Édition du 15 octobre 2024

Une tribune libre pour la gauche québécoise en marche

Syndicalisme

Grand dossier sur les travailleuses et travailleurs temporaires

Ils proviennent des grands coins du globe : Guatémala, Mexique, Philippines, Inde, Niger, Maroc, Tunisie. Ils viennent dans l’espoir d’améliorer leur sort et celui de leur famille. Ils travaillent dans les champs agricoles, des usines de fabrication et de transformation, des hôtels, des buanderies, des maisons privées à titre de domesetiques. Mais leur rêve s’estompe parfois devant des employeurs sans scrupules. Et leur permis de travail fermé ne les aide en rien.

Dossier tiré du journal de la FTQ : LE MONDE OUVRIER N° 146 • HIVER 2024. (Nous publions dans ce numéro de PTAG ce dossier fait d’analyses, de témoignages et d’ouverture vers différentes ressources. Un dossier important.)

Forte hausse du nombre de TET et de leur vulnérabilité

Avec les transformations du marché du travail et la pénurie de main-d’œuvre, les employeurs du Québec ont de plus en plus recours aux travailleuses et travailleurs étrangers temporaires (TET). Historiquement, et jusqu’à récemment, ce sont les travailleurs agricoles et les travailleuses domestiques qui ont constitué la grande majorité de ce groupe. Mais de plus en plus, on les voit apparaître dans plusieurs secteurs d’activités et dans plusieurs régions du Québec aussi.

Selon le ministère de l’Immigration, de la Francisation et de l’Intégration (MIFI), la province comptait 108 410 titulaires de permis de travail temporaire en 2022 ; le double en cinq ans. Et la hausse est encore plus fulgurante si on ne regarde que les permis valides sous le Programme des travailleurs étrangers temporaires (PTET) : ils ont quintuplé pour atteindre 35 215, soit le tiers des permis toutes catégories confondues. Le Québec se retrouve donc en tête de peloton au Canada en ce qui a trait au recours à la main-d’œuvre étrangère. Et depuis des années, le patronat exerce de fortes pressions pour obtenir davantage d’assouplissements au cadre réglementaire régissant le programme et la délivrance des permis, tant auprès du gouvernement canadien que québécois.

Le gros problème, c’est que le PTET octroie bien souvent des permis de travail fermés, ou nominatifs, qui contraignent ces personnes à rester uniquement auprès de l’employeur qui les a fait venir, sans possibilité de trouver un emploi ailleurs. Cette situation les place dans un carrefour de vulnérabilité : qui voudra revendiquer ses droits ou utiliser un recours sachant qu’il risque de ne plus jamais revenir sur le marché du travail canadien ? Cette crainte est particulièrement exacerbée chez de nombreuses travailleuses et de nombreux travailleurs qui ont dû contracter d’importantes dettes dans leur pays d’origine afin d’être en mesure de travailler au Canada. L’endettement les pousse souvent à accepter l’inacceptable au travail.

Des travailleuses et travailleurs comme les autres  ?

La grande majorité des travailleuses et travailleurs étrangers ne parlent pas la langue française. Ils sont nombreux à vivre dans un état d’isolement, dans des logements fournis par les employeurs, souvent à l’écart des centres urbains. Ils doivent travailler de longues heures, en particulier dans le secteur agricole. Ils subissent fréquemment une surveillance accrue de la part de leur employeur.

En raison d’abus subis, certains sont contraints de fuir leur emploi et, conséquemment, de perdre leur statut. C’est un effet pervers du PTET. D’ailleurs, les travailleuses et travailleurs étrangers constituent une portion des personnes sans statut. Impossible de savoir avec précision, mais le nombre de sans-papiers s’élèverait à 100 000 sur le territoire québécois selon certaines estimations. Ces personnes doivent souvent travailler illégalement, ce qui les rend particulièrement vulnérables aux abus des employeurs puisque, comme les travailleuses et travailleurs étrangers, l’action de faire valoir leurs droits les expose à des conséquences disproportionnées. Les employeurs le savent et profitent de cette situation pour leur imposer des conditions de travail désavantageuses.

Cette situation a été décriée en septembre dernier par un Rapporteur spécial des Nations unies, qui a parlé d’une forme contemporaine d’esclavage pour les travailleuses et travailleurs étrangers, « car ils ne peuvent pas dénoncer les abus subis sans craindre d’être expulsés ». Il a demandé au Canada de mettre fin au système fermé des permis de travail, position qui est aussi celle de la FTQ.

Processus d’immigration temporaire

Au Canada, l’immigration est une compétence qui est partagée entre les paliers fédéral et provincial. Chaque ordre de gouvernement est responsable d’une portion du processus. Dans le cadre du Programme des travailleurs étrangers temporaires (PTET), l’employeur doit, dans un premier temps, démontrer aux deux ordres de gouvernement qu’il a tenté sans succès de recruter de la maind’œuvre locale : c’est l’Évaluation de l’impact sur le marché du travail (EIMT). À cette étape, l’employeur peut en théorie essuyer un refus s’il a déjà été condamné pour ne pas avoir respecté ses obligations légales envers les travailleuses et travailleurs dans le passé. Malheureusement, le ministère québécois ne publie aucune information quant à la mise en œuvre réelle de ces dispositions.

Le palier provincial doit ensuite émettre à la travailleuse ou au travailleur un Certificat d’acceptation du Québec (CAQ). Cet automne, la ministre de l’Immigration, Christine Fréchette, a annoncé une nouvelle exigence pour le renouvellement du CAQ : l’atteinte d’un certain niveau de français à l’oral. Bien que la FTQ soutienne les efforts qui doivent être consacrés à la francisation des personnes immigrantes, elle croit que cette exigence compliquera le parcours des TET souhaitant dénoncer des abus. Si l’employeur ne respecte pas ses obligations en matière de francisation, c’est la travailleuse ou le travailleur qui en fera les frais en se voyant interdire de revenir au pays.

Finalement, le palier fédéral délivre un permis de travail à la travailleuse ou au travailleur. Ce permis précise sa durée ainsi que le nom de l’employeur pour lequel la travailleuse ou le travailleur peut travailler au Canada. Si la travailleuse ou le travailleur ne respecte pas les conditions énoncées, elle ou il se retrouve en infraction et risque non seulement l’expulsion, mais voit aussi ses chances fortement compromises de revenir au Canada pour un autre employeur. Par le passé, ces conditions strictes ont notamment permis à des employeurs sans scrupules d’user de menaces de déportation à l’égard des TET.

Positions de la FTQ

Il faut remonter au 16e Congrès de la FTQ, en 1979, pour comprendre l’attention prioritaire que la centrale accorde à la situation des travailleuses immigrantes et travailleurs immigrants.

Aujourd’hui, la FTQ réclame notamment :
▼La fin du régime des permis nominatifs (permis fermés), qui lient les travailleuses et travailleurs étrangers temporaires (TET) à un seul employeur, afin d’octroyer des permis ouverts et de permettre aux TET de changer librement d’employeur ;
▼La régularisation du statut de toutes les personnes sans-papiers en accordant la résidence permanente à toutes les travailleuses et à tous les travailleurs, alors même qu’elles contribuent de manière positive à nos communautés ;
▼L’encadrement strict des agences de placement temporaire. En principe, ces agences ne peuvent placer de travailleuses et travailleurs étrangers, mais certaines exercent leurs activités illégalement et en toute impunité ;
▼L’obligation des autorités à informer les TET de leurs droits dans leur langue maternelle et de leur donner accès à des cours de français pendant les heures de travail ;
▼Le maintien à 10 % la proportion limite de TET admis sur un lieu de travail ;
▼L’accès à la syndicalisation et à la négociation collective dans tous les secteurs, notamment dans la production agricole ;
▼La hausse des inspections dans les entreprises qui emploient des TET. 
 

Syndicat à la rescousse

Quand le rêve tourne au cauchemar

Ingénieur en mécanique originaire des Philippines, Manuel Lero Gianan Junior carbure aux défis. Après un séjour de quatre ans en Australie, une occasion se présente et lui permet de venir en tant que travailleur étranger temporaire dans une entreprise abitibienne en 2019. « J’étais content quand l’entreprise m’a contacté pour me dire que j’étais choisi. Quand on m’a dit que c’était une province où l’on parlait français, c’était un autre défi. J’aime beaucoup apprendre. J’étais tout excité », raconte-t-il.

Ici, il travaille fort en tant que mécanicien de véhicules lourds, ayant un salaire somme toute limité qui suffit à peine à payer les comptes de sa maison aux Philippines, où habite son épouse, ainsi que ses frais de subsistance au Québec.

Après deux ans, en pleine pandémie, il commence à interroger son employeur au sujet de son salaire. « J’avais fouillé un peu sur les salaires, et je voyais bien que cela ne convenait pas. Je posais régulièrement des questions sur le moment des prochaines augmentations. Le patron m’a fait venir dans son bureau. Ça a été une expérience difficile. Il m’a dit des choses que je n’allais pas oublier de sitôt », se souvient-il avec émotion.

Le travailleur étranger temporaire fut alors congédié, cinq mois avant l’échéance de son permis de travail fermé, qui lui donnait le droit de travailler seulement pour un employeur. « On n’a plus de travail pour toi ici », lui avait lancé l’employeur. Il devait même déménager, puisqu’il était hébergé par ce même employeur. « J’étais paralysé, je ne savais plus quoi faire », confie Manuel. 

Espoir et rebond

Un collègue lui a alors conseillé d’en parler à son syndicat Métallos. « Au début, ma confiance envers le syndicat n’était pas grande. Je me disais que ces responsables ne pouvaient pas aller à l’encontre de quelqu’un qui était de leur propre race. Je suis juste un étranger, pourquoi se battraient-ils pour moi ? Je n’avais pas d’espoir. »

Mais Manuel est surpris. Il trouve une oreille compatissante en Sébastien Rail, qui était alors vice-président de la section locale composée 9291 du Syndicat des Métallos. « Je pouvais sentir sa sincérité, je me suis confié à lui. Il m’a suggéré de ne pas abandonner mon idée de travailler ici et de postuler pour travailler dans une autre entreprise de la région », se rappelle-t-il.

Entre-temps, le syndicat a effectué un suivi pour l’aider à faire avancer sa demande d’assuranceemploi, qui traînait en longueur depuis plusieurs semaines. Le représentant du syndicat a aussi parlé de Manuel avec les responsables des ressources humaines de Technosub, une entreprise syndiquée avec les Métallos, qui fabrique des pompes pour le secteur minier et qui emploie plusieurs mécaniciens, tout en recrutant régulièrement des travailleurs étrangers. « On a expliqué à Manuel qu’on croyait en lui, que c’était un gars travaillant et prêt à mettre les efforts pour que ça fonctionne », raconte Sébastien Rail, aujourd’hui président de la section locale composée 9291.

De fil en aiguille, Technosub a effectué les démarches pour que Manuel puisse avoir le permis nécessaire pour y travailler. Il a fini par être embauché, et son permis a même été renouvelé jusqu’en 2024. 

De l’humanité, est-ce trop ?

Le cas de Manuel Lero Gianan Junior est loin d’être isolé. Pour un membre du syndicat des Travailleurs et travailleuses unis de l’alimentation et du commerce (TUAC), qui souhaite se faire appeler José, son parcours est parsemé de frustrations. Ce Guatémaltèque de 35 ans travaille dans une usine d’une petite localité depuis 2014. Il s’intègre si bien qu’il réussit à se trouver une amoureuse et souhaite emménager avec elle. Or, dans son contrat de travail, il est tenu d’habiter dans le logement convenu avec l’employeur et s’il souhaite le quitter, l’employeur l’oblige de continuer à payer les frais de loyer. Le syndicat a dû intervenir en sa faveur, gain qu’il a obtenu. Arrive alors la naissance de bébé. José demande des horaires plus accommodants pour passer plus de temps avec sa famille. Encore une fois, son contrat de travail l’oblige à être disponible en tout temps, 7 jours sur 7, et s’il ne rentre pas le dimanche, il y aura des conséquences.

José commence sa carrière comme emballeur. Au fil des années, il gagne de l’expérience et devient chef d’équipe, et ensuite quasi-superviseur. « Je faisais tout le travail du superviseur, y compris le rapport. La seule chose que je ne faisais pas, c’était la discipline. » Mais encore une fois, son permis de travail est contraignant : superviseur ne cadre pas dans les paramètres de classification ni dans les barèmes de son permis… et il ne peut pas toucher le salaire relié à cette fonction, qui est plus élevé de 2 $ l’heure que celui de son poste actuel. Présentement, José est sur le point de décrocher son 4e permis de travail, mais pour la première fois, ce permis sera ouvert et non fermé. Espérons qu’il aura davantage les coudées franches pour négocier des conditions de travail justes et humaines.

Un défi syndical important

Le nombre croissant de travailleuses et travailleurs étrangers temporaires (TET) dans les milieux de travail pose des défis aux organisations syndicales.

Chez Technosub, là où Manuel a trouvé un nouvel emploi, c’est maintenant près de la moitié du personnel syndiqué qui a un permis de travail temporaire. « Ça prend de la francisation en milieu de travail, sur les heures de travail », indique Sébastien Rail, président de la section locale composée 9291 du Syndicat des Métallos, qui inscrit cette demande dans son petit carnet en vue des prochaines négociations. Il envisage aussi de demander à l’employeur de rembourser les coûts des services d’un interprète pour les assemblées syndicales.

Même son de cloche pour Julio Lara, conseiller syndical au syndicat des Travailleurs et travailleuses unis de l’alimentation et du commerce (TUAC), qui travaille sur cinq unités dans le secteur agricole. Même s’il parle parfaitement espagnol et qu’il peut aisément communiquer avec des Colombiens, des Guatémaltèques et des Mexicains, il exige une langue commune : le français. « Souvent, je fais des assemblées syndicales en trois langues : français, espagnol et anglais. Ça rallonge mon plaisir, dit-il avec humour, mais il faut briser la barrière de la langue pour créer une solidarité syndicale. »

À Saint-Damien, le fabricant de plastique IPL avait même payé des cours d’espagnol à des travailleurs québécois pour accueillir ses TET. C’était le dépaysement total lorsque la première vague de travailleurs guatémaltèques est arrivée en plein hiver, se souvient Frédéric Morin, aujourd’hui conseiller syndical à l’Union des employés et employées de sevice (UES 800). Les vagues suivantes ont été beaucoup plus faciles à intégrer puisque les nouveaux arrivants ont pu bénéficier de l’accueil et de l’expérience des précédents.

La peur du syndicat

« Mais ayoye ! J’en ai vidé des boîtes de Kleenex ! Des femmes en pleurs dans mon bureau ! », relate-t-il avec du recul. Frédéric Morin avait beaucoup d’éducation syndicale à faire. Lorsqu’il se présentait comme président du syndicat, les TET croyaient qu’il était l’équivalent d’un patron et les gens avaient peur de venir le voir, même lorsqu’ils s’étaient blessés. « Dans leur pays d’origine, un syndicat est associé à la corruption et à la criminalité. On a dû travailler fort pour gagner leur confiance. »

Julio vit la même situation. Pour contourner le problème, il utilise les termes union, association ou de fraternité de travailleurs, sauf dans le texte de la convention collective où il doit respecter le mot syndicat. Dans ce contexte, c’est encore plus dur convaincre des TET de s’impliquer dans le syndicat. Il faut donc trouver rapidement des leaders naturels tout en espérant qu’ils ne partiront pas au bout de quelques années.

Si certains partent, d’autres qui souhaitent rester se heurtent parfois à des embûches et deviennent sans statut. Et pour Julio, l’employeur a une part de responsabilité. « Il faut que les employeurs soient des montres suisses dans l’organisation administrative. Puisqu’ils font venir des travailleurs, ils devraient mieux gérer le renouvellement des permis. » Lorsque des travailleurs subissent des mises à pied temporaires à l’approche de l’expiration du permis, il n’est pas rare de voir l’employeur oublier de renouveler les permis de ses TET.

Clairandrée Cauchy, conseillère au Syndicat des Métallos, souligne d’ailleurs à gros trait cette période de fragilité entre deux permis. « On a déjà vu un travailleur hésiter à revenir dans son pays alors que sa fille venait de mourir. S’il partait, il n’était pas sûr de pouvoir revenir parce que ses papiers n’étaient pas totalement à jour. » Situation d’une tristesse infinie et qu’il faut remédier.

JURISPRUDENCE

Incarcérés et libérés

Une décision rendue par le Tribunal administratif du travail en 2019 met en lumière toute la gravité des abus auxquels sont sujets les travailleuses et travailleurs étrangers temporaires (TET) en raison du caractère fermé de leur permis de travail. Des travailleurs ont été incarcérés dans un centre de détention pour des périodes variant entre deux semaines et deux mois à la suite d’une enquête de l’Agence des services frontaliers.

Le propriétaire d’une agence de placement les avait convaincus de délaisser l’employeur avec lequel ils étaient liés par le permis de travail fermé, en leur promettant de meilleures conditions de travail. Puisqu’ils se retrouvent en situation d’illégalité, l’agence était en mesure de les faire travailler dans des conditions inhumaines sous peine de les faire expulser. En plus d’être maltraités, mal logés et mal nourris, de voir leurs passeports confisqués et de travailler plus de 80 heures par semaine, ces travailleurs ne recevaient qu’un montant de 300 $ par semaine, l’agence prétendant que la balance de leur salaire servait à payer les démarches d’un consultant en immigration pour régulariser leur situation… démarches qui n’auront jamais lieu. Chaque fois qu’ils posaient des questions, on les menaçait de déportation.

Grâce à l’appui d’un centre de travailleur, ils sont parvenus à faire la lumière sur les abus subis. Cette histoire vraie démontre que ce n’est qu’en tout dernier recours que les TET sont en mesure de faire valoir leurs droits. Combien subissent en silence les abus rendus possibles par le système des permis fermés  ? 

Un peu d’histoire

L’introduction de la notion de permis de travail dans la réglementation fédérale remonte à 1973. À l’époque, un taux de chômage bien plus élevé qu’aujourd’hui a servi à justifier l’imposition des permis de travail : l’objectif était alors la protection du marché de l’emploi pour les travailleuses et travailleurs canadiens. Encore aujourd’hui, la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés prévoit que « l’étranger ne peut travailler au Canada sans y être autorisé par un permis de travail ». La protection du marché du travail prend essentiellement la forme, pour les employeurs, d’une obligation de démontrer avoir effectué des efforts raisonnables de recrutement local avant de passer au recrutement international. C’est là la source du permis de travail fermé.

Questions fréquentes et réponses

Est-ce que les travailleuses et travailleurs étrangers temporaires du secteur agricole ont le droit à la syndicalisation ?

Oui et non. Très peu de travailleuses et travailleurs agricoles sont syndiqués. Leur droit à la syndicalisation a été pratiquement aboli en 2014 par le projet de loi n o 8. Or, la FTQ ne voit aucune raison pour que le secteur agricole soit exclu du régime de syndicalisation qui prévaut dans tous les autres secteurs. Ce déni brime la liberté d’association garantie par la Charte canadienne des droits et libertés. Par ailleurs, l’ensemble des travailleuses et travailleurs du secteur agricole bénéficie de protections moins avantageuses en termes de conditions de travail. À titre d’exemple, ils n’ont pas droit au paiement au taux majoré de leurs heures supplémentaires et au repos hebdomadaire prescrit par la Loi sur les normes du travail.

Qui doit payer les frais de recrutement des travailleuses et travailleurs étrangers temporaires ?

En principe, les travailleuses et travailleurs étrangers n’ont pas à payer pour travailler. Sauf exception, la loi interdit aux employeurs ainsi qu’aux agences de recrutement de travailleuses et travailleurs étrangers temporaires de leur réclamer des frais pour leur recrutement. Cependant, la notion de frais de recrutement est si floue qu’elle permet dans les faits à de nombreux employeurs et agences de réclamer des milliers de dollars aux travailleuses et travailleurs qui souhaitent obtenir un emploi. De plus, les recruteurs qui se trouvent dans les pays d’origine, et en particulier au Guatemala, exigent des frais importants aux travailleuses et travailleurs pour les placer sur les listes. Ces sommes représentent souvent plus d’une année de salaire dans les pays d’origine et accentuent leur situation de servitude.

Est-ce que les lois du travail s’appliquent différemment aux travailleuses et travailleurs étrangers temporaires ?

Non. En principe, toutes les lois qui visent à conférer des protections aux travailleuses et travailleurs s’appliquent intégralement aux travailleuses et travailleurs étrangers et ne font pas de distinction en fonction du statut migratoire. La véritable distinction se situe au niveau de l’impossibilité pour les travailleuses et travailleurs étrangers, en pratique, de faire valoir leurs recours. Comme le permis de travail fermé les rend captifs de leur employeur, ils hésitent trop souvent à se plaindre des violations de leurs droits, de peur de perdre leur emploi et d’être renvoyés dans leur pays d’origine.

Guide de ressources

Historiquement, en raison des milieux de travail qui ont fait appel à eux, les travailleuses et travailleurs étrangers temporaires (TET) ont œuvré dans des secteurs non syndiqués. Ce sont les organismes communautaires de défense de droits qui ont développé, les premiers, une expertise en matière de représentation des TET. Ces organismes jouent toujours un rôle très important. Centre des travailleuses et travailleurs immigrants (IWC-CTI) info@iwc-cti.ca | 514 342-2111 https://iwc-cti.ca/fr/
Réseau d’aide aux travailleuses et travailleurs migrants agricoles du Québec (RATTMAQ) info@rattmaq.org | 514 415-8077 https://rattmaq.org/

Association pour les droits des travailleuses de maison et de ferme (DTMF-RHFW) info@dtmf-rhfw.org | 514 379-1262 https://dtmf-rhfw.org/

Lexique

CAQ : Le Certificat d’acceptation du Québec est délivré par le gouvernement du Québec comme preuve de sélection temporaire pour toute personne qui relève d’un programme d’immigration temporaire (PTET, PMI, PEE) afin de travailler ou d’étudier sur son territoire, à moins d’exception. Il ne donne pas accès à la résidence permanente.

CSQ : Le Certificat de sélection du Québec délivré par le gouvernement du Québec permet à une personne qui relève d’un programme d’immigration économique (PRTQ, gens d’affaires) de travailler sur son territoire et de postuler à la résidence permanente auprès du gouvernement du Canada.

EIMT : Une Étude d’impact sur le marché du travail favorable doit être obtenue par tout employeur souhaitant recruter une travailleuse ou un travailleur dans le cadre du PTET. Délivrée par les deux paliers de gouvernement, elle établit que la ou les personnes recrutées répondent à un besoin réel de travail. Une EIMT est généralement valide pour une durée maximale de deux à trois ans, selon les situations.

Niveau de qualification : Selon la Classification nationale des professions (CNP), les professions sont notamment classées selon leurs exigences de compétences. Jusqu’à récemment, on distinguait les niveaux 0 (cadres supérieurs et intermédiaires), A (diplôme universitaire), B (diplôme collégial ou équivalent), C (diplôme d’études secondaires) et D (aucune scolarité).

Permis de travail ouvert ou fermé : Il s’agit d’une autorisation de travailler sur le territoire canadien délivrée par le gouvernement fédéral. Un permis dit ouvert permet à une personne de travailler pour n’importe quel employeur et dans n’importe quelle région ou province du Canada. Un permis dit fermé n’autorise une personne à travailler que pour un seul employeur.

PEQ : Le Programme de l’expérience québécoise (PEQ) permet aux personnes immigrantes qui relèvent du PTET (sauf pour les professions les moins qualifiées, de niveaux C ou D) ou du Programme des étudiants étrangers (PEE) de faire reconnaître leurs expériences de travail ou d’études réalisées sur le territoire québécois afin de présenter une demande de sélection permanente auprès du gouvernement du Québec (CSQ) puis de résidence permanente auprès du gouvernement du Canada.

Traitement simplifié : Ce processus lève pour l’employeur certaines obligations ou limites prévues par le PTET depuis 2012. Actuellement, il concerne le recrutement de professions ciblées, qui requièrent surtout des niveaux de qualification élevés. En 2023, on compte 319 professions admissibles au traitement simplifié au Québec, comparativement à 58 en 2017. n Régularisation des personnes sans- papiers et demande d’action collective

Régularisation des personnes sans-papiers et demande d’action collective

Des mobilisations ont eu lieu à Montréal, à Québec et à Rimouski vers la fin octobre pour exiger la mise en place immédiate d’un véritable programme inclusif visant la régularisation des personnes sans-papiers auprès du gouvernement fédéral.

Les participantes et participants ont aussi demandé la fin des déportations et des détentions des personnes migrantes sans statut migratoire ainsi que l’abolition des permis de travail fermés. Ces événements ont été menés dans le cadre de la Campagne québécoise pour la régularisation des personnes sans statut pilotée par le Centre des travailleurs et travailleuses immigrants (CTI), qui regroupe 38 organisations, dont la FTQ.

Par ailleurs, le CTI a aussi déposé une demande d’action collective, au nom de 400 personnes, contre l’agence de placement Trésor et sa société cliente Newcrest, qui offre des services de restauration aux grandes compagnies aériennes à l’aéroport Pierre-Elliott-Trudeau. Elles auraient incité des personnes migrantes à travailler au Canada avec un simple visa de visiteur et sous prétexte qu’elles pouvaient le faire en attendant le traitement de leur demande de permis de travail. Or, la plupart n’ont jamais reçu de permis valide.

Francisation auprès des travailleuses et travailleurs immigrants

Pour mieux comprendre les enjeux liés à la francisation en milieu de travail, vous pouvezvisionner le documentaire Langue à l’ouvrage - Migrer vers le français au travail produit par la FTQ. Ce film d’une heure a d’ailleurs été présenté dans différentes régions du Québec au cours des derniers mois, notamment à Valleyfield, à Sainte-Thérèse, à Sherbrooke, à Québec et à Saint-Anselme, grâce à la belle collaboration de nos affiliés et de nos conseils régionaux. Pour visionner le documentaire : ftq.qc.ca/langue-a- louvrage.

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