Édition du 23 avril 2024

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Europe

Gouvernement Thatcher : « Miracle économique, catastrophe sociale » Sans blague ?

« Donnez-moi, donnez-moi de l’oxygène... » C’était une urgence après avoir entendu le concert d’éloges dans les médias dominants d’ici sur Mme Thatcher suite à son décès. Même Radio-Canada fut extrêmement timide dans ses critiques. Un de leur journaliste a souligné que les gens avaient beaucoup souffert sous sa gouvernance, mais dans l’ensemble concluait sur un bilan positif et tous s’alignaient comme de bons soldats derrière l’éloge néolibéral.

Cela me faisait penser comment les journalistes américains s’étaient tous alignés, à peu de chose près, derrière Bush et sa guerre en Irak.

Heureusement une bouffée d’air frais m’arriva par l’entremise du Courrier international : http://www.courrierinternational.com/article/2013/04/09/margaret-thatcher-n-a-rien-d-une-heroine et avec cet article dans Le Devoir :
 [1]. Enfin fini le politiquement correct ! On nomme un chat, un chat.

« Miracle économique, catastrophe sociale » disait-on à Radio-Canada pour résumer ses années au pouvoir. Non, ce n’était pas une blague. Une catastrophe sociale équivaut à une réussite économique ? Comment peut-on sérieusement dire cela dans une même phrase ? A quelle économie fait-on référence pour l’amour de Dieu ? A une économie au service de l’élite sûrement, pas à une économie au service de tous ! Quelle est la finalité de l’économie sinon de répondre aux besoins du plus grand nombre ? Les politiques de Thatcher ont permis à la classe dominante de s’enrichir alors qu’une bonne partie du peuple avait de la peine à survivre. Conclusion : quand l’économie profite à une élite : c’est une réussite, même quand ça équivaut à une catastrophe sociale. Les esprits ont été tellement colonisés par le néolibéralisme qu’on prend maintenant pour acquis qu’économie et progrès social ne vont pas de pair !

Voici un extrait du Rapport mondial sur le développement humain : « A la fin des années 1990, le Royaume-Uni affichait un des taux de pauvreté infantile le plus élevé d’Europe. En 1998, environ un enfant sur trois - soit quelque 4,6 millions au total - vivait sous le seuil de pauvreté. Ces niveaux de pauvreté élevés, le double de ceux observés à la fin des années 1970, étaient l’héritage des années 1980, une décennie caractérisée par un modèle de croissance ouvertement favorable aux riches et qui laisse les plus pauvres de côté. À la fin des années 1970, les 10 % plus riches de la population représentaient 21 % du revenu disponible total. Vingt ans plus tard, leur part s’élevait à 28 %, soit presque autant que pour les 50 % les plus pauvres. » [2]
Voir aussi cet extrait de l’Institut de recherches économiques et sociales.
 [3]

Le creusement des inégalités, la destruction de tout un tissu social : c’est ça une réussite économique ?

Mme Thatcher, tout comme Harper et la plupart des politiciens aujourd’hui, était en admiration devant Hayek et Friedman et a mis fidèlement en application leurs théories avec ses politiques de déréglementation, de multiples privatisations [4](dont beaucoup ont été des catastrophes économiques) diminution du rôle de l’État, incluant diminution des impôts de la classe dominante. Après lecture du rapport ci-haut, est-il nécessaire d’illustrer le rôle néfaste de ces politiques ?

Même si ces théories ont conduit tout droit aux crises financière et économique, l’establishment tant politique qu’économique ne remet toujours pas en question leur paradigme. C’est dire comment l’idéologie néolibérale a établi profondément ses racines dans les cerveaux, grâce aux nombreux thinktank financés par de riches donateurs et dont les médias dominants se font fidèlement l’écho.

Dans l’éloge du gouvernement Thatcher, on passe vite sur sa guerre des Malouïnes. Les 900 morts et milliers de blessés de cette guerre, en vue de refaire son capital politique et gagner l’élection est-ce un détail ? Et laisser mourir de faim 9 personnes en leur refusant l’appellation de prisonniers politiques, c’est aussi un détail ? Il est vrai que dans le bilan néolibéral, les humains ne pèsent pas lourd comparés à la « réussite économique »

Heureusement que dans le monde, une autre forme d’économie existe : Mondragon et son ensemble coopératif nous montre qu’une saine économie, dont la finalité est de répondre aux besoins des gens, produit des résultats autrement plus intéressants pour la société. [5] Cela aide à garder espoir.


[3Le Royaume-Uni détenait au milieu
des années 1990, selon le panel européen
des ménages 1 , le triste record du taux de
pauvreté des enfants le plus élevé en Eu -
rope : […] De plus, le taux de pauvreté des enfants
avait connu une croissance importante
depuis la fin des années 1970. (2) De 1979 à
1997-1998, le nombre d’enfants pauvres
(au seuil de 50 % du revenu médian) était
passé de environ 1,4 à 4,4 millions
Chronique internationale de l’IRES - n° 95 - juillet 2005 http://www.politiquessociales.net/IMG/pdf/c955.pdf.

Françoise Breault

Après une carrière en enseignement, dont un an avec les Échanges France-Québec, j’ai poursuivi en travail social auprès des familles. Vers l’âge de cinq ans, je me demandais pourquoi il y avait des pauvres et ce que je pouvais faire. Sans en prendre pleinement conscience, cette interrogation m’a habité toute ma vie. Une année en Amérique du Sud ne m’avait toujours pas apporté de réponse. Cela m’a pris du temps à voir clair... Maintenant que la lumière est allumée, je ne peux et ne veux la refermer... Tous les faits, toutes mes lectures me confirment comment le système économique actuel contribue à ce fossé grandissant entre riches et pauvres. Me voici maintenant à ma 3e carrière, celle où je peux mettre tout mon temps et énergie à sensibiliser les gens aux graves enjeux d’aujourd’hui, afin de vivre dans un monde plus juste... « mais nous, nous serons morts mon frère... ».

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