Édition du 16 avril 2024

Une tribune libre pour la gauche québécoise en marche

Négociations du secteur public

Les enjeux concernant l'unité et la démocratie dans les négociations du secteur public en 2015

Un modèle d’entente à rabais, "pourvu qu’on évite les décrets", tend à s’imposer depuis des décennies maintenant dans le secteur public. Après ces ententes, les travailleuses et les travailleurs restent sous les attaques des politiques d’austérité du gouvernement, avec des non-renouvellements de postes à la clef et des coupures qui détériorent la prestation de services à la population. C’est une discussion sur le maintien de ce modèle dans cette ronde de négociation et les conditions de son dépassement qu’il faut maintenant amorcer.

1. La radicalité des attaques d’un gouvernement néolibéral et la perspective des négociations de bonne foi

En juin 2014, après les 18 mois de gouvernement péquiste, le budget Leitao marqué par le même culte du déficit zéro planifiait des compressions des services publics et de la masse salariale. Pour y parvenir, le gouvernement préparait un gel de l’embauche. 15 000 postes seraient soustraits au secteur public par les départs à la retraite non comblés. L’objectif du gouvernement libéral était de juguler la croissance de la masse salariale, et ce particulièrement par les suppressions de postes tant dans les écoles des commissions scolaires que dans les services de santé. Ces politiques d’austérité sont accompagnées de l’approfondissement du caractère régressif de la fiscalité par la réduction de la contribution fiscale des entreprises, par la valorisation de la tarification et par la répugnance à augmenter les dividendes sur les ressources naturelles. [1]

Les premières offres gouvernementales tant au niveau salarial que des conditions de travail marquaient une volonté du gouvernement d’en découdre avec ses employéEs. Par une offre couvrant une période de 5 ans, deux années de gel salarial, une augmentation de 1% pour les trois autres années, donc clairement en dessous du taux d’inflation, le gouvernement exigeait des reculs significatifs des salaires et une détérioration des conditions de travail. Le gouvernement Couillard exigeait un accroissement de la charge de travail, de la mobilité dans l’emploi et plaçait les travailleuses et les travailleurs du secteur devant l’impossibilité d’offrir des services adéquats.

Comme l’expérience des deux dernières négociations avait montré que le gouvernement n’avait pas hésité à décréter ou à proposer une entente qui détériorait les conditions d’existence de ses employéEs, et compte tenu de l’arrogance du responsable du Conseil du trésor, tout cela laissait supposer que la négociation se terminerait par une épreuve de force dans laquelle le gouvernement utiliserait les menaces de toutes sortes et l’adoption d’une loi spéciale de retour au travail et un décret. Le mouvement syndical allait continuer d’évoluer dans le contexte d’un étatisme autoritaire. Tel était l’opinion générale de la gauche syndicale.

La stratégie de l’État-patron tendait à renforcer cette perception. Le responsable du Conseil du trésor tenait un discours alarmiste sur l’état des finances publiques et sur la nécessité de s’attaquer à la dette. En fait, l’analyse de l’évolution du rapport dette/PIB (voir analyse de Pierre Fortin, Actualité, automne 2014) démontrait qu’il s’agissait d’une pseudo-crise qui n’était qu’une justification des reculs proposés par le gouvernement Couillard tant au niveau salarial qu’au niveau des conditions de travail. Elle ne servait qu’à justifier leur politique d’austérité, pavant la voie à la réduction des services publics et à créer les conditions de l’avancée de leur privatisation. Les reculs exigés au niveau des conditions de travail tant dans l’éducation que dans la santé, étaient si importants qu’ils manifestaient soit la volonté d’en découdre avec les syndicats et de détériorer radicalement ces dernières, soit ils visaient à faire apparaître les abandons de ces reculs comme de la bonne foi du gouvernement et des gains pour la partie syndicale.

Mais Coiteux et Couillard ont toujours dénié que les négociations se termineraient par une loi spéciale. Pour eux, il était possible de s’entendre si le Front commun rajustait ses revendications à la baisse.

2. La plate-forme revendicative du Front commun et la perspective des négociations de bonne foi.

Le cahier des demandes (juin 2015) insistait fortement sur les salaires. L’argumentaire était simple. Pour défendre le secteur public, il faut augmenter les salaires, car sans une telle hausse, le secteur public ne sera pas à même de conserver ses expertises qui migreront vers le privé. En fait, le cahier défendait qu’il faudrait faire jouer les mécanismes du marché du travail pour défendre le secteur public. Les revendications salariales ne visaient pas une transformation de la structure salariale dans un sens plus égalitaire, mais à protéger les salaires des individus qui auront encore des emplois une fois que les mesures d’austérité auront été mises en œuvre.

Alors le gouvernement libéral par le budget Leitao proposait un gel de l’embauche et un processus d’attrition (15 000 postes étaient appelés à ne pas être pourvus par les départs à la retraite) afin de juguler la croissance de la masse salariale, la plate-forme revendicative ne fera pas de la négociation d’un plancher d’emplois une revendication centrale. Cela aurait été d’autant plus important, que la baisse des effectifs du secteur public était directement responsable de l’augmentation de la charge de travail tant en santé qu’en éducation et de la détérioration de la qualité des services publics. Ce qui a été écarté comme priorité de la plate-forme revendicative, c’est la perspective de s’appuyer sur la volonté des travailleurs et travailleuses des différents secteurs d’offrir des services de qualité à la population. Des secteurs les moins nantis parmi les travailleurs et les travailleuses voulaient un rattrapage salarial, mais on verra, au final, que ce sont eux et elles qui ont été les moins bien servis par cette plate-forme revendicative.

Les directions syndicales se disaient aussi persuadées qu’il y avait encore un espace pour des négociations de bonne foi. Pour les directions une entente négociée (quelle qu’en soit la nature) et surtout si elle amenuise les reculs constitue une défense des organisations syndicales et légitime tout le processus de négociation dans la défense des acquis. Tout doit s’inscrire dans ce cadre, tant la plate-forme revendicative que les moyens d’action proposés.

3. Les stratégies de mobilisation… construire un front social de résistance à l’austérité ou négocier de bonne foi une augmentation salariale

Le Printemps 2015 devait être chaud. Dans le mouvement étudiant, dans le mouvement populaire, dans le mouvement syndical également, la lutte contre la politique d’austérité gouvernementale semblait pouvoir constituer la base d’un vaste front social de résistance. La question centrale pour les différents mouvements semblait être celle de la synchronisation des mobilisations et des méthodes d’action. Le Grand rassemblement citoyen du vendredi 27 février 2015 semblait être le moment où aurait pu se concrétiser cette perspective. La dénonciation des politiques d’austérité sur les différents secteurs de la population y a été virulente et concrète. Mais, en même temps, ce Grand rassemblement, dans sa forme même, indiquait que les politiques des directions syndicales n’allaient pas réellement dans ce sens. La plate-forme du Grand rassemblement n’a pas été discutée et son adoption a été renvoyée à plus tard dans le cadre des différents groupes. Les négociations du secteur public comme axe de résistance à la politique d’austérité ont été bizarrement absentes des débats. Plus grave encore, alors que les témoignages et discussions au Grand Rassemblement Citoyen portaient la volonté d’en découdre avec le gouvernement Couillard, les directions syndicales rencontraient le 30 février le ministre Leitao pour l’inviter à un dialogue social sur la création d’emplois…

Aucune action conjointe n’a été discutée et adoptée. Le Grand rassemblement était sans doute un lieu de partage, mais pas un lieu réel de délibération et de discussion. Les différents mouvements sociaux ont parlé de leurs initiatives des mois à venir, mais aucune décision n’a été prise et l’hypothèse d’une grève sociale le premier mai n’a pas été l’objet d’une réelle discussion collective et les directions syndicales ne s’y sont pas associées. Ce ne sera que certains syndicats enseignants des cégeps qui se joindront à cette grève sociale alors qu’une implication plus importante avait dans un premier temps été envisagée. La grève sociale a été ainsi portée essentiellement par les organisations communautaires. En fait, il fallait comprendre que la perspective de la construction d’un front social de résistance dans laquelle les négociations du secteur public constitueraient un axe essentiel n’était pas retenue par les directions syndicales… car cette perspective portait une logique d’affrontement et de dangereux dérapages alors que le dialogue social et les négociations de bonne foi étaient le cadre réel défendu par les directions syndicales. En somme la ligne des directions syndicales affirmait que s’il était nécessaire pour faire pression sur le gouvernement, le dialogue social reste une voie efficace, car il permet que la société civile participe à l’élaboration des politiques sociales et économiques.

La rencontre des milliers militantEs des différentes centrales syndicales tenue pour discuter de la pertinence de la grève dans le secteur public devait aborder la question de la grève générale et de la grève illégale. Mais là aussi, cette rencontre n’en était une de partage, sans pouvoir de délibération et de décision. Ici, il n’a pas même été question de donner un mot d’ordre de grève sociale pour le premier mai. Si un grand nombre de travailleurs et de travailleuses ont été invités à partager sur la grève, aucun processus décisionnel n’a été mis en place pour construire la détermination et clarifier démocratiquement les perspectives.

Dans l’un ou l’autre cas, les directions syndicales ont surfé sur la radicalisation et la mobilisation des couches militantes des différents mouvements sociaux en lutte contre l’austérité, mais elles ont refusé, de relayer vers les bases des organisations qu’elles dirigent des mots d’ordre allant dans le sens de la construction d’un véritable front de résistance unitaire et démocratique utilisant des moyens de lutte radicaux comme la grève générale jusqu’à la désobéissance civile si nécessaire. Les directions syndicales sont demeurées sourdes aux appels tant des groupes communautaires que des associations étudiantes à la construction d’action unitaire des différents mouvements sociaux.

4. Une mobilisation significative des bases et son encadrement verticaliste

Les négociations du secteur public s’inscrivent dans une phase de montée des luttes du mouvement syndical et du mouvement communautaire à l’automne 2014 : bataille contre les régimes de retraite des employéEs municipaux, batailles contre la réforme des Centres de la petite enfance, contre les coupures à Radio-Canada ; contre le projet de loi 10 sur la santé… Les grandes mobilisations du début décembre sur l’austérité 2014 laissaient espérer un printemps particulièrement chaud. Printemps 2015, les actions s’enchaînent : semaine d’actions perturbantes de la Coalition opposée à la tarification et à la privatisation des services publics ; manifestation contre les compressions en éducations de la FEUQ, manifestation nationale de l’ASSÉ le 2 avril, manifestation des groupes environnementaux le 11 avril, cocktail d’actions du 1er mai (grève sociale du premier mai, activités de perturbations économiques, actions sur les lieux de travail, festival des solidarités…). Le choix des directions syndicales de ne pas inscrire les négociations dans le cadre d’un front de résistance contre l’austérité et l’absence de toute action synchronisée et la répression contre le mouvement étudiant, à Montréal particulièrement, laissent quand même un sentiment que le printemps 2015, n’avait donnée lieu qu’à de premières escarmouches et que la bataille était devant nous pour l’automne.

L’ampleur des premières manifestations de l’automne 2015 et l’importance des votes de grève et le niveau d’assistance aux réunions tant dans l’éducation que dans la santé démontraient qu’un fort potentiel de mobilisation existait même s’il était réparti inégalement dans les différents secteurs et dans les différentes régions du Québec. Les directions du Front commun proposèrent des grèves rotatives exercées régionalement dont 3 jours de grève nationale au début décembre.

La tenue de ces grèves rotatives a permis de se compter et de mesurer l’impact du discours syndical parmi la population. Elle a amorcé le mouvement et la réponse a été très encourageante. Un sondage révélait en effet que non seulement qu’une large majorité de la population rejetait l’arrogance du gouvernement Couillard-Coiteux dans les négociations, mais les revendications syndicales étaient soutenues par une majorité de la population.

La conclusion des secteurs militants de cette situation était donc qu’une confrontation entre le gouvernement libéral et ses employéEs devenait de plus en plus probable et qu’il était urgent de se préparer à une éventuelle confrontation et plus particulièrement de se préparer à une loi spéciale et à l’adoption d’un décret. Mais une telle analyse oubliait que la perspective d’un affrontement était un scénario écarté par les directions syndicales du Front commun et qu’elles prendraient les initiatives pour l’écarter.

En effet, la révision à la baisse des revendications salariales par les directions syndicales, la suspension des jours de grève en décembre, l’abandon de certaines revendications patronales sur les conditions de travail par la partie gouvernementale permettant des règlements aux tables de négociation sectorielles a conduit à l’ouverture d’un blitz des négociations à l’approche du temps des fêtes. Une entente pouvait être conclue dans les premières semaines de décembre. Les reculs au niveau revendicatif comme des mobilisations ont été pris au-dessus de la tête des membres qui ont été placés devant une politique de faits accomplis.

Il fallait donc conclure que la perspective d’une entente de bonne foi (à rabais) était la seule perspective réellement envisagée (et défendue explicitement d’ailleurs) et que la dynamique d’une confrontation d’ampleur débouchant sur une grève générale avait été d’emblée écartée tant par les directions syndicales du Front commun que par le gouvernement. La force de la mobilisation a sans doute amené le gouvernement à assouplir son attitude, mais le gouvernement n’a pas réellement reculé et n’a pas cédé sérieusement aux demandes syndicales. Cela rend d’autant plus difficilement acceptable le recul important des demandes syndicales et l’abandon des grèves prévues pour le début décembre.

5. Des oppositions syndicales encore fragmentées

L’orientation des directions syndicales n’a été contestée que par des minorités syndicales dans certains secteurs (particulièrement chez les enseignantEs de Cégep). En général, il n’existe pas une politisation très importante chez les employéEs du secteur public et cette politisation reste très différentiée d’un secteur à l’autre. Les directions syndicales ont réussi à imposer sans trop de problèmes une approche verticaliste dans la conduite de la lutte qui repose sur assez longue tradition qui s’est installée comme un fonctionnement normal dans le mouvement syndical.
Les oppositions syndicales ont posé devant le mouvement syndical les orientations suivantes qui indiquaient les enjeux réels pour la majorité des syndiquées :

 nécessité de lier la négociation à la lutte contre l’austérité
 nécessité de se lier avec les mouvements communautaires et étudiant.e.s
 défense de la participation du mouvement syndical à la grève sociale du premier mai.
 défense de l’unité intersectorielle dans l’action des différents syndicats du secteur public
 défense de la nécessité de se préparer au décret et à une possible loi spéciale et d’élaborer un plan d’action contre cette loi spéciale
 nécessité de construire des formes de regroupements des bases – formation de conseils de grève.

En fait, le groupe lutte commune, auquel ce sont associés des militantEs syndicaux de Québec solidaire a constitué une volonté de dépasser la dispersion de cette opposition syndicale. Mais en fait, cette opposition est restée jusqu’ici minoritaire et le fonctionnement verticaliste du front commun a empêché que cette opposition trouve dans des assemblées générales fréquentes le cadre dans lequel elle aurait pu défendre ses propositions.

Cette opposition est surgie pour une bonne part dans le cadre de la lutte elle-même sans qu’elle ait eu le temps de partager des analyses et d’élaborer des mots d’ordre précis sur les enjeux de la lutte. Elle a devant elle le défi de définir dans l’action un projet de renouveau du syndicalisme de combat seul capable de transformer le rapport de force en faveur des travailleuses et des travailleurs du secteur public.

6. Des perspectives : du rejet de l’entente à la construction d’un courant anti-concertationniste défendant pour un syndicalisme démocratique et combatif

a. L’entente proposée et sa défense par les directions

L’entente de principe prévoit 3 augmentations paramétriques aux échelles salariales des employés de l’État : 1,5 % en 2016, 1,75 % en 2017 et 2 % en 2018. Le 2 avril 2018, notre salaire sera donc augmenté de 5,34 % en composant les pourcentages, soit une augmentation de 5,25%.
Mentionnons deux montants forfaitaires : un de 500 $ la première année et un autre de 250$ en 2019-2020. Ces deux montants ne constituent pas des augmentations de salaire.

L’âge de la retraite sans pénalité passerait de 60 à 61 ans à compter du 1er juillet 2019 ; la pénalité actuarielle pour retraite anticipée passerait de 4 % à 6 % par année à partir du 1er juillet 2020. Un facteur compensatoire de retraite sans pénalité à l’âge de 60 ans ne serait accessible que si le salarié a complété 30 ans de service cotisés.

La présentation de l’entente faite par les négociateurs (et négociatrices) du Front commun a constitué un spin médiatique pour mousser l’entente et coincer les membres. Les forfaitaires ont été traduits en pourcentage et inclus dans les échelles. On est ainsi parvenu à une augmentation de 10% pour les employéEs. C’est une présentation démagogique et manipulatrice des résultats des négociations. Il est faux de dire que tous et toutes bénéficieront de la protection de leur pouvoir d’achat. CertainEs s’appauvriront encore d’ici 2020.

L’ensemble des directions du Front commun (si ce n’est la direction de la FSSS qui recommande le rejet de cette entente) recommande la signature de l’entente. Il était possible d’aller chercher davantage. La lutte n’a pas été conduite démocratiquement. Ce sont les moins nantis des travailleurs et travailleuses du Front commun qui reçoivent le moins. L’entente va dans un sens opposé à la redistribution de la richesse. Pour toutes ces raisons, la gauche syndicale peut et doit s’opposer à la ratification de cette entente au rabais et soutenir la position des délégué-e-s du Conseil fédéral de la FSSS afin de poursuivre la lutte et les négociations pour un règlement plus juste. C’est pourquoi, il est nécessaire de soutenir la campagne de Lutte commune contre la ratification de cette entente à rabais.

b. L’unification de la gauche syndicale une perspective incontournable

Des stratégies alternatives à celles mises de l’avant par les directions syndicales ont bel et bien été proposées. Mais, ces orientations sont portées par une opposition syndicale qui reste dispersée et sans une audience large auprès de l’ensemble des travailleuses et travailleurs du secteur public. Un large bilan de cette lutte et une analyse des stratégies qui y ont été déployées devront être faits et diffusés afin de commencer à jeter les bases d’une orientation qui permettrait de casser le modèle de règlement qui s’est imposé et qui découle d’une unité par le haut qui commande tant l’évolution des revendications avancées que des moyens d’action proposés. Une autre orientation syndicale est nécessaire. Elle ne s’imposera pas spontanément. Elle nécessitera la mise en place d’un réseau militant intersyndical capable de l’élaborer et d’en faire comprendre la nécessité.

Les directions syndicales ont tenu à préciser que la signature de l’entente proposée ne signifiait aucunement la fin de la lutte contre l’austérité. La gauche syndicale, lutte de classe, doit s’appuyer sur cette affirmation pour élaborer des cibles précises de la lutte contre l’austérité et des moyens concrets permettant d’établir des rapports de force face au gouvernement. Les revendications doivent être précisées à cet égard : zéro coupure dans les dépenses de santé et d’éducation, non à l’attrition du personnel et réembauche obligatoire pour faire face aux besoins, identification de seuils de réinvestissement dans le secteur public,lutte contre toute tarification des services… Actions solidaires pour défendre ses revendications en liaison avec les différents mouvements sociaux…

c. Québec solidaire doit participer aux débats du mouvement syndical et des autres mouvements sociaux sur les stratégies à mettre de l’avant pour bloquer les politiques d’austérité

Québec solidaire a participé à différentes manifestations de résistance aux politiques d’austérité du gouvernement Couillard et aux mobilisations des organisations syndicales du secteur public. C’est ainsi qu’il a appuyé clairement et explicitement le mouvement des parents en défense de l’école publique. Mais Québec solidaire comme parti ne s’est pas prononcé sur les questions stratégiques essentielles auxquelles ont dû faire face le mouvement syndical et les mouvements sociaux :

 Il n’a pas pris une position claire sur la nécessité de construire un front de résistance aux politiques d’austérité et plus particulièrement sur le rôle des négociations du secteur public dans ce cadre.
 Il n’a pas soutenu l’appel à la grève sociale du premier mai et a préféré garder le silence plutôt que de s’associer à la gauche syndicale et au mouvement communautaire qui faisaient cet appel.
 Il a refusé de poser la nécessité de se préparer à une éventuelle loi spéciale et à un décret, et à défendre la légitimité de la désobéissance civile à cette loi comme il l’avait fait durant la grève étudiante de 2012.
 Il n’a pas élaboré un programme d’urgence pour faire face à la politique d’austérité et poser la nécessité de rompre avec la recherche d’une politique de dialogue social proposé par les directions syndicales au gouvernement Couillard alors que le mouvement social était au cœur de la mobilisation contre les politiques d’austérité de ce gouvernement.

Par cette politique de refus du débat, il s’est rendu incapable de poser concrètement devant le mouvement social la nécessité de se doter d’une alternative politique pour donner un débouché aux luttes sur le terrain électoral.

L’enracinement de Québec solidaire comme parti de transformation sociale passera non seulement par la participation de ses membres aux luttes, mais par la participation du parti aux débats et aux efforts d’unification du mouvement social. Et c’est un tel mode d’enracinement qui permettra à QS d’élargir parmi la population la volonté de rompre avec la domination capitaliste, patriarcale et antiécologique à laquelle est soumise la société québécoise.

La construction de deux comités intersyndicaux de Québec solidaire à Montréal et à Québec a constitué les premiers pas dans cette direction. Cela a permis que des initiatives soient prises permettant d’intervenir dans les débats sur les perspectives à développer. Il faut poursuivre l’organisation des militantEs du parti oeuvrant dans le mouvement syndical.


[1Seule la dynamique des syndicats du Front commun est examinée dans ce texte.

Bernard Rioux

Militant socialiste depuis le début des années 70, il a été impliqué dans le processus d’unification de la gauche politique. Il a participé à la fondation du Parti de la démocratie socialiste et à celle de l’Union des Forces progressistes. Militant de Québec solidaire, il participe au collectif de Gauche socialiste où il a été longtemps responsable de son site, lagauche.com (maintenant la gauche.ca). Il est un membre fondateur de Presse-toi à gauche.

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