Tiré de Europe Solidaire Sans Frontières
22 avril 2025
https://www.europe-solidaire.org/spip.php?article74800
Ces mesures, critiquées depuis longtemps par le mouvement transgenre, sont fondées sur de fallacieux arguments médicaux utilisés pour harceler cette population. Les bloqueurs hormonaux sont des substances utilisées chez les enfants et les adolescents afin de ralentir la puberté. Il s’agit de médicaments utilisés et approuvés depuis des décennies chez les enfants cisgenres présentant une puberté précoce ou un retard idiopathique de croissance.
Chez les enfants et les adolescents trans, ils sont utilisés dans le but de retarder le développement des caractéristiques sexuelles secondaires, qui sont permanentes et souvent sources d’une dysphorie importante pour ces personnes. L’idée derrière ce traitement est de donner aux jeunes plus de temps pour consolider leur identité de genre, ce qui facilite la thérapie de substitution hormonale si le jeune décide de poursuivre sa transition. Il s’agit d’un traitement réversible, traditionnellement utilisé chez les personnes cisgenres, qui présente de nombreux avantages pour les jeunes transgenres, leur évitant de passer par une puberté qui peut très souvent être traumatisante.
L’obligation d’un accompagnement psychiatrique, quant à elle, découle d’une pathologisation de la transidentité qui est extrêmement violente pour nous. Depuis toujours, les milieux conservateurs s’efforcent de faire passer dans l’imaginaire collectif la transidentité et l’homosexualité pour des maladies. Il est important que nous gardions en mémoire que l’Organisation mondiale de la santé considérait l’homosexualité comme une maladie jusqu’en 1990 et la transidentité jusqu’en 2019. Qualifier la « différence » de « maladie » implique qu’il y a quelque chose à soigner, et le CFM, en rendant obligatoire le suivi psychiatrique pour que les personnes trans aient accès à des traitements qui sauvent leur vie, s’inscrit dans cette logique.
Face à une décision qui, de toute évidence, ne repose pas sur des fondements scientifiques solides, mais qui a un impact considérable sur la vie de milliers de personnes transgenres, la question se pose : pourquoi le CFM s’en prend-il à cette population ? La vérité est que la résolution n° 2.427/2025 n’est pas un acte isolé, mais seulement un petit élément d’une offensive mondiale de l’extrême droite contre les personnes transgenres. Aux États-Unis, le gouvernement Trump délivre des visas et des passeports aux personnes transgenres sous le genre auquel elles ont été assignées à la naissance et transfère les femmes transgenres emprisonnées dans des prisons pour hommes. Au Royaume-Uni, sous la pression de groupes féministes « radicaux », alliés à l’extrême droite et financés par la bourgeoisie britannique, la Cour suprême a adopté une définition du terme « femme » qui exclut délibérément les personnes transgenres.
Au niveau international, l’extrême droite met en œuvre une nouvelle stratégie pour rallier les masses à son projet mortifère : créer un climat de panique morale où certaines populations (personnes transgenres, immigrés, musulmans, etc.) sont prises pour cibles. Partant de l’amalgame homophobe entre la communauté LGBT et la pédophilie, on construit un discours selon lequel les personnes trans chercheraient à s’en prendre à la jeunesse et donc que notre lutte pour que les enfants et les adolescents trans puissent avoir accès à des traitements qui sauvent leur vie ferait partie de ce projet. C’est dans ce contexte de prétendue attaque contre l’enfance que des dirigeant·es fascistes se présentent comme les seul·es à avoir le courage de mener ce combat.
Au Brésil, l’effet de cette nouvelle stratégie de l’extrême droite est déjà visible, non seulement avec l’offensive du CFM, mais aussi à travers des figures telles que Lucas Pavanato, conseiller municipal le mieux élu de São Paulo, qui non seulement s’est fait élire en promettant d’exclure les personnes transgenres de certains espaces publics tels que les sanitaires et les installations sportives, mais qui, dès son premier mois de mandat, a déposé trois projets de loi antitrans. Dans un contexte de crise du bolsonarisme, avec l’inéligibilité de Bolsonaro, la persécution des personnes transgenres a été l’une des stratégies de ce secteur pour conserver son audience et tenter de reprendre le pouvoir.
De ce point de vue, il convient de rouvrir les débats précédemment menés par cette plateforme sur les moyens de vaincre l’extrême droite. Contrairement à ce que certains secteurs de la gauche défendent, on ne peut pas dire que l’emprisonnement de Bolsonaro, uniquement et simplement décidé par la Cour suprême, suffira à mettre fin au bolsonarisme, qui reste profondément enraciné dans les masses. Pour défaire définitivement le fascisme, il faut entretenir des processus de mobilisation qui font progresser la conscience de la population et démoralisent l’extrême droite. Ainsi, si nous voulons aller jusqu’au bout dans la lutte contre l’extrême droite, le rôle des révolutionnaires est d’être aux côtés des personnes trans, car nous savons qu’elles ont été systématiquement utilisées comme épouvantails par ces milieux qui n’y regardent pas à deux fois avant de sacrifier leurs droits afin d’en tirer un gain politique.
Cela signifie, entre autres tâches, qu’il nous faut être aux côtés des personnes transgenres dans leur lutte pour leur droit à la santé et contre la résolution n° 2.427/2025 du CFM. Cette lutte, qui connaîtra un moment fort le 24 avril avec la manifestation nationale organisée par l’IBRAT et l’ANTRA, a mobilisé des milliers de jeunes transgenres, prêts à affronter l’extrême droite pour défendre leurs droits. Nous devons descendre dans la rue non seulement pour la dignité et le droit à la santé des jeunes trans, mais aussi parce que nous comprenons que ces attaques font partie d’une stratégie du bolsonarisme pour conserver son influence.
Ekop Novis
P.-S.
• Traduit pour ESSF par Pierre Vandevoorde avec l’aide de DeepLpro
Source - Movimento revista 22 avril 2025, 11h51. 22 avril 2025, 11h51 :
https://movimentorevista.com.br/2025/04/a-resolucao-transfobica-do-cfm-e-o-ataque-da-extrema-direita-as-pessoas-trans/
• Ekop Novis est militante du collectif Juntos !, étudiante en droit, directrice du DCE Livre de l’USP et membre du collectif Intertransvestigênere Xica Manicongo
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