Édition du 16 avril 2024

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Environnement

Mémoire concernant le projet d’oléoduc Énergie Est de TransCanada – section québécoise

Mémoire de la Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec soumis au Bureau d’audiences publiques sur l’environnement

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| 20 avril 2016 |

Introduction

La Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec (FTQ) représente plus de 600 000 membres qui oeuvrent dans l’ensemble des secteurs d’activité économique. Nous intervenons régulièrement sur une foule d’enjeux affectant nos membres ainsi que les travailleurs et les travailleuses de manière générale.

La FTQ est résolument engagée dans la lutte aux changements climatiques . Nous militons pour que la transition vers une économie plus sobre en carbone soit juste pour les travailleurs, les travailleuses et leurs communautés. Puisque les bienfaits de cette lutte seront partagés par tous et toutes, les coûts doivent également être répartis de manière collective. Ainsi, ce ne sont pas les travailleurs et les travailleuses des industries plus polluantes qui doivent à eux seuls faire les frais de ces changements structurels. La FTQ estime qu’il faut tenir compte des coûts sociaux et favoriser la création d’emplois de qualité dans l’ensemble des régions du Québec afin de s’assurer du succès de la lut te aux changements climatiques. Sans cela, l’on demande aux travailleurs et aux travailleuses de faire le choix entre leur survie à court terme et celle de la planète à long terme. Cette situation n’est pas acceptable.

Le projet d’oléoduc Énergie Est de TransCanada, qui vise à transporter 1,1 million de barils de pétrole par j our de l’Ouest jusqu’à la côte e st du Canada, suscite la controverse. Nous sommes bien placés pour en parler. En tant que centrale syndicale, nous doutons fortement de la pertinence d’un tel projet alors que la FTQ - Construction, un syndicat affilié, soutient sa réalisation, en raison du potentiel de création d’emplois . Ces divergences illustrent l’importance des débats et des discussions entourant cet oléoduc .

Bien que nous déplorons la tenue d’un BAPE générique au lieu d’un examen plus en profondeur , la première phase des audiences nous aura permis d’en apprendre plus sur le projet. Nous sommes l oin d’être des spécialistes des oléoducs, mais ce que nous avons entendu et lu ne nous a p as rassurés, bien au contraire. D’après notre cadre d’analyse, nous ne po uvons que remettre en question l a pertinence d’Énergie Est . L’ léoduc n’améliore en rien la sécurité énergétique du Québec étant donné que la très grande majorité du pétrole sera exporté à l’international . En ce qui a trait aux retombées économiques, peu d’e mplois seront créé s à long terme , mis à part durant la phase de construction. Les risques et les impacts potentiels à la suite d’un déversement demeurent importants et plusieurs questions restent en sus pens . Quant à l’acceptabilité sociale, nous ne pensons pas qu’elle puisse être ob tenue en raison de l’attitude de fermeture et de l’arrogance du promoteur, du processus déficient de consultations et de l’opposition grandissante au projet. En matière de lutte contre les changements climatiques, l’oléoduc peut difficilement se concilier avec la protection du climat. Pour ces raisons, nous estimons que les inconvénients d’Énergie Est surpassent ses avantage s.- De multiples consultations sur les hydrocarbures

Au cours des dernières années, les consultations sur les hydrocarbures se sont succédé à un rythme effarant. Pensons, entre autres, à celle sur l’exploration et l’exploitation des hydrocarbures en milieu marin, au gaz de schiste, à la politique énergétique, à l’évaluation environnementale stratégique (ÉES) globale sur les hydrocarbures et à l’ÉES sur l’île d’A nticosti. La FTQ a longtemps demandé une réflexion sur l’ensemble de la filière d es hydrocarb ures. L’ÉES globale aurait p u jouer ce rôle, mais elle ressemblai t davantage à un exercice de relations publiques. Loin de constituer une exception, cette ÉES est plutôt représentative des consultations des dernières années. C’est pourquoi nous adoptons une attitude de prudence lorsque le gouvernement entreprend des consultations sur les quest ions reliées aux hydrocarbures.

L’ÉES globale devait porter sur une foule d e questions , dont « [l’]évaluation des risques relatifs à la sécurité de la population et des biens liés au transport des hydrocarbures [1] ». Les enjeux associés à la construction de l’oléoduc Énergie Est ont été peu abordé s lors de ces consultations. Malgré les défauts de l’ÉES globale , il aura it été intéressant d’avoir en main le rapport final avant le début des audiences du BAPE afin d’être informé d es constats tirés par rapport au transport des hydrocarbures.

Un mandat incomplet et un processus confus

Dès novembre 2014, la FTQ a demandé, co njointement avec d’autres organisation s , que le projet Énergie Est fasse l’objet d’un e analyse du BAPE. Plus de six mois après l’envoi de cette requête, en juin 2015, le ministre de l’Environnement, David Heu rtel , mandate le BAPE afin qu’il fasse enquête et tienne des audiences génériques [2]au lieu d’u ne étude en profondeur . Or, la réglementation de la Loi sur la qualité de l’environnement est sans équivoque. La « c onstruction d’un oléoduc d’une longueur de plus de 2 km dans une nouvelle empri se [3] » constitue un projet assujetti à la Procédure d’évaluation et d’examen des impacts sur l’environnement ( PÉEIE ) [4] 4. Nous comprenons ma l la décision du ministre considérant que la portion québécoise de l’oléoduc s’étendra it sur environ 650 kilom ètres. Habituellement, la tenue d’un BAPE générique ne sert pas à analyser un projet aussi spécifique, mais plutôt à examiner des questions d’ordre général [5].

Puis, le ministère de l’Environnement a demandé à plusieurs reprises à TransCanada de s e conformer aux l ois québécoises. Puisque le projet devrait être assujetti à la Procédure d’évaluation et d’examen des impacts sur l’environnement, cela implique le dép ôt d’un avis de projet ainsi qu e la réalisation d’une étude d’impact. TransCanada a toujours refusé de le faire, prétextant que seules les lois fédérales s’appliquent. Au lieu de répliquer avec vigueur, le ministre de l’Environnement a plutôt fait preuve d’attentisme. Ce n’est que q uelques jours avant le début des audiences génériques du BAPE sur Énergie Est qu’il a déposé une demande d’injonction afin que TransCanada respecte les lois québécoises. Étant donné la taille du projet et les risques qui lui sont associés, pourquoi a-t-on attendu aussi longtemps ? Pourquoi le ministre a - t - il initialement défendu son choix de tenir des audiences génériques alors que, selon certains, cela contreviendrait à la Loi sur la qualité de l’environnement [6] ?

Avec le rejet de l’injonction des groupes environnementaux visant à a rrêter les travaux du BAPE, les intentions du gouvernement commencent à se préciser. L’actuel BAPE sur Énergie Est servirait donc à préparer la position du gouvernement québécois pour les audiences de l’Office national de l’Énergie ainsi que la directive m inistérielle précisant les éléments devant être inclus dans l’étude d’impact de TransCanada [7]. D’après les dir es du gouvernement, il devrait ensuite y avoir une deuxième enquête du BAPE. Cette fois - ci le proj et serait assujetti à la PEEIE. Il y aura it donc une deuxième consultation publique sur le même sujet. C’est à la suite de ce BAPE que le gouvernement choisirait d’émettre ou pas un certificat d’autorisation pour le projet d’oléoduc.

Bref, le dossier d’Énergie Est nous apparaît confus. La questio n du port pétrolier de Cacouna et de la protection des bélugas est une illustration concrète de cette situation. Les travaux de forage o nt été suspendus par les tribunaux à la suite du dépôt d’une injonction par des groupes environnementaux. Ce jugement a mis en lumière des faiblesses importantes dans la prise de décision du ministre de l’Environnement pour l’émission des certificats d’autorisation. Il aurait été beaucoup moins compliqué, et plus cohérent, de contraindre TransCanada à respecter les lois env ironnementales du Québec dès le début du processus. À l’avenir, nous espérons que le gouvernement agisse avec célérité dans la défense des lois et des compétences du Québec en matière environnementale.

En ce qui a trait au mandat actuel du BAPE, nous estimons qu’il comporte d’importes lacunes. L e ministre exclut plusieurs éléments , dont les questions d’approvisionnement en gaz naturel, des retombées économiques et fiscales , ce qui comprend la création d’emplois, ainsi que du respect des obligations de consultation envers les Premières N ations. Plus spécifiquement, - nous nous questionnons sur la raison ayant poussé le ministre à ne pas inclure le volet économique du mandat du BAPE et de le confier au ministère des Finances et au ministère de l’Énergie et des Ressources naturelles (MERN). Pour nous, la création d’emplois constitue une dimension fondamentale lorsque l’on examine de plus près le projet d’oléoduc Énergie Est. Si l’on se fie aux dernières analyses de Fin ances Québec portant sur les hydrocarbures de l’île d’Anticosti, il y a de quoi être inquiet. En effet, le Collectif scientifique sur la question du gaz de schiste a relevé plusieurs erreurs méthodologiques qui remettaient en cause la crédibilité même de c es analyse s [8]. Comme mentionné dans le livre vert sur l’acceptabilité sociale du MERN déposé en février dernier, il serait à propos de confier à un bureau indépendant l’analyse économique des projets [9].

Aussi, il semblerait qu’il y ait eu confusion dans l’évaluation des émissions de gaz à effet de serre ( GES ) du projet . Le gouvernement a soutenu que celle - ci devrait se restreindr e à la portion québécoise et non au projet dans sa globalité . Nous nous réjouissons que le BAPE ait décidé de tenir compte de l’em preinte totale de l’oléoduc, ce qui comprend les émissions de GES associées à la production du pétrole des sables bitumineux [10]. Il serait incohérent de seulement considérer l’impact sur le bilan québécois sans se soucier du portrait global. En effet, le Qué bec n’évolue pas en vase clos. À quoi peuvent servir les efforts du Québec dans l’optique où les provinces de l’Ouest augmentent de manière consi dérable leurs émissions de GES ?

Les emplois et les retombées économiques

Même si les retombées économiques et la création d’emplois sont nommément exclues du mandat du BAPE, nous estimons qu’il s’agit d’une dimension fondamentale pour l’évaluation des projets réalisé s en sol québécois . Selon l’étude du Conference Board du Canada , commandée par TransCanada, l’oléo duc Énergie Est pourrait générer environ 2000 emplois directs durant la phase de développement et de construction ( pendant 9 ans) et 33 emplois directs durant la phase d’exploitation ( pendant 20 ans) [11]. Aussi, le promoteur fait également miroiter des revenus fiscaux d’environ 2 G$ pour le Québec et l’ajout d’un peu plus de 9 G$ à son produit intérieur brut (PIB).

Il faut toutefois faire preuve de prudence avec ces chiffres qui demeurent des estimations . Mowat Energy, à la demande de l a Commission de l’énergie de l’Ontario , a posé un regard critique sur l’étude commandée par TransCanada et a conclu que « le Conference Board a probablement surestimé l’impact économique du projet Énergie Est en Ontario [12] » . Ce diagnostic s’applique probablement aussi pour la portion québécoise de l’oléoduc.

Malgré cette mise en garde, il est possible de tirer des cons tats de s résultats de l’étude du Conference Board . D’abord, c’est surtout durant la phase de construction que la majorité des emplois seront créés. Mis à par t le secteur de la construction, d’autres secteurs pourraient également bénéficier de la réalisation du projet. Par exemple, T ransCanada a annoncé la conclusion d’une entente d’approvisionnement avec l’entreprise ABB pour la livraison de bâtiments électriq ues , ce qui permettrait la création de 120 emplois directs dans la région montréalaise [13].

En ce qui a trait aux emplois permanents, Énergie Est n’aura probablement pas d’impact majeur , surtout depuis que TransCanada a renoncé à la construction d’un terminal pétrolier à Cacouna. L’entreprise laisse cependant la porte entrouverte pour un éventuel terminal d’exportation situé au Québec [14]. Ainsi, le nombre d’emplois créés durant la phase d’exploitation pourrait augmenter.

Pris isolément, il est fort prob able que le projet d’Énergie Est créera des emplois et générera des retombées économiques . Après tout, TransCanada investira près de 16 milliards de dollars afin de construire et d’exploiter un oléoduc. De tels investissements sont loin d’être négligeables . Or, l’on ne peut parler de cet oléoduc sans considérer l’un des plus grands défis qui attendent le Québec , soit la transition vers une économie plus sobre en carbone. C’est pourquoi nous plaidons pour que le ministère des Finances et le MERN analyse nt l es retombées économiques et fiscales du projet de manière globale, c’est - à - dire en tenant compte de tous les impacts associés à la construction de cet oléoduc. Par exemple , est - ce que la réalisation de ce projet pourrait occasionner , à moyen et à long term e s , des pertes d’emplois dans de s secteurs plus vulnérables face aux changements climatiques, comme le tourisme, l’agriculture et la foresterie ? Est - ce que l’augmentation de la production des sables bitumineux aura un impact sur les emplois, notamment dans le secteur manufacturier ? Il s’agit d’éléments qui doi ven t faire partie de l’analyse sur Énergie Est.

Pour la FTQ, l’avenir de l’emploi ne passe pas p ar les projets visant à exporter le pétrole des sables bitumineux. Nous ne voulons pas d’une croissance économique insoutenable qui ne s’inscrit pas dans une logique de développement durable. Les défis associés aux changements climatiques nous amènent également à repenser le modèle de développement économique et à voir plus loin que la hausse du produit intérieur brut. Pour un même investissement, beaucoup plus d’emplois sont créés dans les secteurs verts de l’économie — comme l’efficacité énergétique, les énergies propres et le transport collectif — que dans le secteur des combustibles fossile s, ce qui comprend la construction de pipelines [15]. Pour le secteur de la construction, la transition vers u ne économie plus propre présente un potentiel très intéressant de création d’emplois pendant des décennies comparativement à des perspectives limitées pour l’oléoduc Énergie Est. Pensons notamment à la construction d’infrastructures vertes, à la rénovation domiciliaire et aux projets d’énergies renouvelables.

De manière générale, s’affranchir du pétrole constitue une mesure porteuse pour enrichir le Québec. D’après une étude du Regroupement national des conseils régionaux de l’environnement du Québec, une diminution de 16 % de la consommation de pétrole d’ici 2020 sous le niveau de 201 0 permettrait de créer 130 000 emplois directs et indir ects et de générer des investissements de 20 G$ dans l’économie locale [16].

Un oléoduc d’exportation

Pour la FTQ, la sécurité énergétique vise à assurer que le Québec puisse s’approvisionner en ressources énergétiques pour combler ses besoins en quantité suf fisante et à un prix raisonnable. Lorsque la FTQ et Unifor se sont prononcés en fav eur du renversement de la ligne 9B d’Enbridge , c’est principalement en raison de sa contribution à la sécurité énergétique québécoise et à la c réation et au maintien d’emplois au Québec. Nous avions également appuyé ce projet sous réserve de plusieurs conditions, dont l’application des normes les plus élevées pour assurer l’intégrité du pipeline, l’assurance de la capacité de l’entreprise d’intervenir en cas de déverseme nt et la présence d’une couverture d’assurance adéquate pour couvrir toutes les conséquences d’un possible accident . Nous demandions également aux gouvernements de poursuivre leurs efforts dans la lutte contre les changements climatiques et d’obliger l’ind ustrie à réduire ses émissions de gaz à effet de serre .

Énergie Est, qui transportera 1,1 million de barils de pétrole par jour, est d’abord et avant tout un oléoduc d’exportation permettant à l’in dustrie des sables bitumineux d’accroître sa production . S on objectif principal n’est pas d’améliorer la sécurité énergétique du Québec, contrairement à ce que prétendent les partisans du projet. Durant la première phase des audiences du BAPE, nous avons appris que les raffineries du Québec n’utiliseraient qu’entre 100 000 et 150 000 barils de ce pétrole [17]. Avec, entre autres, l’inversion prochaine de la ligne 9B, les raffineries du Québec n’auront donc besoin que d’une petite partie du pétrole transporté par ce pipeline.

Les partisans de l’oléoduc mettent de l’avant le fait qu’il est a bsurde d’importer du pétrole alors que le Canada dispose d’immenses réserves de sables bitumineux . Les audiences du BAPE nous ont appris que près du tiers du pétrole transporté par Énergie Est pourrait provenir des États - Unis, ce qui est loin d’être négligeable [18]. Cela remet en question un tel argument. Aussi, la provenance du pétrole demeure secondaire en matière de sécurité énergétique. C’est la garanti e des approvisionnements qui demeure la priorité. Soulignons également que la réduction de la dépendance aux hydrocarbures, particulièrement grâce à l’électrification des transports, contribuera de manière bien plus significative à la sécurité énergétique québécoise que l’oléoduc Énergie Est .

Un projet irréconciliable avec la protection du climat

La FTQ est résolument engagé e dans la lutte contre les changements climatiques et le développement durable . Selon le G roupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (G IEC ) , les émissions mondiales de gaz à effet de serre (GES) doivent diminuer de 40 à 70 % d’ici 2050 par rapport à 2010 si l’on veut avoir des chances raisonnables de limiter le réchauffement climatique en deçà de 2 o C. Les pays développés , comme le Canada , devront f ournir un effort supplémentaire étant donné qu’il s sont les principaux responsables d e ce phénomène. D’ici 2050, leurs émissions doivent avoir diminué entre 80 et 95 % par rapport au niveau de 1990. Après la Conférence de Paris sur le climat (COP21), un nouveau consensus semble se dessiner quant à la nécessité de limiter l’augmentation de la température à 1,5 o C. Une telle cible demandera des efforts titanesques de la part de tous les États du monde.

En matière d’émissions de GES, l es représentants de certain es pétrolières ont affirmé que le Canada a peu d’impact à l’échelle mondiale [19]. Cela peut sembler logique en raison de la faible population du pays, mais il s’agit bel et bien d’un sophisme . Les émissions de GES par habitant du Canada sont parmi les plus élevées au monde. De plus, le Canada est devenu un véritable cancre climatique sous le gouvernement conservateur de S tephen Harper. Il s’agit du seul pays s’étant retiré du protocole de Kyoto. Au lieu d’une diminution, les émissions de GES du Canada ont considérablement augmenté durant les dernières années . Il semblerait que l’élection du gouvernement libéral marque un changement de ton, mais pour le moment, les actions concrètes se font attendre. Pourtant, le Canada peut et doit en faire davantage dans la lutte contre les changements climatiques.

Durant la première partie des audiences du BAPE, des divergences sont apparues quant à la réelle empreinte écologique de l’oléoduc Énergie Est . Dans la documentation fourni e au BAPE, TransCanada évalue qu’Énergie Est émettra un total de 440 kilotonnes d’équivalent CO 2 par année, ce qui représente 110 000 véhicules automobiles additionnels sur les routes [20]. Le promoteur conclut que « dans un contex te mondial, l’apport du Projet sera faible (0,001 %) et il ne contribuerait pas de façon mesurable à un changement climatique [21] ». Évidemment, l’évaluation de TransCanada tient uniquement compte des émissions associées à la construction et l’exploitation de l’oléoduc et non de celles qui découlent d’une augmentation de l’exploitat ion des sables bitumineux .

D’autres organisations ont cherché à évaluer les impacts potentiels d’Énergie Est sur les émissions canadiennes de GES. La firme Navius estime que ce projet ferait augmenter les émissions de 0,2 à 11 Mt d’éq. CO 2 [22]. L’Institut Pembina, quant à lui, considère que l’oléoduc entraînera une hausse de 30 à 32 Mt d’éq. CO 2 [23]. Cela correspond , grosso modo, à environ 40 % des émissions de GES du Québec en 2013. Autrement dit, l’oléoduc Énergie Est serait pratiquement aussi polluant que le secteur des transports au Québec ! Soulignons que ces estimation s ne tiennent pas compte de l’impact environnemental associé à la consommation de ce pétrole, qui sera en gr ande partie exporté.

Ces trois évaluations montrent qu’il existe d’importantes divergences quant à l’impact potentiel d’Énergie Est sur le bilan canadien en matière d’émissions de GES. Ce débat de chiffres, parfois assourdissant, ne doit pas nous éloigne r d u fait que la construction de cet oléoduc est profondément irréconciliable avec la lutt e contre les changements climatiques et la protection de l’environn ement. Le Québec, le Canada et tous les pays doivent graduellement abandonner les hydrocarbures au profit d’énergies propres. Contrairement aux prétentions du promoteur, l’oléoduc Énergie Est ne peut être dissocié de ce qu’il transporte . Il n’est pas inutile de rappeler que l e pétrole des sables bit umineux émet davantage de GES que le pétrole conventionnel et a des répercussions particulièrement désastreuses sur l’environnement.

Le projet d’oléoduc Énergie Est est crucial pour l’industrie des sables bitumineux qui souhaite augmenter considérablement sa production dans les prochaines années . Les provinces productrices étant enclavées , elles doi vent trouver une façon d’exporter leur pétrole sur les marchés internationaux. Or, l’augmentation d e cette production accentuera la crise climatique . Des chercheurs ont évalué que 85 % des ressources pétrolières canadiennes doivent rester enfouis afin de limiter le réchauffement climatique à un niveau acceptable [24]. Cela ne fait donc aucun sens de construire un oléoduc ayant une durée d’exploitation d’a u moins 20 ans , alors qu’il faut commencer à s’affranchir des énergies fossiles dès maintenant .

En acceptant la construction de l’oléoduc, le Québec risque d’accentuer sa propre vulnérabilité relativement aux changements climatiques. Ce phénomène comporte des co ûts importants, notamment par rapport aux infrastructures, à la santé des populations et à l’activité économique en général. Bien qu’il soit hasardeux de tenter de quantifier ces co ûts, il existe un consensus assez fort voulant que l’inaction climat ique soit plus désavantageuse que la mise sur pied de mesures visant à réduire les émissions de GES. Même si Énergie Est contribue au développement économique du Québec dans l’immédiat, ce sont les générations futures qui subiront les répercussions des cha ngements climatiques dans les décennies à venir . Il s’agit d’un facteur dont le gouvernement doit tenir compte.

Les risques et les impacts potentiels d’un déversement

Nous sommes loin d’être des experts sur les oléoducs, mais les audiences du BAPE nous o nt permis de constater que les risques et les impacts potentiels du projet sont probablement plus importants que ce que prétend le promoteur . Un déversement aurait des impacts majeurs, entre autres, sur l’accès à l’eau potable pour les citoyens et les citoyennes , la santé humaine et l’intégrité d es écosystèmes . Pour la FTQ, il importe de respecter les normes socio - environnementales les plus strictes et de s’assurer de l’engagement de la responsabilité financière des entreprises participantes en cas de dommages environnementaux [25]. Les réponses de TransCanada durant les audiences n’ont pas permis d’apaiser nos craintes.

Ceux et celles qui soutiennent le projet Énergie Est font valoir que les oléoducs sont plus sécuritaires que le transport ferroviaire. Ainsi, la construction d’un nouvel oléoduc permettrait de réduire le nombre de wagons - citernes . Après les audiences du BAPE, de tels arguments apparaissent quelque peu affaiblis. D’abord, déterminer quel mode de transport est le plus sécuritaire n’est pas chose aisée . Lors des audiences, le B ureau de la sécurité des transports (BST) a indiqué ne pas procéder à des analyses comparatives entre le transport par t r ain et par oléoduc en raison de l’hétérogénéité des facteurs de risque. L’organisme a ensuite ajouté que « l e transport de pétrole brut peut se faire de manière sécuritaire dans tous les modes de transport si les risques sont bien identifiés et gérés de manière proactive [26] 26 » . Loin de nous l’idée de minimiser ce qui s’est passé à Lac - Mégantic, mais force est de constater que la réalité est plus nuancée.

Ensuite, nous ne sommes pas convaincus que le transport ferroviaire diminuera à la suite de la construction de l’oléoduc. Considérant le souhait de l’industrie des sables bitumineu x d’augmenter considérablement sa production, ce mode de transport pourrait demeurer nécessaire. Prenons l’exemple du futur terminal pétrolier à Belledune . Avec ce projet, 220 wagons de pétrole brut traverseront le Québec vers le Nouveau - Brunswick aux fins d’exportation. Est - ce que la construction d’un nouvel oléoduc impliquerait la fin du passage de ces wagons ? Nous doutons que cette substitution s’effectue automatiquement.

L’oléoduc Énergie Est, s’il est construit, transportera en grande majorité des bitumes dilués . Ces derniers sont plus denses et plus visqueux que le pétrole conventionnel. Comme l’illustre le cas du déversement dans la rivière Kalamazoo au Michigan, ce type de pétrole tend à couler plutôt qu’à flotter sur l’eau , ce qui rend sa récupé ration plus difficile. Les intervenants au BAPE ont mis en exergue ces difficultés ainsi que les coûts élevés associés aux déversements des bitumes dilués [27]. Dans le cadre de l’ÉES globale sur les hydrocarbures, une étude a été commandée pour évaluer le pot entiel de danger des bitumes dilués. Les auteurs ont en outre souligné qu’il existait plusieurs lacunes dans les connaissances [28]. Nous sommes d’avis que ces lacunes doivent être comblées. Il pourrait également être pertinent d’obtenir davantage d’informatio ns sur les impacts d’un déversement de bitume s dilué s sur l a santé et la sécurité des travailleurs et des travailleuses responsables d u nettoyage et pour les citoyens et les citoyennes des communautés affectées.

Ensuite, les estimations de TransCanada sur les coûts d’un déversement ne font pas l’unanimité. L’entreprise a élaboré un scénario du pire cas, soit un déversement d’environ 3,6 millions de litres de pétrole dans la rivière Etchemin. Les coûts totaux, soit pour l’intervention d’urgence, la resta uration du site et les dommages causés aux tiers, sont estimés à 619 M$ [29]. Pour une quantité similaire d’hydrocarbures déversés, la facture a grimpé jusqu’à 1,2 milliard de dollars en ce qui concerne la rivière Kalamazoo . N’étant pas des experts en la matiè re, il nous est difficile d’évaluer avec certitude la validité de ce scénario. Cependant, nous croyons que les risques et les impacts potentiels d’un déversement sont fort probablement sous - estimés par TransCanada. Ainsi, beaucoup de questions restent enco re en suspens après la première phase des audiences du BAPE.

L’absence d’acceptabilité sociale

Au moment d’écrire ces lignes, le MERN venait tout juste de terminer les consultations sur le livre vert sur l’acceptabilité sociale. À travers les années, ce concept prend de plus en plus de place dans l’évaluation des projets de ressources énergétiques et minérales. E n raison de la controverse associée à la définition même de l’acceptabilité sociale, cette question demeure délicate . En dépit de cette mise en garde, nous pouvons affirmer avec certitude que le projet Énergie Est n’obtient pas l’acceptabilité sociale.

D’abord, le comportement même de TransCanada est sans doute le facteur le plus aggravant. L’entreprise refuse obstinément de reconnaître les compétences du Québec en matière environnementale. Il n’est pas normal que le Québec doive demander une injonction aux tribunaux afin de faire respecter ses lois. De plus, TransCanada n’a pas traduit en français l’ensemble de ses documents déposés à l’Office national de l’Énergie , ce qui démontre son peu de considération envers les Québécois et les Québécoises . De manière générale, l’attitude de l’entreprise albertaine dans ce dossier a été décriée par une multitude d’acteurs. TransCanada a beau répéter qu’elle souhaite changer d’approche, il demeure que la confiance sera extrêmement difficile, voire impossible, à rétablir.

En suite, le gouvernement , et plus p articulièrement l e ministre de l’Environnement , consulte inadéquatement la population depuis plusieurs années. L’ÉES globale sur les hydrocarbures aurait dû permettre à la population de se faire une tête sur cette filière, ce qui comprend une discussion des modes de transport des hydrocarbures ainsi qu’une réflexion sur le type de

- développement économique souhaité. L a tenue d’audiences générique s pour le projet Énergie Est , quoiqu’utile , ne peut se substituer à un examen plus en profondeur selon la PEEIE. Ainsi, le gouvernement mine lui - même l’accepta bilité sociale du projet.

Aussi, de plus en plus d e municipalités, de groupes et d’organisations s’op posent à ce projet d’oléoduc . Dans certains cas, l’opposition est sans appel alors que dans d’autres cas , les positions pourraient évoluer. Certes, l’acceptabilité sociale ne peut se résumer à un sondage, mais certains résultats nous montrent qu’une proportion importante des Québécois et des Québécoises ne veulent pas de cet oléoduc [30]. Au - delà du processus de consultations et de participation publique, l a réalisation du projet Énergie Est demeure irréconciliable avec les préoccupations de la population en matière de changements climatiques. Quant à TransCanada , elle sous - évalue l’impact des sables bitumineux dans le réchauffement climatique , une posture i nacceptable dans le contexte actuel . Les priorités de l’entreprise ne semble nt pas être en phase avec celles d’une grande partie de la population québécoise.

Conclusion

Les audiences génériques du BAPE sur Énergie Est n’auront pas été inutiles. Nous avons pu en app rendre davantage sur le projet , ce qui a confirmé plusieurs de nos appréhensions. Pour la FTQ, la pertinence du projet Énergie Est doit être remise en question en raison du grand nombre d’inconvénients et du peu d’avantages qu’il comporte pour le Québec. Le projet ne contribuera que marginalement à l’emploi, mis à part durant la phase de construction. L’oléoduc servira avant tout à exporter du pétrole plutôt qu’à améliorer la sécurité énergétique du Québec . Il entre en direct op position avec la lutte contre les changements climatiques parce qu’il mène à une augmentation considérable des émissions de gaz à effet de serre au Québec, au Canada et à l’échelle mondiale. Les risques et impacts potentiels de ce projet demeurent importan ts et l’entreprise n’a pas réussi à nous rassurer. Finalement, il n’y a pas d’acceptabilité sociale pour ce projet et elle sera vraisemblablement très difficile , voire impossible, à obtenir.

CLÉ/yh Sepb - 574

20 - 04 - 2016


[1MERN, Thèmes abordés par les É ES , mars 2015, [En ligne] [hydrocarbures.gouv.qc.ca/documents/Themes - abordes - EES.pdf] (Consulté le 29 mars 2016).

[2Loi sur la qualité de l’environnement , article 6.3.

[3Règlement sur l’évaluation et l’examen des impacts sur l’environnement , article 2.

[4Loi sur la qualité de l’environnement , article 31.1.

[5Par exemple, les audiences génériques ont examiné des questions comme la gestion des déchets et la filière des gaz de schiste.

[6S HIELDS , Alexandre, « Québec enfreint sa loi pour Énergie Est », Le Devoir , 12 février 2016, [En ligne] [www.ledevoir.com/environnement/actualites - sur - l - environnement/462849/quebec - enfreint - sa - loi - pour - energie - est] (Consulté le 31 mars 2016).

[7À ce sujet, voir l e jugement de la Cour s upérieur e : Centre québé cois du droit de l’environnement c. Transcanada Pipelines ltée , 2016 QCCS 903 .

[8D URAND , Marc, Des rapports d’études de l’ÉES - Anticosti : décevants , Collectif scientifique sur la question du gaz de schi ste au Québec, 2015, [En ligne] [www.collectif - scientifique - gaz - de - schiste.com/fr/accueil/images/pdf/regards/M%C3%A9moire%20de%20Marc%20Durand_Consultation %20%C3%89ES%20Anticosti.pdf] (Consulté le 20 mars 2016).

[9M INISTÈRE DE L’É NERGIE ET DES R ESSOURCES NATURELLES , Orientations du ministère de l’Énergie et des Ressources naturelles en matière d’acceptabilité sociale , Livre vert, Québec, 2016, p.22.

[1010 S HIELDS , Alexandre, « Le BAPE tiendra compte des GES de l’Ouest malgré l’avis de Québec », Le Devoir , 11 f évrier 2016, [En ligne] [www.ledevoir.com/environnement/actualites - sur - l - environnement/462606/bape - sur - energie - est - les - audiences - debuteront - en - mars] (Consulté le 30 mars 2016).

[11TRANS CANADA , Analyse économique du Projet Oléoduc Énergie Est, Fiche d’information , 2015, [En ligne] [www.oleoducenergieest.com/wp - content/uploads/2015/12/Oleoduc - Energie - Est - Analyse - Economique.pdf] (Consulté le 29 mars 2016).

[12C OMMISSION DE L’ÉNERGIE DE L’O NTARIO , Donner la parole aux Ontariens sur le projet Énergie Est, R apport du ministre , août 2015, p.85.

[13BISSONNET , Jacques, « Énergie Est : TransCanada promet 120 emplois de plus au Québec », Radio - Canada , 3 février 2016, [En ligne] [ici.radio - canada.ca/nouvelles/Economie/2016/02/03/004 - transcanada - energie - est - entente - a bb - nouveaux - emplois.shtml !] (Consulté le 25 mars 2016).

[14CLICHE , Jean - François, « BAPE : l’idée d’un port d’exportation pétrolière au Québec refait surface », Le Soleil , 17 mars 2016, [En ligne] [www.lapresse.ca/le - soleil/actualites/environnement/201603/1 7/01 - 4961790 - bape - lidee - dun - port - dexportation - petroliere - au - quebec - refait - surface.php] (Consulté le 25 mars 2016).

[15BLUE G REEN C ANADA , More Bang for Our Buck. How Canada Can Create More Energy Jobs and Less Pollution , Toronto, novembre 2012.

[16REGROUPEMENT NATIONAL DES CONSEILS RÉGIONA UX DE L’ENVIRONNEMENT DU Q UÉBEC , Vingt milliards de dollars de plus en six ans. Les retombées économiques d’une réduction de la consommation de pétrole au Québec , 2014.

[17SHIELDS , Alexandre, « Un pipeline voué à l’exportation de pétrole de l’Ouest », Le Devoir , 9 mars 2016, [En ligne] [www.ledevoir.com/environnement/actualites - sur - l - environnement/464976/energie - est - un - pipeline - voue - a - l - exportation - de - petrole - de - l - ouest] (Consulté le 30 mars 2016).

[18SHIELDS , Alexand re, « Du pétrole américain pour Énergie Est », Le Devoir , 15 mars 2016, [En ligne] [www.ledevoir.com/environnement/actualites - sur - l - environnement/465513/du - petrole - americain - pour - energie - est] (Consulté le 30 mars 2016).

[19SHIELDS , Alexandre, « Un pipeline voué à l’exportation de pétrole de l’Ouest », Le Devoir , 9 mars 2016, [En ligne] [www.ledevoir.com/environnement/actualites - sur - l - environnement/464976/energie - est - un - pipeline - voue - a - l - exportation - de - petrole - de - l - ouest] (Consulté le 30 mars 2016).

[20Considé rant l’hypothèse qu’une voiture équivaut à 4 tonnes de CO 2 .

[21TRANS CANADA , Projet Oléoduc Énergie Est. Aperçu du projet au Québec. Processus BAPE , février 2016, p.6 - 30.

[22NAVIUS RESEARCH , Discussion Paper : Greenhouse Gas Emissions Resulting from the Energy East Pipelin Project. A Global Oil Market and Transportation Analysis , 2015, p.55.

[23FLANAGAN , Erin et Clare D EMERSE , Climate Implications of the Proposed Energy East Pipeline. A Preliminary Assessment , Pembina Institute, Calgary, février 2014, p.21.

[24MC GLADE , Christophe et Paul E KINS , « The geographical distribution of fossil fuels unused wh en limiting global warming to 2 o C », Nature , vol. 517, n o 7533, p.190.

[25FTQ , Déclaration de politique sur l’énergie , 30 e Congrès de la FTQ, novembre 2013, p.12.

[26BUREAU D’AUDIENCES PUBLIQUES SUR L’ENVIRONNEMENT , Commission d’enquête sur le projet Oléoduc Én ergie Est – section québécoise. Première partie. Volume 2 , Séance du 8 mars 2016 – 13h, Lévis, p.10 .

[27PERRON - LANGLOI S , Arianne, « Risques de déversement : le plaidoyer d’Émilien Pelletier devant le BAPE », Radio - Canada , 15 mars 2016, [En ligne] [ici.radio - canada.ca/regions/est - quebec/2016/03/15/008 - energie - est - bape - audiences - deversement - emilien - pelletier.shtml] (Consult é le 5 avril 2016).

[28ALLAIRE - VERVILLE , Marjorie, Étude GENV35 – État des connaissances sur le potentiel de danger des bitumes dilués , Institut des sciences de la mer de Rimouski, Rapport final, 5 octobre 2015, p.v.

[29TRANS CANADA , Effets et coûts d’un déve rsement – Scénario de la rivière Etchemin , 16 mars 2016, [En ligne] [www.bape.gouv.qc.ca/sections/mandats/oleoduc_energie - est/documents/GOUV7.pdf], (Consulté le 6 avril 2016), p.12.

[30CROTEAU , Martin, « Sondage : près d’un Canadien sur deux rejette Énergie Est », La Presse , 8 avril 2015, [En ligne] [www.lapresse.ca/environnement/201504/08/01 - 4859090 - sondage - pres - dun - canadien - sur - deux - rejette - energie - est.php] (Consulté le 12 avril 2016).

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