Édition du 16 avril 2024

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Élections américaines

États-Unis : le défi des Verts au système bipartisan

Les dernières grèves des enseignantEs et les mobilisations de masse de leurs alliés à Chicago se sont produites durant l’actuelle campagne électorale et ont démasqué leurs adversaires.

Le démocrate Obama et le républicain Romney se sont opposés à ce combat visant à défendre l’école publique.

En revanche, la candidate du Parti vert à la présidence, Jill Stein, s’est solidarisée avec le mouvement et a été invité à prendre la parole à l’une de leurs manifestations.

Obama a officiellement gardé silence sur la grève, mais il n’avait pas besoin de parler pour montrer dans quel camp il se situait. Son ancien chef de cabinet à la Maison Blanche, maintenant maire de Chicago, Rahm Emanuel, a mené l’offensive contre les enseignantEs.

Secrétaire d’Obama à l’Éducation, Arne Duncan, est responsable du programme d’Obama visant à affaiblir les syndicats d’enseignantEs et à promouvoir la privatisation des écoles publiques connues sous le nom de « Course à l’excellence » - « Race to the Top ».

Duncan a été le responsable de la direction des écoles de Chicago de 2002 à 2008, avant qu’il se voit confier cette responsabilité par Obama.

Dans une démonstration de soutien bipartisan, Romney et son colistier encore plus réactionnaire, Paul Ryan, sont venus offrir leur soutien à Emanuel et ils ont dénoncé les enseignantEs.

Jill Stein a été élue par le congrès du Parti Vert en juillet. Médecin, elle est bien connue en tant que défenderesse du programme national d’assurance-maladie pour tous, et elle milite sur les questions environnementales. Elle s’est opposée avec succès à la construction d’incinérateurs d’ordures et a fait campagne pour nettoyer les Cinq centrales au charbon au Massachusetts, son pays d’origine.

Stein a déjà participé à des élections contre Mitt Romney au poste de gouverneure du Massachusetts, en 2002, et au secrétariat d’État en 2006, où elle a obtenu 350 000 votes en tant que candidate écologiste contre les Démocrates et les Républicains.

La colistière de Stein, Cheri Honkala, est née dans une extrême pauvreté. Mère célibataire dans son adolescence, elle est devenue l’une des principales défenderesses des pauvres et des sans-abri. Elle est la co-fondatrice de l’Union des droits sociaux de Kensington à Philadelphie. Honkala est devenue une socialiste, et elle a été, durant une certaine période, membre d’une organisation maoïste.

Honkala a été nommé par un hebdomadaire de Philadelphie "Femme de l’année" en 1997, et a obtenu ce même titre du Magazine Ms en 2001. En 2011, elle a été candidate écologiste au poste de shérif de Philadelphie en s’engageant à arrêter les saisies immobilières effectuées dans le sillage de l’actuelle crise économique.

Le congrès du Parti vert en juillet a été un événement important pour ce mouvement. De nombreuses références au mouvement Occupy ont été accueillis par des acclamations. Avec le slogan « Occupons les élections", le parti a déclaré sa solidarité avec les objectifs d’Occupy et son opposition au « Un pour cent ».

Dans son discours d’acceptation, M. Stein a expliqué qu’elle a adhéré au Parti Vert parce que c’est « le seul parti national qui n’est pas acheté et payé par l’argent des entreprises » ....

« Les partis politiques parrainés par des entreprises - les partis de l’establishment - ne vont pas changer le statu quo pour nous. C’est nous qui devons le faire. »

Le chant « Ramenez les troupes maintenant !" a été spontanément entonné lorsque Stein a dénoncé les guerres illégales en cours menées par Washington et elle a appelé à la fermeture des près de 1 000 bases militaires américaines dans le monde entier.

Elle a condamné la Loi sur l’autorisation de la défense nationale qui prétend légitimer les guerres américaines, l’utilisation de drones, le Patriot Act, les lois racistes anti-immigrés d’Arizona, et elle a appelé à l’abrogation de l’ALENA qui appauvrit les paysans mexicains et les travailleurs et travailleuses..

Gar Alperovitz, historien et écrivain, auteur de America Beyond Capitalism, a prononcé le discours liminaire lors du congrès. Un réformateur socialiste, ses références au socialisme ont été accueillies par les acclamations des déléguéEs. Il a dit aux congressistes que « leur défi était la « transformation du système capitaliste le plus puissant dans l’histoire du monde - voilà la tâche et ce n’est pas une tâche simple, pas seulement la tâche de construire un nouveau parti, et pas simplement la construction d’un mouvement écologiste... »

Il a conclu en se référant à deux sondages récents qui montraient que 49 pour cent des jeunes avaient une opinion favorable au socialisme, et il a conclu qu’il y avait des possibilités de changer le système.

Les partis verts dans une grande partie du monde se sont intégrés au système capitaliste, ils ont même rejoint des gouvernements capitalistes et impérialistes. Le Parti vert aux États-Unis ne s’est pas engagé dans cette voie.

De sa formation initiale autour d’enjeux environnementaux, le Parti vert aux États-Unis est devenu un parti de la justice sociale. Au sein du parti il y a une grande variété de sensibilités politiques : de la gauche sociale-libérale aux socialistes, mais la direction du parti sous l’effet de la dépression est devenue de plus en plus radicale.

Le parti est en grande partie blanc. Mais les femmes, les Afro-Américains et les Latinos au sein du parti se sont organisés en caucus, et ont participé à des élections pour des responsabilités locales ou nationales.

L’équipe Stein-Hankala apporte également une certaine expérience organisationnelle aux Verts qui restent peu organisés. Face à des lois électorales antidémocratiques visant à préserver le jeu bipartisan des deux partis capitalistes, cette équipe sera sur le bulletin de vote dans plus de 30 États regroupant 85 pour cent de la population, ce qui n’est pas un mince succès organisationnel.

Les Verts se sont aussi qualifié pour recevoir des fonds du gouvernement fédéral en réussissant à recueillir au moins 5000 $ dans un minimum de 20 états, avec seulement 250 $ comme contribution de base pour chaque contributeur. C’était une première pour les Verts, et cela a été fait par une campagne à la base.

La pression de voter pour Obama, en dépit de son bilan comme président , est grande en raison de la profondeur du tournant à droite des républicains qui effraie beaucoup.

Contre ceux qui défendent l’argument du « moindre mal » et qui attaquent les Verts comme des « fauteurs de troubles » qui prennent de votes démocrates, Stein répond : « vous ne pouvez pas salir quelque chose qui est déjà pourri. » S’exprimant sur Democracy Now ! Stein, elle a dit que c’est se taire et voter pour le « moindre mal » qui nous ont amenés à la situation actuelle faite de crise économique, de guerres perpétuelles, d’un chômage élevé et de restrictions des libertés civiles. ».

Barry Sheppard

Barry Sheppard

Barry Sheppard était l’un des militants du mouvement pour les droits civiques et contre la guerre du Vietnam, actif au MIT. Par la suite, il occupa un poste de direction au sein de l’historique Socialist Workers Party des Etats-Unis, avec lequel il a rompu suite à sa dégénérescence organisationnelle et politique. Un premier volume de ses mémoires politiques est paru The Socialist Workers Party 1960-1988 ?A Political Memoir, Volume 1 : The Sixties, Published by Resistance Books, 2005.

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