Édition du 16 avril 2024

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Amérique latine

Venezuela : La révolution est menacée de l'intérieur et de l'étranger

Le dimanche 14 avril, la révolution bolivarienne a connu l’un de ses moments les plus difficiles depuis le coup d’État de 2002. Onze ans après le fatidique coup d’Etat médiatique, dirigé par l’opposition vénézuélienne soutenue par le monde des affaires et avec l’appui du gouvernement des États-Unis, la révolution a affronté deux forts ennemis, celui de l’extérieur et celui de l’intérieur.

(Traduction : Presse-toi à gauche !)

La chute rapide du soutien électoral au chavisme dans ces élections présidentielles et le déplacement de 600 000 votes vers l’opposition démontrent que les critiques formulées par Hugo Chavez lui-même, après avoir remporté les élections d’octobre 2012, avec une marge d’environ 10 pour cent, étaient justes. Dans une intervention télévisée du premier Conseil des ministres, Chavez, déjà assermenté comme Président de la République pour la période 2012-2019, fait une critique féroce du parcours emprunté par la Révolution bolivarienne dans son discours publié sous le nom du "Coup de Timon".

L’accent fut alors mis sur la bureaucratie, l’inefficacité, la corruption et le manque de compréhension du cours qui devrait prendre le processus de construction du socialisme : LES COMMUNES. "Nicolas, je te confie cela comme si je te confierai ma vie, LES COMMUNES, l’État de droit social et de justice », déclara le président.

Chavez accusa ses ministres de ne pas avoir travaillé de concert et leur demanda de dénoncer ceux qui s’éloignent de leur devoir de dirigeants des institutions révolutionnaires. "Il est triste que nous restions silencieux (...) Ici, nous ne sommes pas des élèves du secondaire ou des écoles primaires. C’est le gouvernement révolutionnaire du Venezuela, élu par un peuple il y a deux semaines, mais également très critiqué par le peuple et avec raison, et parmi ces raisons, il y a le manque d’efficacité ».

L’évaluation précise de l’état de stagnation de la Révolution par Chavez l’a amené à mettre de l’avant le Plan de la Patrie, pour la nouvelle période de gouvernement, cette fois avec la participation des syndicats et des organisations sociales. La mise en place de ce plan, qui a été pour lui très exigeant, a affecté sa santé, ce qui limita la mise en place de mesures pour réaliser cette rectification

L’enquête au ministère des Communes était en cours, la création du Département de surveillance et de contrôle, l’aggravation de son état de santé a nui au suivi et à son application.

C’est à ce moment du processus d’autocritique et de rectification, que Chavez gravement atteint délègue à son vice-chancelier Nicolas Maduro la suite et devenir à court terme de la Révolution.

Mais Nicolas Maduro, comme il l’a affirmé durant à la campagne, n’est pas Chavez, mais son fils. Un enfant qui n’a pas la force politique de son père, un enfant qui fait face à une révolution qui après 14 ans n’a pas réussi à créer une masse critique qui comprend que la révolution n’est pas un gouvernement visant à générer des avantages personnels, que l’Etat n’a pas à être responsable de l’organisation du peuple, que devenir fonctionnaire de l’État n’est pas une promotion sociale, ni une source de privilèges, Non.

Cette critique constructive des Communes, des Conseils communaux, des Milices, de médias populaires de communication, du Parti de la Révolution, cette critique massive du Contrôleur de l’État et des fonctionnaires, visait une minorité dans la Révolution. De nombreux secteurs déçus ayant peu de formation politique, ont donné des votes au caprilisme qui a utilisé intelligemment un discours qui a fait sa force dans ces secteurs malheureux (mécontents) et qu’il a résumé dans le slogan : « Chávez n’est plus là, il faut en finir avec les privilégiés » .

Le défi pour le chavisme avec Maduro à sa direction est énorme. Tout d’abord, il devrait être en mesure de surmonter l’état de crise politique engendrée par l’opposition de droite, crise renforcée par le résultat serré de l’élection. Les Forces armées nationales bolivariennes (fanbase) ont joué un rôle essentiel, en appelant au calme et à la discipline et en soutenant la politique adoptée par le président élu Nicolas Maduro et l’équipe dirigeante du Parti socialiste uni du Venezuela (PSUV), qui n’ont pas accepté le chantage de la droite qui a réagi par une violence incontrôlée depuis dimanche, ce qui a conduit à la mort de sept partisans du chavisme et qui en a blessé plus d’une soixantaine d’autres, sans compter la destruction de centres de santé et de marchés alimentaires du gouvernement par des bombes incendiaires.

Le deuxième défi, c’est de parvenir à corriger la bureaucratisation extrême de l’Etat d’une part, et d’autre part de renforcer le pouvoir populaire. Pour ce faire, l’implication des populations organisées en dehors des organismes gouvernementaux est essentielle. La formation des cadres de la révolution, la formation politique des fonctionnaires de l’État, la sortie des saboteurs et des infiltrés des institutions sont essentielles pour faire avancer la révolution vers le socialisme et ne rester pas coincé entre un État social tourné vers l’extérieur et un État capitaliste tourné vers l’intérieur.

Ce 14 avril, le Venezuela est entré dans une période de changement où ce qui est en jeu n’est pas seulement l’élection présidentielle mais la Révolution bolivarienne et la révolution latino-américaine. Les forces révolutionnaires doivent se radicaliser, connaître un saut dans leur niveau de conscience politique et assumer clairement la construction du socialisme, en expurgeant du gouvernement et de l’Etat les corrompus et les bureaucrates responsables de cette crise.

L’unité des trois nouvelles racines de la Révolution : le gouvernement, les Forces Armées Nationales Bolivariennes et le peuple organisé doivent assumer avec conviction le leadership collectif que nécessite cette révolution pour la construction véritable du socialisme du XXIe siècle.

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