Tiré de Afriques en Lutte
2 octobre 2025
Par Réseau international
Le capitalisme définit un rapport mercantiliste et d’exploitation de la nature, tout en restant incapable de résoudre les crises énergétiques, sanitaires, écologiques et socio-économiques qui touchent principalement les classes populaires du monde entier. Il s’agit d’une phase néocoloniale, rentière, du capitalisme où la spoliation de la nature par l’extractivisme, le pouvoir des entreprises et la militarisation mènent une véritable offensive autour d’eux, dans les pays dépendants et semi-dépendants. On assiste à une lutte croissante pour l’approvisionnement en énergie et matières premières qui, au final, continue à alimenter une consommation non durable, principalement dans les pays du Nord, fondée sur une exploitation des ressources naturelles qui détruit les habitats et profite exclusivement à une petite élite économique et politique.
Les hydrocarbures et les matières premières essentielles au développement des secteurs de ce néocapitalisme vert, militaire et numérique, sont concentrés dans des endroits spécifiques, généralement en dehors des frontières des principaux États, ce qui, dans la pratique, revient à encourager l’extractivisme et, plus précisément, les grandes multinationales minières à exploiter tout le nécessaire pour changer la principale source de ressources énergétiques. Pendant ce temps, le discours dominant s’emploie à habiller cette fièvre extractiviste par des concepts de neutralité climatique, de transition verte et numérique ou par des accords politiques tels que le Pacte vert européen ou le Green New Deal, qui ne font que repeindre en vert ce capitalisme vorace.
La transition verte et numérique ne fait qu’approfondir les inégalités sociales à l’échelle planétaire, tout en renforçant une matrice énergétique extractiviste et en nous rapprochant toujours plus vite du point de rupture des limites biophysiques de la planète.
De plus, sur le plan géopolitique, elle accroît encore davantage le pouvoir des entreprises transnationales, encourage la marche vers la guerre et approfondit l’offensive néocoloniale.
C’est pourquoi les grandes puissances se disputent l’accès et la domination des filières d’approvisionnement nécessaires à leurs économies, mettant au service de cette stratégie un ensemble de dispositifs économiques, diplomatiques et militaires.
Leurs intérêts se déploient à travers la signature d’accords de libre-échange et d’investissements, qui confirment le mode opératoire habituel de la mondialisation capitaliste : alors que toutes sortes d’avantages sociaux, en termes d’emplois, droit du travail et protection de l’environnement sont promis aux pays signataires, non seulement ceux-ci ne se répercutent pas positivement sur la majorité de la population, mais leurs effets se traduisent au contraire par de graves impacts socio-écologiques. Dans le même temps, on voit proliférer les accords - bilatéraux ou à l’échelle régionale - sur l’énergie et les matières premières, au seul profit des élites et des grandes entreprises, en appauvrissant la classe ouvrière et les peuples. La militarisation et l’instauration d’un état de guerre dans de nombreux territoires stratégiques sont des effets palpables de cette offensive néocoloniale.
L’exploitation minière à petite ou grande échelle a des conséquences irréparables en termes de dommages sur les terres, de pollution de l’air, de pollution des eaux de surface et souterraines, d’impacts sur la flore et la faune et de déplacements de communautés hors de leurs territoires d’origine par une violence qui ne fait que reproduire la logique du colonialisme.
Les activités d’extraction des ressources se trouvent généralement dans des espaces naturels écologiquement très sensibles tels que les hauts plateaux, les savanes, les plaines, les mers, les forêts, les bassins hydrologiques, les sources d’eau, ainsi que dans des territoires reposant sur une économie agro-pastorale où les dommages causés finissent par affecter la production alimentaire, au détriment des populations rurales et urbaines. Le développement des giga-exploitations minières, de l’industrie pétrolière ou de l’agrobusiness signifie la poursuite du saccage des territoires et l’interdiction de produire notre propre nourriture dans le cadre de la souveraineté alimentaire, en favorisant au contraire les grandes chaînes de production alimentaire.
Si une transition écosociale est nécessaire et incontournable, elle doit s’appuyer sur une vision de classe, populaire et démocratique : qui décide quoi, qui et comment y parvenir. L’extractivisme, volet fondamental du mode de production capitaliste basé sur l’exploitation intensive et dévastatrice de la classe ouvrière, des paysans et de la terre nourricière, a de graves répercussions sociales, économiques, culturelles et environnementales sur les communautés et les territoires du monde entier. Dans ce contexte, l’auto-organisation sociale et populaire devient un outil fondamental pour la défense des droits territoriaux, la justice environnementale et la construction d’un projet écosocialiste alternatif qui s’oppose à l’offensive extractiviste et à son engrenage juridique, politique et entrepreneurial. Il est temps d’envisager d’autres avenirs possibles au-delà de ce modèle de prédation et de spoliation.
Face aux avancées de l’idéologie privatisatrice et extractiviste, les classes populaires, paysannes, autochtones, mettent en avant d’autres moyens de produire de la richesse dans nos territoires, où il existe déjà une immense richesse ethnique et culturelle avec ses potentialités propres, respectueuses de la nature. Ouvrir la voie à d’autres formes d’organisation de l’économie et de la vie sociale ne passe pas par une délégation de pouvoir aux États alliés du patronat, ni en faisant confiance à la bonne volonté des possédants de grandes fortunes. Les limites politiques des gouvernements progressistes quand ils sont aux affaires et des accords interclassistes sont évidentes, il est donc nécessaire d’aller plus loin : réarticuler entre eux les espaces mondiaux, nationaux et locaux animés par des organisations populaires qui contribuent à renforcer une dynamique de confrontation explicitement dirigée contre l’hégémonie des élites politico-économiques.
Une solidarité internationaliste qui articule les communautés en lutte et les peuples en résistance pour affronter l’ordre capitaliste, hétéropatriarcal, colonial et écocide reste essentielle.
La seule issue équitable à la crise passera par les peuples et la lutte populaire pour la défense des territoires face au pouvoir des entreprises, en renforçant les projets alternatifs et les réseaux transnationaux anti-hégémoniques qui exigent et fassent respecter les droits des majorités sociales. En ce sens, l’idée de pouvoir articuler les luttes des peuples fait apparaître une lueur d’espoir pour construire une organisation populaire internationaliste et poursuivre les luttes de défense de nos territoires en réunissant nos forces. Nous pourrons ainsi amplifier la lutte contre toutes les formes d’extractivisme et l’identifier en tant que secteur parmi les plus actifs de la lutte sociale, qui met l’accent sur les contradictions du capitalisme.
Il est donc proposé la création d’un réseau international des peuples contre l’extractivisme, qui se revendique anticapitaliste, antipatriarcal, anticolonial et en faveur de la justice climatique, dont l’objectif est le suivant :
01. Stratégie
Proposer des stratégies communes de lutte contre les entreprises extractivistes transnationales ; elles sont l’ennemi commun auquel nous pourrons riposter avec d’autant plus d’impact et de force depuis cet espace internationaliste.
02. Union
Travailler à l’union des organisations populaires qui luttent contre l’exploitation minière et l’extractivisme sous toutes ses formes, qui résultent directement des dynamiques capitalistes à l’échelle mondiale.
Nous partons du principe qu’il n’est pas possible de lutter contre les effets sans lutter contre les causes qui sont à l’origine du modèle économique qui permet et encourage toutes sortes de relations d’oppression, de néocolonisation et de spoliation.
03. Défense
Mettre en avant la défense de la planète, de la vie présente dans la flore et la faune, dans une perspective radicalement de classe, des peuples opprimés et en particulier de ceux qui subissent les pires conséquences environnementales et sociales de ce système prédateur.
Concrètement, nous appelons tous les peuples frères avec lesquels nous luttons pour un monde nouveau à se joindre à ce cri d’espoir et à se coordonner à travers ce grand réseau international. Pour y parvenir, notre feuille de route serait la suivante :
• Identifier dans chacun de nos pays les luttes sur le sujet et nous coordonner en s’impliquant fortement dans la création ou le renforcement d’alliances larges avec des organisations sociales, politiques et syndicales en tant qu’objectif clé du réseau.
• Le pari d’un internationalisme écoterritorial, lié aux réseaux communautaires.
• Le rejet actif des logiques guerrières et néocoloniales d’exploitation et d’invasion.
• Une composition diversifiée, enracinée dans les luttes populaires et qui regarde au-delà des frontières étatiques, en considérant qu’il n’est pas le seul cadre d’action politique possible.
Afin d’approfondir davantage cette question, nous invitons les organisations de base, les peuples en lutte et les différents mouvements de résistance anti-extractivistes à une rencontre internationale au cours de laquelle cette coordination mondiale sera présentée, en marge du Sommet des peuples qui se tiendra en novembre 2025 à Belém (Brésil).
C’est ainsi que nous nous convoquons nous-mêmes, à travers un monde en crise écologique et sociale.
Ils ont déjà signé :
AMÉRIQUE DU SUD
Equateur
Confederación de Nacionalidades Indígenas del Ecuador (CONAIE)
Frente Nacional Antiminero
Brésil
Movimento Pela Soberania Popular na Mineração – MAM
Articulación de los Pueblos Indígenas de Brasil – APIB
Colombie
Congreso de los Pueblos
Argentine
FOL-Frente de Organizaciones en Lucha en la Coordinadora por el Cambio Social
Tierra para Vivir
Cooperativa de producción Agroecológica CoPa
AFRIQUE
Maroc
ATTAC/CADTM Maroc
Amérique centrale
Guatemala
CODECA-MLP
Honduras
Consejo Cívico de Organizaciones Populares e Indígenas de Honduras (COPINH)
La Coordinadora de Organizaciones Populares del Aguan (COPA).
Panama
Alianza Pueblo Unido por la Vida
Mexique
Frente de Pueblos en Defensa de la Tierra y el Agua – Morelos, Puebla y Tlaxcala (FPDTA-MPT)
Consejo de ejidos y comunidades opositoras a la presa La Parota (CECOP)
Sindicato Nacional de Trabajadores de los Pueblos Originarios al Cuidado del Bosque (SNTPOCB)
RÉSEAUX INTERNATIONAUX
ATTAC/CADTM Internacional
EUROPE
Ecosse
Climate Camp Scotland
France
Soulèvements de la Terre
Péninsula Ibérique
Observatorio Ibérico de la Minería
Ecologistas en Acción
Amigas de la tierra
Asociación ambiental e cultural Tralapena
Plataforma Mina Touro O Pino Non
Euskal Herria
Euskal Herriak Kapitalari Planto
Suisse
CADTM Suisse
Groupe Écosocialiste
Belgique
Code Rouge
Faisons de l’internationalisme un outil vivant et combatif, pour que le monde change de base !
Rejoins le réseau mondial des peuples contre l’extractivisme :
¡Súmate !
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