Tiré du blogue de l’auteur.
Hervé Kempf est une figure majeure du journalisme critique en France. Suivant les pas d’un Edwy Plenel, faisant ses classes au Monde où il a assumé un engagement syndical vis à vis d’une orientation d’accompagnement du système, il co-fonde le journal écologiste Reporterre avant de s’y consacrer pleinement lorsqu’il quitte Le Monde. Auteur d’une quinzaine de livres, il adapte et mets à jour dans cet album BD son ouvrage de 2007 "Comment les riches détruisent la planète".

Le dispositif BD est connu et très proche du best-seller de Jean-Marc Jancovici Le monde sans fin : en mettant en scène les auteurs au milieu de figures historiques, de graphiques et de scènes humoristiques, il s’agit d’illustrer visuellement un propos parfois technique et très chiffré. Contrairement à Jancovici (auquel il s’oppose jusqu’à l’intégrer dans l’album) en revanche, Kempf assume une position radicale qui dépasse allègrement l’exposition des faits en montrant une évolution croissante de nombre d’écologistes qui clament la fin de l’information pour la lutte citoyenne face à un système capitaliste suicidaire qui se radicalise dans son refus de tout aménagement. Or l’auteur est très clair : il ne s’agit pas d’un aménagement mais d’une bascule historique qui serait nécessaire (où il rejoint Le monde sans fin sur ce point).
L’originalité du propos est de rappeler le poids pas du tout statistique mais tout à fait quantifiable du mode de vie des ultra-riches sur la crise climatique et la crise sociale et politique qui l’accompagne. Hervé Kempf dépasse alors le seul champ de l’écologie et de la justice sociale pour nous montrer l’alliance de fait du Capital (et de ses dirigeants) avec le populisme d’extrême-droite pour la préservation d’un ordre mis en danger par le choc climatique. Les évolutions sécuritaires et politiques constatées depuis plusieurs années sont une conséquence directe du risque encouru par l’ordre capitaliste. Actant comme nombre d’écologistes raisonnables l’échec de la stratégie des rapports scientifiques, il cite Nelson Mandela qui proclamait (dans les pas des Constituants de 1793 et des Pères fondateurs américains) la nécessité de la résistance violente lorsque les autres méthodes ne fonctionnent pas et que le pouvoir nous y force.
L’attaque sur les 0.01% peut paraître facile et défouloir, il demeure que la mise en cohérence de l’ensemble des éléments de la crise que nous visons (crise politique, autoritarisme et répression des contestations populaires, crise climatique, crise budgétaire, montée du fascisme, sécessionnisme,...) est très bien faite et convaincante.
Intriquant les enjeux écologiques, démocratiques et économiques, Kempf propose une vision d’ensemble et nomme les choses, comme ce "capitalisme despotique" que nombre de penseurs ont annoncé depuis le XIX° siècle. En sourcant largement ses chiffres et en concluant son propos par la nécessité d’une perspective positive pour sortir d’une résistance mortifère, l’auteur fait une démonstration courageuse et impliquante. Aux rêves citoyens !
Comment les riches ravagent la planète, et comment les en empêcher.
de Hervé Kempf et Juan Mendez
Nombre de pages : 128p.
Date de sortie (en France) : 27 septembre 2024.
Éditeur : Seuil
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