Comme dans l’ensemble des syndicats du secteur public, les mandats de grève à la FAE ont été votés (en juin) dans des assemblées bondées et par des majorités écrasantes. En Outaouais, environ 1800 enseignants (sur environ 4000) ont pris part au vote et la majorité était au-dessus des 90%.
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Comment expliquer un tel niveau de mobilisation ? Essentiellement par le caractère odieux et sans précédent des demandes patronales. Tout indique que le gouvernement Couillard a simplement demandé aux gestionnaires des institutions publiques d’éducation (comme dans la santé par ailleurs) de mettre sur la table tous leurs moindres désirs. On demande aux enseignantes et aux enseignants d’accepter plus d’élèves dans leurs classes, de laisser tomber la pondération des élèves ayant des handicaps ou des troubles d’apprentissage, de passer plus de temps à l’école et d’abandonner toute autonomie professionnelle.
Si on ajoute à cela les offres intersectorielles, on devrait accepter de travailler plus et de prendre notre retraite plus tard, et ce pour un salaire déclinant. Pour le secteur de l’éducation des adultes, la partie patronale veut éliminer le plancher d’emploi, un gain relativement récent, et revenir aux belles années durant lesquelles on pouvait enseigner à temps plein pendant 15 ans ou plus avant d’obtenir un poste permanent.
Et tout ça dans un contexte de compressions budgétaires perpétuelles qui saignent à blanc les budgets des commissions scolaires et des écoles, entrainant des coupures de postes dans l’administration et chez les professionnels, entre autre. Il s’agit, ultimement, d’une opération de sabotage de l’école publique qui constitue depuis les années 1960 la fondation du projet social québécois. Bien des profs sont déjà au bout de leur rouleau, et on leur demande encore une fois de « faire plus avec moins » !
Le vrai test reste à venir
S’il suffisait de démontrer l’appui des membres pour les positions syndicales pour gagner, la bataille contre ce gouvernement serait déjà terminée. Mais tous comprennent que cette journée n’était qu’une étape sur un chemin ardu et rempli d’embuches. Le discours de clôture du président de la Fédération, Sylvain Malette, exprimait de la combativité et de la détermination. On peut s’en réjouir. Mais le discours officiel des directions syndicales à la FAE (comme au Front commun) est toujours axé sur l’hypothèse d’un règlement négocié. On écarte toute discussion sur la préparation à une éventuelle loi spéciale comme prématurée. Pourtant, il est évident que la partie patronale demeure inflexible.
La prochaine journée de grève, qui se tiendra d’une manière rotative durant la seconde moitié d’octobre, sera une occasion d’approfondir la mobilisation au niveau local en forçant non seulement la levée des cours mais la fermeture des institutions. Puis la troisième journée reste en réserve, probablement pour favoriser une convergence avec d’autres organisations mobilisées contre les politiques d’austérité. À noter, la FAE est un membre actif de la Coalition Main rouge (contre la tarification et la privatisation). Aussi, il n’est certainement pas exclu que la FAE demande d’autres mandats de grève à ses membres.
Mais au bout du compte, ce sera notre réponse collective aux décrets et à la loi spéciale, en alliance avec l’ensemble des organisations démocratiques et populaires, qui déterminera l’issue de cette période de mobilisation. Toutes les initiatives favorisant les échanges à la base sur cette question sont les bienvenues, incluant les activités du réseau de syndicalistes de Québec solidaire et les assemblées organisées sous la bannière de Lutte commune (http://luttecommune.info/ ).
La grande manifestation du Front commun, le 3 octobre, était un signe encourageant. On y voyait entre autre une de ces énormes bannières de l’ASSÉ, rappelant les belles journées de 2012, avec un slogan des plus approprié : « Saccage libéral : Grève sociale ». C’est dans cet esprit de lutte unitaire et politique contre un gouvernement autoritaire au service des dominants que se trouve notre meilleure chance de l’emporter.