Édition du 6 mai 2025

Une tribune libre pour la gauche québécoise en marche

Québec solidaire

Une réponse urgente au projet de loi 61, relance pour l’industrie de la corruption

Reconstruire le Plan de transition Solidaire à la mode anticapitaliste

Le gouvernement de la CAQ présente jusqu’ici un des pires bilans mondiaux de la gestion de la pandémie. Il a tout de même réussi à conserver un fort soutien populaire par sa nationaliste démagogie populiste sur fond de démission des syndicats qui commencent à peine à riposter et d’accommodement Solidaire à sa gestion catastrophique que le parti commence sur le tard et avec hésitation à remettre en question. La CAQ, profitant d’une baisse des ravages de la covid-19 en attendant la probable deuxième vague, contre-attaque avec son mammouth projet de loi 61 au profit de « l’industrie de la corruption » devenu de facto le lamentable nouveau Québec Inc. après les déboires des fleurons de jadis. Il leur déroule le tapis rouge en accélérant les projets connus d’infrastructure tout en supprimant contraintes environnementales, sociales et surtout démocratiques résultant de décennies de luttes sociales au point de vouloir s’octroyer le droit « de changer des lois par décret » et « l’immunité de poursuite ». Il fait de ces (ex-)corrompus les champions de la relance aux dépens des « services essentiels » ré-noyés dans le train-train de la ré-ouverture et promis à une nouvelle austérité anti-dette.

Plus que jamais le peuple-travailleur, à travers son seul parti à l’Assemblée nationale, se doit d’appeler à la remobilisation en opposant un contre-plan dont le fil conducteur ne peut être que le Plan de transition reconstruit à l’aulne non seulement de l’intensification de la crise climatique mais aussi du surgissement de la crise sanitaire qui fait que « [n]ous sommes dans une convergence de crises, pleine de dangers, une crise de civilisation capitaliste, la plus grave depuis les guerres mondiales du XXe siècle. » (Déclaration de la Quatrième Internationale). Avec la pandémie, l’humanité vit un tournant qui fera de la question écologique (climat-biodiversité) dont origine la crise sanitaire, et non plus de la question économique, la question centrale de la politique déterminant toutes les autres. Le capitalisme combattra bec et ongles ce virage tout en tentant de s’adapter par le verdissement de l’accumulation du capital. La gauche n’aura plus d’autre choix que de se centrer sur les rapports de l’humanité avec la nature, rapports qui teinteront tous les rapports d’exploitation et d’oppression. Il faudra questionner la verdure de chaque investissement comme celle de toute lutte sociale, rendre explicite pour la compréhension générale leur caractère écologique.

Dans le sillage du rapport du GIEC, la stratégie climatique de gauche se doit de limiter la hausse de la température terrestre à 1.5°C sans jamais la dépasser afin de ne pas déclencher les rétroactions d’emballement une fois franchis certains points de bascule et sans énergie nucléaire ni technologie d’apprenti sorcier de captage et séquestration gargantuesques de gaz carbonique. Cette stratégie nécessite de révolutionner la structure économique de la société (système d’énergie, de transport, trame urbaine, bâtiment, agriculture) et les rapports sociaux (redistribution des revenus, contrôle démocratique de la finance et des grandes entreprises stratégiques). Le Plan de transition, bien qu’il proscrive l’exploration, l’exploitation et le transport d’énergie fossile, fait l’impasse sur ces ruptures.

Au mieux, on entrevoit une Suède idéalisée dont la gestion pandémique « d’immunité collective » est d’ailleurs un échec. Faut-il se surprendre que le Plan de transition ignore totalement la dimension éco-féministe de prendre soin des gens dont la pandémie a démontré qu’elle était au centre de l’organisation de la société ? Faut-il se surprendre qu’il galvaude la dimension éco-autochtone de prendre soin de la terre-mère en promouvant un nouvel extractivisme pourtant à l’origine de la pandémie ? Faut-il s’étonner de cette démission quand on sait que le Plan de transition Solidaire, jamais ni discuté ni voté par la militance du parti, résulte d’un rapport gardé secret, sauf pour une poignée d’initiés, écrit par un think-tank d’experts lié à la nébuleuse du PQ ?

Un rapport coût-bénéfice invraisemblable

Pour diminuer les émanations de GES de près de 50% par rapport à 2010 d’ici 2030, ce qui est la cible du Plan de transition, le cadre financier qui lui est associé affirme qu’il suffirait de 1.7 milliard $ par année pour les dépenses budgétaires plus la ré-allocation du Fonds des générations de 12.6 milliards $ sur le mandat (quatre ans) pour les immobilisations. (Passons sur la désuétude post-pandémique de ces pronostics.) Annualisé et additionné, il s’agit d’un peu plus de 4% des dépenses budgétaires québécoises ou de près de 3% de celles-ci plus la part fédéral revenant au Québec corrigée des paiements de transferts entre gouvernements. C’est une bagatelle. Si on suppose que la justice sociale réclame que la ré-allocation du Fonds des générations aille plutôt à la santé et à l’éducation, ignorées par le Plan de transition, à qui elle a été subtilisée et qu’en conséquence les immobilisations du Plan de transition se financent à un taux de 3% par un emprunt cumulable, sans hausse de la prime de risque, les pourcentages restent à peu près les mêmes.

Ces fonds s’obtiennent par soit une ré-allocation budgétaire (par exemple aucunes nouvelles autoroutes et ponts, baisse de la rémunération des médecins, baisse du prix d’achat de médicaments, suppression du soutien fiscal aux énergies fossiles, baisse des dépenses militaires) soit surtout par une modeste bonification de la réforme fiscale, dont la lutte contre les paradis fiscaux, au dépens du capital, réforme déjà prévue pour le réinvestissement dans les services publics existants. On doit cependant interroger la vraisemblance du ratio coût-bénéfice du Plan sans compter qu’il ne suppose aucune remise en question de la structure économico-sociale autre qu’une mise à niveau de transport en commun devenant moins américain du nord vers plus européen, et un régime fiscal plus scandinave. Il est certes difficile d’argumenter cette thèse faute de connaître les ratios du rapport d’experts gardé secret.

Mais si c’était vrai, ce miracle se serait su et la bonne nouvelle aurait été criée sur les toits. On peut penser que c’est ce rapport coût-bénéfice invraisemblable qui explique la mise en sourdine du Plan Solidaire. S’il était vrai, la solution à la crise climatique, du moins comprise à l’aulne de la proposition du GIEC-ONU, serait à ce point bon marché, du moins pour le Québec, qu’il n’y aurait pas lieu d’en faire un débat public mais un grand ralliement derrière la nouvelle orientation toute électricité de la CAQ (transport, bâtiment, industrie plus l’exportation d’hydroélectricité à New York et en Ontario) dont le Plan Solidaire n’est qu’un prolongement un peu plus poussé et pressé tout comme il l’était, dans le domaine du transport, de la Politique de mobilité durable des Libéraux québécois. On peut même se demander si Québec solidaire n’est pas tombé dans un piège à ours péquiste dont il essaie de se sortir à l’anglaise pour protéger la réputation de sa direction qui s’est faite rouler dans la farine.

Un Plan de transition financé par de régressives écotaxes aptes à soulever un mouvement gilets jaunes

Reniant son programme, le parti a décidé de « temporairement » recourir aux « écotaxes » pour financer son Plan de transition dont en plus il attend une réduction de 20% des GES grâce au changement de comportement des gens. Cette attente est irréaliste. La réduction des GES suite aux écotaxes est négligeable, ce qu’ont démontré les cas réellement existants de laColombie britannique et du Québeccomme de la Suède où les inflexions des émanations de GES sont dues non pas à la taxe ou marché carbone mais aux investissements et politiques normatives gouvernementales.

L’écotaxe est par définition une taxe indirecte qui est elle-même par définition régressive. Cependant, l’écotaxe a l’avantage d’avoir un air progressiste utile pour l’acceptabilité sociale et même pour remplacer l’imposition progressiste des revenus et des profits comme c’est le cas en Colombie britannique et en Suède. Elle est une sorte de taxe de vente sophistiquée et parfois masquée comme le marché carbone. Il faut bien distinguer la taxe et ce à quoi elle sert. Si elle sert à financer la transition énergétique elle n’en reste pas moins une taxe régressive et injuste. La transition peut être financée de la même manière que la santé et l’éducation c’est-à-dire par une réforme fiscale imposant l’une ou l’autre des différentes formes du capital (profit, capital propre, actifs, chiffres d’affaires, revenus individuels élevés, patrimoine, succession, consommation luxueuse) d’autant plus que le capitalisme est la cause fondamentale de la crise climatique et de celle de la biodiversité.

L’autre possibilité que promeuvent les néolibéraux et sociaux-libéraux est que le produit de la tarification soit redistribué plus ou moins intégralement et progressistement. Dans ce cas elle ne finance aucune politique gouvernementale. Son effet est seulement de modifier les rapports de prix sur le marché au prorata de l’ampleur de la tarification. La question qui se pose alors est l’efficacité de cette modification de prix. Plus les gens sont riches plus ils ont le choix de l’alternative ou à défaut la possibilité de payer la taxe sans douleur. Exemple : choisir entre une auto électrique et une auto à essence ou même les deux ; payer l’écotaxe sur les ponts et stationnements parce que de toute façon le système de transport collectif en banlieue et région est trop déficient pour être une alternative ou bien s’acheter un condo (cher) ou une maison (chère) dans le centre urbain. Sont par contre coincés les ménages familiaux moins fortunés partis vivre en banlieue parce que le centre urbain est trop dispendieux et qui n’ont pas les moyens de s’acheter une auto électrique qui reste plus chère même subventionnée et qui se substitue très mal à l’auto à essence sur les longues distances et qui ne peuvent pas s’acheter deux autos.

Ce marché et taxe carbone dépendent du bon fonctionnement du marché sous contrôle du capital financier. Celui-ci en contrôle le niveau par son chantage aux investissements sur les États grâce à la libre circulation des capitaux au cœur des accords de libre-échange. En plus du marché carbone, le Plan de transition prévoit le recours aux péages pour les stationnements hors rue dès la fin du premier mandat et éventuellement sur les ponts et autoroutes, tous ces péages étant l’équivalent de taxes indirectes régressives. On laisse entendre qu’existerait alors des alternatives du moins pour les péages sur ponts et autoroutes. Il le faudrait car autrement cette ponction sur les banlieusards des classes populaires sèmerait les prémisses d’un mouvement de type chemise jaune comme en France. En définitive, l’ensemble du
financement du Plan de transition en est un de droite qui ne ponctionne pas ou très peu le capital financier et les transnationales. Par ricochet, en serait compromise la mobilisation de masse nécessaire à la lutte climatique et pour la biodiversité. En particulier, il en résulterait un divorce entre la jeunesse déjà en mouvement et la grande masse de la population vivant en banlieue et en région.

La pandémie fait voir le grand trou béant du Plan de transition soit le prendre soin des gens

La défaillance majeure du Plan de transition est de ne pas y incorporer les services publics dont la pandémie a mis en relief l’importance vitale à commencer par les soins aux personnes âgées. Le prendre soin des personnes est l’autre côté de la médaille du prendre soin de la terre-mère. Le travail dans les services publics est intrinsèquement climato-écologique pour ne pas dire éco-féministe. Non seulement les soins prodigués par les travailleuses socialisent-ils de semblables tâches domestiques faites gratuitement, et à risque lors de la pandémie, mais ces emplois nécessitent peu d’énergie mécanique (et beaucoup d’énergie humaine) tout en créant de riches rapports humains qui désaliènent de la solitude consumériste, en opposition à la société de consommation de masse qu’exige l’accumulation capitaliste.

Il faut aussi prendre en compte que les services publics sont du moins au Québec le lieu privilégié des luttes pour l’augmentation des salaires et pour l’amélioration des conditions de travail dont celles de la santé-sécurité laquelle est l’écologie des lieux de travail, ce que la pandémie a drastiquement illustré. S’impose le droit syndical de fermer tout lieu de travail jugé dangereux par les travailleuses. Toute la prise en charge des soins aux personnes âgées, y compris les résidences et les soins à domicile, doit être arrachée au secteur privé et les salaires et conditions de travail uniformisés par le haut. La pandémie a en particulier démontré la faillite de l’industrie pharmaceutique que le gouvernement du Québec a subventionnée généreusement en vain pendant des décennies pour voir plusieurs de celles-ci foutent le camp ou réduire leur voilure. On ne peut conclure qu’à sa socialisation (étatisationdémocratisation) de même qu’à la mise sur pied d’une industrie socialisée de la fabrication de matériel sanitaire d’usage courant pour motif d’approvisionnement sécuritaire et de réduction de l’énergivore transport international.

L’augmentation des bas salaires et des conditions de travail donne les moyens matériels et cognitifs pour adopter un mode de consommation le plus rationnel possible dans le cadre du système irrationnel de production. On peut ainsi minimiser l’obsolescence programmée en achetant des produits plus durables et non de la pacotille, se loger convenablement et non dans un taudis mal isolé ou encore acheter une auto écologiquement performante et non une bagnole énergivore, ou encore de la nourriture saine plus dispendieuse. Il n’en reste pas moins que l’impératif de l’accumulation du capital va dans le sens de la consommation de masse que toute politique climatique sérieuse doit supprimer. Au minimum les produits durables requièrent « une garantie minimale de 10 ans sur la plupart des marchandises ainsi qu’une garantie de réparation à faible coût » tel que stipulé dans le Plan de transition et l’interdiction des objets de plastique à usage unique.

Le logement social éco-énergétique est ignoré comme la mise au niveau systématique des bâtiments

La pandémie fait mieux comprendre que le logement est l’intime lieu vital de repli sécuritaire. Il se doit d’être abordable, confortable, suffisamment spacieux, sain et épanouissant, certainement pas menaçant, pour les femmes et les enfants. Sauf pour les gens relativement riches, le marché privé est incapable de remplir ces conditions. Le droit au logement en fait une responsabilité publique ce qui amène à revendiquer la prédominance du logement social éco-énergétique de propriété publique et de gestion démocratique sur le logement privé tous les deux régis par un code du bâtiment tendant à l’autonomie énergétique devenu technologiquement possible. En attendant, le contrôle des loyers et l’interdiction des évictions restent nécessaires.

Non seulement le Plan de transition ignore-t-il la question du logement social mais on reste étonné de la paucité de la politique de mise à niveau écologique des bâtiments. Cette politique peut être une grande créatrice d’emplois et d’économie d’énergie, fossile ou non, tout en étant financée par une banque d’État sans important recours au budget public car le remboursement de la dette pour les travaux se finance à même l’épargne réalisée grâce à l’économie d’énergie (les négawatts). La politique du parti à cet égard ne comporte aucune cible ni échéance sauf peut-être pour les bâtiments étatiques. Pour le bâtiment résidentiel, le parti mobilise une partie des CELI (fonds d’épargne des particuliers dont les rendements ne sont pas imposés), pourtant un outil d’évasion fiscale légale à proscrire pour la gauche, pour que s’autofinancent les propriétaires avec une part réservée pour ceux moins fortunés et leurs locataires.

Quant aux bâtiments non-résidentiels, ils disposeraient d’un fonds dont la source est inconnue. Il serait pourtant possible qu’un ou des organismes étatiques prennent à charge l’évaluation des travaux, leur réalisation et leur financement, quitte à
mobiliser les institutions financières ou une banque d’État, pour mettre au niveau de la meilleure technologie écologique tous les bâtiments. Tous les bâtiments utilisant des énergies fossiles devraient êtres mis à niveau d’ici 2030 et les autres d’ici 2040. Le Plan ne prévoit que des projets pilotes pour des bâtiments à énergie (quasi) zéro alors que la démonstration est déjà faite (ex. bibliothèque de Varennes). Faut-il se surprendre qu’à cause de ce manque d’audace, la mise à niveau écologique des bâtiments ne mobilise que 4% des 390 000 emplois brut à créer (5% des 300 000 net) contre 64% (83%) pour ceux concernant le transport des personnes.

L’inadéquate politique des transports et industrielle du Plan de transition ménage l’entreprise capitaliste

Le Plan met des gants blancs avec les entreprises privées qui possèdent et contrôlent les secteurs de l’industrie et du transport des marchandises pour lesquels les cibles sont modestes relativement à leur apport important en GES, et sert la vis aux ménages et aux gouvernements qui possèdent et contrôlent les moyens de transport des passagers dont on exige la contribution essentielle. On note que le transport des marchandises compte pour un peu moins de 20% des émanations totales de GES mais le Plan Solidaire n’en attend que moins 10% des réductions. On constate la même disproportion du côté de l’industrie qui compte pour environ le tiers des émanations de GES du Québec mais dont le Plan de transition n’attend aussi que moins de 10% des gains.

La condescendance vis-à-vis l’entreprise privée se mue en générosité quand on réalise que les objectifs en matière de transport des passagers seront atteints soit par des subventions pour l’achat d’autos solos électriques soit par de grands projets coûteux et longs à réaliser tels le REM et la ligne de métro dite rose de Projet Montréal. Le soutien de l’auto hydroélectrique, au profit des transnationales de l’auto et GAFAM produisant hors Québec, consacre la continuation de l’étalement/congestion urbains, que la loi ne pourra pas arrêter, aux dépens des terres agricoles et de l’agriculture urbaine, et au bénéfice des énergivores banlieues tentaculaires de maisons unifamiliales souvent surdimensionnées. La contribution à la réduction des GES du REM est nul selon untest climat par l’organisme Coalition Climat Montréal et le Syndicat canadien de la fonction publique (SCFP).

Le train aérien REM abandonne la trame urbaine, là où réside et travaille Madame et Monsieur Tout-le-monde, à l’auto solo, à essence ou électrique. « Le projet de loi 61, en forçant le prolongement du REM à travers les meilleures terres agricoles du Québec, en monétisant les milieux humides, en accélérant un développement immobilier sans les mesures protectrices requises, renvoie aux calendes grecques toute velléité de s’attaquer de façon crédible au sempiternel problème de l’étalement urbain... » (Marie-Claude Prémont et Fanny TremblayRacicot, Opinion Projet de loi 61 – Une machine à étalement urbain toute vapeur, La Presse, 9/06/20). Le Plan de transition Solidaire communie à ce ce « coup d’État caquiste » (Frédéric Bérard, Métro-Montréal, 9/06/20) au seul bénéfice de « l’industrie de la corruption ».

Le soutien direct ou indirect à l’entreprise privée parsème le Plan de transition que ce soit pour l’adjudication de plantureux contrats de transports collectifs, de subventions pour les véhicules électriques, pour l’électrification du camionnage lourd ou léger, pour la conversion de flottes vers les dit carburants alternatifs, pour l’industrie du recyclage, pour l’établissement de circuits courts, pour l’efficacité énergétique des commerces et des industries, pour l’édification d’une chaîne de production du lithium dont les entreprises en aval des mines seront privées, pour l’édification d’une chaîne biosourcée, pour la reconversion de l’appareil productif vers des technologies propres. Ne faudrait-il pas plutôt obliger les entreprises privées, en recourant à des cibles, échéances et fortes pénalités dont la mise sous tutelle en combinaison avec leurs travailleurs et travailleuses, à exécuter ces politiques d’autant plus qu’à terme ça leur est rentable et quitte à obliger les banques à financer les PME pour ce faire.

La révolution du transport personnel débute par l’interdiction du véhicule privé et de la maison unifamiliale

Le revers du prendre soin des gens est le prendre soin de la terre-mère dont la clef de voûte est de juguler l’hypertrophie du transport. Le bon marché du pétrole a permis son boursouflement au point d’accaparer l’espace urbain tout en faisant exploser cet espace sur les terres avoisinantes agricoles et forestières. La démesure du transport des personnes s’est incrustée socialement par l’individualisation des moyens de transport devenu le socle de la consommation de masse car l’auto privée conduit à la maison unifamiliale qu’il faut ensuite meubler et enjoliver. L’esclavage de la dette hypothécaire et l’incrustation idéologique de la mentalité de petit propriétaire orbite le peupletravailleur autour de la planète capital, malédiction des « trente glorieuses » dans les pays impérialiste ce qui avec la société spectacle ont pavé la voie à la défaite du peuple-travailleur par le néolibéralisme.

En ce qui concerne la question des transports, là où le bât blesse, le plan Solidaire est essentiellement une bonification de la Politique de mobilité durable (PMD) des Libéraux québécois jamais critiquée par le parti. Pour le Grand Montréal, qui compte pour 75% des dépenses prévues pour le transport des personnes selon le Plan de transition, le parti se rallie aux lignes directrices de la PMD gouvernementale soit essentiellement le train aérien REM et une orgie de métros au lieu d’un réseau de transport collectif en voies réservés, bon marché, et inséré dans la trame urbaine à l’exemple du « Grand virage » mis de l’avant dès 2016 par la Coalition climat Montréal sur la base du rejet du REM par Trainsparence et le Syndicat canadien de la fonction publique (SCFP).

Cette politique chère et tape-à-l’œil de la taupe et de l’albatros abandonne la terre ferme au loup de l’auto solo, à essence et électrique, d’abord en subventionnant l’auto solo électrique puis en interdisant l’auto solo à essence qu’en 2040, et non pas en 2030 ou même en 2025 comme en Irlande, en Norvège, au Pays-Bas et en Inde, tous acquis, au mieux, au capitalisme vert. La gratuité sur dix ans du transport collectif intra-urbain tout comme la nationalisation de celui interurbain mais sans significatif investissement supplémentaire prévu pour une offre en partant rachitique, ne sont qu’un baume sur la plaie du délaissement des banlieues et régions. La haute vitesse étant énergivore et dispendieuse, les liens interurbains de haute technologie à haute vitesse n’ont pas à se substituer à un système ferroviaire nationalisé et fortement bonifié.

L’auto hydroélectrique est beaucoup plus polluante que l’on pense comme le prouve l’étude de son cycle de vie par HydroQuébec, qui n’a pourtant aucun intérêt à la dénigrer, surtout à cause de ses batteries mais pas seulement, sans compter qu’elle maintient la congestion et l’étalement urbains. Le rejet de cet auto solo minimiserait ce problème pollution minière car non seulement l’électrification du transport en commun, du rail et des navires est-elle quantitativement moins importante et elle se fait en bonne partie en alimentation d’électricité continu (ex. tramway) et non par le stockage de l’électricité dans des batteries. En plus, la ville sans auto solo ni bungalow et à circuits courts nécessite moins de services de transport. Cette dose d’extractivisme lithium-batterie du Plan de transition est d’autant plus à remarquer qu’elle compte pour 13% des emplois brut à créer (17% de ceux net), soit la seconde source en importance après le transport des personnes.

L’opposition aux autoroutes ? Selon le plan de transition Solidaire, le parti « abandonnera tout nouveau projet de construction routière sauf ceux qui visent à améliorer la sécurité routière ou qui permettent de désenclaver des régions isolées. » C’est ce qu’on appelle une promesse politicienne car la sécurité excuse tout et l’électoralisme encore plus. Les autoroutes et les boulevards existant en abondance, ils doivent être utilisés d’ici 2030 en voies réservées pour du transport en commun électrifié, fréquent et confortable construit au Québec sous contrôle public et gratuit d’ici là de sorte qu’il devienne un service public majeur, comme la santé et l’éducation. Loin d’être concentrés dans les centre-ville selon le modèle du moyeu comme c’est le cas dans le Plan de transition, ces investissements s’étaleront en banlieue et en région selon le modèle de la toile d’araignée contribuant à la décentralisation de l’emploi et donc aux navettes courtes favorisant le transport actif. On ne peut pas être en même temps pour le transport actif et abandonner la trame urbaine à l’auto solo comme le préconise le Plan de transition.

La mesure clef est l’interdiction de toutes les autos solos, à essence et électriques, dès 2030 dans les régions métropolitaines et leur remplacement par un transport en commun gratuit et dès que possible électrifié sur la terre ferme y compris des mini-bus éventuellement sans chauffeur dans les banlieues d’unifamiliales et un service complémentaire et bon marché d’autopartage. En plus, la pandémie démontre l’importance accrue du transport actif dont les aménagements temporaires doivent être pérennisés : « Dans le cadre de la lutte contre la COVID-19, la Ville de Montréal a proposé un plan ambitieux comme la majorité des grandes villes qui s’adaptent aux enjeux de mobilité durable du XXIe siècle. Il faut réaliser qu’une fois la pandémie passée, les villes comme Montréal auront encore à bonifier la capacité des réseaux cyclables, piétonniers et des voies réservées aux autobus. Elles agiront de façon plus graduelle, mais néanmoins forte pour répondre aux enjeux environnementaux, de santé publique et de congestion » (Blaise Rémillard, Opinion – Corridors sanitaires et voies cyclables temporaireSMontréal et les arrondissements doivent garder le cap, La Presse, 9/06/20).

Au fur et à mesure de la disponibilité des alternatives, les autos solos seraient rachetées à leur coût d’achat déprécié. Cette urgence impose une interdiction immédiate de la construction de maisons unifamiliales et même en rangées, la densification obligatoire de celles existantes quitte à soutenir leurs résidents soit pour le déménagement soit pour la subdivision. Autrement il est impossible de construire une urbanité basée sur le transport actif et sur celui collectif et de maximiser la mixité des fonctions et l’agriculture urbaine. Le paradigme auto solo-pétrole-unifamiliale doit être remplacé non pas par celui auto solo-électricité-condo du capitalisme vert perpétuant l’étalement urbain mais par le paradigme transport actif et en commun (autobus, tramways, minibus, autopartage complémentaire) gratuit, fréquent, confortable, partout, électrifié et construit principalement au Québec sur toutes les autoroutes et boulevards existants mais sans en ajouter aucun.

La réduction du transport des marchandises, le cœur de la bête, trouve sa solution hors transport

En 2015 au Québec, la part du camionnage lourd en émanations de GES était supérieure à celle de l’automobile, ce qui est presque aussi vrai pour le camionnage léger comprenant les VUS. Sa contribution à la croissance des GES depuis 1990, tout comme celle du camionnage léger, est largement supérieure à celle de l’automobile. Pourtant, le Plan de transition ne prévoit qu’une réduction minime des GES du transport des marchandises par rapport à celui des personnes, soit un rapport de 14%. Selon le plan Solidaire, les transports ferroviaire et maritime n’ont pas la priorité sur le camionnage lourd qui jouira d’autoroutes électriques et dont les entreprises seront soutenues alors que le transport à longue distance des marchandises peut être considéré comme une industrie stratégique à nationaliser selon le programme du parti.

La disparition du véhicule privé induira automatiquement une efficacité accrue du transport des marchandises et par là une réduction de ses émanations de GES. Mais ce champion de la croissances des GES, beaucoup plus que le transport des personnes, nécessite une révolution structurelle pour atteindre les objectifs du GIEC dont la clef de l’énigme se trouve hors du secteur des transports, soit la réduction drastique de la consommation de masse, la souveraineté alimentaire, en particulier la généralisation des circuits courts et le réaménagement urbain-rural. La collectivisation des moyens de transport des personnes et celle de l’habitat frappera au cœur de la consommation de masse. La fin de l’obsolescence programmée par la durabilité et la mise à jour garanties des produits et la fin de la mode en faveur de la diversité fera le reste.

La fin du régime alimentaire basé sur la consommation de viande réduira grandement les surfaces cultivées (et l’apport en intrants dont surtout l’eau) de sorte à faciliter l’imbrication ville-campagne en partant de l’agriculture urbaine jusqu’à la grande culture des céréales et des oléagineux, très réduite, en passant par celle des fermes maraîchères, boostée. La mixité des fonctions urbaines maximisera le transport actif non seulement pour le travail mais aussi pour la logistique de la distribution électrifiée des produits vers des centres de quartier minimisant les énergivores grandes surfaces à la Walmart et, de l’autre côté de la médaille, la toute aussi énergivore livraison à domicile à la Amazon. Dans les zones rurales, le regroupement de l’habitat au village ira dans le même sens y compris pour faciliter le transport collectif, avec une part plus grande pour l’autopartage et même la camion-partage électrique, et l’habitat collectif qui pourrait inclure la maison en rangée.

La quantité de produits consommés ainsi minimisés tout comme leur transport à longue distance et même la distribution finale, resterait à déterminer la meilleure structure de moyens de transport de marchandises. Le rail (et le cabotage) électrifié est le moins énergivore et moins coûteux moyen de transport de moyenne et longue distance dont la souplesse qui lui manque peut être compensée par le transbordement de containers camionsnavires-rail. Resterait le défi de rendre moins énergivore la navigation océanique par un mélange d’électrification et de voile. Cette modernisation-retour d’une technologie ancienne s’applique aussi au transport aérien avec le retour du dirigeable qui pourrait remplacer le très énergivore avion... à condition de rompre avec le culte de la vitesse découlant de la maximisation capitaliste de la rotation du capital. Le retour à une certaine lenteur pour le travail, les repas, la socialisation est au cœur du style de vie d’une société anticapitaliste.

L’électrification de camions légers est déjà en cours. Elle peut être complétée d’ici 2030 en n’en faisant une obligation pour les entreprises qui y ont un intérêt tellement la dépense en énergie est meilleure marché que pour les camions à essence, quitte à obliger les banques à financer l’opération à bon compte. Que dit le Plan de transition au sujet du transport de marchandises à courte ou moyenne distance ? Rien de spécifique, aucun objectif, aucun échéancier. Il en est de même pour le camionnage lourd où l’on donne la priorité à la collaboration avec l’industrie entre autre pour une autoroute électrique au détriment de la priorité à donner à la construction d’un réseau public ferroviaire électrifié et de cabotage qui pourrait être complété d’ici 2040.

Le Plan de transition remet à peine en question l’agro-industrie et la l’hyper-consommation de la viande

L’agro-industrie, quand on tient compte non seulement de la production agricole proprement dite comme le font les statistiques officielles, mais aussi de la transformation de ses matières premières et de ses produits et particulièrement de leur transport y compris celui des consommateurs pour se les procurer, engendre plus du tiers des GES mondiaux. Si la forte atténuation du régime carnivore, seulement abordé par la bande dans le Plan de transition en tant que faisant partie « d’une campagne de sensibilisation sur l’impact social et environnemental des habitudes alimentaires », ferait un bout de chemin pour réduire ces GES tout comme la souveraineté alimentaire réduisant les distances parcourues, c’est la révolution agro-biologique qui est déterminante. (Contrairement aux dires de l’UPA, souveraineté alimentaire et agroindustrie sont antinomiques car la diversité de l’assiette contredit la monoculture de l’agro-industrie dont 80% des surfaces au Québec est consacré à nourrir les animaux.) La pandémie crée l’opportunité de s’y mettre tant elle a incité un mouvement de reconnexion à la terre.

La protection du zonage agricole a beau être soulignée dans le Plan de transition, le soutien de l’auto solo électrique et le REM exerceront des pressions économiques vers l’étalement qui viendront à bout de toute « restriction des périmètres d’urbanisation ». Alors que l’impôt immobilier, de loin au Québec la première source fiscale des gouvernements locaux, favorise l’étalement urbain, le Plan de transition, dans un premier mandat, préconise le même changement que les autres partis soit un banal transfert de un point de pourcentage de la taxe de vente (TVQ). Il n’y a aucune cible et échéance pour la réductions des engrais fossiles et des pesticides ni pour la conversion de l’agro-industrie en bio-agriculture dont il est à peine question. Serait-il saugrenu de faire muter les multiples politiques de soutien à l’agro-industrie vers l’agrobiologie ?

Sans compter cet historique fort soutien financier et réglementaire étatique, la pandémie a souligné la surexploitation, et souvent le risque sanitaire, des travailleurs des abattoirs et des grandes fermes maraîchères au point qu’une forte portion doivent êtres des travailleurs temporaires mexicains et guatémaltèques. On ne trouve pas dans le Plan de transition, ni dans la politique pandémique Solidaire, un appel et des mesures de justice sociale pour ces travailleurs y compris un chemin pour obtenir leur résidence permanente si désiré. Le bon marché relatif de la nourriture en résultant permet non seulement aux pays impérialistes dont le Québec fait partie de se servir de l’alimentation comme d’une arme vis-à-vis les pays dépendants mais aussi de dégager une marge de manœuvre dans les budgets des ménages populaires pour tant la consommation ostentatoire que celle de masse. Ce laxisme vis-à-vis l’extractivisme agro-industriel qui épuise les sols et pollue les eaux en plus d’émettre plein de GES et de sur-exploiter tant de travailleurs est une forme exacerbée d’extractivisme.

L’alternative de la ferme agro-industrielle est la ferme paysanne qui mérite d’être autant soutenue en particulier par une socialisation de sa finance et de sa distribution ce qui empêcherait l’étranglement de l’agriculture par la banque, ce que dénonçait le rapport Pronovost, et permettrait la mise sur pied de circuits courts et marchés paysans comme moyen principal de distribution et non pas comme méthode marginale à l’ombre des oligopoles Métro-Sobey-Loblaw-Walmart (dont une seule entreprise québécoise) qui contrôle l’approvisionnement en fonction de normes standardisées de la consommation de masse. Comme service essentiel, la distribution alimentaire doit être socialisée autant que la santé, l’énergie et le transport. La ferme paysanne a besoin d’un accès bon marché à la terre ce qui serait possible par l’intermédiaire de la constitution d’un fonds de terre étatique mis à la disposition des fermes paysannes sur la base d’un droit d’usage garanti tant que la ferme garde sa vocation de ferme agrobiologique.

L’extractivisme du Plan de transition liquide la pertinence écologique de la lutte pour l’indépendance

Le secteur de l’aluminium produit à lui seul 6.4% de la totalité des GES du Québec en 2015. Or Rio Tinto mettra graduellement en opération un nouveau procédé industriel, rentable pour l’entreprise, faisant complètement disparaître ces émanations de GES. L’obligation de le faire d’ici 2030 pour tout le secteur de l’aluminium dominé par Rio-Tinto et Alcoa serait-il trop demandé à ces transnationales qui conjointement ont imposé un long lock-out à leurs employé de Bécancour de plus d’un an ? La politique zéro-déchet proposée dans le Plan de transition est sans cibles intermédiaires et sans échéance alors que celle gouvernementale en comporte... même si elles ne sont pas respectées.

Le Plan propose d’utiliser les résidus agricoles et forestiers à des fins énergétiques alors qu’écologiquement ceux-ci doivent rester sur place pour nourrir le sol déjà affaibli par l’extraction de la matière récoltée, nourriture et bois. On le fait au nom du développement économique des régions mais au prix de l’affaiblissement de leurs sols. Le Plan propose de substituer la biomasse aux combustibles fossiles pour la chauffe des bâtiments industriels et institutionnels, d’utiliser du biocarburant y inclus le gaz naturel renouvelable pour les véhicules. Or le bilan théoriquement zéro émanation de GES par la biomasse est douteux car les émanations de GES sont immédiates mais la nouvelle pousse est longue et hasardeuse surtout en pays nordique, sans compter l’accaparement nécessaire des terres souvent aux dépens des nations autochtones.

Est aussi discutable la mise en place de la filière du lithium dont l’extraction par des mines à ciel ouvert est particulièrement dommageable pour l’environnement. À partir du moment où on opte pour la généralisation de l’auto solo électrique, comme le fait le Plan Solidaire, la production du lithium et autres métaux rares deviendra une plaie environnementale et sociale mondiale. Il est plus que temps de mettre fin au scandale du pillage des forêts pour fabriquer du papier, en particulier du papier-journal, d’autant plus que cette fabrication est énergivore même si elle est masquée par le recours à la fausse alternative de la biomasse promue par le Plan comme une filière à développer comme pour celle du lithium. Des alternatives électroniques sont maintenant disponibles. Et la promotion d’aires protégées et de ceintures de verdure par le Plan, si louable soit-elle, ne peut cacher la réalité du pillage des forêts.

Le Plan de transition Solidaire fait sien l’extractivisme indépendantiste d’Option nationale adopté par la direction du parti. Dans son manifeste révisé, Option nationale se réfère aux « avantages concurrentiels » du Québec. Pour lui, l’économie québécoise ce sont

des ressources abondantes qui nous permettront de faire aisément la transition entre notre situation actuelle et un Québec indépendant. Notre secteur minier se classe parmi les dix plus importants producteurs mondiaux. […] 60 % du potentiel minéral de notre sous-sol reste inexploré. La forêt constitue également un secteur qui peut contribuer à notre développement. Nous possédons aussi d’importantes réserves d’eau potable. Dans le contexte du réchauffement climatique, cette ressource devrait être de plus en plus déterminante. De plus, l’hydroélectricité nous place dans une position enviable dans ce même contexte, en plus de nous permettre d’attirer des industries énergivores ou d’exporter en cas de hausse des prix.

À l’encontre de l’extractivisme, l’orientation éco-féministe-autochtone du prendre soin des gens et de la terre-mère pour le plein emploi écologiste rejette l’axe pétrole-finance Calgary-Toronto et impose l’obligation de l’indépendance afin de prendre en charge démocratiquement l’épargne nationale par la mise au pas de la Finance.

Capitalisme vert ou planification démocratique ?

Le Plan de transition tel qu’il est tombe dans l’ornière du capitalisme vert. En très résumé, le capitalisme vert ralentit la dite transition pour rentabiliser le capital déjà investi dans le complexe auto-pétrole-unifamiliale graduellement transformé en celui auto-électricité-condo et pour se donner le temps de mettre au point et déployer une gargantuesque géo-ingénierie de récupération des GES atmosphériques qui auront entretemps largement dépassé les cibles de température des Accords de Paris et sans se soucier des points de bascule rendant ce dépassement irréversible. Ce capitalisme se financera à même des marchés et taxes carbone, ce que le parti a cristallisé à son congrès 2019, se substituant aux progressifs impôt sur le revenu et sur les profits et plus fondamentalement à l’expropriation de la Finance.

Une ré-ouverture post-pandémique à gauche appelle un plan de relance dont le Plan de transition devrait être le noyau. Pour accomplir l’impossible afin que la température terrestre moyenne ne dépasse pas 1.5°C nécessite le recourt à une planification démocratique qui supplante la prééminence du « marché », pléonasme signifiant la dictature sous-jacente du capital financier et de sa poignée de cent à deux cent grandes transnationales. Souvenons-nous que ce « marché » ne tolère comme interventionnisme climatique que cette écofiscalité, catégorie de taxes régressives dont le niveau est limité par le chantage et la réalité de la grève et fuite des capitaux permises par le libre-échange.

Cette planification démocratique se déclinant par paliers résiduaires de bas en haut, évidemment d’application obligatoire comme l’est n’importe quelle loi, s’oppose à celle bureaucratique qui a fini par conduire à la faillite le « socialisme du XXiè siècle ». Si cette perspective paraissait complètement décrochée de la réalité avant la pandémie, la carabinée intervention économique de l’État, beaucoup plus forte que lors de la récession de 2008-09, la rend tout à fait possible comme a été possible la transformation de l’économie civile en économie de guerre en trois ans au début des années 1940 puis viceversa. C’est cette alternative drastique, devenue nécessaire, qu’aurait dû populariser Ultimatum 2020.

Une société de prendre soin en est une de plein emploi écologique

Une société du « prendre soin » est aussi une société de plein emploi écologique et vice-versa. Un réinvestissement massif dans les services publics, anciens (santé, éducation, garderies, services sociaux) et nouveaux (banque publique, logement social éco-énergétique et collectivisé comme épine dorsale du secteur du logement, réhabilitation écologique de tous les bâtiments, transport en commun comme substitut à l’auto solo, agriculture biologique rurale et urbaine, programme d’efficacité énergétique et d’énergie renouvelable) créera énormément d’emplois stables et bien rémunérés.

Ces emplois remplaceront ceux supprimés tout aussi massivement dans le secteur des hydrocarbures, de l’extraction et de l’armement, dans la fabrication reposant sur l’obsolescence programmé et la mode et aussi sur la production de masse telle l’automobile, dans le marketing et la publicité, dans la logistique dont le camionnage, dans les secteurs boursouflés du commerce et de la finance mais non nécessairement dans les services privés aux personnes telle la restauration et les services communautaires et à domicile.

Ce sera un festival des emplois aujourd’hui féminins dans lesquels les hommes devront se recycler car ce sera l’hécatombe pour leurs secteurs d’emploi d’aujourd’hui axés sur la production de masse. À ce point que le mot d’ordre syndical de « transition juste », si juste soit-il, a un petit côté défensif et sexiste alors qu’il est tellement évident que la société de prendre soin créera des emplois nouveaux à profusion à l’épreuve de toute robotisation même s’ils pourront être soutenus mais non remplacés par l’intelligence artificielle.

Par contre, l’automatisation intelligente sera en mesure de remplacer en grande partie ces énergivores emplois extractivistes et manufacturiers qui resteront indispensables pour fabriquer les infrastructures et machineries nécessaires afin de collectivement nous loger, climatiser et transporter sans compter nourrir et vêtir chacune d’entre nous de façon créative mais sobrement. Dans ce contexte, l’équilibre de plein emploi durable sera atteint par l’ajustement du temps de travail à la baisse d’autant plus facilement que la cumulatrice et consumériste angoisse de la précarité et de la sécurité disparaîtra avec son cortège de stress et d’obésité. De même, qu’à courtterme dans les pays du vieil impérialisme, les flots de réfugiées viendront en renfort, grâce à des frontières ouvertes, dynamiser une population vieillissante.

Substituer la valeur d’usage à la valeur d’échange

La pandémie fait comprendre que l’économie n’est pas une affaire de croissance du PIB comme condition sine qua non à l’accumulation du capital mais en est une affaire de reproduction sociale du genre humain auquel il faut de basiques produits et services à déterminer socialement dont le noyau reste l’alimentation, l’habitat, l’habillement auxquels l’urbanisation a ajouté les services de santé, d’éducation, de mobilité. L’être humain n’a pas besoin de valeur d’échange pour trafiquer et s’enrichir mais de valeur d’usage pour vivre et se reproduire. Plus profondément, la production de valeur d’échange déshumanise car elle est centrée sur la marchandise dont l’équivalent général est l’argent, celle de la valeur d’usage est centrée sur la satisfaction du besoin humain dont la mesure est la solidaire « égaliberté ». La première mène à l’asservissement de la seconde, à l’exploitation cumularde de la force de travail, à l’appropriation dominatrice des femmes pour se reproduire gratuitement ou à peu de frais, au racisme qui divise la grande majorité d’en bas pour que gouverne un groupe restreint d’hommes armés surtout blancs dont le pouvoir est assis sur la propriété privée des moyens de produire aux mains d’une poignée d’entreprises ne cessant de se concentrer et de précipiter la civilisation dans la barbarie.

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