Édition du 26 mars 2024

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Canada

Sus à Poilievre et à sa campagne de peur raciste montant en épingle le chemin Roxham

Pierre Poilievre, le chef du parti conservateur canadien, a déchaîné les passions quand il a exhorté Justin Trudeau à fermer le poste-frontière du chemin Roxham, dans une virulente sortie contre les réfugiés. En blâmant les réfugiés pour la dégradation des services publics, Monsieur Poilievre détourne l’attention du public des incessantes actions destructrices de la classe dirigeante.

Vendredi 24 février 2023 / DE : LAURA KLEIN
traduction Johan Wallengren
Tiré de Springmag
https://springmag.ca/reject-poilievres-racist-fearmongering-about-roxham-road

La controverse autour du chemin Roxham

L’Entente sur les tiers pays sûrs signée par les États-Unis et le Canada est au cœur du discours politique sur les migrations. Selon cet accord, les réfugiés doivent demander le statut de réfugié dans le premier pays « sûr » où ils arrivent. Cela signifie que le Canada est censé refuser les demandeurs d’asile qui arrivent aux points de contrôle officiels via les États-Unis. En fait, les États-Unis sont loin d’être un pays sûr. L’administration Trump a refusé 73 % des demandes de statut de réfugié, tandis que l’administration Biden en a refusé 63 %. En outre, les réfugiés sont souvent maltraités, emprisonnés, privés de ressources et séparés des membres de leur famille.

L’attitude hostile des États-Unis envers les réfugiés fait du Canada une destination préférable, même lorsqu’il n’est pas possible d’entrer par les voies officielles. L’Entente sur les tiers pays sûrs dispose que toute personne qui franchit la frontière entre les États-Unis et le Canada de manière « illégale », à des points de passage tels que celui du chemin Roxham, peut obtenir une audience pour demander le statut de réfugié.

La traversée est risquée. Des personnes seules et des familles entières sont mortes de froid en traversant la frontière à pied. Lorsqu’ils approchent de notre pays, les demandeurs d’asile trouvent sur leur chemin des panneaux les avertissant qu’ils seront arrêtés s’ils ne font pas demi-tour. Au point de passage, ils sont arrêtés par des agents de la GRC mais autorisés à rester dans le pays en attendant que leur cause soit entendue.

Malgré les risques, le chemin Roxham est l’un des seuls points de passage relativement sûrs pour les demandeurs d’asile sans alternative. Le Canada a besoin de plus de points de passage sûrs, pas moins.

Racisme et stigmatisation

Environ 100 personnes traversent la frontière en passant par le chemin Roxham tous les jours, arrivant généralement par des bus Greyhound à Plattsburgh, dans l’État de New York, et prenant ensuite des taxis pour se rendre à la frontière canadienne, située à 30 minutes de là. En décembre 2022, 4 689 personnes ont franchi la frontière en empruntant le chemin Roxham. Au total, seulement 39 171 demandeurs d’asile sont passés par le chemin Roxham l’an dernier. Soixante pour cent d’entre eux sont des demandeurs qui ont traversé la frontière en passant par le chemin Roxham et ont obtenu le statut de réfugié, ce qui représente 3 % des 1,2 million de résidents temporaires qui sont venus au Canada l’année dernière. N’en déplaise à M. Poilievre, le nombre de réfugiés traversant la frontière par le chemin Roxham est faible et il n’est en aucun cas question d’une crise.

La « crise des réfugiés » n’est qu’une fausseté sur fond de racisme. La plupart des demandeurs d’asile qui arrivent par le chemin Roxham sont des personnes racisées originaires d’Amérique latine, des Antilles et de nombreuses autres régions du monde. En attendant, le gouvernement canadien a accordé 420 000 visas à des réfugiés ukrainiens en 2022. En tant qu’Européens blancs, les réfugiés ukrainiens ne sont pas confrontés au même niveau de rejet et de discrimination que les réfugiés racisés.

En outre, M. Poilievre, le maire de Niagara Falls et le premier ministre du Québec ont martelé le message qu’accepter un plus grand nombre de réfugiés met à rude épreuve les services sociaux et prive de ressources le reste de la population coloniale du territoire connu sous le nom de Canada. Ce discours fait délibérément des réfugiés des boucs émissaires, alors que ce sont les actions de nos propres politiciens et des ultra-riches dirigeant ce pays qui devraient être mises en cause.

Après des années de coupes, Doug Ford a réduit de plusieurs centaines de millions de dollars le budget de l’éducation pour la seule année 2022, alors même que sa province a dégagé un excédent de 2,1 milliards de dollars. Les récentes coupes dans le secteur de la santé et les mesures de privatisation décidées par M. Ford ont complètement déstabilisé le système de santé de l’Ontario. En outre, la réduction des dotations des bibliothèques, les resserrements de l’aide sociale et les expulsions massives ont privé les personnes vulnérables des ressources dont elles ont besoin pour survivre.

Alors que la classe ouvrière subit les conséquences de la réduction des services publics et de la stagnation des salaires dans un contexte d’inflation record, les ultra-riches deviennent encore plus riches. Les milliardaires ont augmenté leur fortune de 51 % depuis le début de la pandémie.

Les migrants ne sont pas un fardeau pour l’économie canadienne, mais un rouage essentiel de celle-ci. Les travailleurs migrants du secteur agricole, dont les conditions de travail sont épouvantables et qui subissent une exploitation de tous les instants, nous aident à nous nourrir au quotidien. Les travailleurs migrants des secteurs de la santé et de l’éducation ont contribué à maintenir des services vitaux tout au long de la pandémie, même avec des salaires irrémédiablement plombés. Enfin, les migrants travaillant dans les usines, les transports et la restauration ont contribué à maintenir l’économie canadienne à flot, même si leurs droits en tant que travailleurs sont systématiquement bafoués.

Sus à Poilievre et à sa campagne de peur raciste

Ce sont les riches et les grandes entreprises, et non les migrants, qui drainent nos services publics. La véritable crise est celle de l’inégalité des richesses, pas celle des réfugiés. M. Poilievre tente d’attiser la xénophobie et le racisme à un moment où les libéraux envisagent de mettre en œuvre un programme de régularisation généralisée de la situation des migrants. Alors que le mouvement de défense des droits des migrants a ouvert la voie à de vastes réformes susceptibles de faire progresser les droits de ces derniers, M. Poilievre et les conservateurs s’empressent d’utiliser une rhétorique raciste pour leur fermer la porte.
Les réfugiés ne sont pas l’ennemi : le véritable ennemi de la classe ouvrière est l’élite qui accapare les ressources tout en menant une guerre systématique contre la pauvreté. Les migrants en quête de sécurité méritent d’entrer sur le territoire connu sous le nom de Canada en étant traités avec humanité et sans craindre de violences. Pour accueillir les réfugiés, nous avons besoin de plus de points de passage sûrs et de services sociaux plus solides. Ne manquez pas de vous joindre aux actions du Réseau des droits des migrants qui auront lieu les 18 et 19 mars dans le cadre de la campagne « Un statut pour tous ».

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