Édition du 16 avril 2024

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Féminisme

Décès d'une femme Inuite dans un contexte de violence conjugale postséparation

Pourquoi les femmes inuites continuent de mourir dans des situations de violence conjugale qu’on pourrait prévenir ?

L’Alliance des maisons d’hébergement de deuxième étape pour femmes et enfants victimes de violence conjugale (Alliance MH2) était outrée d’apprendre cette fin de semaine le décès d’Elisapee Angma, une mère de 44 ans assassinée par son ex-conjoint violent qui s’est ensuite enlevé la vie, laissant notamment 4 enfants dans le deuil.

Un décès prévisible

Rappelons que le meurtre survient après que l’agresseur ait été accusé de voie de fait sur Madame Angma le 3 novembre 2020 et qu’il s’en est suivis plusieurs bris de condition en lien à l’interdiction de contact avec Madame Angma et de l’interdiction de consommer de l’alcool. L’Alliance MH2 se questionne d’autant plus sur les circonstances du meurtre alors que la Couronne s’est opposée à la libération de Monsieur lors de son audience de remise en liberté qui a eu lieu le 21 janvier. Deux semaines plus tard il enlevait la vie d’Elisapee Angma dans un ultime moment de prise de contrôle sur sa victime.

«  C’est inadmissible qu’un ex-conjoint violent représentant d’aussi clairs indices de dangerosité ait été remis en liberté et ce, même malgré l’opposition du DPCP. Le système a clairement échoué à protéger cette mère de 4 enfants et les personnes qui ont autorisés sa libération doivent impérativement rendre des comptes. » Souligne Maud Pontel, coordonnatrice de l’Alliance MH2 et membre du comité d’examen des décès liés à la violence conjugale du Bureau du coroner.

Ne serait-ce qu’avec le peu d’informations dans les médias à ce sujet, nous sommes en mesure de reconnaître plusieurs facteurs de risque que ce comité d’examen du Bureau du coroner a mis en lumière dans son premier rapport paru en décembre 2020 notamment la séparation récente du couple et les problèmes de consommation. Ces éléments viennent ainsi ce superposé aux nombreux bris de conditions qui correspondent à des indices évidents de risque de récidive. Il nous semble ainsi complètement incompréhensible que les autorités impliquées n’aient pas mis en place des éléments de protection nécessaires pour prévenir ce meurtre.

Un manque de couverture médiatique et d’indignation générale

Madame Pontel se questionne aussi profondément sur le délai qui sépare l’événement et la couverture médiatique qui en découle. « Comment se fait-il que, dans les heures qui ont suivi le meurtre de Jaelle Cantin, mère de 6 enfants, tous les médias parlaient de la situation, mais quand on parle de l’assassinat d’une mère inuite de 4 enfants, ce soit silence radio pendant deux semaines ?  ».

Il est important de mentionner qu’il y a une nette surreprésentation des femmes autochtones du Nunavik dans les statistiques concernant les meurtres conjugaux. Pour l’année 2020, par exemple, des 8 homicides conjugaux que l’Alliance MH2 a pu recenser dans une revue de presse, 2 femmes inuites ont perdu la vie. La problématique sous-jacente de la pénurie de logement dans les communautés autochtones est indissociable de cette problématique ; les femmes vont endurer plus longuement des violences par manque d’opportunités de logement sur le long terme. Cette problématique superpose à un manque flagrant d’accès à des services adaptés et spécialisés en matière de violence conjugale et plus largement, de services juridiques. Il est primordial que les paliers gouvernementaux concernés adressent ces enjeux dans les plus bref délai. Il en va de la survie des femmes qui résident sur ce territoire !

À propos de l’Alliance :

Les maisons d’hébergement de 2e étape (MH2) ont une expertise spécialisée en violence postséparation, au regard de la dévictimisation, de l’analyse de la dangerosité du conjoint, des impacts sur les enfants exposés à la violence conjugale, de la réinsertion sociale des victimes et de l’autonomisation des femmes hébergées. En 2019, les 24 membres de l’Alliance ont hébergé 512 personnes (223 femmes et 289 enfants) en danger de violence conjugale postséparation dans un parc total de 119 logements et 21 chambres. On évalue que 8% des femmes victimes de violence conjugale auront besoin d’un référencement en maison d’hébergement de deuxième étape. Malheureusement, le taux de refus des demandes admissibles est de 75% à Montréal, et 37% dans les régions où le service existe ! Nous osons espérer que le MSSS débloquera rapidement les 69 nouvelles places en maison de 2^e étape en attente d’approbation depuis 1 AN ET DEMI !

Alliance des maisons d’hébergement de 2e étape pour femmes et enfants victimes de violence conjugale

L’Alliance des maisons d’hébergement de 2e étape pour femmes et enfants victimes de violence conjugale regroupe 20 maisons réparties dans 10 régions du Québec.

www.alliance2e.com

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