Marc Comby
Archiviste et historien des mouvements sociaux
La Confédération des syndicats nationaux (CSN) portait un intérêt particulier sur cet enjeu du logement. En mars 1969, le Conseil confédéral de la CSN décide de confier à un Comité spécial le soin de travailler à l’élaboration d’une politique du logement. Le comité était composé de Jacques Archambault de la Fédération du commerce de la CSN, Jacques Trudel, urbaniste à la Ville de Montréal, Claude Gingras de la Fédération du Bâtiment et du Bois ouvré de la CSN.
Dans le même temps, le Conseil central des syndicats nationaux de Montréal (CCSNM) a mit sur pied un comité ad hoc d’étude sur le logement et les taudis dans les limites territoriales de l’Île de Montréal qui donna lieu au rapport Un meilleur logement à meilleur prix. Le comité du Conseil confédéral s’est largement inspiré du rapport du CCSNM. Les grandes orientations de ces rapports se retrouveront dans le rapport des colloques régionaux.
Les auteurs soulèvent que l’enjeu de l’accessibilité au logement touche de larges couches de la population. Ils posent d’emblée une politique du logement à celle de l’utilisation du sol qui ne contrôle pas la spéculation foncière.
En terme des besoins en logement, en 1968, selon la Société centrale d’hypothèque et de logement (SCHL) environ 250 000 nouveaux logements par an seraient nécessaires pour résoudre en cinq ans, au Canada, les demandes en logement et la solution aux logements inadéquats. Au prorata de la population du Québec, 72 500 nouveaux logements seraient nécessaires. Pour satisfaire aux besoins des familles, les auteurs émettent des normes pour résoudre le problème de surpeuplement définit comme étant l’occupation d’un logement par plus d’une personne par pièce. En 1961, 22% de tous les logements étaient considérés surpeuplés.
Le logement est aussi un milieu ambiant sain (bruit, circulation, polluants sonores et industriels, présence d’espaces verts, accès aux transports, etc.). Ainsi, la rénovation urbaine qui consiste trop souvent à la démolition de pans de quartier a pour conséquence d’aggraver le milieu social. La transformation des quartiers ne sauraient se faire sans l’amélioration des conditions de vie de la population résidente. Les auteurs plaident pour un vaste programme de construction intensive de logements qui ne saurait se mettre en place sans la participation et la consultation des futurs occupants de ces logements.
Pour une politique du logement
Pour satisfaire aux besoins en logement, les citoyens doivent pouvoir se loger à un prix abordable. À Montréal, les 40% des citoyens les moins fortunés habitent 80% des vieux logements et 53% des logements surpeuplés. Parmi les gens défavorisés, la part du loyer des dépenses de consommation augmente sans cesse car la hausse des salaires ne suit pas la hausse des loyers. Les auteurs y mentionnent aussi la hausse des coûts de construction pour expliquer la difficulté d’accéder à des logements abordables : « Comme le coût de construction ne représenterait lui-même qu’au plus 60% du coût total ou prix de vente du logement, la main-d’œuvre ne représenterait elle-même que 15% de ce coût ». Le coût des terrain, tant pour les vieux que les neufs logements, devient aussi un facteur de l’augmentation du coût du logement. Neutraliser la spéculation devient essentiel pour empêcher toute hausse démesurée du prix du terrain : « la nationalisation du sol urbain pourrait éliminer totalement la spéculation ».
À la différence des autres objets de première nécessité, « le logement se consomme sur une très longue période » (20 ans et plus) d’où l’importance des taux d’intérêt. De 1966 à 1969, les taux bondissaient de 7 1/4% à plus de 9%. Devant l’augmentation considérable des taux, la CSN, dans un mémoire au gouvernement fédéral en 1969, mentionnait qu’elle était de « nature à favoriser les spéculateurs, les banques et les compagnies d’assurances ».
La propriété privée du sol est une entrave à une meilleure planification et aménagement urbain. Le privé engendre morcellement arbitraire et irrationnel du sol. Le spéculateur en sort gagnant. Il finance ses opérations en utilisant son propre capital pour 10% et obtient les 90% restant sur le marché financier des prêts hypothécaires.
Pour les auteurs, l’adoption d’une politique du logement est nécessaire englobant l’industrialisation de la construction, les allocations aux personnes délogées, la rénovation urbaine, le logement des personnes âgées, le logement des immigrants et les droits des locataires.
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