Édition du 16 avril 2024

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Syndicalisme

Bénévolat dans la construction : réactions syndicales

Bénévolat dans les travaux de construction - La CSN appelle à la prudence

MONTRÉAL, le 26 avril 2017 - La Confédération des syndicats nationaux encourage les citoyennes et les citoyens à s’impliquer bénévolement dans leur communauté. Or, le projet de règlement présenté par la ministre du Travail, Dominique Vien, prend prétexte du manque de personnel dans les services publics et de l’état de délabrement des bâtiments publics, causé par les politiques d’austérité et le sous-financement récurrent, pour imposer une très large dérèglementation des travaux de construction avec des conséquences importantes sur l’industrie de la construction comme sur la santé et la sécurité de la population. C’est bien à cause du sous-financement des réseaux que des édifices doivent aujourd’hui faire l’objet de travaux majeurs, voire être carrément démolis puis reconstruits et pour la CSN c’est sur le volet du financement qu’il faut agir afin d’assurer la pérennité de nos bâtiments publics.

« Nous appelons le gouvernement à être transparent et à se mettre en mode écoute lors des consultations à venir, auxquelles nous participerons. Si l’objectif du règlement est de favoriser l’engagement bénévole, nous pensons que le gouvernement ne s’y prend pas de la bonne façon et qu’il créera beaucoup plus de problèmes qu’il n’en solutionnera », réagit le président de la CSN, Jacques Létourneau.

« Cela fait des décennies que nous prévenons le gouvernement comme les gestionnaires des réseaux publics des dangers de ne pas financer adéquatement l’entretien des édifices. La réponse à des années de compressions ne peut pas être de se délester collectivement de nos responsabilités à cet égard », souligne le vice-président de la Fédération de la santé et des services sociaux, Guy Laurion.

Le projet de règlement ne fait pas que permettre le recours à des bénévoles pour de menus travaux de rafraîchissement des bâtiments publics. Il ouvre la porte à la réalisation de travaux importants qui nécessitent une expertise et une imputabilité. « Par exemple, l’amiante est omniprésent dans nos écoles. Des travaux mal faits favorisent les infestations de moisissures. Les ouvriers spécialisés des établissements sont formés et dotés d’équipements particuliers. Ils doivent respecter des protocoles rigoureux. Ce qui est en cause, c’est la santé et la sécurité de la population et du personnel œuvrant dans nos écoles, nos cégeps, nos établissements de santé et de services sociaux. C’est aussi celle des parents et des bénévoles qui n’ont pas l’expertise pour effectuer des travaux majeurs dans les bâtiments publics », explique le président de la Fédération des employées et employés de services publics, Denis Marcoux.

La CSN dénonce par ailleurs le fait que par l’entremise de ce règlement, le gouvernement exclut des travaux aux règles normalement applicables à l’industrie de la construction. « Ce règlement n’est pas un assouplissement de certaines règles trop rigides, c’est la concrétisation d’un fantasme patronal de dérèglementation tous azimuts. On parle de « bénévolat », mais il s’agit ici de désassujettissement du secteur de la construction sans débat. C’est troublant ! », ajoute le président de la CSN-Construction, Pierre Brassard.

Projet de règlement sur les travaux bénévoles en construction - « La déresponsabilisation de l’État va trop loin » - Louise Chabot, présidente de la CSQ

MONTRÉAL, le 26 avril 2017 - L’annonce de la ministre responsable du Travail, Dominique Vien, du dépôt du projet de règlement sur les travaux bénévoles de construction à l’effet de modifier la loi R-20 - Loi sur les relations du travail - inquiète la Centrale des syndicats du Québec (CSQ).

« Les gestes de solidarité que démontrent les bénévoles au Québec sont un acquis précieux pour notre société, tout comme les parents bénévoles qui s’impliquent dans la vie scolaire de leurs enfants. Nous n’en sommes pas là. C’est le transfert des responsabilités de l’État vers la bonne volonté des bénévoles qui pose problème. L’entretien des écoles relève de l’État et de son personnel de soutien. Que le gouvernement en soit rendu à adopter un règlement pour encadrer le bénévolat dans la construction est alarmant quant à son rôle envers la population », soutient Louise Chabot, présidente de la CSQ.

Des questionnements

Plusieurs questions demeurent sans réponse. Entre autres, la Centrale s’interroge sur les modalités qui protègeront les bénévoles. Aura-t-on l’obligation de les inscrire pour qu’ils puissent bénéficier des dispositions de la Loi sur les accidents du travail et maladies professionnelles (LATMP) ? Rappelons que l’inscription des bénévoles dans la loi actuelle est facultative.

Des constats

Il semble bien que la précipitation soit mère de l’inaction en ce qui a trait aux décisions du gouvernement libéral. Sa soudaine fièvre à énoncer un nouveau règlement sur la question bénévole en construction, alors qu’il en avait la possibilité depuis 2011, est étrange. Il donne plutôt l’impression de surfer sur la solidarité témoignée envers les parents bénévoles pour se désengager de son rôle de financer adéquatement les écoles.

La présidente de la CSQ dénonce « la promptitude de la ministre Vien à agir sur cette question, alors qu’elle ne donne aucune indication sur des dossiers nettement plus importants, comme la modification de la Loi sur les normes du travail, annonce faite par la ministre en février dernier lors du Rendez-vous de la main-d’œuvre. C’est là un sujet qui concerne l’ensemble des travailleuses et travailleurs ».

La CSQ suivra de très près le projet de règlement sur les travaux bénévoles en construction. « Le désengagement de l’État va trop loin. Les travailleuses et travailleurs n’ont pas à subir les conséquences de l’action à la pièce », conclut la leader syndicale.

Ouverture aux travaux bénévoles dans la construction : encore une volonté de déréglementation au détriment des travailleurs (CSD)

MONTRÉAL, le 27 avril 2017 - La Centrale des syndicats démocratiques (CSD) s’oppose fermement au projet de règlement sur les travaux bénévoles de construction, préparé dans les officines du ministère du Travail, sans consulter les syndicats de la construction, et qui constitue, une fois de plus, un désassujettissement indirect des travaux de construction.

« À la lecture du projet de règlement, on voit que le problème est fondamental : après la tentative de déréglementation du résidentiel en 1993, on tente encore une fois par voie détournée de désassujettir des travaux de construction. La loi R-20 dans l’industrie de la construction est particulière pour répondre au caractère distinctif du travail des travailleuses et des travailleurs de la construction et les protéger d’une grande précarité d’emploi. Pourtant, à la lumière de ce qu’on lit, en aucun cas les conditions de travail et de vie des travailleuses et des travailleurs de cette industrie n’ont été considérées lors de la rédaction de ce projet de règlement », s’est indigné François Vaudreuil, président de la CSD. Il a ajouté qu’« on a l’impression qu’avec cette règlementation, le gouvernement a voulu tuer une mouche avec un bazooka. La mouche étant l’interdiction de travaux de peinture par des parents bénévoles et le bazooka étant l’ouverture tout azimut à la prolifération de travail au noir, lourde de dommages collatéraux. »

Il sera assurément impossible pour la CCQ de contrôler le travail bénévole, à savoir si la personne est véritablement bénévole, ou si elle travaille au noir. « Le travail bénévole est trop large et trop flou pour être contrôlé. Nous avons écouté avec attention la présidente de la CCQ, Diane Lemieux, qui s’est positionnée en faveur de ce projet de réglementation et qui prétend "ne pas vouloir faire la chasse aux bénévoles". C’est avec stupéfaction que nous avons constaté qu’elle banalise complètement les conséquences qu’aura cette réglementation et nous dénonçons fermement et ouvertement cette attitude irresponsable » a ajouté le président de la CSD.

Il s’agit ici d’une réaction préliminaire. La CSD procédera à une analyse exhaustive des conséquences de ce projet de règlement pour les travailleuses et travailleurs de l’industrie de la construction dans les prochains jours et soumettra ses commentaires à la ministre du Travail, dans l’espoir qu’elle travaille au maintien d’un équilibre qui leur assure d’avoir un travail décent et de qualité pour lutter contre la précarité. Les syndicats de la construction représentent 175 000 travailleurs, ils méritent d’être consultés.

Travaux de construction par des bénévoles, une inquiétante déréglementation selon le SCFP

MONTRÉAL, le 27 avril 2017 - Le Syndicat canadien de la fonction publique (SCFP) via son Conseil provincial du soutien scolaire (CPSS) et son Conseil provincial des affaires sociales (CPAS) dénonce avec véhémence la décision du gouvernement du Québec de permettre à des bénévoles d’effectuer certains travaux de réparation dans les écoles, mais également dans les hôpitaux et les entreprises de moins de 10 salariés.

Selon ce projet, le règlement permettra à des bénévoles d’effectuer le remplacement des fenêtres, le sablage et le vernissage des planchers, la pose de gypse, l’installation de comptoirs dans les écoles, les hôpitaux, les centres de la petite enfance ainsi que dans les organisations sans but lucratif (OSBL).

Fait encore plus inquiétant, les entreprises de moins de 10 salariés seront aussi concernées.

« Nous constatons que l’État se désengage de ses responsabilités et refile la responsabilité aux parents bénévoles. En plus de léser des corps de métiers qui détiennent les compétences pour effectuer ces travaux exigeants, le gouvernement ouvre la porte à du travail clandestin », de dénoncer Denis Bolduc, président du SCFP-Québec.

Il a tenu à préciser que l’organisation qu’il préside considère le bénévolat comme un acquis précieux pour notre société, cependant le transfert des responsabilités de l’État vers des citoyens constitue une autre forme de déréglementation qui risque de poser plus de problèmes que de solutions. Il donne en exemple la santé et la sécurité des bénévoles sur un chantier.

« On sait que chaque année des dizaines de travailleuses et travailleurs qualifiés se blessent ou meurent dans des accidents de travail. Ces personnes souvent qualifiées et équipées ne sont pas à l’abri de dangers, imaginez un bénévole qui a peu d’expérience ! », se désole M. Bolduc.

D’ailleurs, le SCFP-Québec compte être présent lors des consultations publiques sur ce projet de règlement pour faire comprendre au gouvernement l’envergure des problèmes que ce projet risque de créer.

Bénévolat dans la construction — visons des ajustements, pas un chamboulement ! (FTQ-Construction)

À la FTQ-Construction, nous sommes favorables au bénévolat. Dans les dernières années, nous avons participé à plusieurs projets qui rejoignaient nos valeurs sociales.

Le bénévolat a sa place dans l’industrie de la construction

Une mère et ses cinq enfants qui avaient perdu leur maison dans un incendie ont eu l’aide de membres bénévoles de la FTQ-Construction pour la reconstruire. La maison de soins palliatifs Victor-Gadbois sur la Rive-Sud de Montréal a pu construire une nouvelle aile à leur établissement grâce à la FTQ-Construction. Il y a quelques années, la FTQ-Construction avait également offert des bénévoles pour faire des corvées à la suite de la tragédie à Lac-Mégantic.

Ces exemples illustrent les domaines où le travail bénévole fait par des travailleuses et des travailleurs de la construction est le bienvenu.

D’autres travaux faits par des gens qui n’ont pas de carte de compétence pourraient aussi être permis. Pensons à la peinture d’un petit commerce local qui s’apprête à ouvrir ses portes.

Le nouveau règlement pour permettre le bénévolat dans l’industrie de la construction ne va pas du tout dans la même direction.

L’art de se dégager de ses responsabilités

En permettant les travaux bénévoles dans les hôpitaux, les centres de la petite enfance (CPE), les écoles et les organismes sans but lucratif qui remplissent une mission sociale, le gouvernement se désengage et augmente la pression sur les citoyens.

Les taxes et les impôts des familles ne diminueront pas, mais on pourra désormais leur demander de remplacer les fenêtres de l’hôpital, de l’école et du CPE du quartier. Après, on se surprendra d’apprendre que le gouvernement ne veut pas augmenter les investissements dans l’entretien de ces établissements.

Qui pourra blâmer une commission scolaire de ne pas prévoir de budget pour repeindre une école si elle n’a pas besoin de le faire pour que des travaux se réalisent ? Les parents insatisfaits se feront répondre qu’ils ont juste à prendre les choses en main s’ils ne sont pas contents de l’administration de la commission scolaire.

L’art d’ouvrir grand la porte au travail au noir

En élargissant le champ d’application du travail bénévole, c’est le travail au noir qu’on risque d’encourager. La confusion que ce règlement créera pourra être utilisée par des profiteurs pour payer au noir des travailleurs. Ainsi, un entrepreneur pourrait soumissionner sur un projet de construction sans s’inquiéter de respecter les mêmes règles que son concurrent.

Du côté gouvernemental, on ne semble pas s’inquiéter de cette possibilité. Pourtant, le travail au noir dans la construction représente déjà un manque à gagner de plus de 1,5 milliard de $ par année pour le gouvernement. Nos CPE, nos écoles et nos hôpitaux en auraient bien besoin.

L’art d’être incohérent

En 2014, le Parti libéral voulait être le champion de la création d’emplois. On nous promettait la création de 250 000 emplois. Toute l’action gouvernementale devait servir à réaliser cette promesse.

Aujourd’hui, on constate un virage à 180 degrés. Alors que la construction représente un sixième de l’économie québécoise, on veut remplacer des emplois existants par des bénévoles. Le gouvernement croit-il qu’il aidera l’économie québécoise en agissant de la sorte ?

Le gouvernement n’a pas évalué l’impact de cette réforme sur l’industrie de la construction. Combien d’emplois dans la construction seront affectés par cette réforme ? C’est un mystère.

Le gouvernement souhaite faire plaisir aux familles qui veulent améliorer leur communauté. C’est un objectif louable. Mais pour ce faire, faut-il chambouler toute l’industrie de la construction ?

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