Bien qu’il y ait eu certains assouplissements, la consultation permet de mettre en lumière les impacts considérables du gel d’embauche décrété le 1er novembre 2024, ainsi que des compressions annoncées au début de l’été. Notons d’entrée de jeu que, malgré le discours du gouvernement visant à minimiser les conséquences de ses décisions, 95 % des 1 486 personnes ayant participé à l’exercice de consultation affirment en avoir été témoins.
« Les résultats de la consultation démontrent clairement que les décisions néfastes du gouvernement caquiste ont des conséquences bien tangibles, mais qu’elles n’ont aucunement pour effet de réduire la bureaucratie. Bien au contraire, on fait face à une redditionnite aiguë. C’est un véritable parcours du combattant qui vise à réduire les dépenses à tout prix plutôt que de nous permettre de nous attaquer aux besoins criants dans les milieux. De plus, le gel d’embauche crée une pression énorme sur le personnel en place, qui doit assumer des tâches supplémentaires, souvent hors de leur champ d’expertise. Cette situation est intenable et met en péril la qualité des services », ont résumé Éric Pronovost, président de la Fédération du personnel de soutien scolaire (FPSS-CSQ), Carolane Desmarais, présidente de la Fédération du personnel professionnel de l’éducation du Québec (FPPE-CSQ), Valérie Fontaine, présidente de la Fédération du personnel de soutien de l’enseignement supérieur (FPSES-CSQ), et Éric Cyr, président de la Fédération du personnel professionnel des collèges (FPPC-CSQ).
Les élèves à besoins particuliers durement affectés
La qualité des services offerts aux élèves, notamment ceux à besoins particuliers, est directement affectée par le manque de personnel. Au sein des deux réseaux, environ trois personnes sondées sur cinq constatent une diminution du soutien envers les étudiantes, les étudiants et les élèves à besoins particuliers, ou bien une diminution de la qualité de celui-ci.
Dans les écoles et les centres, les techniciennes et techniciens en éducation spécialisée (TES) et autres intervenantes et intervenants sont en sous-effectif, ce qui les amène à délaisser certaines tâches ou à travailler au-delà des horaires normaux sans être rémunérés.
L’augmentation significative du nombre d’élèves à besoins particuliers dans le réseau scolaire se fait également ressentir dans les établissements collégiaux depuis plusieurs années, explique Éric Cyr, président de la FPPC-CSQ. « On a beau réussir à les identifier et à les scolariser, il faut ensuite mettre toutes les chances de leur côté pour qu’ils puissent aller au bout de leur potentiel comme étudiantes et étudiants au collégial. On doit leur offrir les services auxquels ils sont en droit de s’attendre. Ce que l’on constate, c’est plutôt qu’ils ont fait les frais des décisions de la dernière année. De voir autant de répondants affirmer que le soutien à ces jeunes-là a écopé, notamment par la fermeture de centres et de services d’aide, c’est franchement inquiétant », se désole-t-il.
Surcharge à grande échelle
Pour les répondants de la consultation menée par les fédérations, la surcharge se manifeste de différentes façons : 60 % ont dû apporter un soutien additionnel à une ou un collègue, 56 % ont dû assumer au moins partiellement le travail habituellement exécuté par des collègues, 50 % ont raccourci ou sauté leurs pauses, 48 % ont dû augmenter les délais de réponses, 38 % ont accompli du travail supplémentaire en dehors des heures régulières et 26 % ont dû annuler, suspendre ou couper des services (activités pédagogiques, de recherche ou culturelles).
Chez le personnel de soutien du réseau collégial, ce sont 69 % des répondants qui dénoncent une surcharge de travail généralisée alors qu’ils sont dans l’impossibilité de réclamer le paiement de temps supplémentaire.
« L’ingérence du gouvernement dans les embauches a pour conséquence de créer du désengagement et de la démotivation chez le personnel de soutien. Plusieurs des répondants nous témoignent de la diminution de leur sentiment d’appartenance envers leur employeur. D’ailleurs, 94 % ont répondu craindre pour l’attraction et la rétention du personnel. La situation est très inquiétante », a commenté Valérie Fontaine, présidente de la FPSES-CSQ.
Pour le personnel de soutien du réseau scolaire, les constats sont tout aussi alarmants : 75 % des personnes sondées constatent une augmentation de leur charge de travail depuis le gel d’embauche. 73 % des répondants observent une dégradation de la qualité des services aux élèves, et 68 % pour les élèves à besoins particuliers. Près de 60 % doivent soutenir des collègues ou remplacer des postes vacants, tandis que 51 % sont dans l’obligation de raccourcir ou de supprimer leurs pauses. 65 % ont le sentiment de ne pas pouvoir accomplir leur travail pleinement.
Des enjeux de santé mentale
La majorité (60 %) du personnel professionnel et de soutien des réseaux de l’éducation estime que les coupes et le gel d’embauche affectent leur santé mentale.
« Derrière ces statistiques, il y a des personnes épuisées, démotivées et inquiètes pour leur santé mentale. Le gel d’embauche affecte leur santé psychologique, et plus de 92 % parlent d’une augmentation du stress. Ce n’est pas seulement une question de chiffres, c’est une crise », insiste Éric Pronovost, président de la FPSS-CSQ.
« Le gel d’embauche n’est pas qu’une contrainte administrative, il engendre des conséquences humaines profondes. Il plonge une partie importante de notre personnel professionnel en services administratifs dans une détresse psychologique alarmante. Quand 93 % d’entre eux rapportent vivre plus de stress et de démotivation, et que les climats de travail se détériorent, il ne s’agit plus d’un enjeu de gestion, mais d’une crise au travail. Et qu’on ne s’y trompe pas : le personnel professionnel administratif soutient directement les services aux élèves. Prétendre le contraire, c’est nier leur rôle essentiel dans le bon fonctionnement de nos écoles », affirme la présidente de la FPPE-CSQ, Carolane Desmarais.
Annuler en totalité les coupes et le gel d’embauche
« Ce sont les élèves et la population étudiante en général qui paient le prix des décisions prises par le gouvernement. Le manque de ressources compromet leur réussite et leur bien-être. Il est urgent de reconnaître l’importance du personnel administratif et de soutien, et de mettre fin à ce gel d’embauche qui fragilise les réseaux de l’éducation. Il y a tellement de verrous sur les embauches et l’octroi du financement qu’il faudrait se transformer en David Copperfield pour s’en sortir. C’est d’autant plus vrai que les compressions historiques de 151 M$ affectant le réseau collégial sont demeurées entières jusqu’à présent. Les conséquences sont tout simplement dramatiques sur le terrain », concluent les présidences des quatre fédérations affiliées à la CSQ.


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