Édition du 23 avril 2024

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Élections québécoises 2012

Présence des petits partis dans les médias : la grande presse monopolisée pour la droite néolibérale

On ne compte plus les cas de dénonciations du traitement inégal de la part des médias dans la grande presse de masse au Québec depuis le début de la campagne électorale au Québec. Tant Gesca que Québecor interviennent dans la campagne en accordant davantage d’importance aux trois partis de droite en négligeant les formations politiques alternatives. Il s’agit là d’un déni de démocratie, d’une construction de la personnalisation de la politique tout autant qu’une démonstration que les médias agissent au profit des intérêts de leurs propriétaires.

La firme Influence Communication fait le recensement de la présence des partis politiques dans les médias depuis un certain temps déjà. Bien que ne compilant que la présence brute et non l’angle de reportage ou l’orientation des reportages, ces statistiques sont tout de même révélatrices du traitement qu’accordent les grands médias aux partis qui se positionnent contre l’idéologie dominante, Québec solidaire, Option nationale et le Parti vert. Selon une chronique parue dans le Journal de Montréal du 11 août (1), la place de la campagne électorale dans l’ensemble de l’offre médiatique occupe une place ridiculement réduite. Le temps accordé dans les médias électroniques se calcule en secondes, même celui des chefs. Rien pour contribuer à éclairer les enjeux débattus lors de cette campagne électorale.

Par ailleurs, le temps alloué aux grands partis en comparaison avec celui dévolu aux plus petites formations est ridicule. Selon Influence communication, TVA accordait une moyenne de 42,3 secondes par jour à Jean Charest, 31,3 secondes à Pauline Marois et 24 secondes à François Legault. En comparaison, on accordait 2,2 secondes aux co-porte-paroles de Québec solidaire et 1,6 à Option nationale. On parle ici d’une proportion de 97 contre moins de 4 pour les petits partis. La situation est à peine différentes à la SRC : Charest 28 secondes quotidienne, Marois 22,3, Legault 20,4 à comparé avec 8,4 à Qs et 1,6 à ON. Une proportion de 70 à 10 en faveur des grands partis. Pour l’ensemble des réseaux de télévision incluant les chaines anglophones, les proportions sont de 63 à 4 en faveur des grands partis.

Une autre tendance se dessine : celle de la personnalisation de la politique. En effet, un rapide calcul permet de constater que le poids des chefs des grands partis représente plus des 2/3 de l’espace et du temps consacré à la campagne reléguant les simples candidatEs des partis en lisse au dernier tiers. Comme la majorité de ce temps est dévolu aux candidates ditEs vedettes, il ne reste aux condidatEs moins visibles qu’à se rabattre sur les hebdos régionaux et sur les médias sociaux. Là encore, ce sont les principales têtes d’affiche qui parviennent à tirer leur épingle du jeu : lors du début de la campagne (1er au 4 août), François Legault est le plus “Twit” des chef parvenant au 51e rang des messages les plus affichés sur Twitter. Seul Amir Khadir parvient à se faufiler atteignant le 115e rang canadien parmi les plus actif. Pauline Marois atteignait le 120e rang alors que Jean Charest se retrouvait au fonds du classement en 137e position.

Quant au traitement de l’information, les médias naviguent dans la politique spectacle et le "gadgetisme". On parle davantage du tour de taille du candidat Barette et des effronteries de Pauline Marois que des enjeux en santé, du bilan des libéraux et de la place que se taille le secteur privé dans ce domaine. On mise sur l’instantanéité de la prise de parole faisant fi de la nécessaire réflexion sur des enjeux complexes et des échanges allant au fond des choses. C’est la politique en 140 caractères. Le traitement du déroulement de la campagne sur Twitter occupe quant à lui davantage d’espace et de temps que la pauvreté, la santé, la famille, la culture, l’immigration et l’environnement réunis.

Enfin, le “hasard” a voulu que la campagne débute alors que les Olympiques de Londres allaient bon train. Résultat : dans le Top 5 du poids médias, les olympiques occupaient presque 13% du temps d’antenne total (ça m’a paru encore pire…) alors que la campagne électorale québécoise représentait 0,67% du temps total. (2) Du pain et des jeux, ça occupe disent-ils.

Le débat des chefs

Par ailleurs, TVA s’enfonce dans la tendance réductrice et annonce que “ses” débats ne compteront que les chefs des 3 principaux partis faisant fi des règles du Directeur général des élections du Québec. La SRC refuse la présence du chef d’Option nationale. De tels dénis de démocratie (3) démontrent que les grands médias n’ont pas cédé sur leurs intentions d’orienter cette campagne vers les solutions dites raisonnables et sérieuses, comprendre réserver ces grands moments de la campagne qui réussissent à rejoindre une grande partie de la population (près de 2 millions de personnes ont assisté au débat des chefs en 2008 (4)) aux seuls partis néolibéraux, comme s’ils détenaient le monopole des solutions. Jean-Marie Aussant a beau protester, TVA lui tient tête, habitué de définir lui-même les règles, et la SRC n’a pas bougé d’un iota dans ce dossier.

La SRC dans le but de bien encadrer la joute politique a défini à l’avance les thèmes discutés lors du débat du 19 août : l’économie, la gouvernance, la question nationale et les politiques sociales sont les quatre grands thèmes retenus. La question de la gratuité scolaire et du financement de l’éducation, pas assez importante au goût des bonze de la société d’État est reléguée au thème des politiques sociales. Anne-Marie Dussaut sera de l’animation, elle qui pête sa coche assez régulièrement et s’illustre grâce à ses question plombées, question de bien paraître dans la meute démagogique. (5) Ça promet…

Notes

1 - Voir : http://blogues.journaldemontreal.com/elections2012/author/jeanfrancoisdumas/

2 - http://www.influencecommunication.com/fr/content/top-5-de-lactualite-semaine-du-7-au-13-aout-2012

3 - L’article 423 de la loi électorale précise qu’en période électorale, tout télédiffuseur peut mettre gratuitement à la disposition des chefs des partis du temps d’émission « pourvu qu’il offre un tel service de façon équitable, qualitativement et quantitativement, à tous les chefs des partis représentés à l’Assemblée nationale ou qui ont recueilli au moins 3 % des votes valides lors des dernières élections générales ». La réponse du DGE : “cet article ne s’applique pas aux débats des chefs, qui sont considérés comme des émissions d’affaires publiques”.

4 - http://elections.radio-canada.ca/elections/quebec2008/2008/11/26/011-cotes-debat-chef.shtml

5 – Il faut visionner son entrevue avec Jean-Marie Aussant où elle tente de soulever la controverse avec une déclaration du candidat d’ON dans la région de l’Outaouais qui mentionnait que Khadafi n’a pas fait que des mauvais coups http://www.radio-canada.ca/emissions/24_heures_en_60_minutes/2011-2012/Entrevue.asp?idDoc=237887&autoPlay=http://www.radio-canada.ca/Medianet/2012/RDI/2012-08-10_19_00_00_24h60m_996_003_1200.asx

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