Édition du 16 avril 2024

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L’autre crise

En marche vers le Forum social mondial

Dans les médias généralement, l’attention est concentrée sur cette guerre qui n’en finit plus au Moyen-Orient. Et pour cause, voici des pays entiers comme la Syrie, l’Irak et la Palestine, engouffrés dans une série de massacres et de prédations qui n’ont pas de limite, semble-t-il. La « stratégie » des États-Unis (je mets ce mot entre guillemets car en réalité, l’État américain ne sait pas où il va) est de mettre tout-le-monde-contre-tout-le-monde, de sorte qu’il n’y ait aucun « gagnant » qui émerge. C’est ainsi que les « méchants » d’hier deviennent les « bons », d’aujourd’hui, comme par exemple Al-Qaïda au Yémen. Le régime sanguinaire de Bashar el-Assad est maintenant un « allié » de l’OTAN. Et ainsi de suite. Un jour, ces actes criminels seront peut-être jugés.

Entre-temps, d’autres régions du monde sont laissées à la dérive. On se contente de maximiser la prédation des ressources. On fait tout pour éviter qu’une autorité nationale crédible soit mise en place. On fonctionne avec des voyous qu’on présente comme des gouvernements légitimes. Une de ces régions est l’Afrique sahélienne, parmi les plus pauvres de la planète.

Pendant longtemps, le Mali, le Burkina Faso, le Niger, le Sénégal et d’autres pays de cette région à l’ouest du continent faisaient partie du « périmètre » colonial français. En effet, il y a eu ce qu’on a appelé FrançAfrique, un réseau occulte impliquant des gouvernements, des militaires, des entreprises multinationales (surtout françaises), des mercenaires, qui a fait la pluie et le beau temps durant plusieurs décennies. Les récalcitrants étaient simplement assassinés ou renversés, tel le Malien Modibo Keita et le Camerounais Ruben Um Nyobe.

Depuis peu cependant, l’« empire » colonial français se délite. La glorieuse France coloniale n’est plus en mesure de venir au secours de ses larbins, ni de tenir tête à la compétition qui survient d’autres puissances, dont les États-Unis et la Chine. Les pseudos gouvernements tombent en ruine, alors que de vastes régions délaissés par des États sont prises en main par des milices vaguement associés aux réseaux djihadistes. C’est le cas notamment au nord du Mali, une région pauvre dans un pays pauvre, pleine de ressources très convoitées par ailleurs. L’armée française est maintenant sur place, soi-disant pour rétablir l’ordre, en réalité pour recoller les morceaux.

Le Mali par ailleurs est un pays où de soldes traditions populaires existent, à travers un tissu associatif relativement bien organisé, des réseaux de communication (notamment les radios communautaires) et même une coalition politique de gauche assez efficace et présente au Parlement, le Parti Solidarité Africaine pour la Démocratie et l’Indépendance (SADI), dont le médecin Oumar Mariko est un dirigeant. Il y aussi des personnalités comme l’ancienne ministre de la culture, Aminata Traoré, qui essaie de souder tout cela à travers un Forum social malien. L’an passé, l’État français a refusé l’entrée en France d’Oumar et d’Aminata. La levée de boucliers a fini par faire flancher les « socialistes » français.

Les deux militants seront à Montréal en août au Forum social mondial et donc, vous pourrez entendre leurs explications de vive voix. La petite histoire dans la grande histoire est que le Mali est une priorité pour le gouvernement canadien depuis quelques années. Le déclin (relatif) de l’influence française a ouvert, dit-on à Ottawa, une « fenêtre d’opportunités ». Les entreprises minières canadiennes, les mêmes qu’Alain Denault avait dénoncé dans son livre interdit « Noir Canada » sont à l’œuvre. Les Maliens demandent que ces entreprises tiennent compte des intérêts des populations, notamment au niveau de l’impact environnemental des mines.

Avant longtemps, il faudra se solidariser davantage avec les luttes de ces camarades africains qui pourraient vivre de durs moments à travers une dislocation programmée par l’impérialisme.

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