Édition du 23 avril 2024

Une tribune libre pour la gauche québécoise en marche

Syndicalisme

Pour le rejet des ententes entre la CAQ et les bureaucraties syndicales

Ça ne règle rien sur le fond et ça bloque tout espoir d’un nouveau 1972

Il faut écouter l’entrevue du Midi-Info (15/01/24, 12h43) avec une enseignante du quartier Saint-Michel à Montréal pour comprendre pourquoi elle-même et, selon ses dires, ses collègues de son école, suite à une réunion tâtant le pouls de chacune et chacun, penchent pour le rejet de l’entente de principe de la FAE à moins de l’accepter « par désespoir » comme elle le dit. Le salaire négocié n’est pas à la hauteur de leur formation universitaire et de leur responsabilité ajoute-elle. Elle aurait pu préciser que s’il compensera peut-être pour l’inflation — la formule compensatrice des trois dernières années est bloquée à seulement 1% de plus — dont celle de 2022 à retardement, il n’y aura rien pour le rattrapage. L’accentuation de la crise climatique et sans doute des guerres n’augurent rien de bon au sujet du contrôle de l’inflation. Et on est encore très loin d’égaler la rémunération globale des personnes salariées des autres secteurs publics qui au départ était supérieure de près de 23%.

Selon l’enseignante, là où le bât blesse ce sont pour les améliorations sectorielles pour lesquelles la FAE attendait beaucoup. Il ne faut pas oublier que dans le Grand Montréal syndiquée à la FAE, les conditions d’enseignement sont généralement plus difficiles qu’ailleurs pour cause de milieux plus pauvres, d’immigration plus importante nécessitant l’apprentissage du français et, last but not least, d’un écrémage plus important qu’ailleurs par les écoles privées. Premièrement, les personnes aidantes dans les classes ne seront pas les spécialistes requises pour lesquelles il n’y a pas d’engagement même au bout de la longue convention collective de cinq ans, pas plus que pour la création de nouvelles classes allégeant le fardeau de celles existantes. Affirmer qu’il est impossible maintenant d’y remédier n’excuse pas le fait de ne pas s’engager concrètement pour les années suivantes et n’est pas effacer par un bonus compensatoire qui ne règle rien de conclure l’enseignante. Sans compter, ajoute l’enseignante, que l’aide escomptée même déficiente nécessite un pointage complexe difficilement atteignable.

Côté santé, c’est moins clair. Mais les négociations avec la FIQ traînent en longueur parce qu’en plus de l’offre salariale inadéquate elle ne veut rien savoir de la « flexibilité » exigée par la CAQ dans la cadre de la prise en mains du secteur santé par les « top guns ». Ce qui laisse entendre que le Front commun a avalé la pilule en retour de compensations monétaires additionnelles pour les quarts difficiles et les types d’emploi où l’écart avec le marché était criant. Faut-il aussi comprendre que côté éducation le Front commun ait aussi fait preuve de flexibilité ce qui serait moins problématique pour la CSQ syndiquant hors les plus difficiles grands centres urbains ? Il faut donc comprendre que la CAQ a su non pas jouer les syndicats hors Front commun contre celui-ci mais l’inverse allant jusqu’à instaurer une politique de retour en classe acceptable pour mieux faire passer l’amère pilule. Réalisant la manœuvre, si elles le réalisent, les syndiquées du Front commun sauront-elles faire preuve de solidarité en rejetant le corporatisme de leurs directions syndicales ? Prendre cinq semaines pour voter l’entente sent à plein nez la volonté manipulatoire de la bureaucratie syndicale qui veut bien encadrer toutes ces assemblées.

Si cette entente de principe passe, cette pseudo victoire féministe, dixit Le Devoir, laissera le même goût amer de statuquo amélioré que la soi-disant victoire du printemps érable de 2012. Le fond de l’air dégagera la même odeur nauséabonde d’occasion ratée sans aucun autre relais qui pointe à l’horizon. Cette défaite stratégique, car c’est bien de cela qu’il s’agit, laissera le peuple québécois, et encore plus son prolétariat, face au grand vide existentiel de la prolifération des guerres sur fond d’un emballement de la crise climatique que se hâtera de combler la montée de l’extrême-droite fascisante qui menace cette année aux États-Unis et peu après au Canada. Plus que jamais, s’impose un nouveau 1972,

Marc Bonhomme, 15 janvier 2024
www.marcbonhomme.com ; bonmarc@videotron.ca

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