Édition du 17 juin 2025

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Médias

Rapport FIP 2024 : L'année la plus meurtrière pour les journalistes depuis trois décennies

La Fédération internationale des journalistes (FIJ) a publié son 34e rapport annuel sur les journalistes et les professionnels des médias tués en 2024, dont les chiffres sont choquants.

Tiré du Journal des alternatives. Photo : capture d’écran des pages 10 et 11 du rapport de la Fédération internationale des journalistes (FIJ) voir lien à la fin de l’article

Au total, 122 journalistes ont été tués dans différentes parties du monde, dépassant le record de 113 morts enregistré en 2007, lorsque la guerre en Irak a ravagé la presse. Sur ce total, 14 étaient des femmes, ce qui souligne les risques supplémentaires encourus par les femmes reporters, en particulier dans les zones de conflit ou sous des régimes répressifs.

À ce scénario s’ajoute une autre statistique inquiétante : le nombre de journalistes emprisonnés a augmenté de 30 % par rapport à l’année précédente, passant de 393 en 2023 à 516 en 2024. Cette augmentation n’est pas un chiffre isolé, mais la confirmation d’une détérioration globale de la liberté de la presse, où la censure gouvernementale et la persécution des voix critiques sont devenues des pratiques systématiques.

Gaza : l’épicentre de la violence contre la presse

S’il est un endroit où le journalisme a payé un prix atroce, c’est bien à Gaza. Dans ce petit territoire de 360 km², 64 journalistes ont été tués en 2024, soit presque la moitié des journalistes assassinés cette année-là. Depuis le début de la guerre, 152 journalistes et travailleurs et travailleuses des médias ont perdu la vie à Gaza, faisant de ce conflit le plus meurtrier de l’histoire moderne pour la presse.

La FIJ a dénoncé le ciblage délibéré des journalistes par l’armée israélienne, rassemblant des preuves pour déposer des plaintes auprès de la Cour pénale internationale (CPI). En conséquence, des mandats d’arrêt ont été délivrés à l’encontre de dirigeants israéliens et du Hamas, dont le Premier ministre Benjamin Netanyahu et le ministre de la Défense Yoav Gallant, pour crimes de guerre.

Asie-Pacifique : une augmentation alarmante des meurtres

La région Asie-Pacifique a également connu une augmentation inquiétante des attaques meurtrières contre les journalistes. En 2024, 22 travailleurs et travailleuse des médias ont été tués, soit une augmentation de 83 % par rapport à l’année précédente. Parmi les pays les plus touchés, citons :

· Pakistan : six des sept journalistes tués ont été pris pour cible par des tueurs à gages.

· Inde : trois journalistes ont été victimes d’attaques ciblées.

· Bangladesh : cinq journalistes ont été tués, dont trois alors qu’ils couvraient des manifestations en faveur de la démocratie.

Cette augmentation reflète le climat croissant d’hostilité à l’égard de la presse dans les pays où la démocratie et l’État de droit sont menacés.

Amérique latine : une légère baisse, mais l’impunité persiste

En Amérique latine et dans les Caraïbes, les assassinats de journalistes ont enregistré une légère baisse : neuf décès en 2024, contre onze en 2023. Cependant, le Mexique reste le pays le plus dangereux pour la pratique du journalisme, avec cinq journalistes tués au cours de l’année.

Le problème n’est pas seulement la violence, mais aussi l’impunité : 95% des crimes contre les journalistes au Mexique ne sont pas résolus. En Colombie, bien que les meurtres aient diminué, les menaces et les attaques ont augmenté, avec plus de 500 violations de la liberté de la presse documentées en 2023.

Afrique et Europe : Conflits oubliés et guerre en Ukraine

En Afrique, la situation est également grave, avec dix journalistes tués en 2024. La crise au Soudan fait de ce pays un des pires endroits pour journalistes, six d’eux ayant été tué alors qu’ils couvraient le conflit.

En Europe, la guerre en Ukraine continue d’être meurtrière pour la presse. Quatre journalistes ont été tués en 2024, victimes de bombardements ou d’exécutions lors de déplacements forcés. En outre, 43 journalistes indépendants ont été tués dans différentes parties du monde, ce qui représente plus d’un tiers de tous les décès dans le secteur. Nombre d’entre eux travaillaient sans protection, sans assurance ni réseau de soutien pour assurer leur sécurité et celle de leur famille.

L’augmentation du nombre de journalistes emprisonnés : l’autre visage de la répression

L’assassinat n’est pas la seule méthode pour réduire la presse au silence. En 2024, 516 journalistes ont été emprisonnés dans le monde, un record absolu. Et ces chiffres pourraient être bien plus élevés, car dans les pays aux régimes répressifs, les informations sur les arrestations arbitraires sont rares.

La Chine, la Turquie, l’Égypte et la Russie figurent parmi les principaux responsables de ces persécutions, soumettant les journalistes à des procédures judiciaires irrégulières et leur refusant le droit à une défense équitable.

Un appel urgent à la communauté internationale

Face à cette crise mondiale, la FIJ insiste sur la nécessité d’adopter une Convention de l’ONU pour la protection des journalistes, un mécanisme qui pourrait contribuer à endiguer la violence et à garantir la justice pour les victimes. La liberté de la presse est en état de siège, et sans mesures efficaces, le journalisme restera une profession à haut risque.

L’année 2024 a été dévastatrice pour le journalisme, mais elle nous rappelle aussi l’urgence d’agir, et de ne pas tout simplement fermer les yeux. Chaque journaliste tué est une voix réduite au silence, un droit violé, une histoire qui ne sera jamais racontée.

La communauté internationale a l’obligation morale de protéger ceux et celles qui risquent leur vie pour la vérité.

Car lorsque la presse est attaquée, c’est la société tout entière qui est perdante.

Rapport complet en anglais : https://www.ifj.org/fileadmin/user_upload/IFJ_Killed_List_report_2024.pdf

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Isabel Cortés

Collaboratrice du Journal des alternatives.

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