Édition du 26 mars 2024

Une tribune libre pour la gauche québécoise en marche

Syndicalisme

Construisons les États généraux du mouvement syndical

La FTQ et la CSQ ont lancé l’appel en début d’année à la mobilisation pour des États généraux de l’ensemble du mouvement syndical. Louise Chabot, présidente de la CSQ en appelle à un regroupement des forces syndicales au Québec dans le but de tenir des États généraux rassemblant tant les forces syndicales, les organismes communautaires que les partis politiques : « L’année 2014 sera celle de tous les combats, puisque le bilan de 2013 est loin d’être reluisant. On tente par tous les moyens affaiblir le mouvement syndical et de le réduire à sa plus simple expression ». Pour le nouveau président de la FTQ Daniel Boyer, les régimes de retraite et l’organisation des États généraux du syndicalisme sont au centre des priorités.

Il faut saluer cette initiative et y consacrer toutes les énergies disponibles. Les attaques contre le mouvement syndical ont pris une allure d’offensive en règle contre les acquis sociaux et économiques de la population et met en péril la survie même du mouvement syndical tel qu’on le connaît. Selon Louise Chabot, es États généraux serviront non seulement à jeter des liens entre les organisations syndicales et la société civile, mais à tracer le portrait précis de la situation au pays : « Pour ma part, je crois que nous devrions également ouvrir nos portes à nos alliés naturels, les organisations communautaires et citoyennes mais également aux politiciens, tous partis confondus. »

Cette mobilisation prend principalement pour cible le gouvernement fédéral. En effet le gouvernement Harper a sonné la charge avec le projet de loi C-525 qui s’attaque au processus de syndicalisation et remet en question la formule Rand, le projet de loi C-377 qui s’immisce dans les activités syndicales, et le projet de loi mammouth C-4 qui révise la notion de service essentiel et les règles d’arbitrage. Il a permis la disparité de traitement en intervenant dans les négociations des employéEs d’Air Canada syndiquéEs avec les TCA maintenant UNIFOR, imposé une loi spéciale aux employéEs de Postes Canada « en lock-out » et aboli maintenant le service de livraison à domicile tout en augmentant les tarifs. Les modifications à l’assurance-emploi quant à elles, prennent les travailleurs et travailleuses en otage en les obligeant à accepter des conditions à rabais ou encore à déménager. À cela il faut aussi ajouter toutes les coupures de subventions aux organismes communautaires comme les groupes de femmes. La liste est longue et le bilan douloureux.

L’offensive de la droite ne se limite pas au gouvernement Harper. Le gouvernement péquiste a fait reculer le Québec en refusant d’abolir la taxe santé. Sa complaisance avec le gouvernement conservateur concernant le traité de libre-échange Canada-Europe met en péril l’économie régionale au Québec au profit de l’exportation du bœuf de l’ouest. Elle permet au pétrole le plus polluant de la planète de traverser le Québec sans mot dire avec tous les risques environnementaux que cela implique. Ce gouvernement s’en est pris aux plus démunis en apportant des règles plus restrictives pour les bénéficiaires d’aide sociale, il a également coupé dans les budgets des CHSLD et s’apprête à mettre fin à l’accès gratuit des chambres au CHUM et CUSM en la remplaçant par une tarification selon les revenus. Le faux débat concernant la laïcité s’ajoute au bilan sombre du gouvernement péquiste qui utilise les craintes de l’étranger comme écran de fumée pour camoufler ses décisions politiques anti sociales.

Des États généraux et populaires sont dans cette situation une bonne occasion de faire un retour sur ce qui a permis à la droite de prendre force et de développer des perspectives. Mais pour y arriver il est essentiel de dresser un tableau complet et pas seulement sur ce qui parait le plus évident. On comprend que la lutte contre le gouvernement Harper fait consensus au Québec, mais cela ne doit pas servir d’exutoire pour passer sous silence l’offensive du gouvernement québécois. Organiser une riposte contre la montée néolibérale au Canada et au Québec exige une analyse approfondie des causes d’une telle situation et un certain examen de conscience afin de ne pas reproduire nos erreurs.

La CSN quant à elle dressé un bilan tout aussi sombre du gouvernement conservateur mais ne privilégie pas la mise en place d’états généraux. Dans son message pour 2014, le président de la CSN Jacques Létourneaux se distancie de la FTQ qui est sous les feux de la commission Charbonneau. Cela pourrait expliquer qu’il fasse bande à part. Peut-être pense-t-il gagner ainsi en crédibilité ? C’est pourtant la dernière chose à faire. Si la FTQ a connu des problèmes d’une plus grande ampleur, les stratégies de concertation et de partenariat social constituent le principal carcan qui a empêché le mouvement syndical de livrer une véritable bataille, et cela concerne tout le monde. Plus que jamais l’unité syndicale est à l’ordre du jour !

André Frappier

Militant impliqué dans la solidarité avec le peuple Chilien contre le coup d’état de 1973, son parcours syndical au STTP et à la FTQ durant 35 ans a été marqué par la nécessaire solidarité internationale. Il est impliqué dans la gauche québécoise et canadienne et milite au sein de Québec solidaire depuis sa création. Co-auteur du Printemps des carrés rouges pubié en 2013, il fait partie du comité de rédaction de Presse-toi à gauche et signe une chronique dans la revue Canadian Dimension.

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