Tiré de Courrier international. Légende de la photo : Des sud-africains blancs soutenant le président américain, Donald Trump, et le milliardaire sud-africain et américain Elon Musk, lors d’un rassemblement devant l’ambassade américaine à Pretoria, le 15 février 2025. Photo : Marco Longar/AFP
“Mission South Africa” : tel est, d’après The New York Times, le nom du programme élaboré par l’administration américaine dans le but d’accélérer l’accueil de “réfugiés” sud-africains issus de la minorité blanche afrikaner et “victimes de discriminations raciales injustes”, selon le département d’État américain.
Depuis son retour à la Maison-Blanche, Donald Trump s’est employé à fermer les programmes d’accueil de migrants, “rendant quasiment impossible pour des personnes de nombreux pays de chercher refuge aux États-Unis”, rappelle le New York Times. “À une exception près”, souligne le quotidien new-yorkais : les Afrikaners, une minorité sud-africaine blanche issue des premiers colons néerlandais, allemands, français.
Accusant le gouvernement sud-africain de vouloir “saisir les propriétés agricoles de la minorité afrikaner sans compensation”, l’administration américaine annonçait, au début de février, la création d’un statut de réfugié pour cette minorité dont la frange nationaliste fut l’architecte de l’apartheid. Un mois plus tard, les autorités sont passées à la “phase 1” de l’opération : déployer “de multiples équipes pour convertir des bureaux commerciaux à Pretoria, la capitale de l’Afrique du Sud, en centre de réfugiés ad hoc”, selon des documents consultés par le New York Times.
Plus de 8 200 candidatures seraient actuellement étudiées par l’administration américaine, et “100 Afrikaners” potentiellement éligibles au programme ont déjà été identifiés, précise le quotidien. Des chiffres “bien loin” de ceux qui avaient été récemment avancés par la chambre de commerce sud-africaine aux États-Unis, laquelle assurait à la mi-mars que 70 000 Sud-Africains se seraient “montrés intéressés” par l’idée de migrer aux États-Unis, relève le site d’investigation sud-africain Daily Maverick.
“Revendications suprémacistes blanches”
Le 3 avril, un élu républicain à la Chambre des représentants, Troy Nehls, a également déposé une proposition de loi intitulée “Afrikaner Act”, rapporte la presse sud-africaine. Il propose de créer un statut de réfugié prioritaire ouvert aux “résidents sud-africains membres de la minorité caucasienne qui souffrent de persécutions ou qui ont des craintes légitimes de persécution fondée sur leur race, leur ethnie ou leurs ascendances”.
Le gouvernement sud-africain a dénoncé à de multiples reprises la campagne de désinformation de la Maison-Blanche, rappelant notamment que, trente ans après la fin de l’apartheid, la minorité blanche reste, de loin, la plus aisée du pays. S’il est vrai qu’une loi récemment promulguée autorise les expropriations sous certaines conditions, “elle ne vise pas spécifiquement les Afrikaners et offre des protections”, rappelle le média sud-africain Business Tech.
“Le cas sud-africain est important parce qu’il joue un rôle central dans les revendications suprémacistes blanches mondiales. Ces mythologies prétendent que les Sud-Africains blancs, en particulier les Afrikaners, sont le canari dans la mine de charbon : que la prétendue oppression à laquelle ils sont confrontés préfigure ce qui arrivera à tous les Blancs s’ils ne ‘ripostent’ pas”, analyse Nicky Falkof, professeur à l’université de Witwatersrand, à Johannesburg, dans une analyse publiée par The Conversation.
La population sud-africaine
“Il n’y a aucun sous-texte ni rien de subtil dans la façon dont la politique migratoire et la gestion des réfugiés de cette administration présente des connotations raciales et racistes évidentes”, estime également la directrice de l’organisation America’s Voice, Vanessa Cárdenas, interrogée par le New York Times.
Le média sud-africain Business Tech s’étonne également des approximations du représentant Troy Nehls, qui explique que “les Afrikaners sont des agriculteurs d’origine européenne qui représentent 7 % de la population sud-africaine”. Une définition “complètement ignorante de la démographie de l’Afrique du Sud”, observe le média, qui se voit obligé de rappeler que “tous les Sud-Africains blancs ne sont pas des Afrikaners” et que “tous les Afrikaners ne sont pas des agriculteurs”. En réalité, environ 2,7 millions de Sud-Africains sont afrikaners, soit 4,5 % de la population sud-africaine, calcule Business Tech.
“Les États-Unis sont en train de redéfinir l’Afrique du Sud comme un État paria”, résume le magazine panafricain The Continent. Car un autre texte déposé le 3 avril devant la Chambre des représentants menace de refroidir encore les relations entre Washington et Pretoria. Reprochant au pays sa proximité avec “la Chine, la Russie, l’Iran et les organisations terroristes”, le républicain Ronny Jackson demande un passage en revue des liens entre les États-Unis et l’Afrique du Sud. Il souhaite “donner les outils” au président Donald Trump pour “imposer des sanctions sur les officiels gouvernementaux corrompus sud-africains”.
Courrier international
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