Les constats faits par les pêcheurs artisanaux des côtes africaines sont identiques, il y a de moins en moins de poissons et les prises révèlent une diminution de leur taille. Les experts considèrent que les 51 espèces présentes dans les eaux africaines, source d’alimentation pour les populations, sont en voie d’extinction.
Inquiétudes économiques
Au Sénégal par exemple en cinq ans le nombre de sardinelles a baissé de 80%. Ce petit pélagique est largement consommé par les populations pour son prix abordable et se cuisine parfaitement dans le plat national, le thiéboudiène.
La raréfaction des produits halieutiques provoque une anxiété pour nombre d’africains. Dans certains pays côtiers, le poisson représente près de la moitié des sources de protéine animale. Les économistes estiment que la pêche artisanale en Afrique correspond globalement entre les pécheurs, mareyeurs, fumeurs et vendeurs à près de 12 millions d’emplois.
Les deux raisons principales de la baisse des ressources sont le dérèglement climatique et la surpêche.
Si les températures augmentent sur terre elles augmentent aussi dans les océans, bouleversant des écosystèmes complexes. Les conséquences sont la disparition des coraux, la migration des espèces côtières vers des eaux plus froides ou la destruction des mangroves, particulièrement inquiétante pour l’Afrique. En effet ces zones, souvent comparées à des nurseries pour les poissons sont des abris face aux prédateurs, le temps d’atteindre l’âge adulte. Elles sont aussi des aires permettant la riziculture.
Pêche industrielle délétère
La seconde raison est la surpêche. Elle est provoquée par un afflux en augmentation constante de pêcheurs artisanaux. Avec un chômage massif frappant la jeunesse, beaucoup tentent leur chance dans ce secteur. En Sierra Leone petit pays d’Afrique de l’Ouest, leur nombre en 20 ans a doublé passant de 75 000 à 150 000. Ce phénomène cependant ne doit pas cacher que l’essentiel de l’affaiblissement des ressources est la conséquence de la pêche industrielle.
Des véritables bateaux usines sillonnent les côtes africaines toute l’année et avec d’immenses filets raclent les fonds marins et capturent toute la faune marine, occasionnant des dégâts écologiques considérables.
Selon les pays, les règles légales encadrant la pêche dans leur zone économique exclusive sont différentes, mais de l’avis des professionnels artisanaux mais aussi des militants écologistes, elles sont largement insuffisantes et peu respectées. Toujours en Sierra Leone, l’achat d’un permis de pêche varie selon le tonnage du bateau entre 15 000 à 20 000 euros permettant au titulaire de pêcher toute l’année. Un contournement des règles très usité est l’utilisation de prête-nom locaux permettant d’obtenir des droits de pêche près des côtes ainsi que des exonérations sur les carburants et des aides pour les frais administratifs et d’enregistrement au port.
L’essor des usines de farine
Enfin la pêche dite INN c’est-à-dire illicite, non déclarée et non réglementée profite largement des faiblesses et défaillances des moyens maritimes des Etats africains pour surveiller et arraisonner les navires contrevenants.
Si la pêche industrielle est en constante augmentation, c’est certes pour répondre aux demandes des pays occidentaux mais aussi pour fournir les innombrables usines de fabrication d’huile et de farine de poisson.
Une soixantaine de ces usines a vu le jour ces dernières années sur les côtes ouest africaines. Ainsi les ressources halieutiques sont détournées de la consommation des populations locales. Greenpeace considère que chaque années 500 000 tonnes de poisson, qui auraient pu nourrir 33 millions de personnes en Afrique sont utilisées pour produire les farines. Elles sont utilisées pour engraisser des poissons d’élevage largement consommés en Europe et en Chine comme le thon ou le saumon, ou bien utilisés dans les fermes industrielles porcines.
Paul Martial
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