Édition du 26 mars 2024

Une tribune libre pour la gauche québécoise en marche

Politique québécoise

Les Québécois-e-s impophiles ?

Réponse à l’éditorial d’Alain Dubuc du 27 mai

Pourquoi ne pas admettre tout simplement que votre passion à défendre un type d’économie néolibérale ne fait pas le poids quand on y applique un sain et critique jugement politique ? L’expérience que connaissent les Québecois-e-s de leurs services publics n’est pas, dans la vraie vie, une suite de catastrophes rapportées par les médias traditionnels et sur lesquelles les politiques auraient perdu le contrôle.

À moins que l’on ne veille discréditer, en présentant cette vision apocalyptique, l’obligation que les politiques ont d’en répondre devant la population pour y substituer celle de propriétaires privés n’ayant à répondre qu’à des actionnaires avides de rentes.

En effet, à chaque faille révélée dans ces services il y a une intervention politique pour rectifier. Insuffisantes, ces réponses du pouvoir public ? Sûrement ! Une société en progrès constant est le fruit des pressions des citoyen-ne-s manifestant un mécontentement, ou encore tout simplement leurs besoins, auxquels les hommes et les femmes publiques devraient répondre par des correctifs.

Il n’y a que l’ADQ et les Libéraux pour traduire les pressions populaires en armes de destruction massives contre le secteur public en faveur du privé. Le PQ étant d’ailleurs en train de les rejoindre sur ce terrain dévastateur. Crise politique oblige : comment refaire l’unité de tout ce beau monde autour d’un projet de société québécois servant objectivement les intérêts populaires ? Difficile et sans doute contradictoire avec les objectifs que se donnent habituellement ces politiques pour défendre un bien réel statu quo en faveur des possédants.

S’en tenir à des analyses strictement économistes conduit à l’exposition au chaos du capitalisme sauvage que la mondialisation offre sous nos yeux dans l’actualité mondiale : dégradation du climat, guerres de conquête, nouvelles maladies, rationalisations entraînant des pertes d’emplois,... La population, dans sa sagesse, a une réaction de repoussoir devant ce genre de politiques annonçant toujours le pire si on ne plie pas à son chantage d’appauvrissement, de dégradation de la nature, d’exploitation sans contrôle du Tiers-Monde, … qui nous assureraient une soi-disant prospérité collective et une création de richesses. Les promesses de ces enrichissements sont cependant toujours trahies en faveur de ces bien nantis devant être protégés contre les charges fiscales pour ne pas les décourager de maintenir un niveau de travail que tout le monde s’impose pourtant pour vivre contre une relativement faible rémunération. La justice serait-elle, plus que vous ne le penser, une valeur populaire que le politique permet de défendre en démocratie ? Ce qui, si vous osez le prétendre, ne conduit pas à l’immobilisme, mais à la satisfaction des intérêts populaires qui pourraient bien, en effet, venir en opposition à ceux du profit privé. Si c’est le tort que vous attribuez à la gauche, aux travailleur-euse-s en général, je me ferai une joie de revendiquer ce titre et de plaider coupable. Pourquoi ?

Parce que la politique a cet avantage de poser la question du pouvoir : qui le détient, qui décide et en faveur de qui ? Le système politique est donc préalable à la structure économique que l’on veut promouvoir. On y tranche au service de qui seront mises les lois du développement économique et quel projet de société elles serviront. Il est donc fort inapproprié de parler constamment de l’immobilisme à propos des opinions exprimés et de l’implication des citoyen-ne-s. Ce sont au contraire ces gestes politiques qui sont à la source du dynamisme d’une société démocratique. Ils sont, par exemple, à l’origine de projets dans un quartier, du réseau des garderies, de la répartition de la richesse dans une grève sur les salaires ou de services de santé s’adaptant à l’évolution de nouvelles maladies (sida) ou de négligences dans l’anticipation des dangers dans des milieux de travail de hautes technologies (projet Rabaska).

Ce dont on vient à douter, avec des positions de votre genre, c’est de la confiance que vous mettez dans la possibilité des citoyen-ne-s de se gouverner eux-elles-mêmes dans un type de démocratie nouvelle, participative, où ils-elles prendraient et exerceraient effectivement le pouvoir. Il ne semble pas que vous soyez prêt à le leur céder. Ce qui effraie, comte tenu de l’influence que vous exercez auprès des décideurs actuels dont le pouvoir serait remis en cause radicalement.

Guy Roy

l’auteur est membre du collectif PCQ de Québec solidaire à Lévis.

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