Édition du 12 mars 2024

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Environnement

Nouveau rapport : le Québec loin de faire sa juste part de l'effort climatique mondial

Le Réseau action climat Canada et des organisations membres et alliées publient aujourd’hui un rapport scientifique qui quantifie la juste part du Québec de l’effort mondial requis pour limiter l’augmentation de la température planétaire à 1,5°C, tel que visé par l’Accord de Paris. Pour la première fois, ce rapport présente un calcul de la contribution du Québec à l’effort climatique mondial basé sur des principes d’équité, soit en fonction de sa responsabilité historique et de sa capacité financière. Alors que s’amorce l’année de la très attendue COP26 et que les États doivent présenter leurs contributions bonifiées à l’Accord de Paris, ce rapport démontre que le Québec doit réviser sa cible de réduction des émissions de gaz à effet de serre pour 2030, qui vise actuellement une réduction de 37,5% d’ici par rapport à 1990.

Le constat du rapport est clair : l’action climatique actuelle du Québec n’équivaut pas à sa juste part de l’effort climatique mondial. Le rapport, réalisé par le Climate Equity Reference Project, estime que la juste part du Québec est supérieure au niveau actuel de ses émissions annuelles. Le rapport confirme également qu’il n’est pas possible pour le Québec de fournir sa juste part par la seule réduction des émissions domestiques ; il devra également soutenir et augmenter ses contributions à la finance climatique internationale.

Pour déterminer la part juste du Québec, le rapport calcule sa responsabilité et sa capacité à lutter contre les changements climatiques selon les critères établis par la Convention-cadre des Nations Unies, à laquelle le Québec s’est déclaré lié par décret en 1992. Par conséquent, le statu quo n’est tout simplement pas possible. Si le Québec ne fait pas sa juste part à l’effort mondial, ces réductions devront être effectuées par d’autres nations. Ou pire, elles se traduiront en augmentation des impacts sur les populations, en particulier celles des pays du Sud et les plus vulnérables qui sont déjà affectées de façon disproportionnée par la crise climatique.

En prévision de la prochaine Conférence des Nations unies sur les changements climatiques qui se déroulera en novembre à Glasgow, en Écosse, et alors que le Canada s’apprête à consulter les provinces et territoires dans la révision de sa contribution déterminée au niveau national à l’Accord de Paris, les organisations exhortent le gouvernement du Québec à augmenter sa cible domestique de réduction des émissions de 2030 et sa contribution à la finance climatique internationale. Les groupes soulignent que la loi 44 sur la gouvernance climatique qui a été sanctionnée par Québec cet automne prévoit que la cible du Québec « doit être révisée au moins tous les cinq ans ». Celle de 2030 a été adoptée en 2015 et doit être rapidement révisée. En ce sens, les groupes rappellent que le Programme des Nations Unies pour l’environnement « prévient que si les émissions mondiales de gaz à effet de serre ne diminuent pas de 7,6 % par an entre 2020 et 2030, le monde manquera l’occasion de se mettre sur la bonne voie pour atteindre l’objectif de limiter la hausse des températures à 1,5°C, fixé par l’Accord de Paris. »

Ils rappellent également que les Québécois.e.s sont favorables à un respect de la science du climat ; en pleine pandémie, un sondage réalisé par la firme Léger soulignait que 85 % des Québécois.es considèrent que l’urgence climatique est un enjeu aussi ou plus important encore qu’en 2018.
Les changements climatiques sont une crise d’échelle mondiale ; l’action du Québec ne peut être évaluée sans tenir compte des principes d’équité.

Caroline Brouillette, analyste des politiques au Réseau action climat Canada, s’est exclamé : « La question de l’équité internationale est essentielle aux discussions sur l’action climatique du Québec. La crise climatique est une crise d’envergure mondiale ; le Québec ne peut pas se permettre de niveler par le bas et se comparer seulement aux États de l’Amérique du Nord. Le Québec a la responsabilité et la capacité de faire beaucoup plus, et devrait utiliser pleinement son potentiel pour agir comme un véritable leader climatique sur la scène internationale d’ici la COP26. »

Denis Bolduc, secrétaire général de la Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec, a ajouté : « Pour la FTQ, il est clair que la responsabilité du Québec est l’affaire de tous et de toutes. La société civile québécoise est prête à faire sa juste part, elle demande cependant un plus grand effort et surtout à être incluse dans les grandes orientations climatiques du Québec. Pour les milieux de travail, cela ne peut que passer par une transition juste qui inclut les travailleurs et les travailleuses dans les décisions qui les concernent. »

Pour Michèle Asselin, directrice générale de l’AQOCI, « Les changements climatiques affectent tout le monde. Cependant, la crise actuelle a avant tout été causée par les États du Nord et elle frappe de manière disproportionnée les populations qui y ont le moins contribué et qui sont les plus vulnérabilisées et marginalisées, particulièrement les femmes, les jeunes, les autochtones et les populations des pays du Sud. Dans une perspective de justice climatique, le Québec (comme les autres États du Nord) a la responsabilité et les moyens de faire plus en rehaussant sa cible de réduction des GES et en participant au financement de la lutte aux changements climatiques à l’international. Bien que le Québec ait déjà amorcé cet effort, notamment à travers son Programme de coopération climatique internationale (PCCI), le présent rapport montre clairement qu’il doit en faire davantage pour assumer sa juste part. »

Catherine Caron, agente principale des campagnes d’Oxfam-Québec a précisé : « Les financements climat représentent une bouée de sauvetage pour les pays pauvres luttant contre les conséquences d’une crise climatique dont ils ne sont pas responsables. Les communautés défavorisées, déjà confrontées à un nombre sans précédent de canicules, de tempêtes et d’inondations dévastatrices, paient le prix de la surconsommation d’une minorité fortunée. Les changements climatiques ne s’arrêtent pas aux frontières et nécessitent une coopération sans précédent. L’action climatique du Québec doit tenir compte des principes d’équité, car pour gagner la lutte climatique, c’est le seul calcul qui importe. »

Quant à elle, Sabaa Khan, directrice générale pour le Québec et l’Atlantique de la Fondation David Suzuki a dit « La science démontre sans équivoque que les cibles climatiques actuelles du Québec ne représentent qu’un quart de sa «  juste part  » dans la lutte internationale contre les changements climatiques. Pourtant, les principes de justice climatique, d’équité et de responsabilité historique, ancrés profondément dans l’Accord de Paris, imposent l’obligation au gouvernement du Québec de renforcer ses engagements internationaux, en poursuivant une décarbonisation domestique beaucoup plus rigoureuse, et dans l’immédiat. Cela permettra non seulement au Québec de maintenir son rôle de chef de file sur le plan mondial, mais également d’agir à titre de catalyseur de l’innovation sociale et économique, en vue d’augmenter le bien-être humain sur notre territoire, et au-delà. »

Patrick Bonin, responsable de la campagne Climat-Énergie de Greenpeace Canada a renchéri : « 2021 est cruciale pour respecter l’Accord de Paris alors que les États, incluant le Québec, doivent renforcer leurs engagements climatiques. Le gouvernement Legault doit rapidement bonifier son Plan vert qui n’atteint que 42% de sa cible de réduction des GES pour 2030 et adopter, d’ici la COP26 en novembre, une nouvelle cible plus ambitieuse de manière à faire sa juste part et respecter les exigences de la science du climat. »

Émile Boisseau-Bouvier, analyste des politiques climatiques d’Équiterre, a précisé : « Le gouvernement du Québec a tout ce qu’il faut pour se positionner comme un leader en matière de lutte aux changements climatiques, que ce soit sur la scène fédérale ou à l’international. Il doit donc saisir cette opportunité en intégrant le concept de juste part et en mettant en place des outils pour permettre l’atteinte de ses cibles. Nous avons ce qu’il faut pour être des premiers de classe sur la question, ne nous contentons pas de la note de passage. »

Alice-Anne Simard, directrice générale de Nature Québec a conclut qu’« en tant qu’État développé qui s’est enrichi en exploitant les ressources naturelles et en polluant l’atmosphère planétaire, le Québec a le devoir d’en faire plus pour que l’humanité réduise ses émissions de 50% d’ici 2030 comme le recommande le GIEC. Nous avons aussi en main toutes les ressources et la technologie nécessaires pour avoir une cible plus ambitieuse et l’atteindre en 10 ans. Nous devons maintenant faire notre juste part et soutenir les pays les plus touchés par la crise climatique. »

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