Édition du 3 décembre 2024

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Europe

La rage contre la police éclate dans les rues de Londres

« Ce n’est pas terminé. Ils continuent à tuer des gens. Quand j’ai vu des personnes juives également avec nous dans la rue je m’en suis réjouie, j’ai pensé que nous n’étions plus seuls, entre nous. Ils nous ont donné de la force, ce n’est pas seulement nous, les jeunes, qui sortons dans la rue, c’est tout le monde ».

La rage contre la police a éclaté dans la nuit du 6 au 7 août à Tottenham, dans le nord de Londres, suite à une protestation contre l’assassinat de la part de la police d’un jeune noir, Mark Duggan, habitant du quartier.

Autour de 200 personnes, dont la famille et les amis de Mark avaient manifesté dans l’après midi à partir de Broadwater Farm jusqu’au commissariat de Tottenham pour protester contre le meurtre. Mark a été tué par balles le jeudi 4 août en soirée. Dans la manifestation se trouvaient des familles entières avec des enfants en bas âge, quelques personnes avec des pancartes faites à la main et criant « Sans justice, pas de paix ». Tandis qu’elles approchaient de l’entrée du commissariat de police, on leur promit qu’un officier de police les rencontrerait afin de répondre à leurs questions. Mais rien de tel ne s’est produit.

En quelques heures, la rage contre la police a explosé. Des voitures de police ont été incendiées ainsi que des magasins et des autobus. Vers deux heures du matin, on pouvait voir de grandes colonnes de feu pourpre sur tout le nord de Londres, tandis que plusieurs édifices étaient incendiés. Plusieurs centaines de personnes ont pris la rue, reflétant la population locale de tous les âges ; aussi bien des noirs que des blancs et des asiatiques, ainsi que des juifs.

Une jeune adolescente, amie de Mark, a déclaré au « Socialist Worker » : « Tout le monde dans le quartier connaissait Mark, il avait 29 ans et quatre enfants, ce n’était pas un jeune adolescent. Ils l’ont tué au bout de ma rue. Les policiers, en théorie, sont entraînés, ils devraient être capables d’arrêter quelqu’un sans devoir le tuer. Pourquoi lui ont-il tiré dans la tête ? Il n’avait aucune possibilité de s’échapper. C’est du pur racisme. Moi-même j’ai été arrêtée par des policiers de nombreuses fois pour la seule raison que je porte une veste à capuche. La police ne nous traite pas avec respect. Maintenant, ils peuvent voir les résultats pour nous traiter de cette manière ».

Elle poursuit en disant ; « Ce n’est pas terminé. Ils continuent à tuer des gens. Quand j’ai vu des personnes juives également avec nous dans la rue je m’en suis réjouie, j’ai pensé que nous n’étions plus seuls, entre nous. Ils nous ont donné de la force, ce n’est pas seulement nous, les jeunes, qui sortons dans la rue, c’est tout le monde ».

Dans un groupe de jeunes, l’un d’eux déclare que la police « affirmait que Mark avait tiré, mais ils n’ont aucune preuve de cela. On ne peut pas croire ce que dit la police ». Après quatre heures d’affrontements, la situation se stabilisa lorsqu’un groupe de policiers anti-émeutes a chargé à Tottenham High Road, empêchant ainsi que d’autres personnes s’ajoutent aux émeutes. Quand les policiers qui venaient en renfort ont traversé la multitude, on pouvait entendre le bruit des pavés et des projectiles qui s’abattaient sur leurs véhicules.

Tottenham a été le scénario de révoltes massives en 1985 quand Cynthia Jarrett, une noire mère de deux enfants est morte après que la police ait fait irruption chez elle. Cela se passa peu de temps après qu’un policier tira plusieurs coups de feu contre une autre femme noire, Cherry Groce, à Brixton, dans le sud de Londres.

Weyman Bennett, membre connu du United Against Fascim (Unis contre le fascisme) et activiste du quartier où il a vécu pendant des années a déclaré au « Socialist Worker » que tandis que la foule s’affrontait à la police ; « L’ambiance était comme dans les années 1980. Il y a un profond malaise à cause du racisme policier et pour la manière dont la police pourchasse les gens du quartier, les arrête et les fouille. Les réductions de dépenses sociales des Tories (le parti conservateur actuellement au pouvoir) signifient qu’on supprime les services et les opportunités pour les jeunes. Le chômage a augmenté et les gens sentent qu’ils n’ont plus d’avenir. On peut voir la situation de pauvreté dans laquelle les gens vivent en regardant ce qu’ils emportent des magasins pillés. J’ai vu des gens courir avec des grands paquets de papier hygiénique et des couches pour bébés… ».

Jody McIntyre, qui fut jeté par la police à bas de sa chaise roulante pendant les protestations étudiantes de l’année dernière, était également à Tottenham : « J’ai pu voir pourquoi autant de monde est sorti dans la rue. Quand la police tire sur quelqu’un, les gens réagissent. Je ne sais pas exactement ce qui s’est passé, mais je sais qu’un policier a été blessé et qu’on a tué une personne par balles. Si cela avait été le contraire, cette personne serait déjà en prison. Nous devons surveiller la police. Nous devons les rendre responsables chaque fois qu’ils nous attaquent ».

Judith Orr. Article publié dans le « Socialist Worker », journal du Socialist Workers Party (SWP) britannique.

Note de la rédaction (10/08/11) : Alors que les émeutes se sont étendues dans plusieurs villes, un premier rapport d’une Commission officielle indépendante vient de conclure que le coup de feu attribué à Mark Duggan par les policiers qui l’ont abattu provenait en réalité d’un des agents de police…

Judith Orr

Socialist Resistance

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