Édition du 26 mars 2024

Une tribune libre pour la gauche québécoise en marche

Québec

Urgent – Déclaration paysanne

L’Union paysanne est fière d’initier la déclaration climatique paysanne. Producteurs-trices et citoyenNEs responsables, signez avant mercredi 28 novembre ; soyons nombreux-ses à demander un changement radical en agriculture !

Déclaration pour l’action climatique des PAYSANNES du Québec

Nous unissons nos voix en tant que paysannes et paysans pour livrer au nouveau gouvernement du Québec un message important concernant les générations présentes et à venir.

Le 10 septembre dernier, le secrétaire général de l’ONU, António Guterres lançait cet appel à l’action :

 Aujourd’hui, je lance un appel aux responsables politiques, aux dirigeants d’entreprises, aux scientifiques, et au grand public. Si nous ne changeons pas de trajectoire d’ici 2020, nous risquons de rater le moment où nous pouvons encore éviter un changement climatique incontrôlable, avec des conséquences désastreuses pour les individus et tous les systèmes naturels qui nous nourrissent... Les scientifiques nous le disent depuis des décennies.

 Il est encore temps de renverser la tendance. Nous avons les outils pour rendre nos actions efficaces. Ce qui nous manque encore - même après l’Accord de Paris - c’est le leadership et l’ambition de faire ce qui est nécessaire... Il n’y a pas de temps à perdre.

 Je m’engage, ainsi que l’ensemble des Nations Unies, à cet effort. Nous soutiendrons tous les dirigeants qui relèvent le défi que j’ai décrit aujourd’hui.[1]

Depuis ce message de l’ONU, le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) a déposé un rapport confirmant sans équivoque l’urgence de la situation [1]. Considérant l’accélération sans précédent des bouleversements écologiques actuels et les risques critiques d’effondrement qui pèsent sur les écosystèmes dont nos sociétés dépendent, nous demandons :

1. Que tous les partis reconnaissent l’urgence environnementale comme l’enjeu prioritaire de notre époque et que le nouveau gouvernement s’engage, dès l’ouverture des travaux parlementaires, à effectuer avec vigueur la transition vers une économie durable.

2. Que le gouvernement du Québec mette en place, dès l’ouverture des travaux parlementaires, une structure de gouvernance de ses activités qui témoigne de l’urgence manifeste à engager le Québec dans une transition socio-économique permettant d’atteindre les cibles de réduction des émissions de gaz à effet de serre (GES) auxquelles la société québécoise s’est déjà engagée ;

3. Que toutes les politiques publiques et les actions qui en découlent priorisent les enjeux climatiques et écologiques en se donnant les ressources nécessaires en terme de disponibilité de personnel et de financement. Étant donné l’abondance de ses ressources naturelles (eau, vent, soleil, minerais et territoires fertiles) et de l’expertise nécessaire à leur exploitation durable, le Québec est très bien positionné pour donner l’exemple en mettant en place rapidement la transition environnementale.

Les chiffres sont alarmants : à l’échelle planétaire, l’agriculture est responsable d’environ 20% des émissions globales de gaz à effet de serre. L’empreinte écologique de ce secteur est donc supérieur à celui du transport (18%). L’urgence d’agir est donc présente.

La configuration de notre système agro-alimentaire se trouve au coeur même du problème. Comment pouvons-nous nous expliquer, à cette heure où les changements climatiques menacent la survie d’une très large frange de la population humaine, que l’équivalent de 225 000 hectares de nos cultures de soja au Québec (soit 80% de la superficie totale) est directement destiné à l’exportation vers les marchés internationaux ; que la moitié des tomates produites sur notre territoire quittent vers l’extérieur et qu’une quantité comparable soit importée des États-Unis et du Mexique ; que pendant ce temps, près de deux millions de demandes d’aide sont faites aux banques alimentaires québécoises mensuellement ; ou que l’équivalent de onze milliards de poulets traverseront nos frontières en provenance des États-Unis, faute de l’AEUMC, mais qu’unE paysanNE n’est pas autoriséE à produire plus de 99 coqs à chair sans détenir de quotas au coût prohibitif ?

En 1985, l’assiette des Québécois.es était composée à 80% de produits locaux. Aujourd’hui, c’est à peine le tiers (33%) de notre nourriture qui provient de nos sols et de notre territoire : cette situation, dont la tendance qui s’aggrave indique une perte considérable de notre souveraineté alimentaire, doit impérativement changer. Dorénavant, il ne suffit plus de prier les citoyenNEs de faire des achats locaux - et donc de supporter le mythe que la mitigation des enjeux environnementaux reposent sur l’individu - mais bien de mettre en place des politiques publiques qui rendraient accessible la consommation locale. Nous sommes convaincus, à relativement court terme, qu’il soit possible d’instituer un système agro-alimentaire nourricier qui permettraient à nos sols et nos paysanNEs d’approvisionner durablement l’ensemble de la population québécoise.

Les paysanNEs du Québec oeuvrent à créer un système alimentaire durable, en misant sur les marchés de proximité et la consommation locale et en construisant des systèmes de cultures agroécologiques - et de surcroît durables. De cette façon, la paysannerie québécoise se trouve au coeur de la lutte contre les changements climatiques. Pourtant, à l’heure actuelle, le système de production industriel - qui essentiellement, repose sur la monoculture et le mono-élevage - est financée à la hauteur de deux milliards de dollars des sommes provenant des paliers provincial et fédéral. En comparaison, on estime que pour le secteur biologique et maraîcher, c’est à peine un million de dollars qui sont redistribués. Cette iniquité flagrante du financement de l’agriculture rend nos gouvernements directement complices des changements climatiques.

Pour l’épauler dans ce défi, nous proposons :

1. Que le gouvernement convoque, dès la première session parlementaire, des États généraux sur l’urgence climatique. La transition nécessite un effort concerté et sur tous les fronts, de façon simultanée. Des États généraux sont donc nécessaires pour assurer une cohésion entre le gouvernement, les différents secteurs clés de l’économie, la société civile et la population québécoise.

2. Que le gouvernement change son paradigme en cessant de considérer les produits agricoles comme un bien industriel à exporter et en s’engageant clairement dans une démarche de souveraineté alimentaire. Le gouvernement doit modifier radicalement la tendance actuelle du financement de l’agriculture, en octroyant des ressources monétaires considérables qui permettraient l’émergence d’une paysannerie forte et qui lui permettrait de construire des réseaux forts de consommation locale grâce à des systèmes de production véritablement durables. En mots clairs, nous exigeons de nos autorités politiques que des efforts réels soit mis dans la construction d’un système basé sur les principes de l’agroécologie dans une perspective de souveraineté alimentaire

3. Que le gouvernement s’engage formellement dans la réduction des pesticides, des fongicides et des OGM et qu’il rende obligatoire l’étiquetage des OGM au Québec.

4. Que le gouvernement soutiennent concrètement, avec des budgets et des équipes d’expertEs, l’agriculture paysanne, soit :

 Les fermes à échelles humaines, autonomes, diversifiées, créatrices d’emplois local, facilement transmissibles et écologiques.

 La transformation et la mise en marché à la ferme ou dans des petites entreprises à caractère local, régional ou spécialisé ;

 Des pratiques agricoles respectueuses des sols, des animaux, de l’environnement et de la santé des humains.

 L’ouverture du statut de producteur, des programmes agricoles et des structures de production et de mise en marché (plans conjoints, quotas, réglementation, crédit agricole, zonage, etc.) pour faire de la place aux nouveaux-elles producteurs-trices, aux jeunes, aux producteurs-trices à temps partiel, aux producteurs-trices transformateurs, à la vente à la ferme, à l’agriculture de proximité et de diversité ;

 La démocratie rurale qui redonne à l’ensemble des citoyens ruraux le pouvoir d’aménager leur territoire et de se prononcer sur les projets industriels locaux par référendums décisionnels.

5. Que l’exploitation des ressources naturelles ne profitent pas qu’aux grandes exploitations d’exportation mais permettent aux citoyens des régions où elles sont localisées d’en tirer leur subsistance et leur développement, dans des entreprises diversifiées, à échelle humaine et familiale. La pêche côtière et la forêt périphérique devraient être réservées à l’exploitation paysanne.

6. Que le gouvernement rétablisse la liberté syndicale dans le monde agricole et modifie la loi qui autorise l’accréditation d’une seule association pour représenter les agriculteurs, de façon à permettre à l’Union paysanne, une union constituée selon la loi des syndicats professionnels, de représenter officiellement les producteurs et citoyenNEs concernéEs par la production et l’alimentation paysannes.

La situation que nous affrontons aujourd’hui est probablement la plus grave qu’ait connue l’humanité à ce jour. L’impact des changements climatiques est de plus en plus perceptible. Il s’accentuera dramatiquement si des actions concrètes ne sont pas entreprises pour y remédier rapidement. La protection de notre éco-système ne doit plus être considéré comme un enjeu partisan, mais bien un de sécurité nationale, de protection des citoyens et du territoire.

Nous croyons que le Québec doit être au coeur de la solution en inspirant les pays du monde entier par une action efficace et concertée. Nous attendons donc d’ici la rentrée parlementaire du 27 novembre 2018 une réponse à cet appel de la part de tous les partis politiques.

Nous espérons aussi que tous les citoyens sauront reconnaître l’importance de la situation et travailleront ensemble afin de transformer ce défi historique en une occasion de créer une société meilleure pour toutes et pour tous.

Pour signer la déclaration paysanNEs.

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