera la population et ses choix politiques.

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