Voix citoyenne, Claire Binet
et 9 cosignataires :
Institut Jean-Garon, Simon Bégin, porte-parole
Protec-Terre, Hubert Lavallée, président
Comité citoyen, Action climatique et environnement Durham-Sud, Jean Falaise
SOS terres agricoles et milieu de vie Saint-Augustin-de-Desmaures, Denis Guénette
Groupe Forêt Charlesbourg, Martine Sanfaçon, co-porte-parole
Mouvement pour une ville Zéro Déchet, Michèle Dumas Paradis
Cercle citoyen au coeur de la cité, Renaud Blais, président
Les AmiEs de la Terre de Québec, Karen Busque, coordonnatrice
Villes et Régions Innovantes (VRIc) et Réseau de l’économie circulaire, Pierre Racicot, Ph. D., dg.
Le jeudi 24 avril 2025
Cette loi devait soutenir « Nourrir le Québec », le projet d’autosuffisance alimentaire de l’ex-ministre Jean Garon. Cet objectif est plus d’actualité que jamais avec la guerre économique planétaire déclenchée par le président américain. La gestion de l’offre, pilier de l’agriculture québécoise, est dans la mire des États-Unis et la Chine frappe une fois encore l’exportation de nos porcs. Parmi les actions du gouvernement québécois, la campagne publicitaire En achetant québécois, on ne se trumpe pas.
Un territoire agricole adéquatement protégé ?
Pour manger québécois, il faut d’abord avoir accès à un capital territorial protégé, accessible et pérenne. C’était le but de la loi 86, avec de nombreuses mesures, mais toutes ne répondent pas adéquatement aux enjeux.
Saluons les dispositions resserrant la surveillance du territoire agricole et sanctionnant plus sévèrement les contrevenants, une recommandation de la Commissaire au développement durable. Mais les ressources de la Commission de protection du territoire agricole devront augmenter substantiellement.
M. Lamontagne a timidement entrepris de remédier à la spéculation et à l’accaparement des terres agricoles, avec un moratoire transitoire limité à certaines parties du territoire agricole et visant seulement les non-agriculteurs. Cette situation permet aux grands domaines agricoles de continuer à s’accroître, en attendant les règlements complétant la loi, et pourrait contribuer à accentuer la hausse pharamineuse du prix des terres et les difficultés d’accès à la terre pour la relève agricole.
Le point d’achoppement majeur concerne l’élargissement des demandes à portée collective permettant la construction de résidences dans certaines parties de la zone agricole. Le ministre s’est montré intraitable devant la levée de boucliers de nombreuses organisations mais complaisant envers des revendications municipales. Pourtant, 40 000 maisons sont déjà autorisées dans 67 MRC ; moins de 15% auraient été construites. Le saupoudrage actuel de résidences sans lien avec l’agriculture pourra s’intensifier dans certaines MRC, affaiblissant davantage la zone agricole et menaçant sa pérennité.
Un territoire agricole méconnu, sous-utilisé et mal utilisé
Pour manger québécois, le territoire agricole doit être en production. Or, le MAPAQ a manqué à ses responsabilités depuis plusieurs décennies en ignorant l’enfrichement croissant des terres agricoles (estimation : plus de 60 000 hectares). Qu’attend le ministre pour agir, notamment afin de favoriser une relance agricole et du même coup faciliter l’établissement de la relève ?
Un développement optimal du territoire agricole requiert une fine connaissance de son état (propriété, utilisation, etc.). Des données existent : éparses, fragmentées, incomplètes. La création d’un Observatoire sur le territoire agricole a été vainement proposée, notamment dans la perspective de mieux composer avec les changements climatiques.
De plus, notre territoire agricole est en partie mal utilisé en raison de programmes qui n’ont pas évolué, comme le soutien de centaines de millions $ à la filière mais-soya-porc dont l’avenir est plutôt incertain. Nous sommes pourtant à un moment charnière : les changements climatiques déstabilisent la production agricole tandis que l’insécurité économique et politique mondiale inquiète grandement.
Un territoire agricole toujours sous pression
Malgré une loi protégeant le territoire agricole depuis 1978, les pressions persistent : urbanisation, infrastructures, projets économiques, spéculation. À plusieurs égards, les intérêts opposés en 1978 restent les mêmes : à défaut d’une réforme de la fiscalité municipale, le revenu principal des municipalités demeure la taxation foncière, moteur de l’étalement urbain.
D’autres interventions gouvernementales affectent aussi le territoire agricole, principalement la Loi sur l’aménagement et l’urbanisme (LAU) de 1979. Le père de la LPTAA disait que ces lois de la même époque sont comme les deux rails d’une voie de chemin de fer : ils vont dans la même direction mais sans jamais se croiser. Cette image illustre la primauté de la LPTAA sur toute autre loi inconciliable en zone agricole, tel qu’inscrite dans la loi initiale. Si cette primauté a prévalu depuis, les actions récentes du gouvernement suscitent des doutes quant à ses intentions.
Ainsi, la LPTAA semble dorénavant plutôt considérée comme un chapitre en aval de la Politique nationale de l’architecture et de l’aménagement du territoire adoptée en 2023 et de la LAU alors modifiée. De plus, les nouvelles Orientations gouvernementales en aménagement du territoire découlant de la LAU accordent des pouvoirs aux MRC pour régir les activités agricoles, ce qui risque de susciter des tensions et d’altérer la primauté de la LPTAA ainsi que l’équité des conditions de production entre les entreprises agricoles d’une MRC à l’autre.
Malgré des avancées notables, la volonté politique semble manquer pour compléter le chantier afin d’assurer la pérennité et la vitalité du territoire agricole pour « Nourrir le Québec ».
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