Édition du 16 avril 2024

Une tribune libre pour la gauche québécoise en marche

Amérique latine

Mexique : Le nouveau mouvement étudiant et le changement de régime

L’optimisme, la joie et l’enthousiasme qui nous envahissent ces derniers jours grâce à l’émergence et à l’expression d’un nouveau mouvement étudiant et de la jeunesse, le mouvement « #Yosoy132 » [1], a plusieurs dimensions sur lesquelles je veux m’étendre. Il y en a au moins trois : sa dimension internationale ; la comparaison historique avec le mouvement de 1968 et enfin la dynamique actuelle dans le contexte politique mexicain et la nécessité de lutter contre le régime oligarchique.

Le Printemps des peuples du monde

Depuis l’année dernière, nous constatons une vague de luttes et de révoltes qui s’est étendue dans plusieurs parties du monde. A l’encontre des absurdes visions policières - comme celle du gouvernement mexicain en 1968 qui attribuait l’émergence d’un mouvement social réel à une prétendue « conspiration » - la dynamique internationale des mouvements en cours ouvre un nouveau cycle qui laisse efface les conséquences démobilisatrices de la chute du Mur de Berlin et de la fin de l’URSS, présentées à l’époque comme l’échec du « socialisme » ou comme la « fin de l’histoire ».

Après la période des mouvements sociaux altermondialistes, qui symbolisaient pour certains le fait que l’alternative se situait au sein des seuls mouvements sociaux et en dehors de toute perspective politique, nous entrons aujourd’hui de plein pied dans une phase que Daniel Bensaïd aurait qualifié de « retour de la politique ».

D’une part, nous avons les révolutions politiques qui ont secoué les pays arabes – et qui ont aujourd’hui leur pointe avancée en Syrie – et renversé des régimes autoritaires qui semblaient inébranlables. Les caractéristiques de ces régimes aux discours nationalistes démagogiques, leur contrôle social étouffant toute expérience d’organisation et d’expression collective, ont fait que ces révoltes – bien qu’elles aient une dynamique cherchant une issue démocratique et laïque – rassemblent une opposition large et hétérogène, comprenant y compris des secteurs de la classe dominante et de l’appareil d’Etat qui ont rejoint ses rangs par opportunisme (comme nous pouvons le voir également au Mexique). Malgré tout, c’est une dynamique révolutionnaire qui se fraie un chemin au milieu de la confusion.

Nous avons ensuite, en Europe surtout, l’émergence du mouvement des « Indignés » à partir des mobilisations emblématiques de la Puerta del Sol à Madrid, puis dans tout l’Etat espagnol, ainsi que les révoltes urbaines à Londres l’année dernière. Les Indignés remettent ouvertement en question les effets de cette nouvelle phase du capitalisme sauvage représenté par le néolibéralisme, ses privatisations, sa destruction des droits et des conquêtes historiques du mouvement ouvrier et du peuple. L’anticapitalisme sous jacent de ce mouvement est alimenté par la barbarie de la montée du chômage qui frappe la jeunesse, et tout particulièrement les jeunes diplômés : autre ressemblance avec la radicalité qu’on observe aujourd’hui parmi les étudiants des universités privées au Mexique. Des luttes étudiantes massives ont également lieu au Chili et au Québec.

Des Indignés d’Europe, nous passons au mouvement Occupy Wall Street à New York qui s’est rapidement propagé dans d’autres villes du pays, d’une côte à l’autre, et a notamment suscité une grève portuaire des dockers à Oakland, en Californie. Occupy Wall Street a souligné et dénoncé « l’avarice » des capitalistes dans ce qu’il considère comme une « guerre contre le peuple ».

Retour en Europe avec les mobilisations des travailleurs organisés et la réanimation de méthodes de lutte historiques comme la grève générale, dans une dynamique toujours en cours mais qui trouve aujourd’hui en Grèce son centre décisif. Dans ce pays, la gauche radicale a obtenue des résultats significatifs et elle représente une alternative sur le terrain politique et électoral face à la droite et à la social-démocratie. Les travailleurs grecs ont mené jusqu’à présent 17 journées de grève générale de 24 heures ; une dynamique de lutte élevée qui se traduit désormais sur le terrain électoral.

Face à tous ces événements, depuis plusieurs mois, des analystes de tous bords se demandaient s’il existait une « exception mexicaine », ou si la jeune génération de ce pays était gagnée par l’apathie - mis à part une contestation marginale comme celle qui s’est exprimée au cours de la journée mondiale d’octobre 2011. En réalité, l’indignation au Mexique - un pays soumis à près de six années de violence et d’assassinats consécutifs à la « guerre contre le crime » menée par le président Calderon - a parcouru d’autres chemins plus compliqués. Elle ne s’était pas encore ouvertement exprimée, mais elle avançait au travers du ras le bol contre le régime de violence institutionnelle, contre la décadence, la crise et la décomposition du système des partis institutionnels, contre le contrôle des médias par le pouvoir oligarchique et contre l’insultante et mafieuse concentration du pouvoir et de la richesse aux mains de cette même oligarchie néolibérale.

La résistance des travailleurs, comme ceux du SME [2], des enseignants ou des mineurs s’est maintenue au cours de ces dernières années mais elle n’avait pas encore trouvée, comme ailleurs, un écho dans une mobilisation massive de la jeunesse indignée. C’est chose faite depuis les journées de mobilisations du mois de mai (à nouveau Mai !) où surgit le mouvement #YoSoy132.

L’étincelle qui met le feu aux poudre, ce sont les insultes de l’équipe du candidat du PRI, Peña Nieto [3], qui, soumise aux questions des étudiants à l’Université Iberoamericana n’a rien trouvé de mieux que de justifier de manière cynique et autoritaire la répression menée à Atenco [4] et à désigner les étudiants comme des « provocateurs infiltrés ».

L’étincelle, c’est bien cela : une étincelle qui allume une conscience qui s’accumulait depuis longtemps parmi une jeunesse qui en a assez de la démagogie et de la manipulation des médias dans lesquels les gens sont traités comme des moutons et les politiciens présentés et vendus comme des produits de marketing. C’est une étincelle parce qu’il n’y avait pas de génération apathique en contraste avec cette même génération qui se mobilise dans d’autres parties du monde, il y avait simplement une conscience et une radicalité critique chez les jeunes qui n’avait pas encore trouvé la voie pour s’exprimer de manière massive et publique, jusqu’au mouvement #YoSoy132. A travers ce dernier, les jeunes répondent à l’insulte de « provocateurs infiltrés » en s’identifiant personnellement, en exhibant leurs cartes d’étudiants. En disant également qu’ils ne sont pas manipulés, qu’ils sont contre Peña de manière consciente et informée et qu’ils n’oublient pas Atenco - comme ce fut le cas lorsque les étudiants de l’Iberoamericana ont crié à Peña Nieto : « Nous sommes tous Atenco ! ».

Une conscience qui, sans doute, s’est développée au travers des réseaux sociaux et d’Internet mais qui surgit comme un mouvement réel et non virtuel, dans les rues et dans la mobilisation. Un mouvement qui remplit le Zocalo [5] de Mexico, qui s’exprime dans des mobilisations face à la « Estela de luz » [6] et face aux sièges des chaînes Televisa et TV Azteca, et dans une infinité d’assemblées et de réunions étudiantes qui désignent des portes paroles et, enfin, dans des assemblées générales inter-universitaires, avec les représentants des étudiants de plusieurs villes du pays où le mouvement gagne en ampleur.

Similitudes et différences avec 1968

Comme nous l’avons déjà dit, ce mouvement partage avec celui de 68 une dimension internationale. Une rébellion qui s’exprime de manière inégale dans plusieurs pays pendant plusieurs mois. En 1968, tout commença avec l’offensive du nouvel an vietnamien, le Têt, où les forces de la révolution dirigée par le Vietcong ont pénétré jusqu’à Saïgon, la forteresse du gouvernement fantoche soutenu par les Etats-Unis.

La résistance héroïque du peuple vietnamien qu’illustrait cette offensive a renforcé le mouvement anti-guerre, particulièrement dans la jeunesse des Etats-Unis. Les mobilisations étudiantes et de la jeunesse dans ce pays ont été déterminantes pour le triomphe de la lutte vietnamienne. Mais l’impact des mobilisations contre l’intervention militaire au Vietnam a également été très important en Europe, avec la manifestation de Berlin qui rassembla les étudiants les plus radicaux du continent à l’occasion de la visite du président étatsunien. Après cette mobilisation massive, ce fut l’attentat fasciste contre Rudi Dutshcke, le leader étudiant allemand. En France, avec Mai 68, la mobilisation étudiante fut le détonateur de l’entrée en action de la classe ouvrière, avec la plus grande grève générale de l’histoire du capitalisme français qui rassemblée près de 10 millions de grévistes, avec des occupations d’écoles et d’entreprises.

Le 26 juillet 1968, c’est avec la répression d’une marche de solidarité avec la Révolution cubaine et d’autres provocations que commence le mouvement étudiant mexicain. Au même moment, en Tchécoslovaquie se développait le « Printemps de Prague », la recherche d’un socialisme à visage humain, un socialisme démocratique qui sera finalement écrasé avec l’invasion des troupes du Pacte de Varsovie le 20 août 1968. Ces événements, parmi bien d’autres au Mexique et dans le monde en 1968, étaient l’expression d’un changement historique qui dura plusieurs mois et, dans le cas de l’Italie, jusqu’en 1969 avec le « Mai rampant ».

Bien que le contenu fondamental des revendications du mouvement étudiant mexicain de 68 touchait aux libertés démocratiques, à la différence d’aujourd’hui, le paradigme socialiste était une référence très présente qui allait marquer cette génération. Quelques mois auparavant, en octobre 1967, Che Guevara avait été exécuté en Bolivie. Si l’on observe les photos des manifestations de 68, l’image du Che est omniprésente, et c’est avec son nom que fut rebaptisé l’auditorium de la Faculté de Philosophie « Justo Sierra ». La coïncidence avec les autres mouvements radicaux de l’époque déjà cités, avec la résistance vietnamienne, la Révolution cubaine, la révolution culturelle chinoise ou la lutte anti-bureaucratique dans le Printemps de Prague et la critique de la gauche réformistes, tout cela caractérisé le paradigme de la génération de 68.

Le nouveau mouvement étudiant de 2012 est né orphelin de cette référence socialiste, mais il est influencé par la résistance contre le néolibéralisme dans notre pays et par la vague anticapitaliste des Indignés des autres parties du monde. Une fois de plus, dans ce pays marqué par le manque de démocratie - bien que le régime et ses partis insistent sur la « transition démocratique » -, le nouveau mouvement étudiant #Yosoy132 lève le drapeau des libertés démocratiques. En opposition aux pratiques anti-démocratique du PRI et de la manipulation, le mouvement #Yosoy132 affirme son autonomie, sa conscience et exige le respect des droits des personnes. Il dénonce et s’oppose également à la manipulation médiatique incarnée par les deux principales chaînes du pays, tout comme en 68 le mouvement étudiant dénonçait « la presse aux ordres du pouvoir ».

Le mouvement de 68 était essentiellement étudiant, bien qu’il comptait avec une large sympathie dans le peuple. Il arborait un programme, un cahier de 6 revendications de caractère profondément démocratique, autrement dit politique. Il n’était pas le fruit d’un mouvement de revendications strictement académiques, étudiantes, syndicales, mais bien de nature clairement politiques. C’est pour cela qu’il pouvait, au-delà des étudiants, représenter et prendre la tête des aspirations démocratiques existant dans d’autres secteurs et qui sont le propre d’une société étouffée par le contrôle clientéliste du régime du PRI. C’est ce caractère politique qui faisait sa force et son importance historique.

Le mouvement #Yosoy132 exprime lui aussi l’espoir d’un changement démocratique et, dans ce sens, il est également une lutte fondamentalement politique et pas un mouvement adossé aux intérêts des seuls étudiants. C’est là aussi son importance et sa force dans le contexte actuel. Au niveau des mouvements sociaux, il joue à nouveau le rôle, comme on disait il y a plus de 40 ans, d’une « avant-garde transitoire » dans une révolte démocratique.

Le mouvement de 68 a brisé les structures bureaucratiques de représentations des étudiants, comme la FNET, les comités exécutifs, les sociétés d’étudiants, et a ouvert la voie à une organisation massive, plurielle et démocratique dans les comités de lutte et le Conseil National de Grève, composé de représentants élus et révocables par des assemblées générales. Le mouvement #Yosoy132 s’est rapidement organisé de manière autonome et a constitué une coordination large et plurielle de plusieurs « porte paroles » (ce terme étant préféré à celui de « représentants »), élus par des assemblées étudiantes.

Pendant le mouvement de 68, Internet n’existait pas, ni les téléphones portables, les Blackberry ou Facebook. Il n’y avait pas médias de masse, imprimés ou non, qui ne fussent indépendant, même de manière minoritaire. Le Métro de Mexico, du moins jusqu’à la fin de cette année 1968, n’existait pas non plus. L’immense impact du mouvement dans le peuple, l’écho de son mot d’ordre « Peuple, unis-toi ! », fut le fruit des énormes manifestations qui ont occupé pour la première fois le Zocalo de Mexico et de l’action de milliers de brigades étudiantes parcourant les rues, les marchés, les quartiers populaires, expliquant de manière directe, par la parole, les revendications démocratiques du mouvement, avec le support de milliers de tracts polycopiés.

Il est exact que les réseaux sociaux jouent aujourd’hui un rôle important dans la communication et l’organisation du mouvement – c’est par ce canal qu’est apparue la réponse au PRI donnée par 131 étudiants de l’Université Iberoamericana -, mais ce qui a transcendé le mouvement #Yosoy132, c’est qu’il a occupé les rues. Son expression dans les rues et dans les assemblées intra et inter universitaires fait sa force. C’est un mouvement réel et non virtuel. C’est cette expression dans la mobilisation et l’organisation massives qui font le mouvement. Et c’est cette occupation des rues (les impressionnantes manifestations pratiquement quotidiennes de la fin du mois de mai), qui s’étend dans plusieurs villes du pays ainsi que dans plusieurs écoles et universités, qui l’ont transformé en acteur politique central dans la conjoncture actuelle.

Les caractéristiques politiques actuelles et les défis

Les assemblées et la coordination du mouvement ont rapidement mis en lumières ses principales caractéristiques. C’est un mouvement apartidaire, mais ce n’est pas un mouvement apolitique, abstentionniste ; c’est un mouvement qui appelle à la participation politique mais qui exige pour cela des conditions démocratiques, contre les manipulations médiatiques et les pratiques frauduleuses. L’articulation de ce binôme : apartidaire mais en faveur de la participation politique est fondamentale. Apartidaire dans la mesure où il ne dépend pas d’une structure de parti, ni ouvertement, ni de manière « cachée ». De cette manière, le mouvement garantit à la fois son indépendance politique, son autonomie, tout comme son caractère pluriel, démocratique, inclusif. Mais la pluralité ne veut pas dire ambiguïté face à la situation actuelle. En même temps qu’il est apartidaire, il est clairement en opposition à Peña Nieto et contre le PRI car il est né contre tout ce que représente ce candidat et son parti.

C’est une génération nouvelle, mais elle récupère également des aspects centraux de la mémoire historique du peuple mexicain quand des étudiants crient à Peña Nieto « Nous n’oublions pas Atenco », mêlé à une autre affirmation historique : « Nous n’oublions pas le 2 Octobre » [7]. Il n’y a pas de « nouveau PRI » qui aurait abandonné son caractère historique comme on peut le constater quand Peña Nieto lui-même justifie la répression d’Atenco, tout comme Díaz Ordaz l’avait fait par rapport à la répression de 68. On peut aussi le voir dans les actions des hommes de main du PRI qui attaquent les étudiants lorsque ces derniers protestent dans les rassemblements de campagne de ce parti.

Le nouveau mouvement n’oublie pas. Et il est conscient de ce que signifierait un retour du PRI à la présidence de la République. Il va également plus loin que la question de la répression quand il se définit comme anti-néolibéral. C’est pour cela qu’il n’est pas abstentionniste et qu’il refuse les consignes de vote nul ou d’autres formes de non participation (…).

Le défi qui est devant nous aujourd’hui, au-delà de la grande journée de mobilisation du 1er juillet, est d’obtenir, avec ce réveil du peuple mexicain à la tête duquel se trouve ce nouveau mouvement étudiant, un changement de régime qui nous débarrasse de l’oligarchie néolibérale et qui puisse ouvrir un cycle de transformations et de changements démocratiques radicaux et anti-néolibéraux. López Obrador [8] parle d’un « véritable changement ». Un véritable changement aujourd’hui, ce n’est pas simplement un changement du personnel politique au pouvoir ; c’est un changement de régime effectif. Le premier pas consiste à empêcher tout retour au pouvoir du PRI face à l’échec, à l’effondrement et à l’illégitimité du gouvernement du PAN [9]. Le vote en faveur de López Obrador représente ce premier pas au niveau institutionnel pour empêcher le retour du PRI. Mais c’est un pas en avant à l’intérieur d’une structure institutionnelle dans laquelle on ne peut avoir confiance.

Le nouveau mouvement étudiant a dénoncé avec force la manipulation médiatique et le plan des deux principales chaînes télévisées d’imposer leur Président, l’instrument de l’oligarchie. Il exige des règles démocratiques claires dans la compétition électorale. Il s’agit de la défense du droit de vote, de la lutte contre la fraude, avant et après les élections.

Pour entrer dans cette phase de la lutte, il est fondamental de garantir et de maintenir l’indépendance politique du nouveau mouvement, ainsi que son caractère pluriel et démocratique. Cela est nécessaire non seulement pour combattre la fraude et pour maintenir son indépendance face au prochain gouvernement, même s’il est dirigé par López Obrador, mais aussi pour permettre d’impulser et de continuer la lutte non seulement pour la défaite électorale du PRI, mais pour le véritable changement, pour le changement de régime qu’implique le respect des libertés démocratiques, pour annuler les réformes imposées par le néolibéralisme - comme les privatisations et la suppression des conquêtes et des droits sociaux du peuple et des travailleurs. Pour obtenir, non pas la vengeance, mais la justice face aux milliers de crimes commis aussi bien par le PRI que par le PAN, tout particulièrement dans le cadre de la militarisation imposée par Calderón.

Il est possible de regarder l’avenir immédiat avec optimisme. Mais rien n’est garantit. Cet avenir est également conditionné par le maintien de la révolte et de la lutte du nouveau mouvement, par sa convergence avec tous les mouvements de résistance - comme celui du SME et son projet d’une nouvelle organisation politique pour les travailleurs [10] – qui se sont maintenus pendant la longue nuit néolibérale, ainsi qu’avec la perspective politique d’un véritable changement de régime proposé par López Obrador.

Les examens et les vacances étudiantes n’affecteront certainement pas cette impulsion radicale et démocratique car elle est historique et non simplement circonstancielle. C’est un retour de la lutte politique qui remet en questions les vieilles structures et institutions corrompues et manipulatrices du régime oligarchique, mais qui cherche aussi des chemins nouveaux pour la participation politique, distincts de ceux des partis institutionnels, y compris ceux qui se disent de gauche. Cette nouvelle impulsion, cette nouvelle montée des luttes, démontrera sans cesse plus qu’une autre gauche est nécessaire : une gauche radicale qui grandit et s’alimente dans les luttes et qui renoue avec ses caractéristiques en tant que gauche socialiste, révolutionnaire, internationaliste, féministe et écosocialiste.

La participation politique, activiste et militante dans les rues, dans cette nouvelle montée des luttes, n’est pas conjoncturelle. Elle requiert un projet politique à long terme, révolutionnaire, qui est le propre de la gauche socialiste.

Notes

[1] Littéralement : « Je suis le 132e », en référence à l’appel lancé signé par 131 étudiants de l’Université Iberoamericana contre les déclarations de Peña Nieto sur Atenco.

[2] Syndicat Mexicain des Électriciens (SME). Martín Esparza, secrétaire général. Regroupe environ 16 000 des plus de 40 000 travailleurs licenciés en octobre 2009.

[3] Parti révolutionnaire institutionnel (PRI). Parti qui a dominé le Mexique durant 71 ans avec un régime autoritaire et clientèliste de quasi parti unique. A instauré un Etat politico-militaire muselant les droits des citoyens. La classe travailleuse n’a jamais pu compter avec une représentation propre et est historiquement liée au PRI, au moyen de l’affiliation massive et obligatoire des syndicats. Enrique Pena Nieto est le candidat du PRI à la présidentielle. Il prône l’entrée du capital privé dans le monopole public du pétrole.

[4] En mai 2006, à Atenco (à 40 Km de Mexico), des affrontements ont eu lieu entre des militants du mouvement des paysans sans terre et la police. La répression policière, ultra violente, y a fait un mort par balle, de nombreux viols dans les fourgons de la police et dans les commissariats. 217 des personnes arrêtées se sont mise en grève de la faim suite à ces événements. La volonté du gouvernement mexicain était clairement d’instaurer un climat de terreur en s’attaquant non seulement aux paysans, mais également a toute la population de la ville, qui ne participait pas au conflit. Ces journées d’émeute et de répression ont donné lieu à une formidable opération de manipulation de la part de media dominants.

[5] La Plaza de la Constitución, plus communément appelé El Zócalo, est une place de Mexico située dans le cœur du centre historique de la capitale. C’est une des plus grandes places au monde.

[6] Monument commémorant le bicentenaire de l’indépendance mexicaine.

[7] 2 octobre 1968, date du massacre d’une centaine d’étudiants par l’armée mexicaine.

[8] Andrés Manuel López Obrador, désigné par ses initiales AMLO, a participé à la fondation du Parti de la Révolution démocratique (PRD) en 1989. Chef de gouvernement du District Fédéral de Mexico (2000-2005), puis candidat à la présidence en 2006 contre Felipe Calderón (candidat du PAN, proclamé président), dont il a contesté les résultats avec l’appui de toute la gauche mexicaine.

[9] Parti d’action nationale (PAN). Parti de droite au pouvoir. Felipe Calderon, président de la République depuis 2006.

[10] Organisation politique du peuple et des travailleurs (OPT). Créé en août 2011 à l’initiative du syndicats des électriciens

* Retranscription écrite d’une conférence donnée le 1er juin 2012 devant un groupe de jeunes provenant de plusieurs districts de l’Etat de Zacatecas, Mexique

Source : http://www.anticapitalistas.org/Mex...

Traduction : Ataulfo Riera

Edgard Sánchez Ramirez

Parti révolutionnaire des travailleurs, Mexique

Sur le même thème : Amérique latine

Sections

redaction @ pressegauche.org

Québec (Québec) Canada

Presse-toi à gauche ! propose à tous ceux et celles qui aspirent à voir grandir l’influence de la gauche au Québec un espace régulier d’échange et de débat, d’interprétation et de lecture de l’actualité de gauche au Québec...