Édition du 12 mars 2024

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Syndicalisme

Consultations prébudgétaires 2023-2024

Baisses d’impôt : le gouvernement du Québec fait fausse route

Dans un mémoire conjoint, les centrales présentent, au total, 21 recommandations déployées autour de quatre grands axes. Les présidentes et présidents des quatre centrales syndicales, Magali Picard (FTQ), Caroline Senneville(CSN), Éric Gingras (CSQ) et Luc Vachon (CSD), rencontrent ce matin, à 10 h 30, le ministre des Finances, Éric Girard, dans le cadre des consultations prébudgétaires. Nous présentons ci-dessous le communiqué des centrales syndicales et la liste des recommandations de ce mémoire.

2 mars 2023 | tiré du site de la CSN
https://www.csn.qc.ca/actualites/baisses-dimpot-le-gouvernement-du-quebec-fait-fausse-route/

Pour lire l’intégralité du mémoire, cliquez sur l’icône :

Si 2022 devait être l’année au cours de laquelle les Québécoises et les Québécois pouvaient s’attendre à renouer avec une certaine normalité, c’est surtout le retour de l’inflation qui aura marqué leur esprit. Cette conjoncture économique teinte inévitablement les orientations budgétaires et fiscales du gouvernement, qui voit clairement un gain politique à faire en mettant de l’avant des baisses d’impôt. « Il est clair pour nous que le gouvernement fait fausse route en privant le trésor public de ressources essentielles pour soulager la pression dans les services publics, diminuer les tensions qui résultent de la pénurie de main-d’œuvre et relever les nombreux défis du Québec, notamment en matière de lutte aux changements climatiques et de développement économique. Se priver de 2 milliards de dollars dans le contexte où les services publics craquent de partout et où ils atteignent plusieurs points de rupture, c’est incompréhensible et irresponsable ! », soutiennent d’emblée les leaders syndicaux.

Dans un mémoire conjoint, les centrales présentent, au total, 21 recommandations déployées autour de quatre grands axes, soit les finances publiques du Québec et la fiscalité, l’état des services publics et les difficultés qui sont vécues par les femmes et les hommes qui y œuvrent, les nombreux enjeux de développement économique et les défis actuels du marché du travail et les attentes des travailleuses et des travailleurs pour une formation qualifiante et accessible.

Le gouvernement justifie sa proposition de baisses d’impôt des particuliers par le fait qu’elles n’impliqueraient pas de compressions budgétaires, étant financées par le Fonds des générations. Or, pour les centrales syndicales, un des moyens les plus sûrs de garantir l’équité intergénérationnelle est d’investir dans le Québec de demain par un financement adéquat en santé et en services sociaux, en éducation et en enseignement supérieur, dans les services de garde éducatifs à la petite enfance et dans les infrastructures publiques, par exemple.

« L’an passé, nous avions demandé la tenue de consultations larges sur la gestion de la dette publique et sur le retour à l’équilibre. Malheureusement, nous n’avons pas été entendus. Nous réitérons notre demande. Les finances publiques sont saines. Le gouvernement en a assez fait pour accélérer le remboursement de la dette, qui est sous contrôle. Il est grand temps qu’il s’attaque au réinvestissement dans les services publics, plutôt que de promettre des baisses d’impôt », soutiennent les présidences.

Les centrales syndicales soutiennent la décarbonation du Québec d’ici 2050, mais précisent que l’atteinte de cet objectif n’autorise pas le gouvernement à agir dans le désordre. Le Québec a besoin d’une stratégie de transition énergétique cohérente, claire et réfléchie. « Nous demandons au gouvernement de tenir une vaste consultation publique sur l’avenir énergétique du Québec et portant notamment sur les orientations que le gouvernement entend mettre de l’avant. Il devra mobiliser tous les groupes de la société civile pour assurer le succès de cette transition énergétique. Ici comme ailleurs, le dialogue social sera donc essentiel », insistent Magali Picard, Caroline Senneville, Éric Gingras et Luc Vachon.

Les quatre centrales syndicales rappellent aussi au gouvernement l’importance d’accroître ses efforts pour réduire la dépendance du secteur manufacturier aux importations pour ainsi maintenir et accroître la diversité du tissu économique québécois.

Finalement, elles s’accordent aussi à l’effet que les pénuries de main-d’œuvre maintiendront les pressions sur le marché du travail et que, dans ce contexte, le gouvernement doit poursuivre ses efforts pour protéger l’employabilité et la mobilité de la main-d’œuvre en lui offrant les formations adéquates.

« La Loi favorisant le développement et la reconnaissance des compétences de la main-d’œuvre – appelée loi du 1 % – est plus importante que jamais. Nous exigeons qu’elle soit maintenue, malgré les pressions patronales qui s’exercent aujourd’hui. »

Consulter le mémoire de la FTQ, la CSN, la CSQ et la CSD déposé auprès du ministre des Finances en cliquant ici.

Argumentaire des centrales syndicales dans le cadre des consultations prébudgétaires 2023-2024 du ministre des Finances du Québec

Mémoire présenté par :
La Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec (FTQ)
La Confédération des syndicats nationaux (CSN)
La Centrale des syndicats du Québec (CSQ)
La Centrale des syndicats démocratiques (CSD)

Février 2023

Liste des recommandations

Recommandation no 1
Les centrales syndicales sont toujours d’avis que la gestion de la dette publique et la stratégie de retour à l’équilibre budgétaire devraient faire l’objet d’une consultation publique ou d’une commission parlementaire, puisque les cibles de réduction du poids de la dette publique du Fonds des générations pour 2025-2026 sont soit atteintes ou en voie de l’être.

Recommandation no 2
La dette publique étant sous contrôle, le gouvernement doit cesser de verser des sommes au remboursement de la dette via le Fonds des générations. Ces sommes doivent plutôt servir à financer les services publics et les programmes sociaux ainsi qu’à soutenir l’économie. Les centrales syndicales s’opposent donc à la proposition du gouvernement de prolonger la mécanique actuelle de remboursement de la dette publique à hauteur de 3 milliards de dollars par an pour encore 10 ou 15 ans.

Recommandation no 3
Dans un contexte où plusieurs services publics et programmes sociaux sont sous-financés, les centrales syndicales s’opposent à la baisse d’impôt des particuliers proposée par le gouvernement, de même qu’au financement de cette baisse d’impôt par une partie des revenus actuellement dédiés au remboursement de la dette publique via le Fonds des générations.

Recommandation no 4
Les centrales syndicales demandent au gouvernement de rehausser substantiellement le financement des services publics et des programmes sociaux afin de financer un ensemble d’initiatives permettant de s’attaquer véritablement aux grands défis de l’heure du Québec, notamment les crises vécues au sein des différents réseaux de services publics, la pénurie de main-d’œuvre, le vieillissement de la population, la nécessaire transition juste ainsi que la hausse du coût de la vie.

Recommandation n o 5
Les centrales syndicales demandent au gouvernement d’accorder les ressources financières nécessaires pour mettre en place des solutions durables et négociées permettant l’amélioration des conditions de travail, de l’organisation du travail et des conditions d’exercice d’emploi, le tout afin d’attirer et de retenir la main-d’œuvre nécessaire dans les services publics.

Recommandation no 6
Compte tenu de l’augmentation des besoins pour l’ensemble des programmes gouvernementaux et des services publics, les centrales syndicales demandent au gouvernement de mettre en place de nouvelles mesures pour accroitre ses revenus ou mieux gérer ses dépenses. Pour y arriver, nous proposons, notamment : - La mise en place d’une assurance médicaments publique et universelle ; - L’élimination du recours à la sous-traitance et une remise en question de la place du privé dans les réseaux publics ; - L’élimination du caractère « remboursable » des crédits d’impôt aux grandes entreprises ; - La mise en place de mesures d’écofiscalité, tout en prévoyant des mécanismes qui corrigent les potentiels effets régressifs de ces mesures.

Recommandation no 7
Les centrales demandent au gouvernement du Québec de développer une meilleure compréhension des mécanismes à la source de la poussée inflationniste actuelle, d’en analyser les conséquences sur les personnes vulnérables afin de déployer une stratégie de lutte contre l’inflation complémentaire à celle des hauts taux d’intérêt mise en œuvre par la Banque du Canada.

Recommandation no 8
Les centrales réclament que le gouvernement du Québec adopte des mesures structurantes à moyen et long termes visant à atténuer les effets négatifs de l’inflation tels : - Un meilleur contrôle des coûts du logement ; - Des investissements accrus dans le logement social afin d’améliorer l’offre des habitations à loyer modique ; - Une hausse du salaire minimum à 18 $ de l’heure ; - Une bonification des protections sociales de façon à assurer à tous les ménages un revenu au moins égal à la Mesure du panier de consommation (MPC) ; - Un gel temporaire des tarifs que le gouvernement contrôle (ex. : hydro-électricité ; services de garde, droits de scolarité, etc.)

Recommandation no 9
Les centrales demandent au gouvernement du Québec de mettre en œuvre une stratégie industrielle cohérente, durable et solidaire, financée adéquatement, afin de relever les défis de la transition énergétique et pour bâtir une économie résiliente et inclusive à long terme. Cette stratégie doit inclure des initiatives concrètes telles des investissements dans la transition énergétique et la lutte contre les changements climatiques, la réindustrialisation du Québec notamment par la consolidation des activités des filières industrielles existantes et le renforcement des activités de 2e et 3e transformations, et ce, tout en portant une attention particulière au soutien à l’économie sociale et aux PME.

Recommandation no 10
Avant de prendre des décisions qui auront des implications appréciables pour les prochaines générations, les centrales syndicales demandent, dans le cadre de la prochaine vaste consultation publique sur l’avenir énergétique du Québec, que le gouvernement publie préalablement un document de consultation étoffé abordant les orientations gouvernementales envisagées sur les enjeux de sécurité et d’efficacité énergétiques, d’énergies vertes et bioénergies, des grandes orientations stratégiques d’Hydro-Québec ainsi que du mandat de la Régie de l’énergie, le tout dans une perspective de transition juste.

Recommandation no 11
Compte tenu des exigences de décarbonation du Québec et en vue des arbitrages qui doivent être faits au sujet de l’utilisation de notre électricité, les centrales syndicales enjoignent le gouvernement du Québec à prendre en compte les priorités suivantes : soutenir la réalisation d’un grand chantier d’électrification des transports collectifs ; protéger le contrat social entre Hydro-Québec et la population pour l’établissement de tarifs abordables découlant du bloc patrimonial ; être en soutien au secteur manufacturier et encourager l’installation sur le territoire d’entreprises d’ici ; et revoir les conditions auxquelles les tarifs préférentiels sont octroyés à la grande industrie. En outre, considérant la priorité gouvernementale de décarboner l’économie, les centrales exigent que les aides financières aux entreprises prévues dans ses plans de décarbonation (incluant les dépenses fiscales, les subventions et les tarifs préférentiels d’Hydro-Québec) soient bien ciblées, cohérentes pour assurer un développement durable et conditionnel à des critères notamment de création d’emplois, de conditions salariales, de gains environnementaux et d’investissements sur le territoire.

Recommandation no 12
Les centrales syndicales demandent l’instauration d’un dialogue social, ouvert et constructif pour l’ensemble des démarches visant la transition vers une économie sobre en carbone. La participation des organisations de la société civile permettra de mieux concilier des objectifs de soutien à la vitalité économique des entreprises avec ceux de justice sociale pour les citoyens et les citoyennes. Plus spécifiquement, dans ce grand projet collectif de décarboner le Québec, nous demandons que des sièges soient réservés au mouvement syndical au sein du comité consultatif sur les changements climatiques et que d’autres sièges soient représentatifs de la société civile.

Recommandation no 13
Les centrales syndicales pressent le gouvernement du Québec de se doter de capacités nationales de production dans certains secteurs névralgiques – notamment de fournitures médicales, du bioalimentaire et du pharmaceutique – et de se constituer des réserves stratégiques de biens médicaux essentiels et de médicaments pour mieux faire face à de nouvelles crises sanitaires. Les centrales demandent aussi au gouvernement du Québec de financer des projets pertinents du secteur pharmaceutique et d’augmenter les ressources allouées à la recherche et développement tout en rendant les entreprises imputables envers la population. Enfin, nous demandons au gouvernement du Québec d’exiger du secteur du secteur de la distribution alimentaire, qui importe des denrées, de moderniser leur système logistique de façon à se doter de plusieurs options d’approvisionnement ; de soutenir diverses filières alimentaires et de s’assurer que les grands acteurs de la distribution au Québec s’approvisionnent en priorité auprès des secteurs agroalimentaire et bioalimentaire québécois lorsque c’est possible.

Recommandation no 14
Les centrales syndicales demandent au gouvernement que son action pour combler les pénuries de main-d’œuvre et soutenir les personnes salariées vise à permettre à celles-ci d’être pleinement libre de leurs choix, employable et mobile sur le marché de l’emploi.

Recommandation no 15
Les centrales syndicales enjoignent le gouvernement à s’appuyer sur le système existant de formation de la main-d’œuvre, soit la Loi favorisant le développement et la reconnaissance des compétences de la main-d’œuvre (communément appelée loi du 1 %) et Emploi-Québec pour la dispensation de la formation, et de le renforcer afin de favoriser une formation qualifiante, transférable et reconnue, peu importe l’emploi, ainsi que le développement de la formation continue en entreprise.

Recommandation no 16
Les centrales syndicales demandent au gouvernement d’améliorer l’accès à la formation. Plus précisément, elles recommandent : - De soutenir adéquatement sur le plan financier les personnes qui s’engagent dans une formation ou requalification ; - De permettre la formation professionnelle à temps partiel, comme cela se fait dans tous les autres secteurs et ordres d’enseignement, en levant tous les obstacles règlementaires et financiers ; - D’ouvrir l’enveloppe fermée de la formation générale des adultes comme jalon important d’une réelle stratégie nationale de lutte à l’analphabétisme.

Recommandation no 17
Les centrales syndicales demandent au gouvernement d’accorder un financement accru pour le rehaussement des compétences de base (littératie, numératie et littératie numérique).

Recommandation no 18
Les centrales syndicales recommandent de recourir à la fiscalité pour encourager la main-d’œuvre expérimentée à demeurer sur le marché du travail ou à y revenir. En outre, elles enjoignent le gouvernement à explorer d’autres moyens, assortis d’incitatifs financiers, afin d’adapter les milieux de travail à la main-d’œuvre expérimentée en ayant pour objectif de contrer l’âgisme, d’améliorer la transition entre le travail et la retraite et le maintien en emploi, de rendre disponible et d’adapter la formation et l’organisation du travail de cette main-d’œuvre.

Recommandation no 19
Les centrales syndicales recommandent que des efforts supplémentaires et plus structurants en francisation et en reconnaissance des acquis soient réalisés. Elles recommandent en outre que le gouvernement soutienne davantage les employeurs offrant aux personnes immigrantes, temporaires ou permanentes, l’opportunité de se franciser durant leur travail.

Recommandation no 20
Les centrales syndicales demandent qu’un revenu viable soit garanti à l’ensemble de la population québécoise, notamment en haussant le taux horaire du salaire minimum à 18 $ de l’heure et en relevant l’ensemble des prestations d’assistance sociale au niveau du Programme de revenu de base.

Recommandation no 21
Les centrales syndicales recommandent de bonifier le budget de la CNESST afin que cette dernière puisse pleinement supporter les milieux de travail, dans la foulée de la LMRSST et des allègements au PTET (services aux partenaires, formations, inspectorat, Escouade TET). Elles recommandent en outre qu’une attention particulière soit apportée aux milieux de travail non syndiqués

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