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Les suffragettes (Sarah Gavron, 2015)

La mort d’Emily Wilding Davison survenue le 4 juin 1913

1912. Londres. Des féministes militent pour l’obtention du droit de vote des femmes. Certaines parmi elles doivent aussi affronter un milieu de travail où règne le « despotisme d’usine » (abus sexuel, harcèlement psychologique, violence physique et congédiement arbitraire). 1912 et 1913, deux années durant lesquelles des actions radicales, violentes et spectaculaires font peur à des hommes politiques au pouvoir et déclenchent une vague de répression brutale de la part des forces de l’ordre. Le film Les suffragettes de la réalisatrice Sarah Gavron revient sur ces événements qui ont également eu un caractère tragique pour Emily Wilding Davison

Le film

Il s’agit d’un film réalisé par une femme consacré à un combat décisif de certaines féministes en vue d’élargir les droits des femmes et de leurs filles dans une société libérale, aristocratique, capitaliste et machiste. Il s’agit d’une ode à la mémoire de celles qui sont parvenues à conquérir de haute lutte le droit de vote des femmes en Angleterre et qui contestaient le caractère patriarcal de la structure familiale tout en revendiquant également la suppression d’une société fondée sur l’inégalité entre les sexes. Ce film s’inspire de faits historiques réels survenus à Londres entre 1912 et 1913.

Le personnage principal de Maud Watts sert de fil conducteur au récit. Cette jeune mère douce, ouvrière depuis l’âge de 7 ans dans une blanchisserie industrielle, sorte de lieu de travail qui s’apparente à de l’esclavage moderne, va peu à peu s’ouvrir à l’action politique. Elle ira témoigner, sans l’avoir préalablement planifié ou préparé, de ses conditions de travail devant une commission parlementaire de la Chambre des communes. Elle participera par la suite aux réunions d’une cellule clandestine des suffragettes et posera plusieurs gestes illégaux en appui à la cause de ce mouvement féministe (lancer des projectiles sur des vitrines, faire exploser des boîtes postales, poser de la dynamite devant la maison d’un ministre, saboter des lignes télégraphiques dans le but d’attirer l’attention de la classe politique et des médias qui sont indifférents à la cause à laquelle elle adhère). Elle sera rejetée par son mari. Son fils, qu’elle aime et affectionne, sera confié par le père à l’adoption. Déchirant.


Un film à la mémoire également d’Emily Wilding Davison

Certains personnages historiques sont ici portés à l’écran, entre autres, le ministre David Lloyd George qui a fait témoigner des femmes sur leurs motivations à obtenir le droit de vote, pour le leur refuser en bout de piste. Le ministre Lloyd se verra dès lors accusé d’avoir menti aux suffragettes en organisant un simulacre de consultation. Il y a également Edith Garrud, qui enseigna les techniques d’autodéfense à ses « sœurs », Hannah Mitchell qui deviendra ensuite une leader du Parti travailliste. Et bien entendu Emily Wilding Davison cette jeune femme qui voulait brandir le drapeau de la cause des suffragettes devant la presse internationale, à l’occasion d’une compétition hippique à laquelle participait, le 4 juin 1913, le Roi Georges V. La mort de cette suffragette, qui a été renversée par un cheval en pleine course, est probablement l’événement tragique décisif qui a fait basculer l’opinion publique britannique en faveur de la cause des suffragettes.

Emily Wilding Davison était une militante féministe qui a vu le jour en 1872. Parmi ses grandes réalisations, mentionnons qu’elle a effectué des études à Oxford. Elle avait à son actif également de nombreuses grèves de la faim et elle a séjourné en prison à quelques reprises en raison de certaines de ses activités militantes.

C’est finalement en 1918 que certaines femmes britanniques (les femmes propriétaires et les femmes diplômées) ont obtenu le droit de vote à partir de 30 ans (les hommes avaient ce droit dès 21 ans). L’égalité, c’est-à-dire le droit de vote pour les deux sexes à 21 ans, fut conquise uniquement en 1928. Cette grande victoire des suffragettes annonce que le mouvement en faveur de l’émancipation des femmes ne cessera par la suite de s’affirmer et d’obtenir des gains. Gains qui ont pu connaître par la suite, dans certains cas, un parcours en dents de scie.

Pourquoi voir ce film ?

Ce film est à voir parce qu’il indique que l’histoire peut parfois s’écrire dans le sens revendiqué par des femmes exploitées, opprimées, dominées et exclues. Il n’y a pas autrement dit que les grands personnages qui ont l’exclusivité d’écrire l’histoire. Il arrive que ce soient les masses qui la font et l’écrivent.

En lisant sur la question de l’extension du suffrage électoral aux femmes en Angleterre vous découvrirez peut-être le nom de Mary Wollstonecraft (1759-1797). Il s’agit d’une philosophe féministe londonienne du XVIIIe siècle qui prônait l’égalité des hommes et des femmes et qui revendiquait, plus d’un siècle avant le combat des suffragettes de 1912-1913, le droit de vote des femmes.

Interrogations à la suite du visionnement de ce film

Il y a des moments dans l’histoire où l’occasion appartient aux personnes qui décident de ne pas et de ne plus subir passivement les injustices. Le film Les suffragettes montre qu’il est possible d’agir sur ce monde pour le rendre un peu plus conforme aux grandes aspirations d’égalité entre les sexes. À la fin du visionnement de ce film, vous vous poserez possiblement les questions suivantes : À quand la parité des sexes à l’Assemblée nationale ? À la Chambre des communes ? Au Sénat ?

Yvan Perrier

4 juin 2021

Minuit et quelques secondes

Yvan_perrier@hotmail.com

Zone contenant les pièces jointes

Yvan Perrier

Yvan Perrier est professeur de science politique depuis 1979. Il détient une maîtrise en science politique de l’Université Laval (Québec), un diplôme d’études approfondies (DEA) en sociologie politique de l’École des hautes études en sciences sociales (Paris) et un doctorat (Ph. D.) en science politique de l’Université du Québec à Montréal. Il est professeur au département des Sciences sociales du Cégep du Vieux Montréal (depuis 1990). Il a été chargé de cours en Relations industrielles à l’Université du Québec en Outaouais (de 2008 à 2016). Il a également été chercheur-associé au Centre de recherche en droit public à l’Université de Montréal.
Il est l’auteur de textes portant sur les sujets suivants : la question des jeunes ; la méthodologie du travail intellectuel et les méthodes de recherche en sciences sociales ; les Codes d’éthique dans les établissements de santé et de services sociaux ; la laïcité et la constitution canadienne ; les rapports collectifs de travail dans les secteurs public et parapublic au Québec ; l’État ; l’effectivité du droit et l’État de droit ; la constitutionnalisation de la liberté d’association ; l’historiographie ; la société moderne et finalement les arts (les arts visuels, le cinéma et la littérature).
Vous pouvez m’écrire à l’adresse suivante : yvan_perrier@hotmail.com

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