6 décembre 2022 | tiré de Courrier international | Photo : Déboisement dans la forêt de Mishigamish-Broadback, au Québec (Canada. PHOTO NASUNA STUART-ULIN/NYT
L’ambassadrice du Canada auprès de l’Union européenne, Ailish Campbell, a écrit à des représentants européens pour leur faire part des “inquiétudes” d’Ottawa face au projet de réglementation visant à limiter le commerce des produits liés à la déforestation dans le monde, publié le 17 novembre par l’Union européenne (UE), relate, au Canada, La Presse. Ces réglementations, a-t-elle écrit, “engendreront des barrières commerciales significatives pour les entreprises canadiennes exportant dans l’UE”.
Le texte affirme que le principal moteur de la déforestation et de la dégradation des forêts qui aggrave les changements climatiques et la perte de biodiversité “est l’expansion des terres agricoles pour produire des produits tels que le bétail, le bois, l’huile de palme, le soja, le cacao ou le café”. En conséquence, la réglementation stipule que ces produits “vendus dans les pays de l’UE ne devraient pas provenir de terres déboisées ou dégradées”, résume le quotidien québécois.
Affirmant que le Canada est un “leader mondial” en matière de gestion des forêts, Ailish Campbell a suggéré d’appliquer la réglementation graduellement sur plusieurs années “en commençant par un nombre limité de produits”, ajoutant qu’il “n’existe actuellement aucune définition internationalement acceptée et opérationnalisée de la dégradation [forestière]”.
Un milliard de dollars
Les réactions sont vives de part et d’autre de l’Atlantique. “Dans cette lettre, on voit parfaitement que le Canada veut protéger ses intérêts économiques plutôt que la forêt”,a confié à The Guardian l’eurodéputée française Marie Toussaint, l’une des initiatrices de la nouvelle réglementation européenne. Le président du groupe écologiste américain Mighty Earth, Glenn Hurowitz, a déclaré au quotidien qu’il était “dommage que le Canada s’efforce de supprimer la plus importante législation forestière de la dernière décennie”.
“Il est choquant d’apprendre que le gouvernement est actuellement en train de résister à des mesures fortes en Europe visant à protéger les dernières forêts du monde”, a enchaîné par voie de communiqué un porte-parole de Greenpeace Canada, Shane Moffatt.
Le site d’information canadien Vancouver Is Awesome signale que des représentants de huit groupes environnementaux canadiens ont déposé une plainte auprès du Bureau canadien de la concurrence, soutenant que “la norme de certification forestière la plus populaire du pays avait fait des allégations ‘fausses et trompeuses’ dans le but de ‘verdir’ le bois et les produits du bois du pays”.
Selon l’ambassadrice Ailish Campbell, l’exportation de produits forestiers et agricoles canadiens vers l’Union européenne a totalisé plus d’un milliard de dollars en 2021.
En mars 2022, rappelle la BBC, 90 scientifiques canadiens avaient écrit au Premier ministre, Justin Trudeau, pour faire part “de leurs inquiétudes concernant le taux d’exploitation forestière industrielle au Canada dans les forêts anciennes”. Pressé de questions, le gouvernement canadien a indiqué au radiodiffuseur britannique qu’il “entreprenait une série d’initiatives pour protéger et restaurer la nature au Canada”.
Martin Gauthier
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