Édition du 7 mai 2024

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États-Unis

Lutte de classe et protestation sociale face au coronavirus, aux États-Unis

Durant le confinement des deux derniers mois, les États-Unis ont enregistré 90 000 décès tandis que 36 millions de travailleurs ont déposé une demande de chômage, soit près de 25% de la population active. Le président Donald Trump veut maintenant faire redémarrer l’économie parce qu’il craint de perdre les élections de novembre si cette deuxième grande dépression se poursuit.

Tiré du site du NPA, 19 mai 2020
Dan La Botz

Les entreprises sont soucieuses de réaliser des profits ; de nombreux et nombreuses chômeurEs veulent retrouver un salaire, mais ils et elles craignent de se mettre en danger, eux-mêmes et leurs familles. La lutte pour des lieux de travail sûrs sera le moteur de l’activisme dans les semaines à venir.

Des centaines d’actions mais d’impact inégal

Tout au long de la pandémie, les gouvernements, au niveau fédéral et au niveau des États, et les employeurs publics et privés, n’ont pas protégé la santé des travailleurEs et leurs revenus. Les travailleurEs essentiels pour la vie quotidienne, contraints de continuer à travailler sans protection adéquate en matière de sécurité et de santé, ont protesté ou ont quitté leurs postes au cours de centaines de grèves sauvages, petites et brèves, localisées. Certains de ces mouvements, comme un petit débrayage dans l’entrepôt d’Amazon à New York, ont connu de la publicité mais n’ont pas réussi à être massifs.

D’autres actions ont eu un impact plus important. Des infirmières et d’autres employéEs des hôpitaux ont organisé des manifestations pour exiger des masques, des blouses et des respirateurs. De nombreuses infirmières ont manifesté dans leurs hôpitaux, et certaines, du syndicat National Nurses United, se sont rendues devant la Maison Blanche pour exiger que Trump invoque la Defense Production Act (DPA) pour ordonner la production de masques, de ventilateurs et de kits de test de coronavirus. Sur place, au cours d’un hommage émouvant, elles ont lu les noms de leurs collègues tuées par le virus et disposé des rangées de chaussures de travail en leur mémoire. Les gouvernements (fédéral et des États) et les directeurs d’hôpitaux ont réagi à ces actions par la fourniture supplémentaire d’équipements aux travailleurEs.

Les infirmières n’ont pas été les seules. À la mi-mars, les enseignantEs ont menacé de se mettre en arrêt maladie pour forcer la fermeture des écoles publiques de New York lorsque le maire de la ville De Blasio et leur propre syndicat, la Fédération unie des enseignants, ne l’ont pas fait. Fin avril, environ 50 travailleurEs ont quitté leur poste à l’usine de conditionnement de viande Smithfield dans le Nebraska pour des questions de santé et de sécurité : le gouverneur de l’État a promis de fournir des tests et un suivi des contacts à l’usine. À Washington, où il y a une longue histoire de grèves des travailleurEs, des centaines d’emballeurEs de fruits ont fait grève pour des conditions de travail plus sûres et leurs conditions de rémunération.

Un syndicalisme globalement timoré

Certains syndicats ont fait preuve d’initiative. L’Amalgamated Transit Union (travailleurEs des transports) a soutenu les chauffeurEs d’autobus qui ont fait grève pour leur santé à Detroit, Birmingham, Richmond et Greensboro. Le Carpenters Union (un des syndicats de la construction), qui représente environ 10 000 travailleurEs dans le Massachusetts, a lancé une grève dans cet État le 5 avril sur les problèmes liés au Covid-19 et n’a mis fin à la grève que le 20 avril.
De nombreux syndicats ont publié des déclarations appelant les employeurs et le gouvernement à protéger leurs membres et ont fourni des informations utiles aux travailleurEs. Les syndicats ont également fait pression sur le Congrès. Mais en général, ils n’ont pas tenté d’élever la lutte des classes au niveau où cela aurait pu être possible.

Certains syndicats ont capitulé devant la réouverture des usines et la reprise de la production, même s’il est clair que cela peut mettre en danger la santé de leurs membres. Dès le 5 mai, le syndicat de l’automobile (UAW) a reconnu que les entreprises avaient contractuellement le pouvoir de reprendre la production en mai dans les usines General Motors, Ford et Fiat-Chrysler, ceci sans garanties solides de protection de la santé.

Des initiatives militantes

La plus grande organisation de gauche, DSA (Democratic Socialist of America), déjà active dans les syndicats d’infirmières et d’enseignants, a uni ses forces avec le syndicat United Electrical Workers Union connu sous le nom de UE [un petit syndicat de gauche indépendant de la confédération AFL-CIO], et ensemble, ils ont créé le Emergency Workplace Organizing Committee (EWOC). EWOC a pour objectif de former des centaines d’organisateurs bénévoles pour aider les militants dans les entreprises à s’organiser. DSA a également commencé à organiser un réseau de travailleurEs de la restauration dans plusieurs villes.

La pandémie et la fermeture ont fait des ravages, mais elles offrent désormais la possibilité de reconstruire le mouvement ouvrier américain de bas en haut. Alors que les défis seront grands, la résistance de la classe ouvrière grandit et les socialistes avec une stratégie de base et une perspective de lutte de classe sont impliqués dans la lutte.

Dan La Botz

L’auteur est un professeur d’université américain et un militant de l’organisation socialiste Solidarity.

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