Édition du 23 avril 2024

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Europe

Dossier Droites extrême et extrême droite

Les politiques migratoires en Europe et le pouvoir d'influence de l'extrême droite

Presse-toi à gauche poursuit la publication du dossier sur l’expansion des droites extrêmes en Europe, phénomène qui risque de se propager jusqu’ici au Québec avec des couleurs locales et aux États-Unis avec le Tea Party. Il est important de comprendre et d’éviter tout banalisation de ces courants politiques nauséabonds pour en bloquer tout développement.

S’il y a bien un élément commun entre les principales formations d’extrême droite au niveau européen, c’est leur rejet de l’immigration. La totalité de ces organisations hétérogènes font des immigrés, de préférence pauvres et non occidentaux, les boucs émissaires de la dégradation des conditions de vie socio-économiques.

De plus, ce rejet s’est propagé, avec une facilité relative, bien au-delà de ces formations, imprégnant le débat politique dans son ensemble car étant partiellement assumé par les partis majoritaires et les institutions de l’UE elles-mêmes. On peut parfaitement parler d’un véritable « pouvoir d’agenda », compris dans le sens de la capacité d’établir les priorités programmatiques, les problèmes soulevés et les discours qui déterminent les termes du débat politique dominant.

Dans ce sens, l’extrême droite a commencé à engranger ses succès à partir de la fin des années 1980, puisqu’elle a su introduire à l’ordre du jour certaines questions, présentées comme des phénomènes étroitement liés entre eux, telles que la sécurité, l’immigration « illégale » et « incontrôlée » et la « perte de l’identité nationale ». Cette dernière thématique, en particulier, a commencé à prendre une importance croissante puisque l’identité est aujourd’hui conçue d’une manière essentialiste, en tant que caractéristique ethno-culturelle correspondant à un peuple, ou comme un attribut civico-politique qui se considère comme un produit original de la tradition européenne et nationale. De là découlent les tests d’intégration auxquels sont soumis les immigrés sur les « valeurs civiques » ou le débat lancé par Sarkozy sur la nature de l’identité française.

Les origines de la question : l’immigration en tant que « problème »

Dans l’Europe capitaliste, la « découverte » de l’immigration comme fait politique central surgit au début des années 1970, lorsque la plupart des pays, face à la récession économique, mettent un terme aux politiques d’importation de main d’œuvre étrangère et inaugurent une phase de fermeture (relative) des frontières. Selon une lecture simpliste, on pense que les travailleurs étrangers vont rentrer dans leur pays, ce qui ne se produit pas. Au contraire, leur nombre augmente au cours des années suivantes, avec les déséquilibres Nord-Sud croissants provoqués par la mondialisation, l’offensive néolibérale, l’effondrement du « socialisme réel » et l’ émergence de la question des réfugiés.

La présence de migrants, dans ce contexte nouveau, devient un « problème » pour les différents gouvernements, qui adoptent des mesures restrictives variées, créant ainsi un cadre politique et rhétorique qui sera efficacement exploité par les partis d’extrême droite. En effet, les nouveaux partis « post » ou « neo » fascistes et populistes, vont rapidement apprendre à politiser avec succès la question migratoire, en rejetant la culpabilité de tous les maux sur ces « autres », supposément porteurs d’une altérité irréductible.

Le politologue italien Ignazi (2006) illustre cette dynamique en faisant référence à l’expérience du Front national en France. Lors des élections européennes de 1984, ce parti fait irruption avec force sur la scène publique en obtenant 11,1% des suffrages et deux parlementaires. Sa campagne électorale a reposé en grande partie sur la problématisation de l’immigration, considérée comme la cause de l’insécurité urbaine, de l’augmentation du chômage et de la concurrence pour des services sociaux restreints ; une situation face à laquelle le FN dresse la bannière de la « préférence nationale » (« les Français d’abord »).

Les partis du centre-droite traditionnel (UDF et RPR), jouant les apprentis sorciers, acceptent ce terrain de confrontation et reprennent à leur compte une bonne partie des thématiques lepénistes, légitimant ainsi un nouvel espace politique qui, cependant, sera occupé au cours des années suivantes par le protagonisme croissant du Front national. Comme le souligne D’Appollonia : l’utilisation de la xénophobie par l’extrême droite a été facilitée par la banalisation des préjugés xénophobes, et cette banalisation a été accélérée par les partis traditionnels quand, dans leur tentative de freiner le succès de l’extrême droite, ils ont adopté des positions similaires sur les thèmes de l’immigration, de l’identité nationale, ou de la sécurité (D’Appollonia, 2007 : 200).

Ce processus de modification de l’agenda politique s’est étendu dans toute l’Europe, quelles que soient les attitudes formelles adoptées envers l’extrême droite. Tant les gouvernements qui ont installé un « cordon sanitaire » destiné à l’écarter du pouvoir et à l’isoler, que ceux qui l’ont intégré au sein de coalitions majoritaires, tous ont terminé par se placer sur son terrain en termes de discours et de contenu politique.

Ainsi, la véritable victoire de l’extrême droite a été la normalisation de son discours et l’introduction de ses thématiques à la fois dans le débat général comme dans les politiques publiques officielles. Dans la suite de cet article, nous analyserons comment s’articule aujourd’hui ce pouvoir d’agenda sur les politiques migratoires de plusieurs pays européens.

France : le FN comme fer de lance de la droite xénophobe

La montée du Front national aux européennes de 1984 consacre cette formation comme étant le principal parti émergeant de la droite populiste et xénophobe européenne. La capacité médiatique de son leader, Le Pen, ensemble avec les nouvelles revendications mises en avant — non à l’immigration, défense de l’identité française entendue dans un sens réactionnaire et de préférence nationale — fait du FN le premier parti anti-immigrés au niveau européen et montre la voie de la nouvelle stratégie à suivre dans les autres pays.

Dans les deux dernières décennies, l’importance accordée par les lepénistes aux thématiques migratoires n’a pas seulement augmenté, elle a de plus pris de plus en plus la forme d’une islamophobie marquée. En 1991, le FN lance son programme « Immigration ; 50 mesures concrètes », où il propose d’interrompre la construction de mosquées et d’établir un contrôle strict sur les centres islamiques (Betz, 2007). Lors des élections présidentielles de 2002, avec un débat général centré sur l’immigration et la sécurité, il obtient 16,86% des suffrages et passe au second tour.

Face à ce succès notable, on assiste alors à une radicalisation croissante de la droite traditionnelle, qui peut être observée en comparant les programmes électoraux du FN et de l’UMP aux élections de 2007. Le Front national exige que les aides sociales soient réservées aux Français ; l’expulsion de tous les « illégaux » ; la suppression du regroupement familial et de l’obtention « automatique de la nationalité » ainsi que la réduction du permis de résidence de 10 à 3 ans (EFE, 2007). L’UMP, pour sa part, plaide pour créer un Ministère spécifique de l’Immigration ; pour favoriser la seule immigration qualifiée et propose des subsides aux imams musulmans afin qu’ils enseignent les « valeurs françaises » ; s’oppose à l’entrée de la Turquie dans l’UE, etc. Son leader, Sarkozy, se profile de plus en plus comme un partisan de la ligne « dure » par sa politique au Ministère de l’Intérieur, notamment au cours de la révolte des banlieues de 2005.

Ainsi, la victoire de l’UMP, loin de supposer un adoucissement des politiques migratoires, marque leur durcissement. Comme prévu, on instaure un Ministère de l’Immigration, de l’Intégration, de l’Identité Nationale et du Co-développement. Son ministre, Brice Hortefeux, fait passer une loi qui impose, pour les futurs regroupements familiaux, l’organisation de cours sur les « valeurs françaises » dans le pays d’origine, la connaissance de la langue et la signature d’un « contrat d’intégration » qui responsabilise la personne résidant déjà sur le territoire par rapport à la conduite du candidat ou de la candidate au regroupement familial. On établit également un test d’ADN pour vérifier la véracité des demandes, ainsi que la récolte d’informations démographiques basées sur des critères ethniques.

Une autre mesure impulsée par le gouvernement Sarkozy, cette fois-ci au niveau communautaire, est le « Pacte européen sur la migration et l’asile », approuvé par le Conseil européen d’octobre 2008. Ce document, outre la sanction qu’il donne aux priorités de l’UE sur cette matière au cours des dernières années, met en avant des politiques d’intégration « reposant sur l’équilibre entre les droits (accès à l’emploi, au logement et aux services sociaux) et les obligations des migrants (respect des lois et de l’identité du pays d’accueil) ». Traduit du langage juridique à un style moins grandiloquent, cela revient à dire que les droits sont conditionnés au respect d’une supposée « identité » du pays d’accueil, pensée en des termes de plus en plus culturels et essentialistes.

Dans cette foulée, au début de 2009, le nouveau ministre de l’Immigration, Éric Besson, lance un « débat sur l’identité nationale » pour réaffirmer l’orgueil d’appartenir à la nation. L’appel de Le Pen à la défense des traditions et de l’identité française trouve là un nouveau point d’appui de la part de la droite gouvernementale. (À l’été 2010, avec l’expulsion collective des Roms sur bases ethniques et le projet de loi de « déchéance » de la nationalité française pour les personnes « d’origine immigrée » ayant attenté à la vie de représentants des forces de l’ordre, un nouveau pallier a été atteint, NDT).

En fin de compte, si le FN a connu des hauts et des bas électoraux, il a gagné le plus important : ses thématiques sont aujourd’hui au cœur et conditionnent entièrement le débat politique. La lepénisation des esprits n’est plus un vain mot, comme Le Pen lui-même l’a déclaré pendant les élections de 2002 ; « Tout le monde parle comme moi, je me suis normalisé » (Casals Meseguer, 2003 : 70).

Pays-Bas : le mouvement anti-musulman

Plusieurs pays de l’Europe du Nord, comme la Suède, le Danemark et les Pays-Bas, ont été historiquement célébrés pour leur État providence et ont également longtemps été considérés comme des modèles de référence exemplaires pour leurs politiques multiculturelles et respectueuses des droits, tant des immigrés que des populations « autochtones ». Malgré cet héritage, au cours de la dernière décennie, on a assisté à un tournant régressif, caractérisé par l’émergence de formations d’extrême droite ayant une orientation islamophobe très marquée. Le cas hollandais, où 8% de la population est de confession musulmane, est emblématique de ce phénomène à partir du triomphe de la Liste Pim Fortuyn aux élections de 2002. Une formation politique qui, malgré l’assassinat de son leader, obtient 17% des votes et participe, même si ce n’est que quelques semaines, au pouvoir dans le gouvernement de Jan Peter Balkenende. Cet événement représente la légitimation officielle des discours xénophobes.

Après la dissolution de la LPM, le Parti pour la liberté représente depuis lors la principale force anti-immigrés : après avoir obtenu 16,9% aux dernières élections européennes, elle a obtenu un raz-de-marée électoral aux élections locales à Almere et à La Haye pour ensuite tripler le nombre de ses élus lors des élections législatives de juin (de 9 à 24 sièges sur 150). Son leader, Geert Wilders, considéré comme l’héritier de Pim Fortuyn, poursuivi pour incitation à la haine, développe un discours économiquement libéral et se pose en défenseur des libertés civiles qu’il oppose à l’immigration non occidentale. Il considère l’Islam comme une idéologie totalitaire « fasciste » (comparant le Coran avec Mein Kampf), comme une culture homogène opposée aux droits de l’Homme et aux droits des femmes et des homosexuels.

Selon ses propres termes ; « Pourquoi ne serait-il pas permis de dire que les musulmans doivent s’adapter à nous, vu le fait que nos normes et nos valeurs sont plus élevées, meilleures et plus humaines ? Je dis non à l’intégration et oui à l’assimilation ! » (Betz, 2007 : 128-129). Lors de sa dernière campagne électorale, Wilders a ouvertement déclaré sa haine de l’Islam, il a affirmé que Mahomet était un terroriste et que lorsqu’il croise une personne avec un foulard, il se sent dans un autre pays. (Wilders défend ainsi l’instauration d’une taxe pour celles qui le portent, NDT). Il a également proposé de fermer les frontières aux ressortissants des pays musulmans, d’interdire le Coran et de réguler la vente des aliments halal (Oliver, 2010)…

Dans le cas hollandais, nous voyons que la diffusion d’un sentiment anti-immigrés n’a pas été un simple « produit d’importation » de l’extrême droite, mais bien un processus plus général de remise en question de la « tolérance » traditionnelle auquel les partis traditionnels ont activement participé. Par exemple, au cours de ces dernières années, ont été adoptées des mesures qui rendent plus difficile l’obtention du statut de réfugié politique. On a réalisé des déportations massives de demandeurs d’asile et on a mis sur pied l’ « Inburgeringscursus », un cours d’intégration obligatoire qui comprend l’étude de la langue, de la culture et des « valeurs hollandaises ». Dans un tel contexte, l’extrême droite ne peut qu’être à l’aise.

Italie : l’extrême droite au pouvoir

Dans ce pays, à côté de formations d’orientation néofasciste et « nationalistes-révolutionnaires » relativement marginales, existent d’autres forces anti-immigrés qui influencent directement les politiques menées à partir de positions gouvernementales. Par rapport aux premières, il faut mentionner des organisations telles que Forza Nuova, Fiamma Tricolore, Casa Pound, qui, entre autres choses, proposent l’instauration d’une « mutuelle sociale » et des prêts avantageux pour l’achat d’un logement uniquement pour les citoyens italiens.

Dans les partis institutionnels, il existe au moins trois courants significatifs : la Fondation « Fare Futuro » dirigée par le président de la Chambre des Députés, Gianfranco Fini, ex secrétaire du Movimiento Sociale Italiano — héritier du Parti fasciste mussolinien — devenu ensuite l’Alleanza Nazionale qui a finalement fusionné avec Forza Italia pour fonder le parti du Peuple des libertés de Berlusconi — avant de rompre récemment avec lui. Cependant, à partir de positions ouvertement xénophobes ce parti a de plus en plus évolué vers une droite conservatrice classique, proposant y compris le droit de vote pour les immigrés aux élections municipales.

En second lieu, on trouve le parti La Destra (la droite), qui a oscillé entre des positions pro-gouvernementales et des postures plus « critiques » et « sociales » et dont la porte-parole est Daniela Santanchè, qui a déclaré au cours d’un récent programme télévisé que Mahomet était un pédophile.

Il y a, enfin, le parti le plus ouvertement raciste et influent dans l’arène politique, la Liga Norte. Son discours n’a rien à envier à celui du Front national, il est même plus grossier encore. Une de ses figures de proue, Mario Borghezio a été le protagoniste d’actes racistes répétés tels que la dispersion de restes de porcs sur un terrain destiné à la construction d’une mosquée ou encore son irruption dans un train avec un vaporisateur de parfum afin de le « désinfecter » de la présence d’immigrés… L’un de ses ministres, Roberto Calderoli, a déclaré par rapport aux musulmans : « S’ils pensent que leur civilisation est grande, qu’ils le démontrent. Si ce n’est pas le cas, la porte est grande ouverte. Laissons-les retourner dans leur désert pour parler avec les chameaux ou dans leur jungle pour parler avec les singes » (Betz, 2007 : 120-121).

Bien plus qu’un phénomène de pouvoir d’influence sur l’agenda politique, on peut parler dans le cas italien d’une profonde imbrication entre l’exécutif de Berlusconi et la droite raciste. Ce qui ne veut nullement dire que les précédents gouvernements de centre-gauche étaient blancs comme neige sur ce terrain là, bien au contraire.

En effet, la loi « Turco-Napolitano » (1998), approuvée par le gouvernement de Prodi, a été la première à établir les Centres de transit temporaires (CIE), des centres de rétention pour immigrés « illégaux ». Sa réforme de la part de la droite au travers de la loi « Bossi-Fini (2002) n’a fait que durcir les mesures répressives déjà existantes, par exemple en accélérant l’expulsion immédiate des « illégaux ». Il faut dire qu’en Italie, le discours sécuritaire atteint des dimensions incroyables : en 2008 le gouvernement était disposé à réaliser un fichage collectif de la population gitane malgré les protestations de l’UE. En 2009, il a approuvé le « paquet de sécurité » qui crée le délit d’immigration illégale, augmente la durée de détention dans un CIE jusqu’à six mois, prévoit des peines d’emprisonnement pour ceux qui hébergent des sans-papiers et « libéralise » les patrouilles de milices privées non armées.

En janvier 2010, juste après les événements de Rosarno, Berlusconi déclare qu’« Une réduction du nombre des personnes extra-communautaires en Italie représente une diminution des forces qui vont grossir les rangs des criminels » (Velasco, 2010).

Le thème de l’intégration au niveau local acquiert aujourd’hui une centralité renouvelée puisqu’il se traduit par une forte conflictivité autour du partage de services sociaux sans cesse plus réduits. On assiste à l’émergence de « maires-shériffs » tel que celui de la municipalité d’Adro qui, en avril dernier, en se justifiant de la préférence nationale, a approuvé l’exclusion des enfants d’immigrés des cantines scolaires, prenant prétexte de l’insolvabilité des parents. On assiste également dans le sud de l’Italie à d’autres cas d’apartheid, comme à Foggia où l’on a établi une ligne d’autobus qui, de facto, est réservée aux étrangers qui résident dans un centre d’accueil des environs. Les autorités italiennes ont instauré, comme dans d’autres pays, l’apprentissage obligatoire de la connaissance de la langue et des « valeurs civiques ». Mais il se traduit par un permis de résidence à points, qui peuvent se perdre y compris suite à des amendes de circulation automobile…

Quelques observations en guise de conclusion

Dans cet article, nous avons tenté de démontrer le pouvoir d’influence de l’extrême droite sur l’agenda en matière de discours et de politiques migratoires. S’il serait simpliste de penser que le caractère de plus en plus restrictif des mesures sur l’immigration dépend uniquement de ce facteur, il serait au contraire erroné de sous-estimer son importance. Les exemples traités ici ne sont pas des faits isolés et ponctuels, ils sont emblématiques d’une dynamique plus générale à l’œuvre dans tout le continent européen et qui, à des degrés divers, affecte pratiquement tous les pays : de la Hongrie à la Serbie en passant par l’Angleterre, la Suisse, la Belgique, la Roumanie…

Bien que le degré de légitimité formel de l’extrême droite et sa place dans l’arène institutionnelle diffère d’un pays à l’autre et bien que les questions relevant de l’immigration peuvent légèrement varier en fonction des différents contextes nationaux et historiques, cette dynamique générale se manifeste de manière très similaire partout : la banalisation du racisme et l’approche de l’immigration comme étant un « problème » à résoudre ont pavé la voie à l’extrême droite, qui a su profiter de l’ouverture de cet espace politique afin de développer ses discours racistes, se doter d’une légitimité sociale et influencer l’agenda politique bien au delà de son poids électoral réel (par ailleurs en croissance).

D’autre part, il faut souligner l’attitude extrêmement réservée de l’UE, pour ne pas parler de sa condescendance et de sa responsabilité directe. Elle se cantonne généralement soit à des condamnations timides et platoniques peu suivies d’actions réelles, soit à faire purement et simplement l’autruche. On ne peut pas expliquer non plus les politiques migratoires répressives européennes au travers du seul prisme du pouvoir d’influence de l’extrême droite, car bien que cette dernière soit en train de se renforcer, c’est la gauche social-libérale et la droite qui tiennent fermement les rennes de la construction européenne, dans tous les domaines. On peut au contraire affirmer que les politiques européennes en la matière ont « profité » de l’existence des forces xénophobes et du danger qu’elles représentent afin de masquer leur propre racisme institutionnalisé (Van Dijk, 2003).

Des mesures telles que la « Directive sur la Carte bleue », qui vise à fragmenter les droits et les conditions de travail de la main d’œuvre migrante en fonction de ses qualifications professionnelles, démontre clairement que le véritable objectif de l’UE n’est pas de supprimer l’immigration « illégale », mais bien de rendre « invisibles » de vastes secteur de la forces de travail, de les criminaliser et de les marginaliser afin de favoriser au mieux leur exploitation et leur rentabilisation.

En dernière instance, pour l’UE capitaliste, les migrations ne sont pas seulement une question principalement économique. Il faut malheureusement s’attendre à ce que, face aux contradictions croissantes provoquées par la profonde crise sociale, économique et écologique, les migrants deviennent de plus en plus les boucs émissaires des échecs du système et que les partis d’extrême droite en récoltent en premiers les fruits.

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